Le Venin de la Rose.
Chapitre Premier.
Il était une fois, une Méchante Reine, toute puissante, animée d'un désir de vengeance démesuré qui vivait dans un pays magique. Elle avait usé d'une puissante malédiction, le Sort Noir, pour emporter avec elle tous les sujets de son royaume dans un autre monde. Un monde dépourvu de magie, un monde commun où tous les habitants sont ignorant de l'existence réel des mondes merveilleux, tel que la Forêt Enchantée, le Pays Imaginaire, le Royaume de L'Ogres ou encore le Pays des Merveilles d'Alice.
Cette Méchante Reine avait le cœur noircit par des années de souffrances et de peine, des années de tiraillement entre le bien et le mal. Finalement elle n'avait pas eu la force de pardonner et poursuivait sur le seul chemin qu'on lui avait montré, celui de la vengeance. Elle balaye tout sentiment de culpabilité comme on chasse une mouche devant soi. Sans plus de remord. Sans plus d'émotion. Le chemin qu'elle prend, lui noircira le cœur encore un peu plus chaque jour, à moins qu'elle ne se décide à changer. Mais pour quelle bien bonne raison changerait-elle ?
Dans ce nouveau monde, bien loin des bois merveilleux où naissent les histoires d'amour entre prince et jeune innocente, où se livre de grandes batailles épée conte épée, où partent à l'aventure les hordes de pirates sur leurs fières coques de bois la Méchante Reine s'est réservée une place de choix, elle est le Maire de cette ville, construite par la seule force de sa malédiction et de sa volonté.
Storybrook est né d'un vapeur de fumée. Perdu dans les vastes étendus de forêt du Maine, Storybrook, est apparu dans un nuage noir teinté de violet, de vert et d'éclairs. Et chaque personnage de nos contes classiques a perdu la mémoire et vit là comme si de rien n'était. La Méchante Reine est satisfaite. La Méchante Reine dans son miroir se regarde. La Méchante Reine jubile, elle a réussi et pourtant elle se sent toujours aussi vide. La vengeance ne comble rien. La vengeance ne mène à rien, c'est même pire encore.
Et le pire, pour elle arriva après 28 ans de Mélédiction. Au bout de dix ans de tranquillité, dix ans de comportement irréprochable, dix ans en compagnie de ce petit garçon étrange dont elle prend soin depuis tout bébé. Ce petit garçon qu'elle aime à présent, à sa manière à elle, un peu spécial, un peu froide et autoritaire, un peu comme la Méchante Reine qu'elle est toujours. Oui, un jour ce petit garçon comprit tout le manège qui se tramait dans sa ville. Ce petit garçon, comme un héros à part entière de ce conte qu'il tient pour véridique, part à la recherche de sa véritable mère. Et au grand drame de la Méchante Reine, c'est elle, la mère du petit, qui déjoua ses tours et ramena toutes les consciences de ces personnages merveilleux aux habitants de la ville. La Méchante Reine voyait rouge. La Méchante Reine préparait déjà ses ripostes.
Chapitre 2
Elle avait tout fait pour la faire partir. Elle avait tout tentée mais rien ne la ferait plus quitter Storybrook. Elle l'avait manipulée, elle l'avait soudoyée, l'avait menacée et avait même tentée de la tuer. Mais rien n'y avait fait, Emma Swan ne voulait plus quitter cette ville et Régina Mills enrageait jour après jour. La Méchante Reine avait trouvé un adversaire à sa hauteur. La mère de son fils adoptif n'était autre que la Fille Chérie de Blanche Neige et de Charmant. Cette Emma Swan avait en elle, sans le savoir, de grand pouvoir et le premier se révéla en voulant connaitre et sauver son fils tout juste retrouvé. Elle avait levé la malédiction comme cela avait été prédit et la Reine-Maire voyait son œuvre partir en fumée, sous le coup d'un baisé sincère.
Malgré la noirceur de son cœur, Régina commence à retrouver une part d'humanité plongé dans ce monde bien réel au milieu de grandes aventures. Parce qu'elle a eu peur pour une autre vie que la sienne, elle peut commencer à aimer. Tout ce que la vie lui a pris, tout ce qui a fait d'elle, celle qu'elle est aujourd'hui, commencent à prendre moins d'importance. Et parce qu'elle a sauvé la vie de sa pire ennemie, elle peut commencer à changer.
