Je suis super fière, contente de vous présenter la première histoire de mon recueil de One-Shot.
Ce one-shot est centré sur Gajeel et Lévy, et il est l'inspiration derrière ce recueil.
J'espère que cela vous plaira tout autant qu'a moi !
Iron Wedding
Ce jour avait fini par arriver… Pendant plus de cinq années de règne, il avait réussi à éviter ces arrangements, à repousser l'échéance et à étouffer les négociations. Mais les menaces de guerre provenant du pays voisin avaient eu raison de lui et de toutes les barrières qu'il avait réussi à ériger.
Il était un roi fort, un roi guerrier et il refusait qu'on lui indique de quelle façon gouverner. Depuis son accession au trône, il n'avait eu de cesse de réparer les erreurs commises par son père et de repousser les tentatives d'invasion. Il avait réussi à protéger son pays et ses sujets grâce à une politique militaire importante et des taxes en conséquence. Autant dire qu'il n'était apprécié ni par le peuple, ni par ses voisins.
C'est pourquoi une alliance était indispensable. Alors quand la grande et puissante famille McGarden avait offert leur fille ainée sur un plateau d'argent, ses conseillés avaient sauté sur l'occasion sans même le consulter. Ce mariage apporterait le soutient de la famille royale Heartfilia qui était à la tête de la plus grande nation commerçante. Depuis la création du royaume, la famille McGarden avait soutenu la royauté, donnant ses enfants pour créer l'élite de l'aristocratie, formant des érudits et des officiers respectés au-delà de leurs frontières.
Mais une alliance marchait dans les deux sens. Si les McGarden permettaient d'accéder aux grandes ressources des Heartfilia, il était obligé de garnir l'armée en envoyant ses propres soldats.
Voila pourquoi il se retrouvait dans son armure la moins abimée, face à son miroir, alors que l'on annonçait des mouvements de troupes vers les frontières est. Il aurait tout donné pour se retrouver au milieu de ses soldats plutôt que devant un marieur.
Il tenta d'ajuster son plastron qui s'enfonçait dans son cou. Mais décidément, c'était une armure de guerre, pas un habit d'apparat. Le métal poli était noir et froid et abimé par d'évidents coups d'épée. La pierre précieuse qui se trouvait originellement au centre de sa poitrine avait été brisé en plusieurs morceaux par une hache il y a quelques années.
Quelqu'un frappa aux lourdes portes de la suite royale, et un grand chat noir apparut dans l'encadrement.
- Mon roi, la cérémonie va bientôt… C'est quoi cette tenu ?!
Sous l'exclamation de son capitaine et ami, il se tourna de nouveau vers son reflet. L'armure n'était pas de première jeunesse mais il n'était pas repoussant non plus. N'est-ce pas ? Il avait réussit à dompter son épaisse chevelure noire, il était rasé de près et il s'était même coupé les ongles !
Panther Lily entra sans invitation et examina son souverain sous toutes les coutures. Un sourcil arqué, il était impossible de lire son visage. Il prit enfin la parole, pour le plus grand malheur du futur marié.
- Sérieusement Gajeel, une cote de maille ?
Le roi posa son regard sur ses bras. En effet, la cote de maille légèrement rouillée apparaissait sur ses bras nus et sur ses cuisses.
- Evidemment une cote de maille. Une armure se porte avec une cote de maille, sinon la protection n'est pas complète.
- Parce que tu penses avoir besoin de protection, aujourd'hui en particulier ? Tu n'aurais pas pu faire un effort ? Un peu plus et tu sortais avec ton épée.
Gajeel tourna la tête vers son lit et Lily put clairement voir l'épée d'acier scintillant de milles feux sous les rayons du soleil.
- Gajeel ! C'est un mariage !
- Ouais, et moi je suis un soldat. Sans mes armes, je me sens nu, d'accord ?
- Et tu as pensé à ta fiancée ? Tu vas la faire fuir de peur.
- Peur ou pas, c'est pas comme si elle avait le choix. Autant qu'elle comprenne avec qui elle se marie dès le début.
Sans attendre de réponse, il attrapa l'épée ancestral et la passa autour de sa taille et soupira de bonheur lorsqu'il sentit le poids de la lame contre sa jambe. Il observa le résultat final et fut assez satisfait. Il avait réussi à dénicher un pantalon peu déchiré. Les quelques trous étaient habilement cachés par ses toutes nouvelles bottes de cuire. Il rajouta deux protèges-bras en argent et jeta un regard noir à son capitaine qui se prenait la tête dans les mains.
- Au moins, mets une cape, histoire que les invités ne pensent pas que tu es sur le point d'entrer en guerre.
- Je ne devrais pas être là. Ce connard de Dreyar a avancé ses troupes jusqu'à nos frontières. Je devrais être là-bas et être prêt en cas d'attaque.
- C'est exactement ce qu'il attend. Il espère que tu aies la trouille et n'ailles pas jusqu'au bout de ce mariage. Si tu n'honores pas ce contrat, il forcera nos barricades et marchera sur la moitié du pays en quelques jours.
- Ca va, je sais, je sais. Allez, aides-moi avec tous ces trucs.
Lily posa la cape sur son épaule droite et passa les sangles sous son bras gauche de sorte qu'un seul côté de son corps soit couvert. La cape était très belle, un cadeau de mariage de la part de sa futur belle-famille, en velours noir avec des arabesques rouges et du fil d'or. Elle était belle certes, mais elle ne lui allait pas.
- Comment elle s'appelle déjà ?
- Tu le fais exprès, c'est incroyable d'avoir aussi peu de mémoire !
- Hey, n'oublie pas que je suis ton roi, quand même.
- C'est ca, c'est ca. En attendant, ta fiancée s'appelle Amalia. Elle a 25 ans, adore l'équitation, et est une escrimeuse hors pair. Tu aurais pu tomber sur pire.
- Deux ans de moins que moi… Bon, ben quand faut y aller…
Il soupira, comparant son reflet à celui d'un bouffon, mais sortit de sa chambre pour se rendre dans la salle de réception, suivi de près par Panther Lily.
Seulement quelques nobles avaient été invités. La salle, pourtant petite, paraissait vide. Plus que l'union de deux cœurs, il s'agissait de la première étape d'un partenariat commercial. La décoration était un curieux mélange du gris acier des Redfox et du jaune d'or des Heartfilia. Les couleurs des McGarden, orange ambré, n'étaient pas présentes, rappelant que l'alliance se faisait entre les deux familles royales. La future épouse n'était qu'un instrument dans toutes ces intrigues politiques.
Gajeel, debout devant les quelques témoins, commençait à trouver le temps long. Il n'était jamais resté bien longtemps immobile lors des conseils, il lui était impossible de rester assis et faisait plusieurs fois le tour de la pièce sous les regards habitués de ses conseillers. Mais cette fois-ci, c'était différent. Il ne pouvait pas se mettre à faire des pompes devant cette assemblée triée sur le volet en attendant que la mariée daigne apparaitre.
Mais qu'est-ce qu'elle pouvait bien faire ?
Alors qu'il allait demander à ce qu'on aille vérifier l'état de sa promise, les portes s'ouvrirent et cinq jeunes femmes apparurent. Les deux premières jouaient un joli air de flute les deux suivantes jetaient des pétales de fleurs sur l'épais tapis. La cinquième femme avançait lentement dans une robe dorée, un voile sur le visage, les mains tenant une parure de fleurs orange et rouges. Les fleurs s'entremêlaient pour toucher le sol et la mariée semblait porter un bouquet de lave.
- Essaie de sourire, souffla Lily.
Mais Gajeel fit la sourde oreille et observa sa fiancée pour la première fois. Elle était petite, menue, elle semblait bien fragile et ses épaules tremblaient. Ses pas n'étaient pas sûrs et elle marcha plusieurs fois sur sa robe. Quand elle arriva à sa hauteur, ils se tournèrent tous les deux vers le chambellan. Deux suivantes levèrent son voile, découvrant son visage et confirmant les doutes du jeune roi.
Elle était en pleurs.
Son visage était baigné de larmes, ses yeux bouffis prouvant qu'elle pleurait depuis longtemps. Elle serrait les dents si fort que ses mâchoires étaient blanches. Mais elle ne faisait aucun bruit. Elle pleurait en silence elle haïssait son sort mais s'était résignée.
Le chambellan commença la cérémonie comme si tout allait pour le mieux. Du coin de l'œil, Gajeel l'observait ses sanglots semblaient se calmer. Si bien que quand elle parla, sa voix ne trembla pas d'une octave.
- Dame Lévy McGarden, jurez-vous d'honorer votre roi, de le protéger, de servir le royaume et de mettre au monde un héritier ?
- Je le jure.
Lévy ? Qu'était-il donc arrivé à Amalia ? Il n'avait quand même pas une aussi mauvaise mémoire que le disait Lily ?
Quand ce fut à son tour de jurer protection aux Heartfilia, assistance en cas d'attaque, et de débuter des accords commerciaux avantageux, la sienne de voix était légèrement plus aiguë que d'habitude.
