Hello, et merci de vous être arrêté pour lire cette fic. Je reviens après quelques mois d'absence avec une nouvelle histoire sur les héritiers de Durin. Bien qu'ayant lu le livre, cette fanfiction s'inspire directement des éléments du film, autant pour l'apparence des personnages que pour le déroulement de l'histoire et la description des lieux.
Cette fanfiction se divisera en trois chapitres et contient des SPOILERS sur toute l'histoire du Hobbit. Je vous conseille donc de ne pas la lire si vous n'avez pas lu le livre ou vu les trois films. L'histoire se déroule dans un univers alternatif où auraient survécu les héritiers de Durin après la Bataille des Cinq Armées (comme le précise le résumé). Comme l'histoire se déroule jusqu'à l'époque du Seigneur des Anneaux, certains évènements de l'intrigue de la trilogie sont mentionnés, donc encore, attention aux SPOILERS si vous ne connaissez pas l'histoire de Frodon et compagnie.
Pardonnez-moi si vous voyez des fautes de frappe ou d'orthographe. J'ai relu plusieurs fois, mais il y'en a toujours qui m'échappent.
Disclaimer: Le Hobbit ne m'appartient pas.
Dans une autre vie
Thorin
2941
Une aube étonnamment claire, fraîche et pure succédait à une nuit plus noire que les sombres cavernes de La Moria. Les premiers rayons d'un soleil automnal teintèrent de rose la cime de la Montagne Solitaire, bastion de roche et de glace qui s'élevait seule dans une plaine grise et infertile, encore morne sous l'emprise du dragon. Cela était du passé. Smaug-le-Doré venait de rencontrer sa funeste fin aux derniers rayons de la lune, abattu par nul autre que le descendant de l'ancien Seigneur de Dale.
Si les Hommes célébraient depuis le milieu de la nuit cette improbable victoire, les Nains, les Elfes, les Orcs et les Gobelins s'étaient livrés bataille jusqu'à ce que pointe l'astre du jour. Thorin Écu-de-Chêne, fils de Thraïn fils de Thror, Roi sous la Montagne, sentait le sang sur sa langue et le voyait dégouliner goutte après goutte devant ses yeux clairs, qu'il rivait vers la silhouette inerte de celui qui fut sans aucun doute le plus redoutable ennemi de la lignée de Durin. Azog le Profanateur était tombé sous sa lame.
Épuisé par la lutte qui avait manqué par plusieurs occasions de lui coûter la vie, le Roi tomba à genoux sur la terre rocailleuse que l'hiver avait recouvert de glace. Il s'appuya lourdement sur le pommeau d'Orcrist, sa lame d'ordinaire d'une blancheur étincelante souillée par le sang rouge de l'orc pâle. D'épais nuages de bué s'échappaient de ses lèvres à chacun de ses souffles profonds, encore haletants de par l'adrénaline qui avait pulsé dans ses artères. Le combat était terminé. Thorin avait vaincu. Erebor était enfin revenu à son véritable successeur.
Le cri des Aigles tira le grand Nain de sa léthargie et de sa stupeur, encore incapable de pleinement réaliser qu'il venait de reconquérir ce trône si chèrement convoité depuis tant d'années. La silhouette majestueuse des grands oiseaux se découpait dans la lumière du jour tandis qu'il survolait un champ de batailles où les corps de Nains, d'Elfes, d'Orcs et de Gobelins se mêlaient les uns aux autres, indistincts et étrangement unis dans la mort. En posant à son tour ses yeux sur le carnage qu'avait été cette ultime bataille, celle-là même qui clôturerait une guerre que les Nains d'Erebor et leurs cousins des Monts de Fer se livraient depuis de longues décennies, Thorin sentit soudain l'horreur et la bile lui monter à la gorge.
– Mahal…, murmura-t-il.
Péniblement, il se redressa sur ses pieds en s'appuyant lourdement contre son épée pour mieux examiner l'étendue du massacre. Du haut du promontoire rocheux où il avait livré bataille contre Azog, il avait une vue panoramique du plateau où avait eu lieu l'affrontement. Il n'y avait que des corps à perte de vue, parmi lesquelles erraient des silhouettes solitaires. Des survivants, encore hagards d'être en vie, recherchaient vainement des visages familiers, de frères d'arme ou de cousins qui auraient par miracle survécu.
Les pensées de Thorin allèrent aussitôt à sa Compagnie. Les douze Nains qui l'avaient loyalement et courageusement suivi dans cette quête, ainsi que le cher petit Hobbit. Où était Maître Sacquet, pensa le Roi en sentant la panique lui étreindre la poitrine. Bilbo était un cambrioleur, non un combattant, aussi brave pouvait-il se montrer. Avait-il survécu à cette guerre sanglante ? Et Fili ? Kili ?
