Dans un des quartiers bourgeois de Londres, alors que la fine pluie automnale trempait le parc situé au centre de Grimmaurd Place, un réveil retentit au deuxième étage du numéro 12. Derrière les lourds rideaux de la fenêtre donnant sur ce même parc, un jeune homme pestait de toutes ses maigres forces matinales contre cet objet forcément inventé par un être maléfique. Une main donna plusieurs coups de paume sur ledit réveille-matin avant que la sonnerie stridente, choisie expressément pour réveillé le plus grand des dormeurs, ne s'arrête.

Cette même main tâtonna le sol avant de tomber sur l'interrupteur d'une petite lampe de chevet. Une fois la pièce éclairée une tête brune sortie de sous l'épaisse couette sous laquelle elle se cachait et regarda autour d'elle comme pour se souvenir de l'endroit ou elle se trouvait.

Ah oui le déménagement

Trouvant la paire de lunettes circulaires posées aux pieds de son matelas, le jeune homme – car la tête devait bien appartenir à quelqu'un – pris un air résigné comme devant une fatalité face à laquelle on ne pouvait rien (c'est le principe premier de la fatalité après tout).

Autour de son matelas deux place, posé à même une douce et épaisse moquette aux tons rouge sombres, se trouvaient uniquement une petite lampe de chevet, un bureau sur lequel étaient amoncelés quelques vêtements – le peu qu'il avait pris avec lui pour palier à un éventuel retard du camion de déménagement – et trois cartons sur lesquels était écrit Harry livres I, Harry livres 2, et Harry partitions.

Maudits déménageurs, maudit déménagement, maudit temps, maudits aéroports new yorkais qui laissent pas décoller leurs avions à cause d'une tempête de neige, maudite pluie qui bloque les routes écossaises, maudite vie ! Ils n'auraient pas pu faire venir directement les affaires à Londres, noooooooon il fallait passer par Edimbourg parce que les contrôles douaniers sont moins pointilleux et laisseraient passer en douce les dossiers que ce sale cabot avait amassé sur tout le gratin londonien. C'est sur que l'influence des Blacks est plus forte que celle des Malfoy dans le nord du pays mais ce n'est pas une raison pour TOUT faire passer par l'Ecosse ! Merde quoi j'en ai encore pour dix jours à dormir à même le sol.

Dans un geste rageur le brun se leva de sa couche improvisée en faisant voler la couette à l'autre bout de la pièce – elle semble trop grande sans meubles – et alla ouvrir les grands rideaux en velours qui lui cachaient la vue du parc.

Maudite pluie anglaise

Il alla vers le bureau pris un grand tee shirt noir ayant appartenu à Sirius, enfila une paire de chaussette qui lui semblait propre et sortit de sa chambre sans prendre la peine d'enfiler un pantalon sur le caleçon avec lequel il avait dormis.

Une fois dans le couloir il frissonna devant l'ambiance froide qui se dégageait de l'étage.

De mon étage pensât-il avec un sourire

Le parquet en bois sombre donnait au couloir un aspect presque terrifiant, aspect rehaussé par les grandes fenêtres qui, à chaque extrémité du couloir, étaient cachées par de lourdes tentures noires. Les lampes anciennes accrochées à intervalle régulier sur le mur diffusaient une lumière pâle lorsque leurs ampoules n'étaient pas grillées. Le jeune homme réprima un frisson avant de se diriger vers les escaliers qui se trouvaient près de l'une des fenêtres. Avant de descendre il jeta un autre coup d'œil à travers la fenêtre comme s'il espérait que la pluie qu'il avait vu un peu plus tôt n'était issu que de son esprit embrouillé post-réveil.

AH c'est mieux !

La pluie ne tombait quasiment plus et les rayons du soleil semblaient même sortir des nuages derrière les maisons qui entouraient Grimmaurd Place.

C'est donc d'un pas plus guilleret qu'Harry descendit les escaliers dont la rampe, savant mélange de bois sombre et de fer forgé, le fascinait. S'il avait du choisir l'endroit le plus beau du manoir il aurait sans doute dit les escaliers. Ils étaient assez larges pour permettre à trois hommes d'y passer de front, la rampe avait été crée sur commande lors de la construction de la maison près de deux siècles auparavant, le tapis qui ornait les marches était dans les tons pourpres et aurait pu accentuer le coté ténébreux de l'endroit s'il n'y avait les étranges arabesques dorées brodées sur les cotés. L'éclairage se faisait au moyen de lampes style renaissance dont la douce lumière donnait aux escaliers un coté mystérieux comme s'ils menaient vers un endroit incroyable et magique.

Le brun sourit à ces pensées et continua sa descente ne s'étant pas aperçut qu'il s'était arrêté.

