Me revoilà ! Comme promis, je vous publie le premier OS d'une série que j'espère être longue.

N'étant pas familière avec cette forme, j'ai décidé de reprendre les thèmes de mes histoires, en m'attardant plus sur certains points.

Ici, c'est un OS inspiré par « Le mur du silence »…j'espère qu'il vous plaira.

OS «Le mur du silence»

Nevada – Novembre 2005

L'obscurité et le silence se mariaient très bien, trop bien peut-être même. Parfois, le calme des ombres était perturbé par les lumières fuyantes, vagues témoins des voitures qui passaient au loin.

Dean profita du passage de l'une d'entre elles pour soupirer avec lassitude. Ses yeux ne s'intéressèrent même pas à l'environnement de la chambre louée pour la nuit et choisirent plutôt de se poser sur son frère, profondément endormis.

Toujours habillé, Sam semblait s'être laissé tomber de fatigue, vidé de toute énergie. Dean, pour préserver son cadet, avait prétexté aller leur chercher à manger. Les larmes de son frère, prêtes à déborder n'importe quand ne lui avaient pas échappées, aussi devinait-il que pour une fois en une semaine, Sam aurait espéré pouvoir pleurer sans être vu de son ainé.

Alors, Dean avait quitté la pièce…oh combien de temps ? Une heure, peut-être deux…Il se souvenait simplement avoir essayé d'appeler doucement son benjamin en rentrant, alerté par l'obscurité dévorant la chambre. Sam n'avait pas répondu…Sam s'était finalement endormis, les joues encore humides et les paupières rougies par le chagrin.

L'empreinte lumineuse d'une autre voiture glissa sur le visage du jeune homme qui ôta la main qu'il se passait dans ses courts cheveux, en proie à de nombreuses émotions. Un regard machinal sur son téléphone portable, et surtout, sur l'agaçante inactivité de celui-ci qui le fit soupirer de nouveau. John allait-il donc s'obstiner à rester silencieux ? Malgré ce qui venait de se passer à Palo Alto ? Malgré le fait que Sam n'y soit pas resté uniquement grâce à son intervention à lui ? Malgré la tragédie qui reliait désormais son petit frère et son père d'une manière aussi dramatique que dangereuse ?

Son cadet s'agita très légèrement dans son sommeil et se murmura quelque chose. Dean, qui s'était déjà tenu prêt à le réveiller pour lui éviter un nouveau cauchemar se stoppa net lorsqu'il comprit qu'il rêvait…Un rêve…un simple rêve…Le prénom de Jess fut chuchoté de manière quasi-inintelligible et Sam se retourna, continuant sa conversation imaginaire avec la défunte jeune fille. Dean se rassit, surpris par les paroles somnambules de son cadet qui, d'une recette de gâteau râtée se mit soudain à changer d'expression.

Le rêveur fronça des sourcils et resserra l'une de ses mains sur la veste qu'il portait, comme s'il cherchait à se protéger du froid. Une succession de mots sans le moindre sens glissèrent entre ses lèvres pincées…Inintelligibles…sauf un…celui qui serra le cœur de Dean… « Papa ».

Une fois…Sam ne prononça ce mot qu'une seule et unique fois, son ainé remarqua soudain avec tristesse que c'était le genre de mot qui avait été peu à peu banni du vocabulaire de son frère… Un nouveau coup d'œil sur son téléphone le fit soupirer…la raison en était évidente.

Coldwater, Kansas – 1983

Le motel était sordide…il était froid, sale et mal isolé…John et ses enfants pouvaient profiter de la dispute des locataires d'à côté sans même avoir à forcer l'oreille.

Le père de famille en avait eu tellement assez qu'il avait fini par aller régler le problème lui-même…Depuis, il n'entendait plus rien.