Elle a un plan qui ne lui ressemble pas mais dans sa détresse, elle fait ce choix. Mais c'est par la peur qu'elle est menée aujourd'hui non la vengeance. La peur de perdre son fils, le seul être au monde qui la connait, qui la comprend et qui l'aime quand même indéfectiblement. Alors elle fait ce choix, parce qu'elle a compris qu'elle ne pourrait jamais avoir Henry, sans avoir Emma.
Dans son caveau, il y a une bibliothèque en bois magique. Elle y récupère un très ancien grimoire à la couverture en peau de dragon bleu nuit, aux bordures écorchées et vieillis où il est inscrit en lettre d'or Antiquis Magicae. Elle tourne les pages puis en arrache une en particulier. Elle referme le manuscrit qui claque et dégage un nuage de poussière dorée. Elle le range, elle roule la page jaunit par le temps et la glisse dans la poche intérieure de sa veste. Elle referme les portes de l'imposante bibliothèque et celle-ci disparait de sa vue par un seul mouvement de sa main. Elle reste immobile, le regard dans le vide quelques instants puis elle se ressaisit et quitte les lieux d'un pas déterminé.
Régina est portée par sa détermination à toutes épreuves et elle s'apprête à lancer un nouveau sort. Pendant des jours, elle passe ses soirées à lire et relire les mots sur la page qu'elle a arraché au vieux grimoire. Portée par cette solution désespérée, elle se concentre et prépare studieusement l'élaboration de ce sort. C'est un sortilège très particulier. C'est de la vielle magie, de la très vieille magie, un peu oublié, un peu désuet. Une magie primitive, à la base de toutes les autres.
Sur le parchemin est écrit : Rosa Venenum. Le Venin de la Rose, car celle qui est belle et incarne l'amour peut aussi être cruelle voire mortelle.
La douleur est trop grande. La solitude trop lourde. Elle ne voit plus que ça, elle ne pense plus qu'à cela. Perdre Henry, elle ne le supporterait pas et par déjà maintes mauvaises aventures, elle avait découvert le potentiel qu'elle avait à vouloir le sauver à tout prix et la peine qu'elle avait eu, en croyant le voir mort, avait été sans égal. Alors elle ne reculerait devant rien.
Elle ne pense plus qu'à ce plan qui lui était apparu pendant une nuit d'insomnie qui virait à la crise de folie. Son idée : se servir de l'Amour quand la Haine ne marche plus. Son plan : séduire Emma Swan. Le Venin de la Rose dans un verre de vin et Emma tomberait amoureuse. Elle viendrait vivre au manoir et avec Henry, ils seraient heureux.
Mais toute utilisation de la magie à un prix. Et ce sortilège ne déroge pas à la règle. Ce Venin rend fou amoureux, au-delà du possible, au-delà de la raison. Ce venin vous rend heureux puis il vous reprend tout. Celui sous l'emprise du sortilège cessera de vivre avant vous. Vous vouliez qu'il vous aime, il vous aime mais il va mourir tôt ou tard. Le Venin de la Rose tue lentement, petite à petite, cela prend des années, si bien qu'on en oublierait presque la fatalité. Alors Emma mourrait un jour, Régina pleurerait mais Henry resterait. Voilà jusqu'où elle était prête à aller.
Sombre plan pour une sombre Régina que rien ne peut arrêter. Perdue et seule, sa soif de pouvoir et de vengeance ne suffise plus, elle veut son fils, coûte que coûte. Pourtant elle l'entend, cette petite voix qu'elle fait taire à chaque fois, cette petite voix qui lui répète sans cesse que l'idée est très mauvaise. Pour l'instant La Reine jubile pendant son méticuleux travail mais sa conscience qui murmure l'empêchera-t-elle de commettre l'irréparable ? Tuer le Cygne blanc sous le coup d'un sort qui la ferait l'aimer comme jamais, était-ce une si bonne idée ?