Elle remit son voile lorsqu'ils traversèrent, main dans la main, l'assemblée qui applaudissait poliment les nouveaux mariés.
Le banquet s'éternisait…
Face à lui, de l'autre coté de la table, Jude Heartfilia avait trop bu et racontait de mauvaises blagues qui faisaient rire les aristocrates autour d'eux. Le roi n'avait pas beaucoup de prestance avec sa petite moustache jaune et son ventre bedonnant. Et en plus, il ne tenait pas l'alcool… A la droite du roi se trouvait la reine Layla qui était l'opposé de son mari. Elle gardait contenance en toutes circonstances et rappelait son époux à l'ordre d'un geste, d'un regard lorsqu'il allait trop loin. Gajeel avait eu du mal à détourner son regard de cette femme. Elle dégageait quelque chose d'indéfinissable.
La vingtaine de privilégiés qui dînaient à la table royale riaient, buvaient, parlaient à outrance, résumant la bonne humeur qui régnait dans la salle à manger. La nourriture était absolument parfaite et en abondance l'alcool coulait à flot et provenait du meilleur cru du pays la nouvelle reine n'avait pas touché son assiette, ni croisé son regard.
Lorsqu'il ne regardait pas Layla Heartfilia, toute son attention était posée sur sa femme. Elle avait laissé sa coiffe aux mains de suivantes, et son visage était visible de tous. Elle ne pleurait plus mais ne souriait pas pour autant…
Elle était jeune. Bien plus jeune que ce qu'on lui avait annoncé. Elle était jolie, certes, avec ses boucles bleues qui lui tombaient devant les yeux, mais elle avait un air tellement malheureux… Elle jouait avec son morceau de viande de la pointe de sa fourchette. Elle ne remarquait pas les regards insistants que lui lançait le roi d'acier.
Finalement, une suivante des McGarden vint la chercher pour la préparer pour leur première nuit, et le hoquet qu'elle dissimula à l'annonce lui fit perdre toute couleur. Etait-il aussi horrible, repoussant pour qu'elle réagisse de cette façon ? Il savait bien qu'il n'était pas aussi attirant que certains membres de sa cours, ou qu'il avait du mal à parler avec un autre membre de la race humaine, mais il n'aurait jamais imaginé que sa propre femme puisse être répugnée à ce point.
Il finit son verre, en demanda un autre qu'il but tout aussi vite, s'excusa auprès de Jude, baisa la main de Layla et prit la direction de sa chambre.
Devant les portes, trois gardes et deux femmes de chambre attendaient patiemment son arrivée. Il inspecta rapidement les uniformes des ses soldats, donna une bourrade dans le dos de l'un deux et se tourna vers une des femmes.
- Comment va-t-elle ?
Il n'eut aucune réponse verbale, mais quand elle baissa les yeux vers ses chaussures, il comprit.
- Super…
Elle était sur le lit, recroquevillée sur elle-même, le visage dans les genoux, et cette fois-ci, on pouvait l'entendre pleurer.
Les gardes refermèrent les portes derrière le roi et les femmes de chambre, et Gajeel se positionna devant son miroir. Il y a quelques heures, il était encore chef de guerre tout puissant, et à présent il était un homme marié, craint par sa femme…
Avant que les femmes de chambre puissent s'attaquer à son armure, il défit le lien de cuir qui maintenait son épée. Tous les gens travaillant au palais savaient que seul le roi pouvait toucher cette épée sous peine de… Personne n'avait jamais tenté de connaitre la punition réservé au profanateur.
Une fois que l'arme fut rangée, les deux femmes s'affairèrent à le déshabiller. La cape avait été perdue depuis le début du banquet. Le plus dur restait à faire. Les sangles du plastron étaient trop serrés et dans des endroits inaccessibles pour qu'il puisse le faire lui-même. L'une des femmes soutint la pièce de métal lorsqu'elle tomba de son corps et la plaça tant bien que mal sur le mannequin prévu à cet effet. La seconde faisait passer la cote de maille pardessus sa tête, trop lourde pour y parvenir sans aide.
Quand il se retrouva en tunique, pantalon et bottes, les femmes sortirent, le laissant se préparer pour la nuit, seul. Il ôta ses souliers qu'il lança sous un fauteuil et fit passer sa tunique au-dessus de sa tête. Elle ne sentait pas trop mauvais, il pourrait la remettre.
Remarquant que les sanglots avaient cessé, il leva la tête vers elle. Elle l'observait, toujours dans la même position et quand il croisa son regard, elle émit un petit cri et cacha de nouveau son visage dans ses genoux.
Dans le miroir, pour la première fois, il vit ses cicatrices différemment. Elles n'étaient pas des trophées ou des preuves de ses victoires, mais des témoins de son agressivité et de ce qu'il représentait : la violence, le sang, la guerre. Pas ce qu'une dame comme elle pouvait rechercher chez son époux.
Il enleva son pantalon, enfila une chemise de nuit et sortit son épée de son fourreau. Il pouvait voir le regard terrifié de la jeune mariée alors qu'il avança vers le lit.
Il plaça l'arme au centre du lit conjugal, se glissa sous les couvertures et ferma les yeux.
oO0Oo
- Sire ! Sire !
Le tambourinement sur la porte le réveilla en sursaut et il manqua de tomber de son lit. Il grommela, tenta de se donner une apparence convenable et ouvrit la porte. Un soldat se tenait entre ses gardes et semblait avoir cavalé toute la nuit.
- Sire, les troupes de Dreyar ont reculé. Les frontières est se dégagent.
Super. Au moins cette idiotie de mariage avait eu l'effet escompté…
- Parfait. Dis aux troupes de rester sur leur position pendant encore deux jours, au cas où. Va aux cuisines prendre un repas. Je te donne deux heures pour faire ce que tu veux. Tu prendras un cheval neuf dans les écuries.
Le messager sourit aux ordres de son roi et se redressa, fièrement.
- Merci, Sire. Et félicitation pour votre mariage.
Sous le regard noir du suzerain, les personnes présentes ne purent s'empêcher de pouffer. Gajeel referma la porte le plus violemment qu'il put.
La lumière du soleil entrait faiblement dans la pièce. Il était encore tôt, mais il savait qu'il ne pourrait pas se rendormir. Il se changea, passant une tenue d'entrainement et voulu récupérer son épée. Mais la scène qu'il vit le figea sur place.
Son épouse, Lévy, dormait encore profondément, les cheveux bleus cachant complètement son visage. Ses bras fin dépassaient de sa chemise et le tissu accentuait ses jolies courbes. Mais ce qui attira son attention était les deux mains blanches refermées sur la garde de l'épée. Elle ressemblait à un ange guerrier.
Inconsciemment, il ôta une à une les mèches de son visage jusqu'à pouvoir la regarder dans son entier. Ses traits étaient paisibles malgré les larmes qui avaient séchées sur ses joues. Elle respirait profondément, preuve d'un sommeil serein. Ses doigts effleurèrent sa joue et elle remua à son contact. Il retira sa main comme s'il venait de se bruler et rougit.
Laissant son épée aux mains de son épouse, il sortit presque en courant de sa chambre.
Le château était encore froid et silencieux il aimait marcher dans les couloirs à ces moments. Il avait tout le temps qui lui fallait pour réfléchir aux attaques des bandits, aux invasions voisines, aux problèmes paysans, à l'entrainement de ses soldats ou à l'adoubement d'un nouveau chevalier. A tout ca, il devait maintenant ajouter les problèmes conjugaux…
Il entra dans la salle d'armes vide avec bonheur. Il adorait cette odeur de métal et de chaud. Il se sentait véritablement bien au milieu de tout cet acier, de ces armes, de cette violence. Après tout, il était un soldat avant d'être un roi.
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La journée fut éprouvante. Une bonne partie des invités était toujours au château et il fallait aller les saluer un par un en fonction de leur rang. Heureusement les Heartfilia partaient le matin même, les Redfox étaient à présent les seuls personnes royales dans le château.
Il avait supervisé l'entraînement des nouvelles recrues, et il fallait trouver un moyen de couper l'armée en deux afin d'envoyer des soldats auprès de l'armée des Heartfilia. Lily n'avait pas été d'une grande aide, et les membres du conseil savaient à peine comment tenir un couteau à viande, alors Gajeel refusait à ce qu'ils prennent ce genre de décisions martiales.
La séance de doléances avait paru prendre des heures. Deux agriculteurs se battaient pour des terres, un petit village du sud étaient venu annoncer la présence de pilleurs, un petit aristocrate voulait couper les mains de tous ses serviteurs car un collier avait disparu et un jeune paysan avait perdu un œuf… Il essayait. Vraiment, il essayait de s'intéresser à son peuple et d'être un roi bienveillant, mais quand on venait le voir pour lui parler de ces problèmes futiles, il avait juste envie de mettre tout le monde à la porte !
