C'était un projet qui me traînait depuis longtemps dans la tête. Parce que chacun de mes perso secondaires à sa propre histoire, j'ai décidé de vous en faire part par un OS pour chacun d'entre eux.

Je préviens que dans certains d'entre eux, il y aura des spoilers de l'histoire principale, donc c'est à vous de voir ... Il y a aussi des choses qui pourront vous induire en erreur. N'oubliez donc pas que les choses ne sont pas toujours ce qu'elle semble. Vous êtes prévenus.

Bonne lecture !


OS 1

- Entre les murs -

La pièce était affreusement sombre pour une chambre d'enfant, et n'avait sur son mur qu'une seule et petite fenêtre. Pouvait-on décemment appeler ça, une fenêtre, d'ailleurs ? Un des carreaux était brisé, ayant encore quelques endroits coupants. La poussière recouvrait le verre de la vitre et les rideaux … Seigneur, les rideaux … Ils ressemblaient davantage à des guenilles en lambeaux qu'à de véritables rideaux. Même en plein jour, la pièce n'avait jamais rien eu de chaleureux.

C'était l'hiver, la nuit tombait plus tôt, ces soirs-là. Il faisait sombre plus vite dans la pièce. C'était embêtant car elle y passait la grande majorité de son temps, depuis son arrivée dans cet sordide endroit. Elle ? C'était cette petite fille de tout juste onze ans, assise sur ce qui lui servait de lit. Une espèce de chose, elle-aussi presque en lambeau, dont les ressorts couinaient aux moindres mouvements.

Mais vu qu'elle ne bougeait pas beaucoup, il n'y avait pas tellement de bruits. Non. Elle ne bougeait pas. Lorsqu'elle revenait d'avoir mangé, elle s'asseyait sagement sur son lit et regardait par la fenêtre, immobile et le regard vague. Durant des heures.

Parfois, des cris et des rires lui parvenaient de dehors, par le carreau cassé qui laissait aussi entrer le froid en hiver. Maudit carreau. Ces bruits, ces exclamations stupides d'enfants pas assez intelligents pour voir le monde comme elle le voyait, enclenchaient une sourde colère et une grande jalousie dans le cœur de la petite fille.

A l'époque où le carreau de la fenêtre était intact, la petite fille s'était disputée avec un autre enfant et était rentrée hors d'elle dans sa chambre. Elle s'était assise sur son lit, elle avait fait un peu de bruit, d'ailleurs, parce qu'elle était si furieuse qu'elle s'était presque jetée dessus. Et elle avait fixé la fenêtre. Le carreau s'était brisé à ce moment-là.

Elle n'avait pas eu peur, bien qu'elle fut un peu surprise. Quand Maman était encore là, elle lui disait que c'était juste parce qu'elle était exceptionnelle qu'il lui arrivait des choses hors du commun. Elle disait aussi en souriant qu'il ne fallait pas avoir peur de ses dons.

Oui, songea la petite fille. Elle était exceptionnelle, c'était certain. Mais pourtant … Elle n'avait pas réussi à sauver Maman. C'était pour ça qu'elle était dans cette chambre trop petite, sur ce lit trop dur et pour seule amie la solitude. Parce qu'elle était morte, la petite fille n'avait personne d'autres. Alors à quoi pouvait bien servir ses dons, dont Maman était si fière ?

Avant, elles vivaient rien que toutes les deux, dans un appartement miteux d'une banlieue de Londres. L'endroit ne payait pas de mine, c'était certain, mais c'était toujours mieux que cette horrible chambre. Au moins, à l'époque, elles étaient ensembles.

Souvent, des hommes, jamais les mêmes, venaient à l'appartement et alors, Maman l'emmenait chez la voisine en lui disant qu'elle devait travailler. La petite fille ne savait pas quel travail faisait vraiment Maman, mais la fameuse voisine, elle répétait souvent que ce n'était pas sain d'élever une enfant dans ces conditions. Elle disait aussi qu'elle avait besoin d'un Papa, comme les autres enfants.

Les autres enfants, la petite fille s'en fichait. Ils n'étaient pas gentils de toute façon. Elle, elle avait Maman. Et comme Maman ne travaillait que le soir, elle lui faisait cours à la maison durant la journée. Parce que Maman ne gagnait pas assez d'argent pour qu'elle aille dans une bonne école et que de toute façon, elle n'y serait sûrement pas heureuse. Car les gens exceptionnels sont souvent jalousés des autres, expliquait souvent la voisine en parlant de son neveu, une sorte de génie en herbe.

Et si Maman disait que la petite fille était, elle aussi, exceptionnelle, alors elle avait sûrement raison. Maman avait toujours raison. Et puis, les leçons de Maman étaient vraiment amusantes !

Un jour, la voisine, croyant la petite fille endormie, prenait le thé avec un ami. Mais elle ne dormait que d'un œil, aussi entendit-elle la conversation. Mme Marple racontait au vieil homme que sa Maman, sa douce maman, était folle. Le monsieur répondit qu'il faudrait qu'elle soit mise dans un établissement adapté pour elle.