Régina Mills ne pense qu'à lui, égoïstement, elle ne pense encore qu'à manipuler et comploter pour avoir ce qu'elle veut. Il suffirait pourtant qu'elle ouvre simplement les yeux. Aveuglé par toutes les déceptions et tragédies de sa vie, aveuglée par des années entières nourrit de folie douce et meurtrière, elle ne voit tout simplement pas ce qui pourtant est évident.
Chapitre 3
Emma Swan était une femme que rien ne faisait reculer. Elle a ce don de déceler la vérité et de toujours suivre son instinct, son cœur ou sa conscience. Elle est ingénieuse et déterminée, elle est aussi très têtue et acharnée. Si Régina avait été plus attentive, elle aurait pu remarquer ces signes et ces regards qui ne trompent pas. Ces regards qui étaient noirs au départ mais qui, avec le temps et le cours de leurs aventures, étaient devenus doux, toujours sincère, parfois même convainquant. Ces regards entre elles qui remplaçaient les mots dans leurs batailles ou leurs alliances. Ces regards qu'elles échangeaient avant d'allier leurs forces magiques et surtout cette puissante quand, ensemble, elles décident de combattre côte à côte. Ceux qui tendent à prouver qu'une telle potion d'Amour Cruel n'est peut-être pas nécessaire pour se faire aimer d'Emma. Oui son plan machiavélique n'était pas la seule et unique solution mais elle ne s'en doutait pas le moins du monde.
Quoiqu'il en soit, Régina Mills passa des mois à l'élaboration de la potion. Dans son sous-sol au manoir, elle se reconstruit un laboratoire de chimiste. Henry n'est plus souvent là alors elle a tout le loisir de se concentrer sur sa préparation dont elle a eu un mal fou à trouver tous les ingrédients.
Elle convainc Mr Gold de lui revendre un petit coffret en fer orné de pierre précieuse qu'elle lui avait déposé en caution des années auparavant pour pouvoir obtenir autre chose, dont elle ne se souviens même plus, surement un gadget pour assouvir une quelconque vengeance. Il ne sait pas exactement ce que ce coffret renferme, il n'a jamais pu l'ouvrir malgré ses pouvoirs. Il rechigne à lui rendre, il demande beaucoup en échange mais elle accepte. Elle accepte de lui céder une chose précieuse qu'elle a en sa possession, du sable de Lune et elle récupère son coffret. Dans ce joli petit coffre, il y a un étui de soie rouge et à l'intérieur, des graines. Ce sont les graines des Roses du Jardin d'Eden, récolté par le premier magicien de l'Histoire des pays fantastiques. Régina cultive, sous une serre, des pieds de rosiers qui par la magie fleurissent en une nuit et dont les roses ne se fanerons jamais à moins d'être cueillit. Régina les laisse murir et s'embellir pendant qu'elle se démène pour trouver tout ce qui lui faut. Chaque soir elle relie le vieux bout de manuscrit rédigé en latin. Elle s'assure qu'elle n'oublie rien. Elle rassemble petit à petit ce qui lui faut et les roses dans leur serre de verre continuent de grossir et de multiplier leurs pétales rouges cramoisis. Elles sont magnifiques, réellement splendide, ces roses gagneraient largement un concours de composition floral.
Un soir, alors qu'elle rentre après un diner avec Henry au Granny's, elle monte à l'étage sans passer voir ses roses comme elle a pris l'habitude de le faire. Elle va directement dans sa chambre, d'un geste de la main, elle enclenche la sono et les notes classiques de la Nocturne Op.9 No2 de Frédéric Chopin résonne avec force et douceur dans l'antre privé de la Méchante Reine. Sa conscience la torture. D'un mouvement de tête, elle fait couler l'eau de la douche, elle envoie valser sa veste, elle déboutonne un à un des boutons de sa chemise, elle ôte sa jupe de tailleur puis ses sous-vêtements de dentelle noir et se glisse sans la douche. L'eau est brûlante, elle s'en moque, elle se noie sous la pluie de gouttes qui se mêle à ses larmes. Elle reste longtemps, elle se décide, elle reprend des forces dans les vapeurs d'eau chaude, elle doit être prête et forte pour aller chercher le dernier ingrédient de la recette de cette sombre potion.
