Salut !
Voilà une petite fanfiction sur notre cher Regulus !
Si jamais vous suivez déjà une autre de mes fics (soyons fous haha), sachez que je suis désolée : suite à une panne d'inspiration temporaire, je me suis penchée sur celle-là. ^^ (Mais je n'abandonne pas les autres hein).
Sinon, j'espère que vous apprécierez. :)
Disclaimer : L'univers d'Harry Potter est la propriété de J.K. Rowling.
Hiver –La bise se lamente,
La neige couvre le verger.
Dans nos cœurs aussi, pauvre amante,
Il va neiger, il va neiger.
.
Hier, c'était les soleils jaunes,
Hier c'était encor l'été,
C'était l'eau courant sous les aulnes
Dans le val de maïs planté.
.
(…)
Demain, c'est les doutes, c'est les craintes,
C'est les désirs martyrisés,
C'est le coucher sans tes étreintes,
C'est le lever sans tes baisers.
Jean Moréas, « Conte d'amour », Les Syrtes
Chapitre 1
Pour la première fois de sa vie, Annabeth Greengrass n'avait pas réellement envie de retourner à Poudlard. La tête posée contre la vitre froide du wagon, elle n'écoutait plus les voix de ses camarades autour d'elle. Son regard hébété ne cessait de passer des paysages défilant à toute vitesse dans la pénombre du dehors à l'ambiance chaudement éclairée et rassurante du compartiment dans lequel elle se trouvait. Il y avait de l'orage et les éclairs zébrant le ciel illuminaient par moment les vallées sauvages que le train parcourait. Le temps ne semblait plus avoir d'emprise sur eux. Cette pause hors du temps apaisait l'esprit de la jeune fille, pansait son cœur blessé. Elle songea avec tristesse qu'elle-même était un horizon barré défilant trop vite.
-Annabeth, tu m'écoutes ?
L'interpellée releva finalement la tête, ne pouvant éviter la confrontation.
-Je te demande pardon ?
Edith Travers poussa un soupir et secoua son carré de cheveux blonds avec désapprobation. Cette nouvelle coiffure dévoilait joliment son cou pâle.
-Mac-Mahon a osé me saluer alors même qu'il était en compagnie de Clifford !
-Oh, fit Annabeth.
Elle ne savait pas quoi dire d'autre. Le monde autour d'elle lui paraissait trop lointain. La tempête en son for intérieur accaparait toute son attention.
-Tu es sûre que ça va ? demanda Evrett Gibbon.
Il avait levé les yeux de son manuel de Quidditch pour les tourner vers elle.
-Bien sûr que non, elle ne va pas bien ! Réfléchis Evrett ! le réprimanda Edith.
-Tout va bien, assura Annabeth d'une voix enrouée.
Edith claqua de la langue avec force :
-Ce Regulus, je vais le…
À la mention de son nom, Annabeth se crispa.
-C'est bon, Edith, ce sont des choses qui arrivent.
Ces choses-là arrivaient aux gens normaux. Cela n'aurait pas dû arriver à Annabeth et Regulus. Ils n'avaient jamais été normaux. Regulus était extraordinaire et en sa compagnie, elle avait cru l'être, elle aussi.
-C'est notre dernière année ici, hors de question que tu la gâches à cause de lui, nous sommes d'accord ?
-Évidemment.
Mais Annabeth ne pouvait que regretter l'absence du garçon. C'était la première année où ils ne faisaient pas le trajet ensemble. Regulus s'était toujours assis près d'elle, auparavant. Ils avaient ri ensemble sur cette même banquette. Où était-il en ce moment ? Pourquoi l'avait-il chassée de sa vie ? Qu'avait-elle fait de mal ?
La douleur et l'incompréhension envahirent à nouveau la poitrine d'Annabeth, qui ne tressaillit même pas. Elle vivait avec depuis un mois. Depuis que, brutalement, Regulus lui avait annoncé que leur histoire était finie. Il l'avait fait sans ciller, sans s'émouvoir alors que le propre univers d'Annabeth s'écroulait. Il ne l'avait pas prise dans ses bras, ne s'était pas excusé. Il s'était contenté de tourner les talons et même le soleil avait continué à briller.