Quand il passa celles de sa chambre bien après le coucher du soleil, il était éreinté. Il remarqua tout de suite que Lévy n'avait pas bougé de sa place. Il n'était pas sûr qu'elle se soit même changée. Mais il était trop fatigué pour quoi que ce soit. Il se laissa tomber sur le lit, habillé et botté, dos à sa femme.
- Dans quatre jours nous partons pour un voyage de présentation. Le peuple doit rencontrer sa reine. Soyez sure d'être présentable.
Est-ce qu'elle avait compris, ou ne serait-ce qu'entendu, il ne pouvait en être certain. Elle ne répondit pas et il s'endormit presque aussitôt ces mots prononcés.
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Il était entrain de s'armer lorsqu'il entendit du bruit provenant du lit. La femme de chambre bouclait la dernière sangle sous son aisselle quand il vit Lévy se lever. Elle non plus n'était pas du matin, ses cheveux dans une pagaille monstre. Il réprimât un ricanement. La servante ajustait la cote de maille sur ses bras lorsque Lévy se rendit enfin compte qu'elle n'était pas toute seule. Son regard se fit curieux et elle s'approcha en silence. Elle observa la scène sans un mot, suivant des yeux tous les mouvements de la servante.
- Et voila, Sire. Parfait ! Ils seront terrorisés rien qu'en vous voyant.
- Vous partez ?
La femme de chambre fit un bond sur le coté, ne remarquant la présence de la jeune reine que lorsqu'elle prit la parole, et se confondit en excuse tout en s'inclinant respectueusement. Gajeel la congédia d'un signe de tête et se tourna vers Lévy. Si elle l'avait trouvé intimidant le jour de son mariage, cette armure là la ferait certainement fuir en courant. Il s'agissait d'une armure plus épaisse et plus imposante. Ses bras et ses jambes étaient entourés de métal et le col de fer remontait haut contre sa bouche.
Si elle avait peur, elle ne le montrait pas. Au contraire, elle le regardait droit dans les yeux et attendait une réponse de sa part.
- Des ennuis dans le sud. Je pars pour quelques jours. Je serais de retour à temps pour le voyage en votre honneur.
Elle hoche la tête, puis baissa les yeux vers ses pieds nus. Il la vit se mâchouiller la lèvre et tordre ses doigts dans tous les sens.
- Uhm… je voulais m'excuser pour mon comportement ces derniers jours. Je ne me suis pas conduite comme j'aurais dut le faire et j'en suis navrée. Les évènements… m'ont pris de cours…
- Je comprends. Vous n'avez pas à vous excuser.
- Tout ca pour dire, qu'à partir d'aujourd'hui vous n'aurez pas à vous plaindre de mon comportement.
Le sourire qu'elle lui adressa le pris de court et il sentit ses joues chauffer face à ce visage soudainement lumineux. Heureusement que le métal de son col cachait ses rougeurs.
- Je vais assigner des gardes à votre sécurité. Utilisez mon absence pour faire connaissance des lieux. C'est chez vous à présent après tout.
Il récupéra son épée sur son lit et l'installa à sa ceinture.
- Jet ! Droy !
Les deux gardes entrèrent dans la chambre, s'inclinèrent devant la reine et attendirent que le roi leur donne ses ordres.
- Je vous confie ma Dame. Montrez lui le château et les jardins. Aidez-la à se familiariser avec les lieux. Mais s'il lui arrive quoi que ce soit, je vous arrache la colonne vertébrale.
Les deux gardes blanchirent immédiatement et claquèrent des talons pour signifier qu'ils acceptaient la mission, et Gajeel sorti de la pièce sans un regard pour sa femme.
Panther Lily et une petite troupe de soldats l'attendaient dans la cours. L'expédition ne devait être ni très dangereuse ni très longue, mais Gajeel tenait à accompagner ses hommes s'il n'avait rien de plus pressant à faire. Et ces attaques tombaient à merveille pour s'éloigner de sa femme et de la peur qu'il lui inspirait.
Mais ce sourire…
Du haut de son cheval, par un étrange réflexe, il leva les yeux vers sa chambre et son cœur manqua un battement. Elle était là, sur le balcon, et observait la scène qui se déroulait à ses pieds. Elle fit un geste de la main lorsqu'elle le vit se tourner vers elle et Gajeel lança son cheval au galop.
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Comme prévu la mission avait été accomplie sans difficulté et il rentrait juste à temps pour le départ le lendemain. Et encore heureux, parce qu'il avait été particulièrement distrait… Il se demandait comment Lévy avait passé ces derniers jours, mais la seule chose à laquelle il aspirait réellement était un bain. Trois jours de chevauché, de combat et de nuit à la belle étoile avait eu raison de lui.
Heureusement ses serviteurs avaient appris à anticiper ses moindres désirs et une baignoire pleine l'attendait dans la salle d'eau. Sa femme de chambre l'attendait pour l'aider à se dévêtir et elle avait seulement ôté ses protèges bras quand quelqu'un frappa à la porte. Les yeux écarquillés, il cessa de respirer lorsque Lévy passa le seul de la porte.
- Sue, tu peux aller te reposer. Je vais m'en occuper.
- Ma reine, je vais…
- S'il te plait, Sue.
La femme de chambre s'inclina et disparut. Gajeel savait qu'elle se trouvait de l'autre coté de la porte, prête à intervenir si le moindre problème survenait.
L'attention du roi se posa sur la jeune femme : elle portait une robe orange simple qui dégageait ses épaules et tombait sur le sol. Une ceinture rouge décorait ses hanches et une jolie couleur rose pimentait ses joues. Elle semblait en bien meilleure forme que lorsqu'il l'avait quitté.
- Vous n'êtes pas obligé. C'est assez lourd.
- Je sais bien, mais j'ai envie. J'ai bien observé et Sue m'a montré comment faire.
Et comme si elle avait fait ca toute sa vie, elle défit toutes les lanières qui permettait au plastron de tenir sur son corps et posa les pièces de métal une à une sur le sol. Tout en s'activant, elle racontait ses derniers jours et son adaptation.
- J'ai découvert la bibliothèque, et je dois dire que votre collection n'est pas très hétéroclite. Uniquement des livres sur la guerre, les tactiques martiales et autres sujets de ce genre. Il va falloir se diversifier un petit peu. Mais je m'occuperai de ca. J'ai visité les jardins, et je dois avouer que je m'attendais pas à trouver quelque chose d'aussi charmant, de coloré et fleuri. C'était très agréable. Jet et Droy sont d'excellente compagnie. Très maladroits, mais amusants. Nous sommes allés nous promener dans la campagne autour du château. J'ai rencontré des gens vraiment intéressants. Vous saviez qu'un jeune paysan avait perdu un œuf ? Nous avons passé toute l'après midi à le chercher, mais nous l'avons retrouvé.
Quand elle dut s'occuper de la cote de maille, un problème de taille fit son apparition. Gajeel dut se pencher considérablement pour permettre à ses petits bras de passer au-dessus de ses épaules. Lorsque le vêtement de métal vint, elle manqua de tomber à la renverse sous le poids. Il eut un petit rictus en la voyant se rattraper tout en empêchant la cote de maille de tomber sur le sol.
- Comment était votre voyage ?
Voyage ? Son rictus s'agrandit.
- Bien. Les autochtones n'étaient pas très chaleureux mais on a sut y faire face.
- … Uhm… Vous… vous n'êtes pas…, vous savez…, blessé ?
Ses yeux remontaient le long de ses bras nus et de ses jambes et torse toujours couverts de tissu. Elle cherchait des blessures, des taches de sang. Il haussa les épaules et lui tourna le dos pour cacher son embarras et se dégagea de sa tunique, exposant son dos. Un énorme hématome s'étalait sur son flan gauche. Il n'avait rien de cassé, c'était juste impressionnant.
- Rien de très grave…
Par-dessus son épaule, il la vit tendre la main vers lui, puis se raidir, s'excuser et partir presque en courant.
Et voila qu'il la faisait encore fuir…
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Le bain chaud l'avait achevé et lorsqu'il s'endormit, ni le soleil ni Lévy n'était couché.
Il dormit d'un sommeil sans rêve et se réveilla parfaitement reposé. Il était prêt à combattre un dragon, une armée ou même partir à la recherche d'un trésor oublié. Mais tout ce qui l'attendait était un long voyage à travers le royaume… dans un carrosse… avec une couronne sur la tête… La galère !
Il tourna le visage vers la personne qui partageait sa couche et ne put empêcher un sourire d'apparaitre devant une Lévy encore endormie. Cette fois-ci, elle ne tenait plus d'arme entre ses doigts mais bel et bien une mèche de ses cheveux, à lui. Il rougit sans savoir pourquoi et se laissa tomber dans les oreillers en soupirant. Depuis quelques jours, il passait son temps à rougir. Ce n'était pas très royal de sa part…
Il se dégagea gentiment de sa poigne, s'habilla rapidement et descendit dans la salle d'entrainement. Il n'aurait pas du dormir autant il ne serait pas assez fatigué pour somnoler sur le trajet, et il allait perdre tout respect que Lévy pouvait encore avoir pour lui. Et il se surprit à penser qu'il voulait que Lévy pense à lui tendrement.