Elle le sait, ce qu'elle s'apprête à faire est dangereux mais pour aller jusqu'au bout de son plan, elle est prête à tout. A minuit Régina monte dans le grenier de son manoir, elle porte un pantalon de cuir noir, de grandes bottes montantes avec des renforts en métal, une chemise rouge et un long manteau de cuir, orné de multiples ceintures à la taille, d'une épaulière et de protection aux avant-bras en métal d'une solidité à tout épreuve car enchantés. Une longue cape rouge finit le détail de cette tenue qui ressemble plus à une armure qu'à ses habituels tenues majestueuses, une armure royale certes mais une armure quand même. Régina s'apprête à affronter quelque chose de terrible pour avoir son dernier ingrédient.
Dans son grenier elle cache un miroir, elle adore les miroirs, mais celui-ci est particulier et si le reste de la ville apprenait son existence, ils auraient bien évidement crié au scandale car la Maire leur avait cachée la présence à Storybrook d'un miroir capable de passer de monde en monde. Mais elle avait eu raison de le garder secret car ce miroir ne peut servir qu'une fois. Un allé, un retour. Ni plus, ni moins. Autant dire que l'utiliser était une lourde décision à prendre. Mais il le fallait. Le dernier élément de la potion était la passion, la passion à l'état brute dont elle a besoin ne se trouve que dans le souffle d'un dragon. Voilà pourquoi Régina pesa le pour et le contre jusqu'à la dernière seconde. Quand elle arracha le voile blanc qui recouvrait le miroir, elle eut des frissons. Elle se posta devant, son reflet était parfait. Son regard valse entre la détermination et l'hésitation. Elle respire profondément, elle se décide, se regarde droit dans les yeux et puis soudain elle disparait.
Quand elle réapparait -des heures plus tard dans son grenier mais en réalité elle a passé des jours dans un coin reculé de la Forêt Enchantée- elle est à genoux, son manteau et sa belle cape rouge sont brulés, de la fumée s'échappe encore d'elle, son visage est noir de suie et du sang coule de son front. Elle se redresse difficilement, son regard est rouge comme le feu, ses mâchoires sont crispées et dans son poing ganté elle tient une fiole brûlante où danse à l'intérieur deux petite boules de feu. Elle a réussi au péril de sa vie. Si elle avait échoué, personne, pas même Henry n'aurait su ce qu'il était advenu d'elle. Mais elle avait réussi. Un sourire implacable se dessina alors sur son visage et ses yeux reprirent leur couleur original.
Chapitre 4
Régina tenait entre ses mains la potion fin prête.
Entre ses mains le fruit d'un lourd labeur, le fruit d'une préparation complexe qui au bout de plusieurs mois fut enfin achevée parfaitement. Ce sort nécessite une totale abnégation pour le réaliser, il fallait y croire, il fallait laisser les fleurs murir, il fallait ensuite faire décanté ses pétales, il fallait jouer au petit chimiste maléfique pour incorporer tous les composant qui font de l'Amour et de la Mort des amants inséparables pour celui qui la boit. Il lui aura fallu des mois de patience et de certains sacrifices pour obtenir le mélange parfait. Elle venait d'incorporer le dernier élément, une goutte de son propre sang. Elle fit apparaitre dans sa main, un long poignard dont le manche était fort bien travaillé et représentait un dragon aux yeux de rubis. Elle serra les dents et s'entailla la paume, le sang chaud et rouge coula sur sa peau et elle en recueillit assez pour l'allié à la préparation.
La potion fût fin prête avec de l'essence de Rose des Jardin d'Eden, du feu de Dragon, des éclats d'étoiles filantes, des gouttes de sang et de l'eau du puit aux vœux. Ce sortilège requière beaucoup de patience et de sacrifice, et cela sert à prendre le temps de préparer la potion mais aussi à bien réfléchir avant de l'utiliser, cela sert à bien prendre conscience de l'acte car celui qui veut l'utiliser, veut se faire aimer mais il perdra l'objet de son affection un beau jour et avant l'heure.
Chaque soir Régina tient la fiole de Venin de Rose entre ses mains et se persuade que c'est son unique chance. Chaque soir, elle attend le moment propice pour mettre son plan à exécution. Chaque soir elle s'imagine que tout peut changer grâce à ce sort. Mais chaque soir, elle renonce et range la fiole dans un tiroir secret.