Sur le moment, Annabeth n'avait pas compris. Mais elle avait eu le temps de réfléchir, de ressasser la scène et les mois de vacances la précédant. Il y avait eu des signes. Pourquoi n'avait-elle pas su les lire, alors ? Il n'était plus venu la voir aussi souvent, était devenu plus réservé, plus distant, plus froid. Jamais il ne s'était comporté comme cela jusqu'à ce moment-là. Une question demeurait : qu'avait-elle fait ?
oOo
Au dîner de rentrée que la douleur revint, plus forte que jamais. Annabeth ne put éviter plus longtemps du regard la silhouette qu'elle chérissait tant. Regulus apparut dans son champ de vision, plus beau et pourtant plus inaccessible encore. Comme Annabeth s'y était attendue, il ne lui adressa pas un regard et s'assit loin d'eux. Le Serpentard était très doué pour ignorer ceux qu'il jugeait indignes de lui. Et Annabeth se demanda si, désormais, elle ferait partie des rejetés.
Cela semblait improbable à première vue. Annabeth était une Sang-Pur, de même qu'Edith et elles avaient toujours été au centre de l'attention de leur maison depuis que Regulus, Evrett Gibbon et Corban Yaxley les avaient rejointes. Ensemble, ils avaient grandi avec arrogance, méprisant les autres, restant cachés au sein de leur bulle de noblesse.
Et voilà que Regulus, le soleil de leur petit monde, avait tout fait explosé.
Mais pour Annabeth, Regulus n'était pas seulement le soleil. Il était aussi le ciel de nuit infini, parsemé d'étoiles, qu'on aime admirer à minuit, la vaste plaine qui souffle l'envie d'aventure, le haut sommet qu'on craint les jours d'orages, la forêt obscure qui murmure le soir et le vent qui soupire et caresse les cheveux. Regulus parti, c'était le monde d'Annabeth qui s'enfuyait.
-Tu devrais manger quelque chose.
La voix d'Edith tira Annabeth de ses lamentations.
-Je n'ai pas faim.
-Tu n'as jamais faim, remarqua Evrett, la bouche pleine.
Le jeune homme haussa les épaules sous le regard exaspéré d'Edith.
-Tiens-toi correctement. Nous devons montrer l'exemple aux première année.
Tout en parlant, Edith jeta un coup d'œil au bout de leur table, où de jeunes Serpentards mangeaient sagement. Un garçon aux cheveux blonds vint s'asseoir à côté d'eux. Corban Yaxley glissa une main autour de la taille d'Edith, qui rosit de plaisir.
-Tu n'es pas passée me voir, dans le train, chuchota-t-il avec un air mutin.
Edith et Corban étaient ensemble depuis aussi longtemps qu'Annabeth avait été avec Regulus. Leurs parents respectifs comptaient sur le mariage des deux jeunes gens comme ceux d'Annabeth avait auparavant compté sur le sien avec Regulus. Mais ce qui fascinait la fille Greengrass, c'était les mêmes yeux émeraudes que les deux promis arboraient. Comme s'ils étaient deux âmes complémentaires et que chacun se retrouvait dans le regard de l'autre.
Annabeth, elle, n'avait jamais eu les mêmes yeux que Regulus. Il avait un regard gris orage, perçant et flou en même temps, un regard fascinant qui transperçait l'esprit. Elle avait des yeux bleus brouillés à la chaleur relative qui ne brillaient jamais qu'avec lui.
-Je crois que je vais aller me coucher, marmonna Annabeth en se levant de table.
Elle voulait dormir. Dormir pour oublier. Peut-être que lorsqu'elle se réveillerait demain, elle réaliserait que tout ceci n'avait été qu'un affreux cauchemar.