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L'escorte était prête. Lily avait sélectionné ses meilleurs éléments pour les accompagner et chaque homme et femme resplendissaient dans des armures polies et scintillantes. Les chevaux avaient été brossés et harnachés du cuir le plus fin. Le carrosse rutilait, le bois était vernis et les couleurs restaurées. Gajeel avait passé une tenue de voyage légère et attendait l'arrivée de Lévy.
Quand elle apparut en haut des grands escaliers, l'attention de tous se posa sur elle. Ses cheveux volaient librement autour de son visage elle souriait joliment à Jet et Droy tout en bavardant. Contrairement à la veille, sa robe crème couvrait sa poitrine et ses épaules et épousait avec délice les courbes de son corps. Elle accepta la main de Droy pour descendre les escaliers, et le remercia chaleureusement. Les regards dévièrent pour se poser sur le roi, et il savait ce que tous se disaient, parce qu'il pensait la même chose : comment une femme pareille pouvait-être liée à cette grosse brute ?
- Bonjour.
Elle s'adressa à lui avec un magnifique sourire, mais il se contenta de lancer un regard meurtrier à Jet et Droy qui était en train de baver devant sa femme, leur reine.
- Je vous en prie, dit-il en se décalant pour lui permettre d'atteindre le carrosse.
Elle prit la main qu'il lui offrit et grimpa dans le véhicule alors que Gajeel manqua de s'étouffer en voyant le dos de la robe. Il n'y en avait pas ! Son dos, ses omoplates et les quelques grains de beauté qui parsemaient sa peau étaient découverts et coupèrent la respiration du brun.
Il retrouva ses esprits quand il entendit Lily ricaner de façon peu discrète. Il lui envoya une pierre pour le faire taire avant de monter à la suite de sa femme.
Le carrosse s'ébranla et Gajeel avait envie de mourir.
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La première après-midi de voyage s'était déroulée dans un grand silence. Gajeel tentait de ne pas rendre son petit-déjeuner sur la magnifique robe, tandis que Lévy, assise face à lui, était plongée dans les livres qu'elle avait pris dans sa bibliothèque. Elle regardait de temps à autre à travers la fenêtre, sans rien dire.
Lorsqu'ils arrivèrent dans la cours de la demeure qui allait les accueillir pour la nuit, il sorti sa couronne de son coffret et la posa sur sa tête. C'était une vieille couronne tout en métal. Un simple cercle de quelques centimètres d'épaisseur, gravé d'arabesques, qui tombait sur le milieu de son front. En voyant la tête nue de Lévy, il regretta de ne pas avoir pensé à en faire faire une pour elle…
Leur hôte de la nuit, José, était un vieux général qui avait gagné gallons, fortune et respect sur les champs de bataille. Gajeel s'entendait relativement bien avec lui il pouvait parler de politique en toute impunité. Et en ce moment, il avait besoin de conseils.
Le vieil homme s'inclina respectueusement devant sa nouvelle reine, lui offrit une dague ouvragée sertie d'ambre, mais l'homme était froid et jugeait la jeune femme. En tant que soldat, il aimait les femmes grandes, fortes, et charismatiques. Gajeel savait que lui et les principaux membres de sa cours auraient voulu une reine dans ce genre, à l'image de feu la reine mère. Il les conduisit vers la salle à manger. Mais sur le chemin, sa canne ripa sur le tapis et il serait dangereusement tombé si Lévy n'avait pas eu le réflexe d'attraper son bras.
Faisant comme si rien ne s'était passé, elle glissa la main du vieil homme sur son bras et continua à avancer, posant toutes sortes de question sur la décoration. L'homme ne fit aucun commentaire, mais apprécia l'aide discrète que la bleue lui procurait.
Comme à son habitude, le diner servis par José était simple et sobre. Ils n'étaient que tous les trois dans la petite salle, Gajeel dominant la table, Lévy à sa droite et le général à sa gauche.
- Je dois envoyer 200 soldats avant la fin du mois je ne me suis pas encore penché sur le problème.
- Quel problème ? Vous êtes Gajeel Redfox, aucun soldat n'irait jamais à l'encontre de vos ordres. Prenez les premiers soldats que vous voyiez et dites leur de faire leur bagage.
Depuis le début du repas, ils parlaient des problèmes du pays, de politique étrangère, de la situation encore tendue avec Ivan Dreyar. Lévy n'avait pas encore émis un son.
- C'est une mauvaise idée.
Jusqu'à présent du moins…
Les deux regards se tournèrent vers elle, étonnés, attendant plus d'explications.
- Peu importe votre réputation, si vous forcez des hommes et des femmes à quitter leur pays, leur famille, vous perdrez leur respect et leur amour en un claquement de doigts. Pendant que vous étiez absent, j'ai pu discuter avec les soldats autour de moi, et beaucoup rêvent de voyager. Si vous annoncez publiquement et dans toutes les villes que vous chercher 200 volontaires, vous aurez le compte en moins d'une semaine.
Le général explosa d'un vieux rire qui se transforma en hoquet, manquant de l'étouffer. Gajeel la regardait avec intérêt. Elle ne sembla pas s'offusquer de l'éclat de rire grossier et fini son dernier morceau de pintade. L'homme reprit son souffle.
- On n'aura jamais vu un roi demander l'avis de ses soldats !
- Vraiment ? Pourtant c'est bien la méthode que Mavis a utilisé pour rassembler tous les royaumes sous son autorité. Elle a envoyé des soldats volontaires former des familles et des alliances dans tous les pays limitrophes. De cette façon, elle s'est assurée le respect de ces nouvelles familles et leur descendants. Si bien que tous les rois et reines se sont naturellement retrouvés incapables de s'opposer à l'autorité de Mavis. Rappelez-moi, cela m'échappe soudainement, combien de temps l'empire de Mavis a-t-il duré ?
Gajeel tentait de ne pas rire et devait se mordre l'intérieur des joues pour y parvenir. José avait considérablement blanchi. Tous les deux savaient pertinemment qu'elle n'avait rien oublié. Elle voulait juste prouver son argument.
- Un millénaire, répondit-il à contre cœur.
- C'est ca, en effet. Je ne dis pas que c'est ce que nous devons faire. Je ne fais que rappeler que prendre en compte l'avis de tous est toujours une bonne chose.
Leur hôte rougit lorsque la reine lui offrit un sourire tout à fait charmant. Gajeel ne le vit pas, perdu dans ses pensés.
« Nous. »
oO0Oo
- J'espère que je n'ai pas outrepassé mes limites. Je ne voulais pas être insultante.
- Pas du tout.
Ils étaient dans la chambre des maitres, plus petite que celle du château certes, mais avec tout le confort nécessaire. Le feu dans la cheminé crépitait et faisait danser mille et une couleurs sur la peau laiteuse de Lévy.
- C'est la première fois que j'assiste à un repas de ce genre. Je n'étais pas sure d'avoir mon mot à dire.
Le roi renifla pour cacher son ricanement.
- Vous êtes reine. Si vous avez quelque chose à dire, vous le dites. C'est tout.
Gajeel était allongé sur le lit et lisait un rapport qu'il venait de recevoir à la lumière d'une bougie. Lévy apparut dans sa chemise de nuit elle paraissait encore plus jeune dans cette tenue.
- Est-ce qu'on va dormir ?
- Bien sur, quoi d'autre ? Demain, on doit partir à l'aube. L'endroit que je veux vous montrer est à quelques heures de route.
- D'accord…
Et elle se coucha sans un autre mot.
oO0Oo
Les jours suivants se construisirent sur le même modèle. La matinée, le roi et la reine parcouraient la région qu'ils visitaient en compagnie de leur hôte et d'une escorte et Gajeel montrait à Lévy les endroits qu'il préférait dans son pays. L'après-midi, ils voyageaient silencieusement, Gajeel souffrant, Lévy lisant, et le soir la reine charmait leurs hôtes par ses connaissances, sa gentillesse et sa curiosité. Une fois dans leur chambre, ils discutaient de tout et de rien, de plus en plus longuement.
Et plus, elle parlait, plus il la découvrait, plus Gajeel regrettait ce mariage. Elle ne méritait pas d'être utilisé à des fins politiques, ou d'épouser un homme qu'elle ne connaissait pas. Elle méritait d'être une reine, ca c'était certain. Personne ne le méritait plus qu'elle, et plus elle se montrait digne de ce rôle, plus Gajeel sentait son cœur fondre pour cette femme. Mais à chaque fois qu'elle posait ses grands yeux marron sur elle, le souvenir du jour de leur mariage et de ses larmes remontait à la surface. Et il détournait le regard.
oO0Oo
Ils avaient presque fini leur tournée et le trajet qu'ils entamaient passait par les montagnes. Gajeel ne s'était jamais senti aussi mal. Tous ces cahots, ces balancements… C'est comme ca qu'il allait mourir. Pas sur le champ de bataille, mais dans une carriole… Il avait tenté de fermer les yeux pour faire passer le mal mais ca ne marchait pas vraiment.