Après des mois sans aventures ni catastrophes à Storybrook, la ville est plutôt paisible et Régina passe son temps seule dans son bureau. Chaque habitant vit sa vie avec en mémoire deux existences mais chacun à l'air de trouver son équilibre. Chacun s'occupe chaque jour, chacun profite d'une vie presque trop sans soucis. On aurait même pu croire qu'un sortilège de paix et de calme avait été lancé mais il n'en était rien. La ville de Storybrook s'inscrivait dans le paysage de la réalité, et paraissait être une petite ville sereine et charmante dans les forêts du Maine. Régina était souvent seule car Henry vivait la plupart du temps chez Emma. Elle n'avait pas vraiment d'ami, même si depuis qu'elle contrôlait ses pulsions et envie de meurtre et qu'elle avait prouvé qu'elle pouvait agir en bien, elle été plus apprécié de ces concitoyens. Mais elle dinait toujours seule. Elle n'avait personne.
Un soir, où Madame le Maire trainait encore au bureau parce qu'elle n'avait rien de mieux à faire, elle eut une visite inattendue. Il était 11h du soir passé, elle travaillait sur de vrai dossier pas sur des recettes et des sortilèges, quand on frappa à sa porte.
Ses talons résonnent sur le sol de marbre dans le silence de la Mairie vidé de tout employé à cette heure tardive. Elle ouvre et découvre Emma. D'abord surprise, elle y voit une opportunité et sourit de toute ses dents mais encore trop faussement.
_Mademoiselle Swan, bonsoir. Que me vaut cette visite ?
_Bonsoir Régina. Je ne vous dérange pas ?
_Hm non. Entrez.
Emma s'avance et elle est invité à s'assoir dans le canapé impérial qui trône au milieu du bureau.
_Il est tard. Vous bossez encore ?
_Oui enfin j'avais fini. Que se passe-t-il ? Demande-t-elle en rangeant quelques dossiers dans un tiroir.
_Rien de grave Régina, rassurez-vous. J'avais juste envie… besoin… de vous parler.
Régina, qui s'avançait vers le bar pour lui proposer à boire, se retourne, interloqué par cette réponse.
_Besoin de me parler ?!
_D'Henry.
Régina se ravise et adoucit les traits de son visage.
_Emma, vous voulez un verre ?
_Volontiers, j'ai eu une rude journée.
Régina lui tourne le dos, elle sert deux verres d'un très bon alcool, elle glisse sa main dans la poche de son blaser marine qui la siée à ravir et en sort la petite fiole ovale. Elle est prête à verser le liquide rouge écarlate scintillant de grains d'or dans le verre d'Emma mais elle hésite. Ce serait trop soudain, avec les relations qu'elles entretiennent actuellement, ce serait suspect qu'Emma soit soudain dingue de la mairesse sans pouvoir sans cacher. Son plan avait une faille. Elle se résigne. Elle doit attendre. Stoppé dans son élan par sa lucidité ou bien son inconscient, elle range la fiole et retourne auprès d'Emma.
_Merci Régina. Dit-Emma en prenant le verre.
_De quoi voulez-vous parlez exactement ?
_Henry.
_Et bien quoi ? Il s'est passé quelque chose ? Il va bien ?
_Oui il va très bien, il est chez David et Mary-Margaret ce soir.
_Alors quoi ? Emma pourquoi vous hésitez autant, ça ne vous ressemble pas.
_Et bien, ce n'est pas tant de lui que je veux vous parler. Enfin de lui bien sûr, mais surtout de nous.
A ces paroles, le cœur de Régina bondit. La sensation est éphémère mais elle l'a ressenti, cela ressemblait à un pincement au plus profond d'elle, comme un vague souvenir de ce que c'est qu'être deux.
_De nous ?
_Je veux dire… en tant que mères d'Henry… (elle avale une gorgée et grimace) Il faut bien l'avouer nous sommes toutes deux les mères de ce petit. Ni l'une ni l'autre ne compte plus pour lui. Il nous aime toutes les deux. Je l'ai mis au monde, vous l'avez élevé. Et il faut bien dire que c'est un petit garçon formidable… grâce à vous.
