Chapitre 1
La jeune fille pénétra en un coup de vent dans la salle, la parcourut d'un regard circulaire, et sautilla en titubant jusqu'à Gypsy en s'appuyant sur elle pour freiner une éventuelle chute. Elle ne sembla pas s'en soucier et se retourna vers elle, les yeux plus rieurs que jamais.
Gypsy pouffa de rire, en voyant le regard ébahi de Irys qui venait d'apercevoir le blond et séducteur Malefoy. Elle dit:
"Irys, Irys, Irys... mon petit scarabée... Tu vois bien qu'il ne t'as jamais regardée? C'est..."
(Elle releva la tête d'un geste fort évocateur)
"...moi, bien entendu, qu'il convoite..."
Irys la regarda avec haine, mépris, perplexité. Elle s'écria: "Mais il est à MOI!" .
Axelle, nonchalante, s'approcha de ses deux amies de toujours… Enfin, toujours est un bien grand mot, mais ne nous attardons pas sur les détails du temps et de l'espace, nous avons mieux à faire. Elle ne put s'empêcher d'ajouter
« Ouais, Gypsy a raison, il ne te regardera jamais. Par contre, je ne crois pas qu'il la regarde non plus. À mon avis, ce bellâtre de Poudlard est homo, tout simplement.»
Les deux autres la regardèrent avec tout le mépris du monde.
Et Axelle, elle se contenta de faire un habituel sourire en coin qu'on pouvait facilement qualifier de sarcastique, ou même de narquois. Irys s'en alla en gambadant, persuadée du contraire.
Gypsy fit une moue boudeuse, puis posa sur Drago un regard plein d'amertume.
« Il ne peut pas être homo » espéra-t-elle de toutes ses forces et de tout son cœur.
Du même élan de passion inutile, elle se jeta sur lui dans un mouvement théâtral.
Lui, en bon Malefoy, la regarda se pendouiller à lui telle un ver luisant, avec tout le dédain dont il avait hérité de sa noble et très ancienne famille.
Cependant, il dû s'avouer à lui-même qu'il appréciait ce geste adorateur.
Mais il resta impassible, comme à son habitude.
Il savoura ce moment comme on savoure une bouchée de crème glacée au chocolat et la repoussa doucement en disant d'un ton méprisant:
"Oh, mais n'est-ce pas la petite sang de bourbe Kaosu? Une de plus s'accrochant à moi désespérément ! Pourquoi ne vas-tu pas voir Potter, mmh? Quoique... c'est vrai, tu es une Serpentard. J'oubliais. Je peux presque te considérer comme mon égale..."
« Presque ». Ce mot résonna dans la tête de cette pauvre et pathétique Gypsy. Pathétique ? Oui, c'était en effet l'opinion générale du moment dans la salle commune des Serpentard. Chacun dans cette pièce respectait Drago Malefoy, certains par peur, d'autre par estime.
Axelle la regarda simplement d'un air désolé. Elle était l'une des seules à ne pas craquer pour ce Malefoy. Certes, elle était une sang de bourbe et ne pouvait pas tout à fait comprendre « l'effet Malefoy » qui animait ces blondasses de nobles familles. Mais elle considérait qu'elle était simplement trop peu superficielle pour vénérer le sol sur lequel IL marchait. Ou peut-être était-elle simplement trop elle-même pour faire comme les autres.
Gypsy se dit que Drago ne s'en sortirait pas aussi facilement.
"Endoloris!", dit-elle d'une voix moqueuse. Elle le regarda s'effondrer dans un bruit mat sur le sol dallé. Elle sourit, d'un sourire cruel, dépourvu de joie. Il se tordait de douleur, en perdant le souffle tant la souffrance était vive. Gypsy s'agenouilla à son côté et lui dit d'une voix douce:
"Malefoy, je voudrais que tu saches une chose au moins à mon sujet… je ne suis pas faible et je te considères comme mon égal. Et te voir souffrir comme ça, à mes pieds, m'est extrêmement satisfaisant… Si tu souhaites que ce supplice cesse, excuse-toi à moi, à toutes les autres filles que tu as blessées et… »
Elle sourit franchement :
« À Potter, aussi. Je veux que ce soit toi qui soit humilié ce soir. »
La réponse ne se fit pas attendre.
