A l'ombre de ton sourire
oOo
Maman,
Un jour une amie m'a dit, si tu as la gorge trop serrée pour parler et que tes larmes se sont figées, alors prends une plume et écris. Écris tout ce qui te vient à l'esprit. Laisse ton cœur parler et couche tes mots sur un papier. L'encre parlera, comme une larme qui glisse en toi.
Et aujourd'hui, plus que tout, j'ai besoin d'évacuer ces mots qui me brûlent, cette peine qui, lentement, me consume. Il n'y a qu'à toi dont j'ai envie de parler, alors je t'écris cette lettre. Je la confierais au vent pour qu'elle puisse te l'apporter, là où tu es.
Je ne sais pas si tu m'entends, ni si tu me vois en ce moment.
Je sais juste que tu n'es pas loin, quelque part tu m'attends à l'autre bout du chemin.
Avec ton sourire, ton éternel sourire. Qui ne demande qu'à être cueilli.
Le sourire qu'une mère adresse à son enfant, à chaque instant de sa vie, peu importe où il se trouve…
Celui qui me permet de tenir et de rester debout.
Celui auquel je m'accroche quand je suis dans l'obscurité.
Alors Maman,
Si tu vois papa, Sirius, Remus et tous ceux qui sont tombés au combat, tu leur diras que la guerre a cessé et que l'aurore s'est enfin levée.
Je ne pourrais pas te dire que demain ira mieux et que bientôt le ciel sera bleu…
En fait, j'aimerais que la pluie ruissèle de toutes ses forces et qu'un vent puissant se lève, afin qu'ils lavent la terre imprégnée du sang des innocents et sèchent nos visages constellés de larmes.
Sang-pur, sang-mêlé, né-modus….. Tout est mélangé à mes pieds, dans l'herbe séché.
Je n'arrive même plus à distinguer qui est qui, mes yeux sont voilés.
Tant de vies se sont brisées, tant de sourires se sont figés, en une fraction de seconde, en un battement de cils.
Il faudra du temps pour tout reconstruire. Poudlard est en ruine et de nombreuses familles sont en deuil (si tu vois Fred Wesley, fais-lui un petit coucou s'il te plait…). J'ignore si une vie entière suffira pour cicatriser toutes ces plaies. Voldemort est tombé, mais avec lui, beaucoup de mes amis…
Au bord du lac, il y a Luna qui serre Ginny dans ses bras. Pour la réconforter elle lui chante une douce mélopée. Ses paroles sont un peu étranges mais leur sens m'importe peu.
Sa voix est douce et se laisse facilement porter par le vent. Peut-être même qu'elle va atteindre le firmament.
Alors tends-bien l'oreille maman et tu entendras la mélopée de Luna. Celle qui vit à travers moi.
Non loin de là, il y a aussi Neville Londubat. Je crois que le héros qui sommeillait en lui a finalement pointé le bout de son nez. Plusieurs fois je l'ai vu glisser, trébucher mais jamais il n'est tombé. Et je pourrais même rajouter que c'est lui qui aide les gens à se relever. Je le sais, j'en fais parti.….
A l'endroit où je me tiens, je vois Tonks et puis Lupin. Leurs regards sont éteints, ils t'ont sans doute déjà rejoint. Réunis à jamais, plus personne ne pourra les séparer. J'y veillerai, dis-leur, s'il te plait.
Dora a un petit sourire qui me fait penser à toi. Le sourire d'une mère pour son fils. Le sourire d'une dernière fois.
Maman, j'ai encore tant de choses à te raconter, à partager. Mais une page n'y suffirait pas alors je m'arrête là. Le vent s'est enfin levé, il a séché mon encre et mes larmes. Je vais pouvoir lui confier ce précieux papier. Je ne peux pas te l'apporter, il le fera pour moi.
Je ne peux pas te serrer dans mes bras mais je pense à toi.
Je ne te dis pas adieu, ce n'est qu'un au revoir.
Bientôt, je reverrai ton sourire. Ton éternel sourire.
Et on sourira ensemble, avec papa, Sirius et tous les autres,
Ton fils, Harry