_Grâce à son héritage génétique, diront les autres.
_Régina, ne faites pas attention à ce que les autres disent. Leur haine à votre égard est presque ancestrale mais moi je sais.
_Vous savez quoi ?
_Que vous n'êtes plus mauvaise.
Régina comme à son habitude quand on fait mouche, hausse les épaule et un sourcil et affiche un regard noir.
_Ou du moins … plus aussi mauvaise qu'avant, si vous préférée.
_Et puis quoi ?
_Et bien nous avons collaboré pour le sauver des griffes de Peter puis de celles de votre sœur.
_Demi-sœur !
_Oui bon. Quoiqu'il en soit, je sais que vous avez changé pour lui, par amour pour lui.
_Il est le seul être au monde qu'il me reste.
_Vous voulez bien me parlez de lui ?
_Comment ça ? je ne comprends pas ?
_De lui bébé et petit garçon. J'ai loupé tellement de chose. Vous avez été là pour lui et malgré la malédiction que vous avez jetée et qui a causé tout ceci, je vous suis reconnaissante d'avoir pris soin de lui.
_J'ai tellement bien fait mon boulot, qu'il a fini par découvrir la vérité : sa mère est la Méchante Reine et toute la ville est sous son emprise.
_C'était écrit comme cela c'est tout. Parlez-moi de lui, je vous en s…
Emma ne peut terminer sa phrase et le regard de Régina, soudain tendre lui répond qu'elle le fera. Ainsi cette nuit-là, elles parlèrent de lui et rien que de lui. La petite voix au fond de Régina lui murmure qu'elle a bien fait de ne rien faire… et l'autre petite voix en elle, murmure que ce sera pour bientôt. En elle la dualité encore fait rage dans un combat sans merci qui l'empêcherons de dormir les prochaines nuits.
Chapitre 5
Il n'y a pas un seul soir, pas une seule nuit, où Régina ne pense pas à son plan. Au-delà de la raison, elle sombre lentement vers une folie douce. Elle s'est battue ses dernières années pour changer, pour agir en bien et voilà qu'elle s'apprête à faire une chose pire que ce qu'elle a pu faire dans le passé. Mais si la folie s'insinue en elle, c'est en réalité sa conscience qui fait son travail. Plus elle pense à son plan, plus elle pense à l'objet principal de ce plan, Emma Swan. Et plus elle y pense, plus elle se perd en digressions qui n'ont plus rien à voir avec le sortilège mais juste avec Elle.
Elle se souvient de toutes les fois où elles se sont inquiétés ensemble à propos d'Henry, elle se souvient de leur alliance et de ce sentiment puissant en elle à chaque fois qu'elles couplent leurs magies. C'était toujours éphémère mais réel, toujours furtif mais marquant. Quand elles combattent côte à côte où bien quand elle lui enseignait la magie, elle le ressentait. Elle pensait juste que c'était l'attrait de la force qui l'attirait mais c'était bien plus, le destin avec réunit la magie blanche et la magie noire et cela n'avait rien d'anodin. Ce qui est sûr c'est que Régina ne s'était jamais senti plus forte qu'en présence d'Emma. Alors chaque soir, elle s'endors avec l'idée de la voir très vite, caché derrière le sortilège il y a tout simplement l'envie de la voir, seulement cela elle ne le réalise pas encore.
Elle garde une rose qu'elle a cultivée sous verre. Si elle la garde c'est pour une seule et unique raison. Cette rose ne mourra jamais. Cette rose est l'antidote à son venin. Elle ne se résigne pas à détruire la seule et unique chose qui pourrait déjouer le sortilège. Et si elle ne s'y résigne pas, c'est qu'au fond d'elle, elle commence à écouter cette petite voix qui lui murmure toujours que c'est une mauvaise idée. Elle cache la cloche et la Rose dans son caveau, dans la réplique parfaite de son bureau à la Mairie, camouflé derrière un mur enchanté et trompe l'œil.