« D'accord » laissèrent échapper les lèvres de Malefoy, probablement malgré lui. Tous les gens présents dans la salle se mirent à chuchoter. Comment Drago Malefoy pouvait-il se laisser faire par cette sang de bourbe ? Gypsy laissa quelques longs instants s'écouler avant de lever le sortilège. Le temps à ce petit prétentieux de souffrir sans mourir.
Quand il se releva, le corps entier secoué de spasmes encore douloureux, il murmura quelque chose qui ressemblait à un juron. Gypsy lui dit, un rictus malveillant lui donnant un air de sadique mégalomane (n'était-ce pas le cas, en vérité ?) accroché aux lèvres :
« Tu souffres bien, Malefoy. »
Il la regarda d'un air ébahi. Irys arriva, gambadant encore :
« Qu'est-ce qu'il y a, Gypsy ? Tu lui as parlé ! Chanceuse ! »
Axelle haussa un sourcil et Gypsy la regarda, extrêmement amusée.
« On peut dire ça comme ça. Pas vrai, mon chou ? », dit-elle en posant une main sur l'épaule de Drago.
Alors, elle vit dans ses yeux toute la rage accumulée. Et, de la rage, il y en avait beaucoup. Voir même énormément. Irys, comprenant peu à peu la situation, se précipita sur son Drago adoré. Elle lui pris un bras, voulant l'aider à se relever, mais il se drapa dans ce qui lui restait de dignité et lui cracha au visage :
« Ne me touche pas ! »
Irys lâcha son bras puis, comme paralysée, resta là, comme une abrutie.
Gypsy lui dit, rassurante :
« Irys, fais-toi en pas… Notre Dragounet chéri… »
Ce fut Axelle qui continua, hilare :
« Ouais, ce blondinet rebelle n'est pas vraiment dans son assiette… C'est que Gypsy lui a jeté un sortilège Doloris et l'a forcé à s'excuser à tout le monde… »
Drago devint cramoisi, baissa les yeux, essayant de se faire le plus discret possible.
« D'ailleurs, il ne l'a pas encore fait… Tu as de la chance, scarab', tu vas pouvoir assister au spectacle ! », reprit-elle, joyeuse.
Irys, bien que boudeuse à cause du fait qu'on ait fait du mal à ce jeune homme blond qu'elle appelait jalousement « son précieux » - ou bien était-ce parce qu'elle avait raté son précieux en train de souffrir à l'agonie ? Qui sait… -, accepta en elle-même et de bonne grâce de se réjouir du « spectacle », comme l'appelait son amie. Après tout, Drago, même s'il était – pour elle – le dieu des dieux, elle ne pourrait probablement pas s'empêcher de se délecter de la représentation d'excuses qu'il offrirait dans quelques instants.
Gypsy épousseta la poussière sur les habits de Drago d'un revers de main, lui replaça une mèche rebelle tombée sur son front blême.
« Alors, Malefoy …», dit-elle solennellement en appuyant sur le dernier mot.
« …tu es prêt ? Nous attendons tous, tu vois… » On entendit quelques ricanements dans l'audience puis Axelle ajouta, narquoise :
« Mais, ma petite naine… »
« Oui, crabinette en sucre ? »
« Il pourrait s'agenouiller devant toi… »
« Qu'il se prosterne ! », clama une voix dans l'assemblée.
Elle arbora un air pensif puis se tourna vers Drago, qui semblait vouloir disparaître, ayant perdu toute trace de sarcasme autant dans les yeux que dans l'attitude...