Mais le silence n'était pas forcément mieux que les cris d'un jeune couple en pleine crise…Et pour seule compagnie, John ne trouva que cette vieille bouteille de whisky bien dissimulée derrière la TV en panne… Il n'avait même pas eu à le demander, que Dean était allé se coucher…Sans prononcer le moindre mot, comme à son habitude. Une habitude qu'un père aurait dû corriger…Son fils ne devait pas s'enfermer dans ce mur de silence...même après avoir vécu un tel drame.

Mais John n'y arrivait pas…il n'arrivait pas à se voir comme un père. A tel point que son gamin de quatre ans ne parlait plus…Et que son bébé de six mois hurlait à pleins poumons depuis son berceau improvisé dans l'espoir que quelqu'un vienne s'occuper de lui.

John entendait...le père en lui le priait de se lever et d'aller voir pourquoi Sam pleurait ainsi. Mais le chagrin reprenait toujours le dessus, et la bouteille de whisky fut son seul intérêt.

Le nourrisson continua de pleurer toute les larmes de son corps, désespérant qu'un visage familier ne se penche au-dessus de lui et ne lui murmure des paroles rassurantes.

Cette nuit-là ressemblait à tant d'autres…Dean avait fini par s'extirper de son lit, assourdis par les cris de son frère, puis finalement inquiet de ses hoquets à répétitions.

Les larmes coulaient en abondance sur les joues rebondies du bébé dont les hurlements de désespoir avaient été peu à peu remplacés par des soubresauts larmoyants, accompagnés de quelques toussotements maladroits et encombrés.

Lorsqu'il avait aperçu le visage de Dean, le nourrisson avait tendu les bras vers lui, babillant quelque chose avec reconnaissance. L'enfant avait maladroitement prit son cadet contre lui, qui reprit presque aussitôt ses pleurs, comme pour se plaindre.

Il y eu un grognement de mauvaise humeur depuis le salon et le petit garçon emmena le bébé dans sa chambre, là où il pourrait le calmer sans gêner papa.

Nevada – Novembre 2005

Des histoires comme celle-ci, Dean en avait plein. Et même s'il n'aimait pas se remémorer cette image de son père si pitoyable, à la limite du détestable, il lui arrivait assez souvent de se repasser quelques-uns de ces films dans sa tête. Dans ces moments-là, il comprenait l'animosité qui animait son jeune frère.

Sam…Sam le deuxième fils…le plus jeune…Le rebelle…l'incompris… L'étranger.

Sam avait eu tellement d'occasion de lancer ses reproches à la figure de leur père…Et John ne s'était pas gêné pour le réprimander tout au long de sa vie…Dès qu'il fut en âge de parler et de marcher, Sam était sujet aux réprimandes. Dean avait toujours trouvé que son frère exagérait…Un adolescent qui se fait passer pour une victime…Oh…c'était si inhabituel ! Ironisa l'esprit de l'ainé.

Mais les faits étaient là…ils l'avaient toujours été, et le jeune homme, malgré ses sourires gentils et ses railleries amicales n'était pas aveugle.

Le Sammy bébé pleurait trop…Il était trop bruyant et était capricieux. Le Dean enfant ne supportait pas les larmes de son petit frère, riait quand il riait et se félicitait d'être le seul à pouvoir le faire manger.

Le Sammy enfant posait trop de questions…il laissait trainer ses affaires…Et pendant ce temps, le Dean jeune adolescent tentait d'y répondre maladroitement et suivait d'un œil curieux et bienveillant l'éducation scolaire de son petit frère.

Sammy ne faisait aucun effort pour réussir les exercices de tirs…John lui reprochait ouvertement de ne pas se sentir concerné par la tragédie de leur famille. Alors Dean l'entrainait en cachette.

Et puis un jour…Sammy avait grandi et avait laissé la place à Sam. Sam l'adolescent…le rebelle…qui était désormais aussi grand que leur père et qui n'avait plus peur de le défier.

Sam était un jeune homme à l'avenir prometteur qui osa remettre en cause toute l'éducation militaire apportée par John…Sam s'était détourné de son père.

Et Dean l'avait envié.