Le paysage défile le long de la fenêtre, de la vitre, du part-brise, de la voiture. Mais toi, tu n'y fais pas attention. D'ailleurs, à quoi fait tu attention désormais ?

Le paysage défile, change, se modifie, les immeubles s'enchaînent, se suivent et pourtant, aucun n'est semblable au précédent. Un peu comme tes souvenirs, non ?

Le paysage te file entre les mains, sans que tu ne puisse rien y faire. Un peu comme ta vie, non ? C'est pour ça que tu aime conduire, hein ?

Le paysage ne s'arrête pas, tout comme ta voiture, ton petit bolide, et toi tu ne dirige plus rien. Tu ne dirige plus rien depuis si longtemps..

Le paysage se modifie le long de ta rétine, et l'image ne te parvient pas telle qu'elle est réellement. Tu aurais-du arrêter, et pourtant tu n'en as rien fait, te noyant encore plus dans l'océan de la drogue. La dépendance t'a rejointe.

Les vitesses s'enchaînent, la rapidité arrive, tu ne contrôle plus rien. Les lumières défilent, les passants apparaissent et disparaissent aussi vite. Les rues à cette vitesse ne sont que petits bout de vie. Et ta mémoire t'assaille violemment. Avec chaque nouvelle lumière qui apparaît dans ton champ de vision, c'est un souvenir qui refait surface. A chaque passant que tu croise rapidement, c'est un autre souvenir qui vient cogner à ta tête. Tu ne contrôle plus rien depuis si longtemps..

La voiture tourne, change et accélère, ralenti peu. Tu ne fait que bouger un peu le volant, juste assez pour ne pas te prendre le trottoir lors d'un virage, juste assez pour ne pas aller tout droit lors d'un tournant. Tu ne contrôle rien d'autre.

Tes yeux se plissent, tu accélère. Tu ne sais pas, tu ne sais plus. Regarde devant toi.

Une jeune femme traverse la rue. Et tu est la toi, a accélérer toujours plus, sans t'arrêter. Et elle, elle traverse. Et puis, alors que tu es si proche d'elle, elle se retourne. Éclair de cheveux noirs, elle tourne la tête, et te regarde de ses beaux yeux marrons cernés de noir. Et toi, tu dévie ta trajectoire, fait tout pour l'éviter, à quelques mètres d'elle, tu fait une embardée sur le côté, tente coûte que coûte de tourner, et tout ce que tu parviens à faire, c'est de la cogner, et d'aller échouer contre le mur d'une maison, contre laquelle tu rebondis. Et tout devient flou. Tu ne vois plus rien devant toi, sauf les passants regroupés en cercle. Et toi dans ta voiture, immobile et sanglotant. Le rythme respiratoire plus irrégulier que jamais. Les larmes se déversent, dévoilant ta faiblesse. Ba-boum ba-boum ba-boum fait ton cœur, plus rapidement que tu ne l'aurais souhaité. Et à chaque nouveau battement, ton cœur se serre dans ta poitrine et tu oppresse. La sensation d'étouffement ne disparaît que lorsque tu inspire, pour revenir quelques secondes après.

Aurais-tu tué quelqu'un ?