Quelques marches plus bas, arrivé au premier étage, il stoppa sa descente ayant entendu le bruit d'une porte qui s'ouvre. Il sourit en sachant très bien que son père, comme lui-même, ne s'étaient réveillés si tôt que pour souhaiter bonne chance au troisième homme de la maison qui commençait son nouveau travail aujourd'hui.

Le couloir du premier étage était en tout point semblable à celui du deuxième si ce n'est qu'il était légèrement plus long.

Réveil difficile, constata le jeune homme d'une voix claire.

L'homme qui venait de sortir de la pièce était un homme d'une quarantaine d'année mais qui en paraissait dix de moins – la vie au grand air y-a qu'ça d'vrai se plaisait-il à dire avant qu'on ne lui fasse remarqué que passer deux mois dans l'année dans un chalet alpin ou au bord d'une mer quelconque ce n'était pas vivre au grand air – il ne portait qu'un pantalon de pyjama noir en ce qui semblait être de la soie faisant ressortir la pâleur de son torse finement musclé et accentuant la longueur et la fermeté de ses jambes et le rebondit parfait de ses fesses. Ses cheveux aussi sombres que son pyjama encadraient un visage masculin et viril qui pouvait être à la fois terrifiant et doux. Toute cette profusion de noir et de blanc ne visait qu'à mieux faire ressortir le bleu intense et profond de ses yeux.

C'était une règle d'or chez lui, ne jamais porter autre chose que du noir et du blanc, les seuls touches de couleurs qu'il s'accordait en société étaient ses cravates ou ses écharpes qui prenaient la teinte de ses yeux. Dès son plus jeune âge il avait compris que s'il voulait réussir il lui fallait charmer, surtout après que ses parents l'aient mis à la porte, aussi depuis près de trente ans Sirius Black avait élevé la séduction au rang d'art. Dans son travail il était le meilleur grâce à la maîtrise totale de son corps, chose dont sa famille se moquait sans cesse, elle qui avait droit à l'adolescent désinvolte et surexcité qu'était resté l'homme au fond de lui.

Les yeux de l'homme se tournèrent vers la voix qui venait de l'interpeler et une étincelle de bonheur les fit scintiller un instant.

Autant que le tient, déclara t-il dans un grognement, Sirius étant incapable d'émettre un son clair avant son premier café.

Il se dirigea vers le plus jeune pour le prendre dans ses bras et lui ébouriffer un peu plus les cheveux.

Bien dormis Spikhead ?

Eh c'est normal si tu me décoiffe à chaque fois que tu me vois !

Les deux hommes se sourirent d'un air entendu. Ce n'est pas parce qu'ils étaient partis de New York pour venir habiter dans l'ancienne maison de Sirius qu'ils devaient changer leurs habitudes. Ils descendirent ensemble les escaliers menant au rez-de-chaussée et sourirent une nouvelle fois. Non, leurs habitudes n'étaient pas prêtes de changer.

Au bas des escaliers se trouvait la raison du sourire doux d'Harry et de celui à la fois tendre et un peu pervers de Sirius.

Un homme, dont les cheveux châtains tombaient négligemment sur deux prunelles oscillant entre le brun claire et l'ambre, se tenait appuyer à la colonne terminant la rampe de l'escalier. Il portait un pantalon de velours brun assez large permettant aux esprits de s'imaginer un nombre considérable de choses. Une chemise à moitié boutonnée donnait sur un torse mince. Il se dégageait de l'homme une impression de fragilité et de douceur, son aspect presque androgyne en fascinait plus d'une – ou d'un. Mais Harry savait qu'il ne fallait pas s'y fier.

Jusqu'à l'âge de dix ans il avait vu en Rémus un homme doux et tendre et il devait l'admettre ce n'était pas la première personne à qui il pensait pour illustrer les termes de fort, viril ou imposant. Harry se souvient encore du jour, un peu avant Noël, où Sirius était rentré en trombe dans sa chambre en haletant « Rémus s'est fait attaqué. J'y vais ».

Flash back

Harry ne lui avait pas laissé le temps de protester il s'était levé et était partit en chaussons vers l'endroit où l'agression avait eut lieu. Harry n'avait osé poser de questions mais depuis qu'il était monté dans la voiture de Sirius il ne cessait d'adresser des prières à la première divinité qui voudrait bien l'entendre pour que Rémus soit encore en vie. Sirius n'avait pas décollé ses mâchoires depuis qu'il était sortit de la chambre de Harry.

Ils arrivèrent rapidement vers un quartier assez sombre que les feux des gyrophares rendaient glauque. Harry et Sirius se précipitèrent de la voiture et les yeux d'Harry se remplirent de larmes à la vue d'une civière sur laquelle se trouvait un de ces sacs sombres que l'on voit dans les films et qui sont utilisés pour cacher les corps des cadavres. Mais voyant que Sirius ne s'arrêtât pas il le suivit vers l'attroupement de policier et médecins.

