Titre : Un mélange particulier

Crédits : Tous les personnages de Saint Seiya The Lost Canvas appartiennent à Masami Kurumada.

Genres : Romance (rated M)

Couples : Sisyphos et El Cid (et quelques uns sous-entendus)

Résumé : De retour d'une mission en Espagne, El Cid a appris une nouveauté qu'il tente de produire en vain... Sisyphos l'invite alors pour partager ses connaissances. Culinaires.

Notes : C'est un couple qu'on pourrait voir aussi comme Aioros x Shura mais disons que l'époque est différente. De deux siècles. C'est pour ça que j'attribue à Sisyphos et à El Cid les origines de leurs ''descendants'', vu qu'on en a aucune précision. Donc Sisyphos est d'origine grecque et El Cid, espagnole. Et l'histoire se situe avant la Guerre Sainte contre Alone-Hadès. Plus précisément, avant l'arrivée de Tenma au Sanctuaire pour devenir chevalier.


CHAPITRE 1

Le jeune homme à la longue crinière bleue le dévisagea un long moment avant de partir dans une crise de fou rire.

- HAHAHAHAHAHA ! T'as entendu ça 'Gel ? ! Une recette de cuisine ! I'nous a rapporté une recette de cuisine ! HOHOHO !

- Kardia... calme-toi !

L'interpellé lui donna une violente claque à l'arrière du crâne, stoppant net le Chevalier d'Or du Scorpion qui avait déjà les larmes aux yeux.

- Mais, 'Gel ! Une recette !

- Oui, j'ai entendu, souffla-t-il calmement.

Debout au milieu du salon, ''l'invité'' attendit patiemment que le Verseau lui réponde.

- ...

- Excuse-moi El Cid... Mais je ne m'y connais pas plus que toi en cuisine espagnole.

- Je vois. Merci. Je ne vais pas vous déranger plus longtemps, ajouta le Chevalier d'Or du Capricorne en jetant un regard impassible à leur nudité.

Le gardien du Onzième Temple rougit légèrement, remontant le seul drap qui les recouvrait avec son amant.

- Mais j't'en prie, railla Kardia tout en picorant de baisers le cou de son partenaire.

- 'Dia !

Sans un mot, le Chevalier d'Or du Capricorne quitta les appartements privés du Verseau, toujours aussi désespéré qu'à son arrivée.

Pendant sa mission dans son pays natal, il avait acquis d'une vieille dame une récompense assez inhabituelle : une recette d'un nouveau met qui aurait un énorme succès en Espagne. La recette pour cuisiner une paella parfaite. (1) À son retour, il avait abandonné le fameux-rouleau-contenant-le-secret-de-la-merveille (comme l'avait dit la vieille) sur sa table de cuisine pour sa dignité, mais sans la jeter non plus, par respect... et avec une once de fierté pour son trophée. Et à cause de l'Événement qui approchait, il ne put malheureusement pas l'ignorer plus longtemps. Il en avait besoin.

Tout en descendant les marches qui séparaient les deux temples, El Cid relut pour la énième fois le rouleau de papier puis soupira. Toutes ses tentatives ont été vaines : il manquait un ingrédient pour rendre sa paella parfaite. Il comptait sur le savoir de son voisin du dessus pour l'aider mais apparemment, El Cid était arrivé au mauvais moment...

Pour un mois de novembre, l'air était plutôt lourd et la température assez élevée. La canicule du dernier été avait été désastreuse pour les récoltes au pied du Sanctuaire. Un problème de plus pour les ingrédients nécessaires à une bonne paella.

Le soleil arrivait à son zénith lorsque le Capricorne entra dans son propre temple. Il déposa son trésor aimé et haï sur le socle de la Statue et s'inclina devant elle un instant. Cette représentation de la remise de l'Excalibur par Athéna au chevalier fidèle et loyal, lui inspirait toujours une bouffée de sérénité et de courage, sans vraiment en connaître la raison. El Cid se remit sur pieds, considéra un moment le rouleau avant de s'en détourner en lâchant un autre soupir. Non... le courage et le calme ne lui suffiraient pas pour retourner dans sa maudite cuisine retenter cette recette... Se changer les idées serait mieux pour lui.

-xXx-

Le Capricorne s'affala dans les gradins de l'Arène, épuisé. L'Excalibur s'était un peu plus affûté mais toujours pas assez. Il lui fallait plus. Encore plus. Ses entraînements seul finiront par porter leur fruit, il en était certain. Reprenant une dernière grande inspiration, il se redressa, prêt à reprendre son exercice, quand une voix familière l'arrêta.

