Prologue

Lorsque je me suis réveillé, la douleur, la fièvre avaient disparus. Quelle sensation étrange ! Je me sentais vide de tout sentiment, un silence pesant s'était installé dans la pièce où je me reposais. Il n'y avait pas un bruit, seul une odeur de sapin, de lavande et de brume embaumé la pièce. Alors que je commençais à respirer, tout près de moi une respiration venant de ma droite, j'ouvris les yeux et je découvrais un visage qui m'était familier. C'était un homme blond avec des yeux, qui lors de notre rencontre m'avaient parus étranges et hypnotisants de par leur couleur ambre. Je reconnus mon médecin : le docteur Carlisle Cullen. Alors je compris, cette voix qui m'avait accompagné pendant qu'un feu destructeur me lacérait mon corps, c'était lui ! Je l'avais entendu dire des choses comme quoi mon corps changeait et que je devenais un vampire… je riais tellement la situation était exubérante. Puis je vis son visage grave et torturé et j'entendis ses paroles qui ne traversèrent pas la barrière de sa bouche et tout me parut clair soudain :

« Comment ai-je pu lui faire une chose pareille ? Je pense avoir fait le bon choix et comment va-t-il le prendre ? Ai-je agi de manière égoïste même si sa mère Elisabeth m'avait supplié de le sauver quoiqu'il arrive ?... »

J'eus la sensation que mon estomac aurait pu être noué mais je ne ressentis qu'un malaise. Il fallait que je lui dise d'arrêter de se torturer car cela aggravait mon mal de crâne naissant. Je le regardais droit dans les yeux et lui dit :

« Alors tout ce que vous m'avez dit est vrai… je suis un vampire, que dois-je faire ? Que suis-je réellement ?

- Tu es en effet un vampire, ne me haïe pas pour t'avoir donné cette possibilité…. J'aurais pu, j'aurais du t'éviter cela…

-Vous venez de dire que ma mère le souhaitait… je ne comprends pas… »

Il me regarda avec insistance et se demanda comment j'avais pu le savoir. Mais soudain il sourit et m'expliqua que le fait d'avoir entendu ses pensées correspondait à un don ce qui était assez rare chez nos semblables, il m'expliqua aussi à quoi consistait notre condition, que nous étions maudit en soit puisque nous vivions éternellement avec comme moyen de subsistance le sang humain… il me dit que le fait de se nourrir de vies humaines pouvait être évité et qu'une nouvelle alternative moins attrayante était le sang animal. Il me narra son histoire, qu'il était né à Londres autour des années 1700, qu'il fut transformé accidentellement par un vampire une nuit alors qu'il le traquait. Il s'interrompit, regarda par la fenêtre et sourit :

« Il est temps d'aller chasser, il fait nuit, c'est le moment de la journée le plus sûr pour nous… »

Il me regarda et poursuivis :

« Tu verras, c'est assez simple, c'est même instinctif… tu dois avoir très faim, je ne t'ai même pas demandé comment tu te sentais. Je manque à tous mes devoirs… »

Je le regardais fixement, il était seul depuis trop longtemps, il s'était confié à moi afin que tout deux on se sent en confiance. Il me regardait avec appréhension, je pris alors la parole :

« Carlisle, je ne sais encore comment prendre cette situation, montrez-moi et aidez-moi pour que cela me paraisse plus aisé… vous vous êtes ouvert à moi et vous m'avez choisi alors que des milliers d'autres patients meurent comme moi chaque jour, pourriez-vous m'expliquer pourquoi ? »

Il fixa l'horizon et me déclara que lorsque mon père était tombé malade, il s'était pris d'affection pour ma famille car il voulait en avoir une comme la mienne. Lorsque j'étais tombé malade, il avait vu ma mère me soigner avec tellement d'amour que cela l'avait troublé et qu'il s'était attaché à moi plus que de raison et que quand ma mère avait succombé, il lui avait promis de me guérir coûte que coûte, peut importait le moyen il fallait que je vive, il m'avait déjà adopté comme fils tant il m'aimait… que pouvais-je lui dire ? Ces sentiments n'étaient pas réciproques même si je ressentais de la sympathie, mes sentiments s'arrêtaient là. Il vit mon désarroi et me dit que je ne devais pas m'en faire et que je pouvais partir dès que je le voulais. Je l'informai que dans l'immédiat je me sentirais mieux en l'ayant pour compagnie et que je réfléchirais plus tard sur les choix qui s'offraient à moi.