Elle garde la fiole de venin toujours sur elle, cela fait des semaines qu'elle est prête et elle a eu des occasions mais elle n'a encore rien fait. Régina et Emma se voit souvent pourtant. Cela fait partie de son plan et cela a toujours l'air bien anodin. Et pourtant Régina n'agit pas. Elle se torture, elle veut changer, elle veut faire le bien mais elle veut son fils. Tout son être souffre de cette dualité en elle. Petit à petit elle pourrait bien sombrer dans la folie.
Et puis un soir, Emma dépose Henry chez la Mairesse pour le week-end. Sous le porche, on dirait presque un vieux couple en instance de divorce. Dans leurs yeux des regrets, de la colère et des envies inavouées. Henry monte à l'étage après un rapide bisous à sa mère. Régina reste silencieuse. L'invité à entrer ? Lui offrir un verre ? Verser la potion ? ou la laisser repartir ?
Régina, bras croisé comme à son habitude, réfléchit et en reste muette. Emma bras ballants, face à elle, ne déguerpit pas comme à son habitude, elle reste aussi plantée là, les yeux rivés sur Régina. Cette dernière ouvre enfin la bouche et les mots qui sortent la surprenne elle-même.
_Vous restez diner avec nous ?
Emma est plus surprise encore.
_Hm…
_J'ai fait des lasagnes, trois fois trop pour seulement Henry et moi, alors… si vous n'avez rien de mieux à faire …
_Non effectivement, je n'ai rien de mieux à …faire. Je comptais réchauffer un plat tout près et regarder un vieux film. Emma répond en baissant la tête comme honteuse de songer à accepter.
_Que diriez-vous de faire la même chose mais avec un plat fait maison, Henry et … moi.
Son regard à cet instant n'est pas faux, il est honnête. Une honnêteté qu'elle ne peut dissimuler alors qu'elle excelle d'ordinaire à ce jeux. Emma voit son trouble, elle sent que son intention est sincère, alors elle entre.
Régina la conduit en cuisine, elle rajoute un couvert. Elle sert deux verres de vin de rouge pendant qu'Emma lui parle du nouveau projet de science d'Henry qui a l'air de le passionner. Régina l'écoute et ne pense pas une seconde à la fiole de venin dans sa poche. Pourtant ce serait le moment idéal. Quand elle tend le verre à Emma, elle y pense soudain et son regard se transforme. On lit l'oubli dans ses yeux. Emma le remarque et tique en s'emparant du verre. Régina se ressaisit et boit une gorgée pour faire passer son malaise.
_La glace, j'ai oublié de sortir la glace du congélateur pour le désert. Dit-elle en se précipitant vers le frigo pour faire diversion.
Emma sourit et s'assoit sur un des tabourets de l'ilot central de la cuisine. Régina la rejoint et elles parlent d'Henry jusqu'à ce que le bip du four ne les coupe. Régina sort le plat du four et crie « à table ». Emma est mal à l'aise, l'odeur est alléchante, l'ambiance est agréable pourtant elle se sent bizarre comme plongé dans une intimité qui n'est pas la sienne, c'est la vie d'Henry et Régina et elle est là, elle ne trouve pas sa place, elle se questionne sur sa présence ici.
Henry dévale la marche à toute vitesse et déboule dans la cuisine. Il se stop net en voyant sa mère Régina tendre le saladier et les spatules à sa mère Emma. Il reste planté là, la bouche et les yeux grands ouverts. Ses mères le regardent, puis se regardent. Ensemble elles haussent les épaules et ont presque envie de rire. Emma tourne les talons et part vers la table à manger.
_Mon chéri, Mademoisell… hm… Emma reste avec nous pour diner, je suppose que tu n'y vois aucune objection ?
_Aucune maman. Arrive enfin à articuler Henry.
Il se met à table avec une joie non dissimulée. Ils dînent tous les trois en discutant du projet d'école d'Henry. Il a déjà plein d'idées. Parfois Emma regarde Régina avec tendresse et admiration. Régina en est presque mal à l'aise mais Emma ne peut s'empêcher de penser que si son fils est un si bon garçon c'est en partie grâce à elle, elle n'est pas que la Méchante Reine finalement. Régina détourne le regard avec un léger sourire.