– Thorin !
La voix claire, chantante, et entre mille reconnaissable, claqua dans l'air comme un coup de clairon. Thorin pivota vivement sur ses talons, Orcrist au poing, son regard bleu glace tourné vers les silhouettes qui se découpaient de l'autre côté de la plaine. Bilbo, toujours vêtu de son épais manteau de fourrure donné par Bard, agitait le bras avec force. Malgré la distance, Thorin discerna clairement le sourire radieux qui éclairait le visage rond du Hobbit, l'étincelle soulagée brillant dans ses yeux. Á côté du cambrioleur avançait une silhouette surmontée d'une épaisse chevelure blonde désordonnée. Fili avançait en boitillant, s'aidant de l'épaule secourable de Maître Sacquet.
La tension quitta aussitôt le corps de Thorin en voyant son ami et son neveu sain et sauf. Ses larges épaules s'affaissèrent, cédant à l'épuisement total, physique comme moral, et il se courba en avant, posant son front contre le pommeau de son épée. Les yeux vides d'Azog rencontrèrent les siens. Thorin plongea son regard dans les iris délavés de l'orc.
C'en était fini du Profanateur. C'en était fini de ce cauchemar éveillé. Erebor était revenu aux siens. La lignée de Durin avait survécu.
Le Roi se redressa juste à l'instant où Bilbo et Fili le rejoignirent. Les deux lui tombèrent littéralement dans les bras et Thorin, abandonnant momentanément Orcrist qui tomba au sol en un fracas métallique, enferma le Nain et le Hobbit dans une étreinte d'ours. Il sentait les mèches frisées de Bilbo contre sa barbe, celles imbibées de sang et de boue de Fili contre sa tempe. La respiration de son neveu était rauque dans son oreille, mais Thorin se rassura de sentir sa poitrine s'élever contre la sienne.
– Par les Valars, Thorin, vous êtes en vie ! jubila Bilbo en se haussant sur la pointe des pieds pour inspecter le visage du Roi Nain.
– Oui, je suis en vie, soupira le monarque d'une voix éraillée, un sourire exténué aux lèvres. Et vous également.
– Oui, oui ! Et nous avons gagné, Thorin ! Les armées ennemies ont été terrassées par les Nains et les Elfes !
– Les Orcs et Gobelins survivants ont détalé comme des lapins en voyant arriver les Aigles, ajouta Fili d'une voix fatiguée.
Thorin porta son attention à son héritier. Fili était là, debout et bien vivant devant lui, mais tout comme son oncle, il n'était pas complètement indemne. Son bras droit était plié dans un angle étrange et ses épaisses tresses blondes étaient littéralement gorgées de sang. L'aîné sentit une vague d'inquiétude l'engloutir lorsqu'il constata qu'une rigole de liquide rouge coulait toujours le long de la mâchoire de Fili. Suivant son regard, le jeune prince porta une main sur le côté droit de son visage, et, soulevant un pan de sa chevelure d'or, révéla un trou ensanglanté là où auparavant se trouvait une oreille.
Le cœur de Thorin se serra douloureusement dans sa poitrine. Fili lui offrit un sourire sans joie.
– Une blessure de guerre comme une autre. Le Gobelin qui me l'a arrachée a vu sa tête répugnante se détacher de ses épaules en guise de réponse.
– Il faudra vous faire soigner par Oïn, déclara le Hobbit dont le timbre de la voix trahissait l'inquiétude.
Fili hocha distraitement la tête. Ses yeux, bleus comme ceux de Thorin, se plongèrent dans le regard de son oncle. Thorin vit dans les prunelles sérieuses, mais habituellement naïves de son neveu, une nouvelle étincelle, une nouvelle lumière qui semblait ternir le regard autrefois enfantin de Fili. Ce n'était plus dans les yeux d'un enfant qu'il regardait, il le réalisait, mais dans ceux d'un guerrier. Fili n'était plus un jeune Nain qui avait grandi au sein des remparts sécurisants des Montagnes Bleues. C'était à présent un Prince de Durin qui s'était battu pour récupérer le royaume perdu par son peuple, qui avait vu la mort et le sang.
La large main du Roi sous la Montagne se glissa dans les cheveux rouge et or de son neveu et il appuya son front contre celui de Fili. La proximité de son neveu, de son héritier, de son sang le rassurait, l'apaisait. Plus que les cris de victoire des siens, que les réjouissances des Hommes de Dale, la simple présence de Fili lui instaurait ce sentiment de sécurité qu'il avait retrouvé quand il avait pénétré pour la première fois depuis des années dans les entrailles abandonnées d'Erebor, quelques jours plus tôt.