Ou peut-être pas.
oOo
À son réveil, le dortoir était déjà bruyant. Ses camarades s'habillaient et toute cette agitation dérangeait Annabeth qui aurait préféré rester plongée dans sa torpeur. Elle resta allongée sur son lit, les bras écartés alors que la voix d'Edith retentissait derrière les rideaux aux couleurs de Serpentard.
-Annabeth ? Tu ne viens pas déjeuner ?
Elle dut entendre la réponse étouffée de la jeune Greengrass, car elle quitta la pièce en compagnie des autres filles. Alors seulement, Annabeth se leva et s'enroulant dans son peignoir, se posta à la fenêtre. Cette dernière donnait sur les profondeurs verdâtres du lac que le soleil ne parvenait jamais à illuminer. On voyait quelques algues s'agiter sur le fond vaseux et de temps en temps, un poisson ou une autre créature marine passait à toute allure.
La vision paisible de ce monde sous-marin l'avait toujours réconfortée, mais aujourd'hui, la quiétude du lac et le silence du dortoir peinaient à combler le vide installé dans sa poitrine. Elle se demandait si, avec le temps, il se comblerait de lui-même.
Plus tard, Annabeth se rendit directement en Potions. Edith lui avait pris son emploi du temps, si bien qu'elle n'avait eu à croiser personne d'autre que son amie revenue la chercher. Cela ne faisait que retarder l'inévitable : le moment où elle devrait choisir de parler normalement à Regulus, ou bien de l'ignorer. Malheureusement, elle avait bien peur que le choix ne dépende pas d'elle.
La salle était déjà presque pleine quand elle entra. La rumeur des bavardages calma légèrement le cœur battant d'Annabeth alors que ses yeux scrutaient les silhouettes se détachant dans la vapeur des chaudrons. L'une, grande et élancée, attira son attention et elle se dirigea sans la quitter des yeux, se rattachant à cette vision comme un marin fixerait le phare pour rentrer chez lui. De près, nimbé de fumée et le visage assombrit par le manque de lumière, Regulus Arcturus Black apparaissait grand et terrible. Mais Annabeth n'avait pas besoin d'une telle vision pour être impressionnée par le jeune homme. Alors qu'elle le dévorait du regard, il ne lui accorda qu'une œillade distraite, encore plongé dans un de ces livres qu'il lisait en-dehors des cours. La jeune fille ouvrit son manuel de Potions et le plaça entre eux, sachant pertinemment que Regulus n'avait pas daigné amener le sien. Ils avaient tout fait pour pouvoir travailler ensemble, l'année dernière. Regulus le regrettait-il, désormais ?
Le professeur Slughorn n'était pas encore présent, c'était le moment ou jamais. Annabeth pouvait choisir de rester silencieuse et accepter le gouffre qui s'ouvrait entre eux ou bien elle pouvait essayer de le franchir avant qu'il ne soit trop large. Par orgueil, elle aurait voulu choisir la première option. Mais Regulus était son monde. Elle aurait tout abandonné pour lui.
-Salut, Regulus.
Elle retint son souffle et son cœur tressauta quand la voix rauque, à peine un murmure, du jeune homme lui répondit.
-Annabeth.
-Tu as passé une bonne fin de vacances ?
Annabeth, qui avait posé la question par pure politesse, se maudit intérieurement. C'en était revenir à lui demander si la rupture avait été difficile pour lui.
-Plutôt oui, merci.
Annabeth serra les lèvres. Il ne lui avait pas posé la question, à elle.
-Moi aussi, j'ai passé un mois d'août formidable. Nous sommes allés en France avec mes cousins, tu les avais déjà rencontrés une fois, je crois ?
Comme Regulus ne répondait pas, elle continua :
-Il a fait très beau et les français sont des gens on ne peut plus charmants. Il y avait des élèves de Beauxbâtons aussi et je dois avouer que leurs manières sont exquises.