Il entendit Lévy bouger, fermer son livre, puis il sentit une présence à ses cotés, une main sur son front.
- Vous allez bien ?
Il ouvrit les yeux en grand quand il sentit son souffle sur son visage. Elle était proche. Très proche. Trop proche…
Il émit un grognement en guise de réponse. Il avait vraiment essayé de formuler des mots, mais ils seraient sortis sous forme de gargouillements. Il avait encore un peu d'honneur, il tenait à le préserver.
Lévy posa sa main sur sa joue et guida son visage jusqu'à son épaule.
- Essayez de dormir. La route est encore longue.
Tout le corps de Gajeel était tendu et s'attendait à ce qu'elle le repousse d'une seconde à l'autre, mais bercé par sa respiration calme et sa douce odeur, il finit par sombrer dans un sommeil tant attendu.
oO0Oo
Il était très inconfortable. Son dos lui faisait mal, ses jambes avaient besoin d'être activées, son épaule était complètement engourdie… mais il refusait de bouger. Cette chaleur sur son cou…
Il ouvrit lentement les yeux. Il s'était certes endormi sur l'épaule de son épouse, mais à présent sa tête reposait sur ses genoux et c'était sa main sur son cou qui était la source de cette chaleur si confortable. Il bougea légèrement la tête pour la regarder.
Elle avait les yeux fermés et la tête posée sur la paroi en bois. Il pensait qu'elle dormait également jusqu'à ce qu'elle bouge sa main le long de sa gorge, de sa joue, et sur son crâne. Ses ongles sur sa peau lui prodiguaient d'agréables frissons et s'il avait été un félin, il se mettrait certainement à ronronner dans la seconde.
Il referma les yeux pour mieux apprécier les caresses lorsque le carrosse s'arrêta soudainement. Gajeel se redressa soudainement, regardant autour de lui, perdu. Lévy cacha un rire dans sa manche. Lily apparut à la fenêtre.
- Nous sommes arrivés, Majestés.
La dernière étape. Demain soir, ils seraient de retour chez eux… Il ne savait pas quoi penser de tout ca.
oO0Oo
La soirée se déroula de la même façon que les précédentes, à la différence que Gajeel ne prenait pas part aux conversations. Il n'avait d'yeux et d'attention que pour la jeune femme à sa droite. Lévy parlait d'art avec la même aisance qu'elle parlait de politique. Son esprit vif et son sourire radieux avaient conquis toute l'aristocratie, et Gajeel ne faisait pas exception.
oO0Oo
Sa blessure était quasiment guérie, mais il devait continuer à étaler un onguent préparé par sa doctoresse. Dos au miroir, il obéissait tant bien que mal aux ordres donnés par le médecin. Mais cette fois, le corps endoloris par le trajet, il avait du mal à atteindre l'intégralité de la peau tuméfiée.
- Je vais le faire.
Lévy était apparu sans bruit et venait de lui prendre le pot des mains. Gajeel allait rétorquer quand la main fraiche de sa femme se posa sur son flan. Ses mots moururent dans sa gorge et il laissa échapper un soupir de soulagement. Ses doigts couraient sur sa peau avec douceur et il se demanda soudainement ce qu'il ressentirait si ces mêmes doigts touchaient le reste de son corps…
- C'est bon, merci…
Il se dégagea d'un mouvement d'épaule et alla se mettre au lit, encore torse nu et en pantalon. Ne pouvant supporter son regard brun interrogateur, il enfonça son visage dans les oreillers.
… Merde…
Il était irrémédiablement amoureux de sa femme.
oO0Oo
Il se réveilla à l'aube. Le soleil perçait à peine la brume matinale. Mais elle, elle était aussi lumineuse qu'une étoile lors d'une nuit sans lune. Son visage paisible n'était qu'à quelques centimètres du sien, et il sourit en voyant dans quelle position elle dormait. Elle serrait encore quelque chose entre ses doigts : sa main à lui. Il pouvait sentir son souffle sur ses doigts. Il voulu se dégager mais la poigne de Lévy se raffermit et elle rapprocha la main jusqu'à la glisser sous sa joue.
Rouge comme une pivoine, Gajeel se laissa tomber de nouveau sur l'oreiller et observa sa femme. Il se surprenait à la détailler de plus en plus souvent. Son petit nez, ses sourcils fins, ses joues rondes, sa bouche… Une bouche qu'il rêvait d'embrasser.
Sur cette vision, cette pensée, il se rendormit, cette fois-ci de jolis rêves pleins la tête.
oO0Oo
La seconde fois qu'il ouvrit les yeux, sa main était libre, mais son cœur rata un battement lorsqu'il posa le regard sur la jeune femme. Ses cheveux soyeux tombaient en belles boucles sur les draps. Ses joues, ses lèvres étaient plus roses que d'habitude. Même sa chemise de nuit était différente, plus légère, plus ouverte. Elle dormait un bras plié au-dessus de sa tête, donnant à sa poitrine un volume inhabituel très engageant. Bougeant dans son sommeil, elle se rapprocha de lui, posant sa main sur son torse toujours dénudé.
Son premier réflexe fut de s'éloigner le plus vite possible, mais il se battit contre son instinct de peur de perturber son sommeil. Il ferma même les yeux pour apprécier la chaleur et la douceur de cette main. Exactement comme il l'avait fait dans la calèche la veille.
- Majestés ! Vos repas sont servis.
La voix grave provenant de l'autre coté de la porte le fit sursauter si fort qu'il en tomba de son lit. Lévy se redressa également, à peine surprise, comme si elle était réveillée depuis déjà plusieurs heures.
Gajeel massa son royal derrière tout en grommelant et se dirigea vers la malle de vêtements qu'il avait amené. Il n'avait pas grand-chose, mais la tunique qu'il avait mis la veille ferait bien l'affaire.
- Gajeel ?
A chaque fois qu'elle prononçait son prénom, mille aiguilles transperçaient sa colonne vertébrale.
- J'ai une requête… Depuis plus d'une semaine, nous sommes constamment entourés. Serait-il possible, juste pour ce matin, que nous nous baladions uniquement tous les deux ?
Super… Maintenant il allait devoir trouver des vêtements propres…
oO0Oo
Du haut de son cheval, Lévy appréciait le vent sur son visage, sous le regard attentif de Gajeel.
Panther Lily avait été dur à convaincre mais il avait fini par accepter de les laisser gambader tous les deux. Il avait même jeté un regard moqueur au roi. Mais ce dernier n'était pas stupide et il savait bien qu'un petit groupe de soldats triés sur le volet les suivait de loin.
Si son visage gardait son calme habituel, à l'intérieur il était bouleversé d'émotions contradictoires. Son cœur dansait de voir Lévy si souriante, d'entendre son rire et de voir ses yeux pétiller. Ses tripes se tordaient de perdre tout cela dans un accident, une attaque, qu'elle disparaisse d'elle-même.
Cela faisait plus d'une heure qu'ils se promenaient dans la campagne, traversant des villages, grimpant des collines, se perdant dans les hautes herbes. Et plus le temps passait, plus Gajeel se détendait. Elle avait eu une idée grandiose. Certes, ils n'étaient pas réellement seuls, mais de ne pas les avoir constamment sous les yeux, il les oubliait presque.
Ils approchèrent un petit village qu'il connaissait. Lors d'une expédition de reconnaissance, il s'y était arrêté et y avait gouté la meilleure bière. Et il voulait que Lévy en profite également. Mais dans le village, les gens semblaient pris de panique et courraient dans tous les sens. L'un d'entre eux les vit et se précipita sur la jambe de Gajeel.
- Seigneur. Je vous en supplie, aidez-nous. Un éboulement… trois enfants sont coincés…
- Montrez-nous !
Lévy sauta de son cheval avant que Gajeel n'ait pu dire quoi que ce soit, et l'homme la guida à travers la foule. Le roi dut mettre pied à terre également pour pouvoir les suivre et ils arrivèrent rapidement devant le flan de la montagne. Une vingtaine d'individus s'affairait autour de rochers, ne sachant pas réellement comment dégager l'entrée de la grotte.
- Que s'est-il passé exactement ? demanda Lévy.
- C'est une ancienne mine… On avait bien dit aux enfants que c'était trop dangereux de jouer dedans, mais vous savez comment sont les enfants… On a pourtant demandé au roi de faire quelque chose. Il y a tellement de mines de ce genre dans le pays. Mais il n'a rien fait. J'imagine que ce n'est pas aussi valorisant que de faire la guerre.
Gajeel eut l'amabilité de rougir sous le regard désapprobateur de Lévy. Il avait entendu parler de ces vieilles mines, mais ne pensait pas que c'était un problème urgent. Alors que Lévy allait dire quelque chose, un hurlement provenant de l'intérieur de la montagne retenti et une femme tomba à genoux, le visage noyé de larmes.