Autour d'eux au moins trois personnes reposaient sur des civières inconsciente, les médecins s'afférant autour d'elles pour, semblerait-il les maintenir en vie. Harry se souvient avoir jeté un rapide coup d'œil cherchant Rémus mais ne le trouvant pas parmi les victimes les questions commencèrent à se bousculer dans sa tête. Questions qui redoublèrent en trouvant au milieu des policiers et médecins Rémus assis sur une poubelle l'air abattu et triste répondant distraitement aux questions des agents de police pendant qu'un médecin lui faisait des points de suture à l'arcade et qu'un autre l'examinait du mieux qu'il pouvait.

Sirius s'était jeté au cou de Rémus avant que quiconque n'ait pu faire quoi que ce soit, Harry était resté en retrait soulagé de voir l'homme qu'il considérait comme un père sain et sauf. En écoutant les policiers il apprit que Rémus avait été abordé par quatre hommes qui l'ayant vu descendre de sa moto s'étaient dit qu'il devait avoir pas mal d'argent pour posséder une telle merveille.

Les témoins qui avaient vu la scène depuis leur fenêtre et qui avaient appelés la police n'ont cessés de répéter que le jeune homme – Rémus – n'a pas arrêté de chercher à raisonner ses agresseurs. Lorsque les témoins étaient descendus pour l'aider ils s'étaient retrouvés face à Rémus envoyant coup de pied et de poing et terrassant ses agresseurs qui après avoir vu l'un des leur tomber inconscient après un coup de pied de Rémus l'avaient attaqués tous ensemble.

Harry n'eut pas d'autres explications, il accompagna Sirius à l'hôpital, les médecins préférant garder Rémus en observation. Durant le trajet Sirius lui expliqua que Rémus avait été le plus jeune ceinture noir européen en trois arts martiaux mais que suite à un accident semblable où il a envoyé un de ses agresseurs dans le coma il à décidé de tout arrêter. Harry s'était inquiété alors parce qu'il avait bien vu un homme mort mais Sirius lui dit simplement que c'était l'un des témoins qui avait tiré sur l'homme parce qu'il allait lui-même tirer sur Rémus.

Malgré cela, il fallut trois bon mois à Rémus pour se remettre du fait qu'un de ses agresseurs s'était fait tué. Il était allé voir la famille pour s'excuser et les aider à préparer les funérailles.

Fin du flash back

Harry sourit en se souvenant de cela. Pour lui Rémus resterait l'homme bon qu'il a toujours été malgré la puissance que cachait son corps. Son sourire redoubla et il dépassa Sirius pour arriver en premier dans les bras de Rémus qui l'enlaça comme il pu malgré les deux tasses fumantes qu'il tenait dans chaque main. Harry savait que c'était enfantin de faire un câlin à ses parents à 23 ans mais c'était une des nombreuses habitudes qu'ils avaient depuis plus de dix ans alors … continuant le rituel matinal Harry prit la tasse de café au lait que lui tendit Rémus avant d'aller vers la cuisine.

Sirius finit de descendre les escaliers pendant que le châtain prenait une gorgée de l'autre tasse. Aussitôt la tasse éloignée de ses lèvres il sentit plus qu'il ne vit une bouche s'imposer à la sienne pendant que deux bras venaient rapprocher son torse d'un autre dangereusement dévêtu. Rémus sourit dans le baiser tandis que la langue de Sirius imposait son rythme à sa jumelle. Rémus éloigna son visage mettant fin au baiser. Il sourit à l'homme qui partageait sa vie depuis près de vingt ans et posa ses lèvres sur le front du brun en lui murmurant je t'aime/ Sirius lui rendit ses paroles alors que Rémus tendait la seconde tasse pleine d'un café noir et amer.

J'aime le gout de mon café à tes lèvres.

Et j'aime le gout de ce café uniquement lorsque je sais que tu viendras prendre ta première gorgée à mes lèvres.

Les deux hommes se tournèrent et allèrent main dans la main vers la cuisine où les attendait un Harry plus réveillé qui remplissait sa deuxième tasse tout en en tendant une à Rémus. Ils se regardèrent d'un air entendu. Malgré tous les bons souvenirs qu'ils avaient des Etats Unis, ils pourraient reprendre leur vie ici. Ils le devaient même.

