Une petite fic qui mélange les ambiances et les ressentis et qui peut être perçue comme une vague forme de Johnlock ou de la simple amitié... la perception et l'interprétation dépendra des convictions de chacun ! ^^
Et je pense que l'on peut mettre une mention spéciale... ou un warning dû à la forte concentration de fluff de cette fic. Vous êtes prévenus !
Sur ce : bonne lecture ! :D
Le vent glacé mugissait entre les immeubles victoriens de Baker Street, bringuebalant impitoyablement les flocons de neige. Les carreaux des fenêtres – constellés de fleurs de givre diaphanes - craquaient sinistrement, menaçant de céder sous les coups de butoir de la tempête hurlante qui déferlait sur Londres. Quelques rafales sifflaient en s'engouffrant dans le conduit de cheminée et entre les interstices des montants de fenêtre vieillots.
Il n'y avait aucun bruit hormis celui des rafales ; la circulation était comme suspendue, attendant patiemment une accalmie dans cette nuit mouvementée qui ne semblait pas finir. Aucune personne saine d'esprit n'aurait osé braver les rigueurs de l'ire de Dame Nature...
Et, tandis que les éléments se déchaînaient, il régnait une agréable chaleur douillette au 221B. Le feu de cheminée crépitait joyeusement, ses éclats de lumière dansantes distillant une atmosphère tiède semblable à un cocon.
Assis sur l'un des fauteuils placés près de l'âtre pour profiter de la chaleur des flammes, Sherlock attendait, ses doigts tambourinant sur ses genoux dans un staccato rapide et nerveux : impatient.
Bon sang ! Mais que fichait John ?!
N'ayant absolument aucune envie d'avoir à faire à son aîné, il avait puérilement envoyé - en milieu d'après-midi - son ami chercher des documents auprès de Mycroft pour conclure une affaire. La mission était simple, sans aucun besoin d'avoir à utiliser son cerveau (non pas que John soit un parfait crétin) et surtout : rapide - le club Diogène n'étant qu'à 25 minutes en taxi. En conséquence, l'ancien soldat aurait déjà dû être rentré depuis un bon bout de temps...
Le détective ferma les yeux et soupira : agacé de devoir attendre. Certes, il avait su que la tempête s'abattrait sur la ville cette d'après-midi mais il n'en avait pas tenu compte. Après tout, ce n'était pas un petit caprice de Dame Nature qui allait faire lambiner John et surtout obliger Sherlock à patienter.
Soudain la porte du hall s'ouvrit, accompagnée par le sifflement lugubre d'une rafale glacée. Puis, des pas lourds montèrent péniblement les marches grinçantes.
Les yeux toujours clos, Sherlock haussa un sourcil en entendant la démarche anormalement pesante de son ami. Ami qui ne tarda pas à ouvrir la porte et entrer dans leur appartement.
Enfin ! Ce n'était pas trop tôt !
- Tu en as mis du temps !
Sa voix de baryton résonna froidement entre les murs tièdes de Baker Street tandis que son grand corps mince restait d'une immobilité de marbre et que son visage aux paupières fermées affichait un air prodigieusement ennuyé.
Il sentit le regard noir de John le poignarder... ainsi que le dossier comportant les précieux documents heurter douloureusement son torse avant de finir sur ses genoux dans un chuintement léger de pages volantes. Visiblement, John était aussi précis au tir au pistolet qu'au lancé d'objet en tout genre.
Sherlock se décida à ouvrir les yeux, une réplique glaciale et méprisante sur les lèvres mais il fut coupé dans son élan.
Et pour cause : John faisait vraiment peine à voir.
Toujours dans l'entrée, les doigts engourdis tentant maladroitement de déboutonner sa veste trop légère, John tremblait violemment, les mâchoires fermement serrées pour ne pas claquer des dents. Ses cheveux blonds étaient perlés de givre, ses yeux cerclés de cernes noires, ses lèvres gercées, colorées de bleu tandis que ses oreilles et son nez – probablement douloureux – étaient teintés d'une vilaine couleur rouge. Les jointures de ses mains frémissantes étaient violettes et peinaient à dépêtrer l'ancien militaire de ses vêtements humides. Ses cuisses tremblotaient et sa mauvaise jambe semblait menacer de lâcher sous son poids...
Cette vision pathétique fit difficilement déglutir l'arrogant limier qui sentit un métaphorique dard effilé injecter dans sa poitrine quelque chose ressemblant fort à de la culpabilité.
- John ?...
- Ferme-là ! cingla l'ancien militaire. La prochaine fois, t'iras les chercher toi-même ! Je suis pas ta bonniche ! acheva-t-il entre deux claquements de dents, ses jambes engourdies le conduisant maladroitement vers la salle de bain.