- Ils vont finir écrasé… Plus on enlève des rochers, plus la montagne tremble…
Le couple observa la situation. Gajeel aperçût un conduit qui semblait entrer dans la montagne, mais l'entrée était trop étroite pour lui. Il fallait trouver un moyen de consolider les parois… mais il serait peut être trop tard pour les gosses.
- J'y vais !
- Quoi ?
Et, éberlué, il vit Lévy gravir la montagne pour se glisser dans le conduit qu'il venait de remarquer. Avant qu'il puisse lui ordonner de revenir, elle s'était glissée, tête la première, en direction des hurlements de terreur.
- Tout le monde s'écarte ! Plus personne ne touche à quoi que ce soit !
Il hurla ses ordres, et les villageois prirent peur sous la voix rocailleuse de ce noble qui était apparu de nulle part. Il s'approcha de l'éboulement et analysa l'enchevêtrement des pierres. Il devait trouver une solution pour dégager le chemin le plus rapidement possible et sortir Lévy de ce piège.
Derrière lui, il entendit des gens crier d'indignation et des hennissements chevalins. Ses soldats arrivaient, trop tard. Du haut de son cheval, Lily observa la situation.
- Que se passe-t-il ?
- Une mine désaffectée. Des enfants coincés. Des pierres instables… Lévy est à l'intérieur…
Le capitaine des gardes mis pied à terre et se positionna près de son roi. Ce dernier posa une main sur un rocher mais la retira comme s'il s'était brulé. Et s'il se trompait ? Si la décision qu'il prenait entrainait la mort de Lévy ? S'il restait sans rien faire et qu'elle étouffait ?
Alors qu'il jaugeait le pour et le contre, des pierres roulèrent hors du conduit qu'avait emprunté Lévy et une petite tête apparue. Un homme hurla un prénom et l'enfant sauta dans les bras de son père. Deux autres enfants sortirent avant que les cheveux bleus de Lévy n'apparaissent, avec son plus grand soulagement.
Adressant un sourire à la foule, elle descendit prudemment. Sa robe était sale et déchirée. Ses mollets étaient visibles et écorchés. Du sang coulait le long de sa jambe et les yeux de Gajeel suivaient ses gouttes rouges. Quand elle fut à sa portée, il l'a pris par les aisselles et la força à s'assoir sur le sol. Sans aucune gène, il remonta le reste de la jupe sur ses cuisses et observa les blessures.
- Tout va bien ? Pourquoi tu saignes ?
De sa manche, il essuya les trainées rouges, cherchant l'origine. Il manipulait ses jambes, ses chevilles avec beaucoup de précaution, aveugle à ce qu'il se passait autour d'eux.
- C'est bon. C'est juste une écorchure.
- Tu es sûre ? Ca pourrait être dangereux.
- C'est bon, j'ai dit !
Le ton sec de sa voix le fit lever les yeux vers elle et il tomba sur le visage cramoisi de sa femme. Il regarda autour de lui, et si les paysans fêtaient le retour de leurs enfants, les soldats les encerclaient et observaient la scène. Un rictus sur les lèvres.
Lévy bondi sur ses pieds, cachant ses jambes à tout venant. Elle s'éloigna, prétextant de prendre des nouvelles des enfants. Sur un signe de tête de leur roi, la moitié de l'escorte s'accrocha aux pieds de la petite reine.
Gajeel la regarda partir et se laissa tomber dans la terre.
- Sacré bout de femme, pas vrai ?
Il acquiesça d'un mouvement de tête à la remarque de Lily.
Elle n'avait pas hésité et avait plongé au cœur du danger, sans aucune connaissance du terrain ou autre. Elle ne se préoccupait pas de ses blessures. Non, elle s'inquiétait du bien-être des autres. Le fait qu'elle soit reine n'avait rien à voir là-dedans. C'était elle, Lévy McGarden, qui était comme ca.
- Allez, debout.
Il attrapa la main de Lily et parti à la suite de sa femme. Il la retrouva entouré des villageois qui la remerciaient chaudement. Il préféra observer la scène de loin c'était Lévy l'héroïne d'aujourd'hui.
Un vieillard s'approcha et tout le monde s'écarta avec respect. Il devait être le chef du village. Il s'inclina devant la jeune femme et prit la parole.
- Ma dame, au nom de tous, je vous remercie chaleureusement. Sans votre courage, nous ne serons pas là à serrer dans nos bras ces petits chenapans désobéissants. Et je me vois désolé d'abuser de votre générosité, j'ai une requête.
- Je vous écoute.
- Une grande dame telle que vous aura beaucoup plus d'influence auprès du roi. Pourriez-vous lui raconter ce qu'il s'est passé et lui faire comprendre que ces mines sont dangereuses ? Si nous pouvions nous en occuper nous même, nous le ferions. Malheureusement…
- Je comprends. Je lui parlerai dès que je le verrais.
Elle se tourna vers lui.
- Gajeel ! Tu prends des notes ?
Avec terreur, tous les villageois se tournèrent vers l'homme en retrait. Comment n'avaient-ils pas reconnu cette chevelure noire, ces yeux rouges, ce visage de marbre, ces armoiries d'argent ? Leur roi, connu pour son impétuosité et sa violence, les avait écoutés se plaindre de lui. La jeune noble qui les avait aidés se dirigea vers lui et se planta devant, les mains sur les hanches.
- Alors ? Pour faire la guerre, il n'y a pas de soucis, mais dès qu'il faut régler les problèmes du royaume, il n'y a plus personne ! Quand il y a des gens à tuer, le problème se règle en une semaine, mais dès qu'il faut aider les gens concrètement, cela semble prendre des années.
- Hey ! Quand je pars en campagne, c'est pas pour moi. Si je ne vais pas massacrer les envahisseurs, à qui-est-ce qu'ils vont s'en prendre ? Moi, je suis à l'abri dans mon château, si je pouvais je passerais les journées au lit !
Ce n'était pas tout à fait vrai. Il aimait beaucoup faire la guerre et il détesterait ne rien faire de ses journées, mais il devait se faire comprendre.
- Et bien quand on sera rentré, tu vas me faire le plaisir de laisser tes armes et t'occuper du reste. Si tu voulais faire la guerre tous les jours, tu aurais dut être soldat. Pas roi !
Il soutint son regard pendant quelques secondes. Ses arguments étaient idiots, il n'avait jamais demandé à être roi. Il n'avait pas demandé à naître au sein de la famille royale. Puis une autre pensé apparut, une pensée qui lui fit détourner les yeux. Il aimait quand elle devenait autoritaire et lui donnait des ordres.
Toute l'assemblée chuchotait à présent. Ils avaient enfin compris que la nouvelle reine se tenait devant eux. Ils avaient entendu des rumeurs sur elle, sur ses manières et sa façon d'être. Et apparemment, les rumeurs étaient vraies : elle avait dompté le terrible dragon de d'acier.
Lily ricanait derrière ses mains, et Gajeel comprit qu'il était temps de partir. Il remonta sur son cheval sans un mot et avança sur le chemin du retour. Lévy fit de même, mais avant de partir offrit un dernier sourire.
- Ne vous en faites pas. Je ne vais pas le lâcher.
- Ma reine !
Le chef du village s'inclina profondément, les larmes aux yeux. Le reste de la population suivit son exemple. Avec une reine de sa trempe, le pays avait un avenir radieux face à lui.
oO0Oo
Sur le chemin du retour, Lévy ne lisait plus les livres qu'elle avait trouvés à droite, à gauche. Elle étudiait les vieilles cartes, les plans des mines et leur location. Elle avait tenté de faire participer Gajeel, mais elle s'était vite aperçue que l'homme était totalement inutile dans un véhicule en mouvement. Il se contentait de la couver du regard, tellement fier d'être lié à elle. Peut-être que s'il lui disait ce qu'il ressentait pour elle, leur relation prendrait un meilleur tournant.
oO0Oo
Et comme l'avait promis Lévy, Gajeel délaissa les affaires martiales, déléguant les plus urgentes à Panther Lily. Il s'intéressa aux récoltes, aux réserves, aux infrastructures, aux côtes maritimes, aux impôts, à l'éducation… Et même si ca ne l'intéressait pas autant, il adorait voir le sourire satisfait de la reine quand il lui parlait de sa journée et de ce qu'il avait achevé.
Il ne lui avait pas dit, mais il avait fait passer le mot : il recherchait 200 volontaires pour s'installer sur le territoire des Heartfilia. Et comme prédit, en moins de deux semaines, il avait reçu plus de 250 réponses positives.
Mais aujourd'hui, il s'ennuyait. Il n'arrivait pas à se concentrer. Le trop plein d'énergie accumulée demandait à sortir, et s'il ne s'occupait pas de ce problème maintenant, il allait exploser.
Alors quand il entendit les soldats s'entrainer dans la cours, juste sous sa fenêtre, il ne résista pas longtemps, voir même du tout, et sorti presque en courant de son bureau. Arrivé près du groupe, il laissa tomber son manteau encombrant dans la poussière, attrapa une épée et se mêla aux joyeusetés.