Annabeth ne pouvait plus s'arrêter de parler. Il fallait qu'elle comble le vide entre eux.
-D'ailleurs, en parlant de cela, ma mère a invité la famille Henry-Carrance en décembre, comme ils sont de passage en Angleterre. Je crois qu'elle va organiser une grande réception pour Noël. Toi et ta famille serez évidemment inv….
-Annabeth, commença Regulus, l'air crispé.
Ce fut ce moment que choisit le professeur Slughorn pour surgir dans la classe.
-Bonjour à tous ! J'espère que vous avez passé de bonnes vacances ? Kilinger, posez ce pot d'encre, je vous prie.
Le dénommé Kilinger obéit piteusement au professeur, bien que l'envie de recouvrir sa voisine d'encre semblât toujours présente. Alors que le professeur Slughorn se remettait à discourir, Annabeth posa son regard sur le visage fermé de Regulus. Avait-il failli la rejeter, à nouveau ? L'aurait-elle supporté ? Aurait-elle pu demeurer indifférente ? Même les pitreries de ses camarades n'auraient pu la divertir, tandis qu'elle réfléchissait au comportement de son ancien petit-ami.
Cette hébétude anxieuse la poursuivit tout le reste du cours. Elle fit tomber plusieurs fois des ingrédients, confondit les quantités à ajouter à la potion qu'ils devaient préparer. Cependant, Regulus ne lui en tint pas rigueur. Lorsque ses yeux de loup se posaient sur elle, il affichait l'air poliment indifférent qu'Annabeth connaissait bien : c'était celui qu'il affichait en société, celui qui dressait une barrière entre son âme et ses interlocuteurs.
Il n'avait jamais eu cet état d'esprit avec elle. La jeune fille aurait préféré qu'il la haïsse. Tout, plutôt que ce détachement.
Alors quand la cloche sonna la fin du cours, elle soupira silencieusement. Regulus rangea ses affaires et s'éclipsa, oubliant sans doute qu'ils avaient ensuite cours d'Arithmancie ensemble.
-Comment ça s'est passé ? demanda anxieusement Edith, qui l'attendait à la sortie de la classe. Attends, en fait, ne me dis rien. Il n'en vaut pas la peine.
Annabeth était reconnaissante envers son amie de son soutien sans faille. Le cœur un peu moins lourd, elle s'enfonça dans le couloir en direction de son prochain cours. Ni Edith, ni Evrett n'avaient choisi cette option, si bien qu'elle fit le chemin seule. Elle se mêla anonymement à la foule d'élèves affluant dans les corridors, se laissa porter par la marée humaine, alors qu'un terrifiant calme intérieur régnait en elle. L'extérieur ne l'atteignait plus. Les sons s'atténuaient, les couleurs disparaissaient pour laisser place à un décor tout en nuance de gris. Ne persistait que le toucher qui, à chaque collision avec le réel, la ramenait durement dans le moment présent.
Le cours d'Arithmancie fut encore plus éprouvant pour Annabeth car cela avait toujours été le moment où elle et Regulus passaient du temps ensemble. Il était très doué avec les chiffres et c'était grâce à lui si elle avait eu de bonnes notes jusqu'à présent. La jeune Greengrass l'aperçut en milieu de rang, à côté de deux élèves dont elle ne se souvenait plus et ne put se résoudre à le rejoindre. Elle s'assit plusieurs rangs derrière, les yeux fixés sur les épaules du jeune homme, ignorant l'étonnement de ses camarades. La nouvelle de leur rupture ferait peut-être le tour de l'école, ou peut-être pas. Annabeth se fichait bien de ce que les gens ordinaires pouvaient penser.
Mais tandis que les murmures couvraient le grattement des plumes sur le parchemin, elle sentit son cœur se serrer en voyant les chaises vides autour d'elle. N'avoir que peu d'amis ne l'avait jamais beaucoup dérangé, tant que Regulus était avec elle. Mais désormais, le jeune Black n'était plus là. L'année s'annonçait difficile.