Le détective aurait pu répondre par une réplique bien sentie mais il s'en abstint, rongé par une culpabilité des plus étranges... et agaçantes.
Les émotions ! cracha-t-il pour lui-même en se relevant.
Debout, immobile, les bras ballant bêtement dans son appartement tiède et encombré, il écouta distraitement le tambourinement de la douche sur les épaules tendues de John.
John...
Sherlock savait parfaitement que l'ancien soldat supportait mal le froid depuis sa campagne dans la chaleur afghane. Et pourtant, le limier n'avait pas hésité à l'envoyer dans la tempête pour aller chercher un dossier auprès de son frère. Tout ça parce que lui, n'avait eu pas envie d'y aller...
Mais, d'un autre côté, il avait toujours réagi ainsi et John... même s'il grinçait parfois des dents, semblait s'en accommoder.
En résumé, cette soirée n'était pas différentes des autres... alors, au nom du ciel, pourquoi ressentait-il cet aiguillon de culpabilité ?!
Pinçant les lèvres tandis que l'eau de la douche continuait de couler, Sherlock chercha une solution à cet agaçant problème.
De plus, John était furieux. Et un John furieux c'était... c'était... ça n'allait tout simplement pas. Le grand brun avait besoin d'un John calme pour réfléchir.
Quelques minutes s'égrainèrent dans un silence pensif puis Sherlock s'activa, profitant de ce que John était toujours en train de se réchauffer grâce à une douche brûlante...
oOo oOo oOo
Lorsque le médecin – réchauffé et épuisé, enveloppé dans un peignoir moelleux – ouvrit la porte de la salle d'eau dans un nuage de vapeur, il découvrit Sherlock, immobile, assis, les jambes croisées dans son fauteuil de cuir noir. Le génie avait le nez plongé dans ses fichus papiers et ne daigna même pas lever les yeux vers lui.
La colère qui avait étreint John durant tout son laborieux trajet à travers les rues balayées par le vent et le froid, et qui s'était intensifiée lorsqu'il avait vu Sherlock et son crispant air ennuyé plaqué sur la figure, se raviva.
Connard ! La prochaine fois, je te fait bouffer tes papiers ! pensa-t-il en se dirigeant vers la cuisine pour se préparer une bonne tasse de thé.
Un froissement de page tournée accompagna son temps d'arrêt. John cligna des yeux lorsque ses iris brillant de colère refoulée et de fatigue se posèrent sur la table de bois blanc.
Au milieu du fatras habituel de papiers chiffonnés couverts de gribouillis, de fioles de produit et de matériel de chimie, trônait une théière de laquelle s'échappait un mince serpentin de vapeur blanche qui diffusait une savoureuse odeur de bergamote. Une tasse propre et une assiette de biscuits – ses préférés – attendaient son bon vouloir.
Ce n'était pas Mrs Hudson qui leur avait destiné – non, qui lui avait destiné puisqu'il n'y avait qu'une seule tasse – cette délicate attention.
Mais... Sherlock ne faisait pas de thé. Ou en tout cas, il n'en faisait jamais pour John.
Le docteur s'approcha d'un pas puis tourna sa tête en direction de son ami, sentant les yeux de celui-ci épier la moindre de ses réactions. Le regard de John crocheta celui du grand brun avant que les prunelles vif-argent ne se baissent promptement.
La colère qui n'avait pas quitté l'ancien soldat fut soufflée comme la flamme d'une bougie.
Il tendit une main vers l'anse de la théière et se servit une tasse tout en tendant l'autre vers l'assiette de petits gâteaux. Ses doigts rencontrèrent une mince feuille de papier pliée en deux à la va-vite. Intrigué, il l'ouvrit et parvint à décoder l'unique mot écrit par une main nerveuse qui rendait l'écriture proprement illisible :
« Pardon »
John relut plusieurs fois ce message laconique puis reporta son attention sur Sherlock qui faisait mine de se concentrer sur son dossier, oublieux du reste du monde. Mais John n'était pas dupe de cette attitude feinte. Et la tentative bouleversante de maladresse de son ami était un bon appui.
Un sourire amusé et surtout attendri étira ses lèvres.
- Sherlock murmura-t-il pour lui-même.
Puis la voix grave et assurée de Sherlock résonna dans un recoin de sa tête, réminiscence d'une soirée lointaine : "Je suis un sociopathe de haut niveau". Voilà ce qu'il avait asséné à toute l'équipe de Scotland Yard.
Mordant dans un biscuit, John ne put s'empêcher de penser :
Un sociopathe, certes, mais uniquement quand ça t'arrange...
Alors ? Ce Sherlock a la fois égoïste mais aussi touchant de maladresse vous aura-t-il plu ? :)
La suite au chap 2. :p