Pendant plus d'une heure, il attaqua, para, riposta, évita, sous un soleil de plomb. Mais il se sentait beaucoup mieux. Il avait toujours aimé s'entrainer avec ses soldats et ceux-là le lui rendaient bien. Ils ne retenaient pas leurs coups et respectaient leur roi un peu plus à chaque estocade.
Mais l'agitation retomba et toute l'attention se détourna des combats lorsque Lévy descendit les marches, toujours aussi gracieuse que d'habitude. Aujourd'hui elle portait une robe bleue nuit qui ne laissait apparaitre qu'une épaule. Le tissu semblait être parsemé d'étoile. Il tenta de transformer le soupir amoureux en soupir agacé, mais, au vue du rictus de Lily, le résultat ne devait pas être très probant. La reine se dirigea vers lui à grandes enjambées. Elle n'eut pas le temps d'ouvrir la bouche, Gajeel se trouvait déjà des excuses.
- C'est juste une heure ou deux. Si je ne bouge pas, je vais devenir gros. Je retourne travailler bientôt, alors pas la peine de me faire des reproches.
- Je n'ai rien dit. Je comprends. Je suis juste venue vous apporter un encas.
Et effectivement, elle tenait une assiette avec une tartine épaisse recouverte de pâté de volaille.
- Pas la peine. J'ai pas faim.
- Je sais que vous n'avez pas pris de petit-déjeuner, vous devriez manger quand vous faites un effort physique.
- Merci, mais j'ai pas faim.
- Allons, vous risquez de vous évanouir sous ce soleil et le ventre vide.
- J'ai pas faim !
- MANGEZ !
Le sourire de la reine disparu instantanément et ses sourcils se froncèrent. Gajeel attrapa la tartine et il l'engloutit en trois grandes bouchées. Mais le visage de Lévy était toujours noir. Elle posa son regard sur la cape.
- Je vous prierais de traiter les cadeaux que l'on vous fait avec un peu plus de respect.
Sous les regards amusés de ses soldats, il ramassa la cape, cadeau de mariage des McGarden, la secoua énergiquement et la plia pour la déposer sur le muret.
- Contente ? demanda-t-il, la bouche encore pleine.
- Ravie.
Son sourire lumineux revint. Comme frappé par une force invisible, Gajeel recula d'un pas. Elle tourna les talons et adressa un signe de main aux spectateurs.
- Messieurs-dames, faites attention à vous également.
Et elle disparut vers les jardins, suivie de loin par Jet et Droy.
Alors qu'il fixait encore le chemin qu'elle avait emprunté, le rugissement de Lily le ramena à la réalité. Le grand chat noir se roulait dans la poussière en riant.
oO0Oo
Il était épuisé. Physiquement et émotionnellement. Cela faisait plusieurs jours qu'il n'avait pas dormis dans sa chambre, finissant les formalités concernant le transfert de ses soldats. Et Lévy ne faisait rien pour l'aider. Elle avait redoublé de petites attentions qui ne faisaient qu'une chose, naître un espoir. Un espoir qu'elle soit heureuse, et qu'elle l'accepte un peu plus.
Il avait besoin d'un bain…
Poussant à peine la porte de la salle d'eau, il se sentit déjà un peu mieux. Rien que la perspective de barboter dans une grande bassine d'eau chaude délassait les muscles de son dos. Mais en voyant la scène, il manqua de s'étouffer.
Lévy était là. Dans la bassine en bois. Endormie. Nue.
Il aurait voulu détourner le regard il aurait voulu partir. Il n'en fit rien. Il aurait voulu sauter dans l'eau chaude avec elle il aurait voulu toucher sa peau blanche. Il n'en fit rien également. Cette vision enchanteresse l'hypnotisait et le figeait sur place.
La reine dut sentir une présence car elle bougea et ouvrit les yeux. Son regard posé sur lui le sorti de sa transe et il se retourna pour lui laisser son intimité.
- Je suis désolé. Je ne savais pas que vous étiez là.
- Ce n'est rien. Je n'aurais pas du m'endormir moi-même.
- Je vais vous laisser.
- Non, non, voyons. Je suis restée trop longtemps.
Il l'entendit se lever et sortir de l'eau. Il l'imagina ruisselante, et sa respiration s'accéléra. Elle était sa femme après tout. S'il le voulait, il pouvait la prendre, là, tout de suite. Il secoua la tête et se maudit peu importe ce que le reste du monde pensait, il n'était pas un barbare !
- Vous avez besoin d'aide avec votre armure.
- Non, celle-ci n'est… pas…
Il s'était retourné et ses mots moururent dans sa gorge. Elle se tenait debout devant lui, dans une robe de chambre pas très bien attachée et la peau encore humide. Des gouttes d'eau tombaient de son visage pour rouler sur sa peau. Ses lèvres brillantes… sa main qui s'approchait de lui…
C'en était trop il devait partir ! Voulant reculer, il ne vit pas le tabouret derrière lui et trébucha. Dans un réflexe, Lévy accrocha ses doigts au col du plastron dans l'espoir un peu idiot de le retenir et le couple alla s'écraser sur le sol.
Gajeel se redressa inquiet. Les épaules de Lévy tremblaient dangereusement, mais finalement, elle releva le visage vers lui pour la voir éclater de rire. Il s'autorisa un sourire amusé face à la situation et à son hilarité.
- Mince, je saigne.
En effet, elle s'était coupée la lèvre en tombant sur lui et un peu de sang coulait sur son menton. Il eut un regard horrifié, la prit dans ses bras, et la serrant contre lui, ouvrit la porte d'un coup de pied. Il traversa le château en courant comme si elle allait mourir d'une minute à l'autre. Il entra dans le laboratoire de Polyussica, effrayé comme il ne l'avait jamais été.
Quand la doctoresse eut ausculté la reine, elle se tourna vers Gajeel et le frappa sur la tête avec une branche de gui.
- Tu m'as fait peur, espèce d'idiot ! Elle n'a rien. Regarde, le sang ne coule déjà plus. Pffff, on n'a pas idée de réagir comme ca pour des broutilles. La pauvre doit être morte de froid.
Face au visage gêné de Gajeel, Lévy cacha son rire derrière sa main et le remercia de s'inquiéter pour elle.
oO0Oo
Il ne retournait jamais dans sa chambre en plein milieu de la journée, mais cette fois-ci, exceptionnellement, il avait vraiment besoin de s'isoler. Une étrange nouvelle venait d'arriver jusqu'à eux et il avait peur des conséquences : le prince héritier Laxus Dreyar venait de mourir. Il voulait se reposer et essayer de fermer les yeux un petit peu.
Jamais il ne se serait attendu à voir Lévy à genoux, pleurant toutes les larmes de son corps. Gajeel se précipita à ses cotés et allait la prendre dans ses bras, lorsqu'il vit face à quoi elle pleurait.
Sa robe de mariée.
Il se laissa tomber par terre et l'écouta pleurer en silence pendant de longues minutes. Elle se reprit et essuya ses yeux du revers de la manche.
- Désolée. Je suis désolée. Ca va aller…
- Est-ce si dur d'être mon épouse ?
- Comment ?
- Tu es si malheureuse que ca avec moi ?
Lévy leva un regard étonné vers lui et scruta son visage, espérant y trouver une réponse. Et sans qu'il ne voie venir la chose, les lèvres de Lévy se posèrent sur les siennes. Ses mains glissèrent sur sa nuque et tout son corps se pressa contre le sien. Mais il ne sentait que la pression du baiser. Lévy l'embrassait… Lévy l'embrassait ! Elle l'embrassait comme une femme embrasse son mari. En goutant sa bouche, prenant son temps pour reconnaitre l'empreinte de ses lèvres sur les siennes, en faisant passer toutes ses émotions dans un seul baiser.
Lorsqu'elle s'éloigna, elle posa son front contre le sien et tous deux reprirent leur respiration. Lévy ne lui laissa pas le temps de réagir d'aucune façon elle se leva et lui tendit la main.
- Je dois te montrer quelque chose. Viens avec moi.
Comme un automate, il lui prit la main et se laissa guider à travers le château, puis les jardins. Ils arrivèrent dans un endroit qu'il ne connaissait pas. Une petite mare entourée de fleurs et de papillons offrait un habitat charmant à quelques poissons.
Lévy lâcha seulement sa main et s'approcha d'une pierre gravée : « Amalia McGarden ».
- Je te présente Amalia. Ma sœur ainée et ta fiancée.
Gajeel fronça les sourcils. Amalia… Oui, Lily lui avait bien parlé de cette femme. Il avait cru à une erreur.
- Amalia était parfaite. Elle était souriante, forte, intelligente. Elle savait parler plusieurs langues et pouvait faire de l'escrime aussi bien que de la peinture. Elle aurait été parfaite pour toi. La parfaite reine, la parfaite épouse.
Les larmes réapparaissaient dans ses yeux et Gajeel avait peur de comprendre.