Depuis sept longues années… Bon pas tout à fait… Disons 6,5 longues années, Gypsy avait persuadé toutes personnes se trouvant sur son chemin que, même en étant une sang de bourbe, elle pouvait être ce qu'on se plaisait à appeler « une pure Serpentard ». Accompagnée de Axelle, avec qui elle avait grandi, et Irys, rencontrée à Poudlard même, elles avaient fait leurs preuves. Et, alors qu'à l'époque de leur première année, on les avait quasiment traînées dans la boue pour avoir fait le sacrilège d'être placées dans cette maison alors qu'elles n'avaient même pas un sang pur, elles étaient aujourd'hui respectées. Pas autant que Malefoy. Lui, c'était un cas particulier, mais disons juste que plus personne n'osait dire quoi que ce soit de désagréable à leur égard sous peine de souffrir d'atroces tourments. Il y avait cependant ce Drago, qui se permettait tout, et qui osait encore les insulter ouvertement. C'était la première fois qu'il en payait réellement le prix. Et c'était maintenant qu'il allait le faire, qu'il allait enfin payer ce fameux prix fort que tout bon Serpentard redoutait. Ça allait être beau à voir.
Elle dit d'un ton presque neutre qui cachait néanmoins une pointe de sarcasme quelque chose qui tétanisa d'horreur le pauvre Malefoy.
« C'est une excellente idée… » Drago, les yeux humides, recula de quelques pas, puis sortit sa baguette dans un réflexe purement instinctif. Gypsy n'esquissa aucun geste, mais lui parla tellement froidement qu'il en frissonna :
« Tu t'essaies encore ? » Il bégaya quelque chose d'incompréhensible puis, d'une voix soudain autoritaire, aboya :
« Crabbe ! Goyle ! Amenez-vous, bande de… » Il n'eut pas le temps de finir tant ils s'approchèrent rapidement de lui. Irys sourit :
« Tu as besoin de tes gardes du corps, mon préc… euh, Malefoy ? » Elle rougit aussitôt, étonnée de son propre cran. On entendit Goyle grogner et Crabbe renifler. Drago leur jeta un regard dégoûté. Axelle prit la parole :
« De toute manière, Gypsy peut s'occuper de Malefoy. Je prend Crabbe et toi Goyle, okay Irys ? » Elle acquiesça d'un signe de tête. Ces derniers reculèrent, apeurés. Finalement, avant même que l'une d'elles ait pu sortir sa baguette, ils étaient déjà retournés dans les rangs, parmi l'audience. Gypsy eut un demi-sourire.
« Quel exemple de courage ! », s'exclama-t-elle. Elle se retourna de plus belle vers Drago qui avait perdu –encore-- de sa contenance. « Et toi, tu t'obstines ou tu te mets à mes pieds devant tous les Serpentards ici présents ? » À la surprise générale, il jeta sa baguette par terre et se mit à genoux devant elle, qui jubilait littéralement.
Et il y avait de quoi jubiler ! Un Malefoy – et probablement l'un des plus orgueilleux de toute la lignée – allait se soumettre à elle ! Une chose impensable et qui n'avait plus dû se produire depuis plusieurs siècles. Une chose à inscrire méticuleusement dans l'histoire de Poudlard, comme ça, cette pimbêche de Granger pourrait soûler ses amis avec ce détail et Potter en rougirait de jalousie. Parce que ce n'était pas lui qui aurait réussi à faire mettre Malefoy à genoux devant une salle commune toute entière. Gypsy pouvait être fière d'elle et elle ne se gênerait sûrement pas pour le montrer… Mais pourquoi le spécifier alors qu'elle n'était pas du genre à rester humble et que toute l'école serait au courant ? Mais bon, elle avait beau se vanter légèrement, elle s'assurait pourtant de mériter les exploits dont elle se vantait vigoureusement.
Drago dit, d'une toute petite voix :
« Je… je m'ex… » Il marmonna le reste. Axelle dit d'un ton ironique :
« Vas-y, Malefoy, on t'écoute… » Il inspira profondément.