Plus tard, dans le large canapé du salon, ils regardent un vieux film que Régina et Henry n'ont jamais vu. C'est Emma qui a choisi sur les chaines câblées. Empreint de nostalgie et d'humour, ils regardent Le Songe d'une nuit d'été, adaptation filmographique du classique de William Shakespeare, en mangeant des coupes de glaces vanille fraise.
Henry finit par s'endormir, la tête sur les genoux d'Emma et les jambes sur Régina. Le film se finit et Emma monte Henry dans sa chambre. Quand elle redescend, Régina n'a pas bougé, elle fixe toujours l'écran où le générique défile avec la couverture sur elle. Emma reste à la porte du salon et l'observe quelques secondes et se surprend à sourire. Apparemment le film a eu une signification pour Régina qui semble de pas s'en défaire et continuer de réfléchir dans le noir quasi intégral.
Régina se ressaisit et la voit enfin. Elle bondi du canapé et Emma s'attend à ce qu'elle la raccompagne à la porte mais eu lieu de cela elle lit l'hésitation dans son regard.
_Emma vous voulez un café ?
Voyant Emma hésiter à son tour, Régina insiste.
_Un thé ? Un chocolat… avec de la cannelle ?
_Non merci. Dit précipitamment Emma.
Elle sourit mais son regard est perturbé. La douceur dans la voix du Maire est très inhabituelle, Emma prend presque peur car cela lui plait et elle préfère s'esquiver.
_Merci mais je vais rentrer. Une prochaine fois peut être.
_Bien. Répond Régina un peu déçue.
Emma se laisse guider jusqu'à l'entrée. Au seuil de la porte, Régina entre ouvre la porte, l'ambiance est ambiguë entre elles. Toutes deux semblent heureuse de pouvoir être « amie » pour le bien d'Henry mais quelque chose d'étrange persiste entre elles, et elles restent sur leurs gardes.
Régina se place contre la porte à demie ouverte et Emma la frôle pour passer. Elle se stoppe à sa hauteur, leurs regards se rencontrent, leurs respirations se bloquent et elles loupent un battement de cœur. Emma ose le dire.
_Merci Régina, pour ce diner. C'était délicieux. Et pour cette soirée…
_Ce n'était pas grand-chose.
_Les lasagnes étaient succulentes mais je ne parle pas que de cela.
_De quoi alors ?
_De m'accepter dans vos vies. D'avoir cessé de me faire la guerre parce que je suis sa mère.
_J'ai dépassé tout cela.
_Je le vois et c'est pourquoi je vous remercie.
Régina dégluti difficilement, Emma Swan est sincère et le ton de sa voix est émue, elle tremble presque de devoir prononcer ses paroles. Régina découvre alors que les gens peuvent vraiment changer et être sincère avec elle, elle la Méchante Reine que personne ne croit capable d'aimer. Au contraire c'est parce qu'elle aime trop qu'elle en est arrivée là, mais ça les gens ne le savent pas.
Régina ferme les yeux quelques secondes comme si elle savourait les paroles d'Emma. Elle prononce un « de rien » dans un souffle presque inaudible. Elle est sincère, elle n'arrive plus à mentir, du moins plus devant elle.
Elles sont si proches, que chacune sent le parfum enivrant de l'autre. Sans le vouloir toutes les deux s'enivrent de ce moment. Régina prend peur et recule pour laisser Emma sortir. Elle descend les marches de l'entrée et habituellement la porte claque immédiatement derrière elle mais ce soir, Régina reste à la porte et regarde Emma s'éloigner jusqu'au portail. Un dernier regard puis plus rien.
Cette nuit chacune dans son lit, elles ne peuvent s'empêcher de se demander ce qui avait bien peu se passer. Régina était folle de rage contre elle-même, c'était le moment idéal et pourtant elle avait carrément oublié de sortir la fiole et de verser le venin dans son vin. Emma est chamboulé, elle a apprécié ce diné, beaucoup plus que le simple fait d'être avec Henry, elle a apprécié Régina, sa conversation, sa présence, sa cuisine, son sourire et ses regards affectueux sur leur fils. Emma et Régina toutes deux insomniaques cette nuit, pensent l'une à l'autre sans le savoir.
Suite Chapitre 6…