« Je pense que le moment est venu pour nous de nous nourrir… tu dois ressentir une soif importante…

-C'est donc cela la sensation au fond de ma gorge

-En effet, rit-il. Ne t'inquiète pas, on finit par s'y habituer avec le temps… il suffit d'aller chasser mais elle ne s'en va pas pour autant… viens, suis-moi »

Il sauta sur le rebord de la fenêtre et m'intima de le suivre. Je vis alors que nous étions au 4ème étage d'un immeuble au nord de Chicago, à quelques kilomètres d'une forêt qui, selon Carlisle, regorgeait de spécimens intéressants pour des promeneurs comme nous étions lui et moi. Fallait-il que je le suive dans cette folie, de parcourir les toits jusqu'à notre destination de chasse ? Il me sourit :

« Ne t'en fais pas Edward, ce n'est pas aussi haut qu'il n'y paraît et tu trouveras amusant cet exercice… »

Je le suivis alors car il me semblait digne de confiance et sentais tellement d'amour en cet homme grâce à ses pensées pleines d'admiration à mon égard que je me sentais moins seul même si ces égards me gênaient. Nous longeâmes la balustrade et sautâmes avec facilité sur les toits jusqu'à ce que nous arrivions à l'aurée du bois. Je me stoppai car j'avais peur d'avancer vers l'inconnu, alors il me dit que je n'avais rien à craindre et que jusqu'ici tout s'était bien passé. Je lui dis alors que j'avais ressenti des faiblesses tout à l'heure sur les toits car ma soif avait été intenable en voyant de jeunes gens dans la rue. Il sourit et pensa :

Tu ne les as pas attaqués, ce qui est déjà exceptionnel. Viens, tu as soif mon fils…

Je le suivis mais son dernier mot m'avait choqué. Il me prenait vraiment pour son fils. Ses yeux étaient pleins d'amour et de compassion. Que pouvais-je faire ? L'aimer comme un père ? Le mien dans ma vie antérieure avait été un soutien, Carlisle pouvait-il l'être dans cette nouvelle vie ?

Je le suivis. Il se mit à courir et je le suivis encore. Quelle sensation de liberté ! Je sentais le vent frais du soir me fouettait le visage, quelle aisance de donner libre cour à toute cette énergie refoulée, libérer ces frustrations, ces peines qui emprisonnent ton âme. Je revivais après chaque foulée. Carlisle dut me rattraper et m'arrêter car nous étions déjà au bord des grands lacs, il me regarda avec un sourire, il pensait que le fait de me libérer dans la course pouvait m'aider et qu'il était heureux de me voir libre. Il me demanda de le suivre, de fermer les yeux et de laisser libre cours à mes sens. C'est alors que j'entendis tout, le souffle dans les arbres, le moindre cœur dans la forêt… ce simple bruit réveilla la sécheresse de ma gorge, je m'élançai vers la première odeur de sang qui me vint, elle était bien moins alléchante que celle sentit sur les toits mais cela passera. Je débusquai mon gibier, qui n'était qu'un cerf majestueux mais dont l'odeur me fit grimacer. Je lui sautai dessus, déchirant la chemise blanche que Carlisle devait m'avoir mis avant mon réveil avec ses bois et but son sang d'un trait. La sensation chaude du sang coulant sur mon menton était grisante, j'en voulais plus. Avant la fin de la nuit je bus encore une biche et un sanglier. Nous revînmes chez le docteur et il me donna de quoi me changer. Il me regarda, il attendait que je réagisse mais que faire ?

Carlisle, pourquoi je ressens dans mon être de la méfiance en votre égard et en même temps je sens que vous êtes un être bon…

Ton instinct de protection te dicte de me quitter et c'est ton âme d'humaine qui te dit ce qui est juste pour toi.

Normalement toute âme meurt lors de notre mort. N'est-ce pas ce que la bible enseigne ?

Je pense qu'un paradis existe et que nous avons une possibilité de rédemption Edward. Il suffit juste de laisser les humains vivre, de les respecter, de faire preuve d'empathie et de croire en un monde de tolérance et de respect.

C'était la première fois que j'entendais Carlisle parler de philosophie. Il était plein d'espoir et il voyait en moi un potentiel que je savais qu'il n'existait pas. C'était vraiment un homme bien, droit et savant.