– Et… Et Kili ? balbutia-t-il soudainement en s'écartant de Fili. Ou est ton frère ?
La mine impuissante de Bilbo lui glaça les os. Mais la main de Fili se referma sur son bras, attirant son attention en direction d'une haute silhouette élancée qui était apparue au loin. Plus grande et plus fine que les trois amis, Thorin reconnu la longue chevelure rousse de la Femme Elfe qu'il avait vu à Vertbois. Elle faisait partie de l'escouade qui les avait capturés dans la forêt. Elle avançait d'un pas vif vers eux, mais sa démarche d'ordinaire aérienne était ralentie et alourdie par le fardeau qu'elle portait avec précaution dans ses bras.
Tout sentiment de mépris et de colère envers les Elfes s'évanouit en Thorin dès qu'il reconnut la chevelure sale et emmêlée de Kili. Il se précipita vers la guerrière qui baissa vers lui des yeux résignés. Dans ses bras, Kili était complètement inerte. Á l'image de son frère, son torse était baigné de sang.
– Il est vivant, dit la Femme Elfe en jetant un bref regard au visage blême du Nain blessé. Une lance d'Orc s'est empalée dans sa poitrine, mais heureusement, le prince Legolas est parvenu à refermer la blessure avant qu'elle ne devienne mortelle.
Thorin avait déjà tendu les bras. L'Elfe n'hésita qu'une seule seconde avant de lui passer délicatement son neveu. Aidé par Fili et Bilbo, Thorin déposa le jeune prince au sol, posa une main contre son front qu'il trouva étrangement frais. Un petit souffle d'air battait son poignet. Thorin resta un long moment à observer la poitrine de son neveu, qui s'élevait et s'abaissait à un rythme régulier, tranquille. Kili était vivant.
– Par Mahal…, souffla-t-il encore.
Il exhala complètement. Son menton tomba contre sa poitrine, il ferma les yeux étroitement en sentant la brûlure humide des larmes de soulagement qui s'y accumulaient. La main de Bilbo tapota son épaule, le petit Hobbit riait de bonheur de voir les trois fils de Durin en vie.
Sur sa droite, il entendit Fili se lever brutalement. Il redressa la tête, juste à temps pour voir l'Elfe faire volte-face et s'éloigner à grands pas des trois Nains. Fili fit quelques pas dans sa direction.
– Tauriel !
La Femme Elfe se figea à l'appel de son niveau, lança un regard par-dessus son épaule. Ses yeux étaient emplis d'interrogation, mais aussi de ce qui ressemblait à de l'accablement et de l'amertume.
– …Merci, balbutia Fili. Merci pour mon frère. Il… Il tient beaucoup à vous.
L'Elfe, Tauriel, resta impassible. Elle fixa Fili, puis son regard se posa sur la forme inerte de Kili, allongé dans l'étreinte protectrice formée par son oncle et Bilbo. Un voile tomba sur ses yeux, ses épaules s'affaissèrent.
– Remerciez le prince Legolas, fils de Durin. C'est grâce à lui si votre frère respire encore.
Il y avait, dans sa voix, une teinte sinistre qui sonnait comme un glas funèbre. Sans un mot de plus, elle fit volte-face et s'éloigna rapidement et disparut à l'horizon.
Le regard de Thorin retomba sur Kili, sur Bilbo, sur Fili qui s'agenouilla à côté d'eux. Puis ses yeux se levèrent vers le ciel, vers l'aube radieuse de ce froid et de ce pur matin d'hiver. Une grive survolait les plateaux gris en direction du majestueux sommet de la Montagne Solitaire.
Erebor, Royaume sous la Montagne, héritage de la lignée de Durin, était revenue à ses véritables successeurs.
Thorin sourit à pleines dents.
Une nouvelle ère commençait.
OOO
Étendu sur le sol glacé, Thorin ne pouvait que fixer le ciel que l'aube naissante nimbait d'une lumière blanche et pure. Il pensa à Erebor, sa fière cité, à son père et son grand-père que la folie avait mené au trépas. Il aurait tant voulu revoir la grandeur passée de son royaume, reconquérir le trône qui revenait à la digne lignée de Durin.
Thorin, Roi sous la Montagne, mourut à l'aube d'un jour nouveau, sans pouvoir entendre le cri des Grands Aigles, sans pouvoir sentir la brûlure des larmes du cher petit Hobbit qui le serrait dans ses bras.
Merci d'avoir pris le temps de lire cette fic. Je publierai le prochain chapitre demain. J'en profite pour vous souhaiter (un peu en retard) une bonne année 2016.