« Je m'excuse à elle, à toutes les autres filles et… à Potter… »
Gypsy s'exclama :
« Vous avez entendu ? J'ai réussi ! Malefoy est à mes pieds et s'excuse à tout le monde, même… » Elle riait tellement qu'elle en avait les larmes aux yeux. « …même à Harry Potter ! » Puis elle éclata de nouveau d'un monstrueux rire machiavélique qui fit frémir l'assemblée entière.
« Il l'a fait de son plein gré ! », rugit-elle. Irys reprit, presque aussi triomphante :
« Drago Malefoy, tu peux te remettre debout… »
Axelle s'indigna :
« Non, voyons, on a si bien commencé, pourquoi ne pas terminer en beauté ? »
« Rampe », ordonna-t-elle.
Ce fut au tour de Gypsy de réagir, très enthousiaste :
« Oui, bonne idée crabinette ! » Drago, fulminant contre le sol glacé, s'impatienta.
« Bon, je n'ai pas toute la journée ! », hurla Malefoy de toute la puissance de sa voix puissante et « Malefoyienne », c'est-à-dire traînante mais autoritaire.
« Alors rampe, comme le ver de terre que tu es. Fais le tour de la salle et tu pourras partir », fit Axelle d'un air hautain accompagné d'un mouvement de sourcils qui n'appartenait qu'à elle.
« Partir ? », s'indigna Gypsy. « Déjà ? », demanda-t-elle plus calmement.
« Gypsy, ma p'tite naine pakistanaise adorée » continua Axelle d'une voix douce. « On lui en a fait assez pour être renvoyées de ce satané collège. Je sais qu'il ne dira rien, Malefoy a bien trop peur qu'on recommence pour dire quoi que ce soit à qui que ce soit. N'est-ce pas, Malefoy ? », dit-elle en s'adressant à lui, qui était toujours par terre.
Il se releva péniblement, rouge de honte et de furie. Il tanguait dangereusement d'avant en arrière, conséquence directe du sortilège Doloris. I l détacha chacune de ses syllabes, tentant en vain de contrôler sa rage, un peu comme le faisait Rogue quand il parlait à Potter :
« Mais si jamais vous recommencez… » Irys le coupa brusquement :
« Tu nous feras quoi, hein ? On vient juste de te prouver qu'on était plus fortes que toi ! Si tu veux un duel officiel, t'as qu'à le dire ! On sera toutes les trois aussi contentes l'une que l'autre ! » Gypsy et Axelle approuvèrent silencieusement.
Drago, pour une fois, ne trouva rien à répondre. Mais c'était un Malefoy. Il devait avoir le dernier mot, c'était primordial.
« C'est ce qu'on verra… » siffla-t-il entre ses dents.
Seulement, ces quelques mots n'eurent pas l'effet escompté. Un léger rire anima la salle. Cette réplique devait faire retourner tout les Malefoy dans leurs tombes ! On aurait dit une réplique de film hollywoodien de série B ! En d'autres termes, totalement indignes du plus jeune descendant des Malefoy.
Gypsy s'esclaffa :
« Eh bien, puisque c'est ce que tu dis, on verra. Dans trois jours… » Elle réfléchit quelques secondes. « Oui, dans trois jours tu devras combattre l'une de nous en duel… dans la Grande Salle. Puis, trois jours après ce même duel, tu en feras un autre contre l'une de celles qui restent. Après ce même laps de temps, tu te battras contre la toute dernière. Nous verrons bien, en effet, de quoi un Malefoy de ton envergure est capable… »
Elle n'attendit pas de réponse et tourna brusquement les talons pour aller jusqu'au dortoir des filles, laissant Drago sans son dernier mot. Axelle, cependant, ajouta quelque chose une fois qu'elle fut partie :
« Tu sais, Malefoy, trois duels, ça peut t'être fatal… » Elle repartit aussi sec. Irys ricana méchamment puis alla s'asseoir dans l'un des confortables fauteuils de la Salle Commune pour lire un énorme bouquin sur la vie des vampires transylvaniens.
À SUIVRE...