- Mais il y a eut un accident… Et la veille de son mariage… elle est morte. Pour conserver l'honneur de la famille, j'ai pris sa place… Je fais du mieux que je peux, vraiment. Tu dois me croire… mais c'est dur… Tout ca… cette vie, ce château, ce mariage, cette robe… ce roi… Tout lui était destiné.
Elle s'essuya le nez dans sa manche, fit face au roi qui n'avait pas encore ouvert la bouche et lui prit les mains.
- Je sais que je ne suis pas celle que tu attendais et que je ne serais jamais Amalia. Et parfois, elle me manque tellement. Mais je suis heureuse à tes cotés. Même si tu ne me considères pas comme ta femme, même si tu ne me regardes jamais dans les yeux. Je suis heureuse.
Et Gajeel plongea son regard rouge dans celui marron de la jeune femme. Pendant quelques secondes seulement. Ensuite il la prit dans ses bras et l'écrasa contre sa poitrine. Tous ces espoirs, ces rêves, ces sentiments versés dans cette embrassade.
- Avec ta réaction lors de notre mariage, et même après… Je croyais que je te faisais peur. Comment aurais-je pu te toucher sachant cela ?
Lévy rit entre deux sanglots et passa ses bras autour de lui.
- Moi ? Peur de toi ? Tu es l'homme le plus gentil que je n'ai jamais rencontré.
Il la relâcha un peu et baissa les yeux vers elle. Délicatement, il posa ses lèvres sur sa bouche. Ce n'était pas réellement un baiser. Il les effleura seulement comme s'il avait trop peur pour aller plus loin.
- En ce qui concerna ta sœur, je suis navré de ce qu'il lui est arrivé, mais tu as tord. Elle n'aurait jamais fait une meilleure reine que toi. En moins d'un mois, tu as conquis tout ce pays, juste par ton sourire, ta parole et ta gentillesse. Personne ne pourrait rêver d'une meilleure reine. Ou d'une meilleure épouse.
Pour la première fois, il répondit à son sourire solaire par un sourire aussi lumineux. Lévy se mit sur la pointe des pieds et le força à se pencher vers elle pour l'embrasser de nouveau. Cette fois-ci, la passion refoulée pris le dessus sur la retenue. Gajeel découvrant le visage de sa reine pour la première fois, mordillant sa lèvre, inhalant son odeur jusqu'à ce qu'il ne puisse plus respirer.
- Lévy… Il y a quelque chose que je dois faire. Tu dois me donner quelques jours.
- Mais…
- Tu me fais confiance ?
- D'accord. Quelques jours.
oO0Oo
Cela faisait presque une semaine et la relation au sein du couple royal semblait être au plus mal. Lévy passait ses journées et ses nuits seule Gajeel semblait l'éviter depuis leur… conversation dans les jardins. Elle essayait de conserver sa bonne humeur et de rester positive. Il n'avait pas été obligé de lui dire toutes ses jolies choses, ou même de lui retourner ses baisers. Il l'avait fait de lui-même. Cela voulait dire quelque chose !
Et s'il regrettait ?
Non, elle lui faisait confiance. Il avait dit quelques jours.
Elle laissa échapper un long sourire et Sue la rappela à l'ordre – si elle bougeait trop, elle ne pourrait pas l'habiller correctement. Elle se redressa et s'excusa. Mais ce n'était pas vraiment de sa faute. Elle voulait vraiment le voir. Depuis leur mariage, elle voyait enfin un espoir pour eux deux. Il avait été tellement distant malgré toutes ses avances. Est-ce qu'il pensait qu'elle dormait réellement dans ces tenues révélatrices et inconfortables ? Est-ce qu'il croyait que c'était une coïncidence qu'elle se retrouve dans la salle d'eau en même temps que lui ?
- Vous êtes parfaite.
Sue semblait vraiment fière de son travail et elle se tourna vers le miroir.
Elle dut cligner plusieurs fois des yeux pour être sure que la personne qu'elle voyait était bien elle. Elle portait une nouvelle robe, la plus belle qu'elle ait jamais vue. Le tissu semblait fait d'argent liquide et coulait élégamment sur son corps. Les manches longues s'élargissaient au coude et recouvraient ses doigts. Le tissu ne couvrait pas ses épaules permettant à la parure d'ambre de briller de mille feux. Assortie à son cou, une longue ceinture de la même matière précieuse entourait ses hanches et tombait jusqu'à ses pieds. Faisant un tour sur elle-même, elle remarqua enfin que l'intérieur de la robe était doublé de soie orange.
Lévy interrogea Sue du regard qui fit semblant de ne pas le remarquer. Elle la guida à l'extérieur et à travers tout le palais sans dire un seul mot malgré les questions pressantes de la reine. Elles arrivèrent devant de lourdes portes et Lévy les reconnu pour être celle donnant sur la salle de réception. Elle avait passé d'interminables minutes à pleurer la mort de sa sœur avant de marcher vers son futur époux.
Sue lui mit dans la main un petit bouquet de fleurs. Il y avait plusieurs genres de fleurs mais elles étaient toute orange, mêlé à des feuilles d'argent. Elle frappa deux coups sur les portes et elles s'ouvrirent sans bruit.
La salle était pleine à craquer et tous les regards étaient tournés vers elle. Elle reconnut les soldats du château, les quelques nobles auxquels elle avait rendu visite, et même des paysans qu'elle avait rencontré. Les murs et les plafonds étaient décorés de banderoles argent et ambre. Face à elle, au fond de la salle, les armoiries des McGarden avaient pris la place de celles des Heartfilia, aux cotés de celles des Redfox. Et juste en dessous, Gajeel l'attendait en souriant. Il était toujours habillé de noir et de métal, mais il semblait briller dans les rayons du soleil. Avec sa couronne sur son front, il était impérial.
- Allez-y.
Sue la poussa dans le dos pour la forcer à faire les premiers pas. Lévy ne comprenait pas ce qu'il se passait. Ils étaient déjà marier alors à quoi tout cela rimait ? Mais elle voulait jouer le jeu, alors elle accrocha les yeux de Gajeel et avança vers lui. Elle dut se faire violence pour ne pas courir et se mordit la lèvre lorsqu'il vint à sa rencontre.
Les mains entrelacées, le couple se positionna une nouvelle fois devant le chambellan qui recommença son discours, à la seule différence que cette fois-ci, Gajeel ne lâcha pas sa main comme le voulait la tradition. La reine était de plus en plus confuse.
- Reine Lévy McGarden, jurez-vous d'honorer votre roi, de le protéger, de servir le royaume et de mettre au monde un héritier ?
- Je le jure… encore une fois.
L'emprise de Gajeel sur sa main se fit plus forte et il prit une grande inspiration lorsque le chambellan se tourna vers lui.
- Roi Gajeel Redfox, jurez-vous d'honorer votre reine, de la protéger, de servir le royaume et de mettre au monde un héritier ?
- Je le jure.
Ce n'était pas les vœux habituels… Il lui retournait les même mots qu'elle venait de prononcer. Il l'épousait pour ce qu'elle était et pas pour des alliances militaires et commerciales. Alors tout ca, cette robe, ces invités, ces décorations… ce roi… c'était pour elle. Uniquement pour elle.
Elle avait raison. L'homme le plus gentil qu'elle connaisse.
Gajeel se tourna vers elle, lâcha sa main et prit un coffret des mains de Lily. Elle y découvrit une couronne similaire à la sienne, plus fine et plus ouvragée. Elle remarqua enfin les mains de Gajeel : les entailles sur ses doigts, les brulures sur ses paumes… Le roi prit l'objet de métal et le positionna au-dessus de sa tête.
- Lévy McGarden. Par cette couronne, vous devenez la reine de ce royaume. Par cette couronne, vous devenez la protectrice de son peuple. Par cette couronne, vous devenez la mère de mes enfants. Par cette couronne, vous devenez la femme de ma vie.
Quand il posa la couronne de métal sur son front, il était rouge comme une tomate et jeta un regard meurtrier à Lily qui ricanait dans son dos. Ce n'était clairement pas dans ses habitudes de faire de grandes déclarations d'amour, publiquement qui plus est. Le chambellan les déclara mariés, une seconde fois, mais Lévy n'entendit pas les applaudissements tonitruants. Elle réfléchissait.
C'était uniquement la matinée. Il y avait une centaine d'invité avec lesquelles elle devra faire la conversation, puis il y aura surement un banquet interminable. Et avec la chance qu'elle avait, Gajeel aurait quelque chose à faire jusque tard dans la nuit. Au mieux, elle allait devoir attendre la tombée de la nuit. Elle pouvait bien patienter jusque là…
Gajeel était en bas de la petite estrade et l'attendait, la main tendue, en souriant.
Non. Trop long.
Elle se jeta dans ses bras et écrasa sa bouche contre la sienne. Elle brisait toutes les règles de la bienséance, mais elle n'en avait rien à faire. Elle sentit le visage de son mari chauffer sous son toucher et elle entendit toute la salle exploser, de rires, d'applaudissements, d'encouragements. Et quand il referma les bras sur elle, elle oublia tout le reste et se concentra uniquement sur ses lèvres.
oO0Oo