Harry avait toujours voulu connaitre Londres après les nombreuses histoires que ses deux pères lui avaient racontées. Il avait encore des flashs, des souvenirs confus, qui lui revenaient de l'époque où il avait vécu ici avant que ses vrais parents ne meurent. Harry avait appris à patienter sachant que les deux hommes devaient finir de faire leur deuil avant de revenir au point de départ. Harry comprenait, lui, n'ayant pas vraiment connu ses vrais parents, ne ressentait pas la tristesse de leur perte comme Sirius ou Rémus, mais il acceptait de prendre son temps. Il savait que leur couple avait été à deux doigts de se briser à la mort de ses parents et il ne voulait pas, en pressant les choses, les faire retomber dans les questionnements et la tristesse.

Harry était heureux avec ses deux pères et jamais il n'aurait imaginé qu'ils puissent ne pas être ensemble un jour. Pour lui Sirius et Rémus étaient comme une vérité générale quelque chose d'inébranlable, de nécessaire.

Mais il savait aussi que revenir trop tôt à Londres serait une bêtise car Sirius refusait catégoriquement d'habiter autre part que dans la maison de ses parents. Non pas que cette maison lui rappelait des bon souvenir, Harry savait que Sirius avait détesté ses parents au point de quitter le domicile familial à l'âge de 15 ans, mais il savait aussi qu'après leur mort brutale trois ans plus tard dans le crash d'un avion, il y avait vécu avec son frère certains des meilleurs moments de sa vie. Ils s'étaient fait la promesse d'y vivre tous les deux, prétextant que la maison était suffisamment grande pour les abriter eux et ceux qui feront, plus tard, parti de leur famille. Sirius disait que Regulus lui avait souvent fait remarquer que Rémus pouvait aussi bien venir habiter définitivement chez eux au lieu de garder la petite garçonnière à l'autre bout de Londres.

Regulus n'était plus, emporté par un cancer fulgurant qui n'a pas été détecté assez tôt et seul le soutient de ses amis avait aidé Sirius à s'en remettre avant que ces derniers ne meurent à leur tour. Ces souvenirs avaient hanté le couple durant leurs premières années. Harry se souvenait vaguement d'un Rémus qui venait tous les vendredis soirs passer la soirée avec eux, prétextant qu'il avait aussi le droit de voir Harry, il se souvenait du regard triste de Rémus face à un Sirius buté voulant couper les ponts avec toutes les choses concernant son passé. C'était fini maintenant. La persévérance de Rémus était venue à bout de l'entêtement siriusien, mais cela lui avait pris plus d'un an.

Il leur a fallut longtemps avant de panser leurs plaies ; la mort de Regulus puis celle des Potter les avait anéantie. Mais Sirius un matin s'était réveillé et avait pris sa décision, c'était comme si la maison l'appelait, comme s'il savait au fond de lui qu'il était l'heure de rentrer au bercaille. Alors il les avait prévenus, sachant parfaitement que Rémus était déjà prêt à retourner là-bas, et début septembre ils prirent leurs dispositions pour pouvoir déménager avant les fêtes de Noël. Sirius ayant besoin de tout le deuxième semestre pour reprendre les rênes de la branche BLACK de la Black, Malfoy and Prince Cie, Rémus avait déjà posé sa candidature dans un prestigieux collège privé dont le directeur était un ancien ami et qui lui avait confirmé avoir besoin d'un professeur de lettres pour l'après Noël, quant à Harry, qui avait décidé de toute manière de prendre une année sabbatique, décida d'en profiter pour se dépatouiller avec tous les problèmes d'équivalence qui se poseraient lorsqu'il voudra s'inscrire à l'université de médecine de Londres.

Harry s'ébroua, se rendant compte qu'il s'était perdu dans ses propres pensées. Il but d'une traite la fin de son café tiède avant d'aller souhaiter bonne chance à Rémus pour son entretient avec le directeur et sa rencontre avec le personnel. Rémus cessa de fredonner la chanson qui passait à la radio française et Harry s'aperçut que lui aussi s'était mis à la murmurer.

Il allait quitter la pièce avant de se retourner pour voir Sirius et Rémus s'embrasser et si Harry savait interpréter les signaux – les mains de Sirius glissées sous la chemise de Rémus à présent complètement déboutonnée et un Rémus qui avait migré sur les genoux de Sirius – Sirius allait encourager à Rémus à sa manière.

Harry sourit et quitta la cuisine

Et ne faites pas de bêtises ! Papa doit être partit dans moins d'une heure, leur cria t-il en montant les escaliers.

Il se dirigea vers la salle de bain de la chambre bleu au premier étage, la plus spacieuse, avec une douche à jets massant. Avant d'entrer dans la douche il alluma la chaine incrustée dans le carrelage mural à l'opposé de la douche. Les premiers accords d'un piano retentirent dans la pièce à l'acoustique idéale pour ce genre de morceau.

La musique et le bruit des jets d'eau coupaient Harry du reste du monde.

Tant mieux d'ailleurs, Rémus a tendance à crier assez fort.