- 'Cid ! Attends !

Un chevalier aux courts cheveux châtains arriva à son niveau en courant et, essoufflé, s'appuya sur l'épaule de son ami.

- Arf... Pfuu... Je hais cette chaleur...

- Sisyphos ?

- 'Cid ! Encore en train de t'entraîner seul ? Tu devrais t'occuper de tes disciples un peu !

- Ils n'en ont pas besoin, trancha-t-il froidement.

- Bien sûr que si ! Arrête de rester isolé dans ton coin, et mêle-toi un peu aux autres !

- Je ne veux pas. Pas tant que ma lame ne soit pas parfaite.

- Mais t'es vraiment audacieux dis-donc !, rit le Sagittaire en lui pinçant le bras.

- Hmpf.

El Cid repoussa son ami et se dirigea vers un carré désert d'herbes asséchées, Sisyphos sur les talons.

- Tu m'excuseras mais il faut que je m'entraîne.

- 'Ciiiiiiid... Ton cœur est aussi froid que ta lame. Ça finira par te retomber dessus.

- Peu m'importe.

- Mouais. Au fait, tu fais quoi demain ?

Le Chevalier du Capricorne s'arrêta brusquement, l'air incrédule. Sisyphos sourit face à sa réaction : c'était rare de surprendre une personne aussi imperturbable qu'El Cid.

- Je... euh...

- Bah, à part tes entraînements solitaires, je suppose que t'as rien à faire !

- Effectivement, mais...

- Yato, attends !

Ils furent interrompus par un jeune adolescent blond à la poursuite d'un autre qui fonçait droit devant, tête baissée.

- Non, Reg'! Je ne m'entraînerai pas avec toi !

- Mais pourquoi ? demanda le jeune Lion d'une voix plaintive.

- Parce que tu vas encore me foutre une pâtée et j'ai aucune envie d'être ridiculement plaqué à terre!

- Je te plaquerai au sol de toute façon ce soir... susurra Regulus.

Yato vira au cramoisi et dans un grognement étouffé, il ne releva pas, accélérant le pas.

- Mais allez, Toto~ !

- Ne m'appelle pas comme ça ! hurla le petit brun, toujours plus rouge.

Le Sagittaire les regarda s'éloigner, une lueur amusée dans les yeux. Folle jeunesse...

- Ton élève est aussi entêté que toi à ce que je vois, remarqua El Cid au bout d'un moment de silence.

- Oh, tu trouves ? Donc tu passes me voir demain midi à la maison ?

- Sisyphos...

- À demain~ ! le coupa son ami et partit en courant vers d'autres combattants.

El Cid le vit encore agiter gaiement la main avant de se détourner. Exaspéré, le Capricorne s'avança vers la rivière qui s'écoulait un peu plus loin de l'Arène, et d'un geste sec, il abaissa son bras droit. La terre s'éventra soudainement dans un grondement sourd, et le liquide se sépara en deux parties distinctes en coupant net le courant. Le tableau se figea un instant puis les morceaux de terre, la poussière et les gouttelettes limpides d'eau s'abattirent brusquement au sol. La rivière reprit normalement son cours, la fissure se referma d'elle-même lentement.

- C'est pas suffisant... murmura le Gardien de la Dixième Maison. Je dois encore aiguiser l'Excalibur...

Il prit une position d'attaque et continua à s'entraîner sans relâche jusqu'au crépuscule.

-xXx-

- Manigoldo ! Repose-moi tout de suite ! IMMÉDIATEMENT !

- Pas envie mon chou.

- Tu risques la mort si tu t'approches autant de moi !

- Oh, j'ai peur !

- MANIGOLDO !

- Héhé, la Mort est mon amie tu devrais le savoir, p'tite rose. Ah, s'lut 'Cid ! Tu rentres au bercail ?

- … oui.

- Ha ! Toujours aussi franc, hein !

- El Cid ! Aide-moi ! Fais moi descendre de ce timbré !

- Tût-tût, ça c'est pas gentil mon p'tit poisson.

- EL CIIIIIIIIIIIIIIIID~ !

La Chevalier d'Or du Cancer rit de bon cœur en tapotant l'arrière train d'Albafica, désespéré et outré d'être porté ainsi comme un vulgaire sac à patates. Il s'agita en poussant des hurlements de rage et frappa des poings le dos de son ''agresseur'' qui ne fléchit à peine. Le Capricorne les regarda s'orienter vers la plage, et continua silencieusement sa montée avec une dernière pensée pour le pauvre Chevalier d'Or du Poisson dont les cris s'évanouissaient dans le pénombre.

