L'air lui même semblait arborer les couleurs flamboyantes de l'automne, rouge, orange et or. Camaïeu de cramoisi et de soleil, méli-mélo de chaleur et de lumière.
Par réflexe, je me contracte et hume doucement l'odeur doucereuse du manteau que je porte. Une odeur de sucre automnal, de feuille morte, de miel de fleurs des champs et de sang chaud.
Un souvenir d'un amour d'adolescente. Cloud fut mon amour de jeunesse, un peu froid, distant, frais, et lger. Lui celui de mon adolescence, plus chaud, plus sensuel, passionnel. Et pour le reste ? Le temps me le dira. J'aurai aimé qu'il soit l'amour de ma vie.
De Cloud, j'ai gardé l'amitié enfantine, nous sommes toujours un réconfort, l'un pour l'autre. Des appuies, l'amour qu'on a pus se porter ne semble pas avoir eu impact sur nos échanges.
De lui, j'ai préservé une image, un portrait, et ce long manteau en cuir rouge, dans lequel j'aime me blottir encore et toujours. Son odeur, la réflexion de ma chaleur par le cuir me réconforte autrement qu'un ami, comme le ferait un tendre amour.
Les feuilles tombent doucement, long sanglot, pour un amour que j'ai perdu. J'aime l'automne, l'odeur de la nature qui souffre, avant d'expirer, pour une durée détermine. Mais la voix de l'instinct fera renaitre la vie, au réveil de la nature.
Pour l'instant je regarde danser les délicieux débris de la nature, le soleil se couche, rendant la scène tout simplement parfaite. Tout est dans des tons chauds, toujours autour du roux chaud, loin des teintes froides du noir et du blanc. Proche de mon amour, loin de mon ami.
Une petite brise soulève mes cheveux noirs, les effluves automnaux m'enivrent. Me faisant plisser les yeux, mes pupilles rouges bordeaux ne peuvent plus se fondre dans le paysage si magnifique.
A chaque automne je m'éloigne un peu de ma jeunesse, un peu de Cloud, et chaque automne me rappelle cet instant béni où j'ai conclu que mon amour d'enfance avait décliné malheureusement, et où est né mon autre amour, un amour presque éternel, dans mon cœur, même si il n'est plus partagé.
Sa silhouette rouge et rousse est encore marquée au fer rouge dans mon esprit, il fut une passion écarlate, brulante.
Dans mon chemin pour rentré au village, à l'auberge je croise un étang qui reflète le bleu marbré de rose du ciel, quelle belle saison. Le rose de mes draps du temps. Et celui qui colore mes joues, et mordu par le léger froid humide, et échaudé par les souvenirs de l'époque, quelle âge avais-je ? Quatorze ans ? Peut être quinze. Et neuf ans plus tard, tous les souvenirs sont ancrés dans ma mémoire, toujours aussi net, aussi indispensable.
Je me souvins de la lumière de la lune, bleuté et légère, sur sa peau satin, sur ses cheveux roux, sur mes draps rose indien et rose tendre.
Dans les goutes d'humidité, qui perle sur les herbes vert tendre, le reflet est bleu clair, bleu profond, bleu azur ces yeux. Empli de tant de sentiment, amour, désir, frustration, peur, et même jalousie pas mon encontre, il a toujours été jaloux d'un de ces camardes... J'aime un soldat... Pas de j'aimais, je l'aime toujours.
Mon amour pour lui me transfigure l'automne. Et l'automne, c'est le printemps de l'hiver
Je m'emmitoufle dans le manteau, son odeur imprègne toujours le cuir. Ensorcelante.
Je reprends ma marche, les arbres perdent leurs feuilles, et au bord du chemin, inattendu, une fleur d'un rose nacré presque chair. Ces lèvres. Je cueille la fleur, ne pouvant m'empêcher de presser amoureusement mes lèvres sur les pétales si doux.
La fleur est fragile, délicate, ses courbes sont harmonieuses, et sa présence dans le frais en est poétique.
L'automne est vraiment sa saison.
J'arrive au village, le col relevait sur ma joue, et la fleur sur les lèvres. Son souvenir me surprend toujours par son intensité.
Au village, le ciel est bleu nuit, le pavé blanc et les murs gris, les couleurs chaude, ses couleurs me manquent.
Il me manque.