Il atteignit enfin son temple et sans un regard pour la Statue, ou plus précisément, pour le rouleau de recette, il pénétra ses appartements privés. El Cid se dirigea directement vers la salle de bains et seulement une fois entré dans sa bassine d'eau brûlante, il se permit un long soupir d'aise. Rien de mieux pour apaiser la fatigue et les douleurs de la journée... Même en fin de mois de novembre, la fraîcheur était encore insuffisante aux chevaliers pour s'entraîner plus agréablement dans l'ardeur des combats.

Détendant ses jambes dans l'eau, il réfléchit un instant sur sa situation actuelle. Non alarmante mais assez gênante. Le Capricorne ne savait que penser de l'invitation de son ami. Mais comme ça n'avait pas l'air de déranger Sisyphos autant que lui, à quoi bon se torturer l'esprit ? Emporté par l'apaisement que lui prodiguait l'eau chaude, il finit par s'endormir.

Il poursuivait... quelque chose. Non, il courrait après quelqu'un. Cette personne riait aux éclats sans se retourner et filait tout droit vers une grande... colline ? Non. Un monticule plein de couleurs, à la silhouette familière. C'était... un plat. De paella. Il s'arrêta devant avec stupeur, tandis que l'inconnu continuait de courir et gravissait maintenant le riz fumant. Arrivé en haut, il finit par se retourner en lui faisant des grands signes du bras, un sourire étalé sur son beau visage, son regard bleu-vert pétillait. Sisyphos ?

El Cid se réveilla brusquement, les yeux écarquillés. Que faisait le Sagittaire au sommet d'un plat de paella géant ? ! Il lâcha un énorme éternuement avant de se rendre compte qu'il était nu dans une bassine d'eau froide. Il bondit hors de la baignoire et saisit sa serviette, frigorifié. Il manquerait plus qu'il tombe malade enrhumé... Tremblant comme une feuille et habillé chaudement, le chevalier se glissa dans son lit le ventre vide. Il devait sûrement être aux alentours de minuit. Son rêve lui revint clairement, mais plus le Capricorne y pensait, plus il le trouvait ridicule... Frappé par un gros coup d'épuisement, il sombra enfin dans un profond sommeil sans rêve.

-xXx-

De bonne heure, El Cid descendit jusqu'à l'Arène pour s'entraîner avant d'aller chez Sisyphos. Après deux heures intensives sous un soleil de plomb, il s'assit dans les gradins pour observer les autres chevaliers dans leurs combats. Ses disciples se tenaient non loin de lui : ayant pris l'habitude de son isolement, ils avaient fini par s'entraîner entre eux par observation et étude des techniques de leur maître. Au milieu du terrain, il aperçut Shion et Dohko, torses nus (comme la plupart des chevaliers) mener un combat aussi torride que violent. Regulus suivait toujours Yato de près, très près. Asmita avait engagé un combat contre Deutéros, qui avait laissé l'île de Kanon pour passer quelques temps au Sanctuaire... et pour se divertir avec le Chevalier d'Or de la Vierge autant qu'il le pouvait. Degel lisait un vieux grimoire à l'ombre d'un grand olivier, la tête posée sur l'épaule de Kardia qui lui caressait tendrement les cheveux. Rasgado répétait des techniques de combat à ses trois élèves, enthousiastes et admiratifs. Quant à Albafica, il déambulait dans l'herbe, les yeux vagues, avec un léger sourire aux lèvres. Manigoldo lui jetait des coups d'œil tout en discutant et en riant avec le Grand Pope avec complicité.

El Cid vérifia une dernière fois la position du soleil et se leva pour retourner dans son temple. Un bain rapide s'imposait pour se débarrasser de la transpiration et de la crasse qu'il avait accumulées pendant ses exercices. Il jeta un regard las à la volée de marches qu'il devait encore grimper... Quel système sadique !

Enfin prêt, propre et en forme, il sortit de son logement avant de s'arrêter net devant la Statue. Le maître des lieux hésita une minute et s'inclina brièvement devant elle. Résolu, il saisit la rouleau et descendit les escaliers quatre à quatre jusqu'au temple du Sagittaire.

Tant pis pour sa surprise !


(1) En effet, la paella (un des plats les plus connus d'Espagne aujourd'hui) naquit seulement au XVIIIème siècle dans l'Horta de Valence et il s'agissait du riz de la lagune voisine de l'Albufera que les paysans de la région cuisinèrent à leur manière.