La petite fille n'avait pas très bien comprit. Pourquoi disait-elle ça de Maman ? Faisait-elle référence à la fois où elle lui avait mis sa plus belle robe pour aller à la fête foraine ? Ou des fois où elle se mettait à trembler et à crier très fort sans raison ? Est-ce qu'un établissement adapté, quoi que ce fut, pouvait aider Maman à être moins bouleversée dans ces moments ?

Non, la petite fille avait décidément du mal à comprendre le monde des grands. Une fois, l'année de ces huit ans, elle avait demandé pourquoi elle n'avait pas de Papa, elle aussi, comme les autres enfants. Pas qu'elle en veuille un, ça avait l'air toujours occupé, un Papa. Mais elle aurait voulu comprendre. Elle avait eu un peu peur, parce que Maman s'était encore mise à trembler. Elle lui avait murmuré que parfois, on était obligé de faire des choses, des vilaines choses, mais que c'était nécessaire pour survivre. Maman avait sangloté en lui disant qu'elle n'était pas assez forte pour enlever la vie à une petite personne qui ne demandait qu'à voir le jour. Même si elle était la conséquence des vilaines choses. Car finalement, c'était la meilleure chose qui avait pu lui arriver.

La petite fille n'avait, encore une fois, pas compris grand chose au comportement et aux mots de Maman. Juste qu'elle était la meilleure chose qui lui était arrivé. Alors, elle avait le sentiment dans ces moments-là, qu'elle était vraiment exceptionnelle, car personne n'arrivait à étirer les fines lèvres couvertes de rouge carmin de Maman à part elle.

Et ça lui suffisait, parce que Maman et la voisine, bien qu'agaçante, étaient les seules personnes qui comptaient aux yeux de la jeune enfant. Mais il y avait eu cet accident …


C'était une histoire toute bête. Maman avait décidé de l'emmener au cinéma pour la première fois. C'était Samedi, pourtant elle avait choisie de ne pas travailler ce soir-là. Parce que c'était bientôt Noël et qu'elles avaient envies de passer la journée à chercher des cadeaux et de finir la journée en beauté. La petite fille avait vu une belle poupée en porcelaine dans la vitrine de l'autre coté de la rue. Elle avait traversé sans vraiment faire attention. Mais il y avait de la neige, ce soir-là. Et la voiture en voyant cette petite fille traverser, n'avait pas réussi à contrôler son véhicule.

Finalement, la voisine avait sûrement raison. Maman était sûrement folle pour s'être jetée au milieu de la route pour protéger sa petite fille de son corps. C'était idiot. La petite fille avait beau crier, hurler et secouer le corps de Maman, elle ne se réveillait pas. Comment pouvait-on s'endormir si vite ? Pourquoi son front avait la même couleur carmin que le si beau rouge à lèvres que Maman mettait pour travailler ?


- Shannon, peux-tu venir, s'il-te-plait ? Demanda une des dames de l'orphelinat en ouvrant sa porte. Il y a quelqu'un qui demande à te parler.

Shannon aimait bien cette femme. C'était la moins pire des adultes de ce monstrueux endroit. Elle était la seule qui ne l'avait jamais regardée avec pitié depuis son transfert ici. D'un ton rassurant, elle lui avait expliqué simplement comment ça allait se passer désormais pour elle. Elle lui avait dit qu'ici, tout le monde avait souffert et que ça l'aiderait à se faire des amis car tout le monde comprendrait sa peine.

Elle avait mentit sur ce point. Mais Shannon savait, elle, que c'était parce qu'elle était meilleure que les autres enfants, Maman l'avait toujours dit. Alors elle ne lui en avait pas voulu de ne pas avoir dit la vérité, car elle ne pouvait pas savoir, cette femme, a quel point Shannon était mieux que ces sales enfants qui n'arrêtaient pas de pleurnicher.

Elle, elle ne pleurait pas. Elle ne pleurait plus. C'était se montrer faible face à tous et les autres en profiter, ça, elle l'avait vite compris. L'orphelinat, c'était comme la jungle. La loi du plus fort. Pourtant, ce n'est pas parce qu'elle ne pleurait pas qu'elle ne souffrait pas. Non. Elle avait parfois envie de hurler, hurler à s'en faire mal, comme le faisait Maman avant. Hurler sa douleur. Hurler sa peine. Hurler pour la folie qui prenait peu à peu son esprit dans cet sordide endroit.


Lorsqu'elle entra dans le bureau de la directrice, un homme étrange était là. Juste un homme. Et pas la directrice ? C'était surprenant. Et inquiétant un peu aussi. L'homme la fixait, une lueur peinée dans les yeux. La petite fille l'observa à son tour. Il avait de drôles de lunettes cet homme, en forme de demi-lune. Un truc qui ne va bien qu'aux vieux. Mais il était bien plus que vieux, en fait. Le plus étonnant était le fait qu'il porte une robe bleue couverte d'étoiles argentée.

Maman aurait trouvé ça drôle, un homme en robe. Elle se serait sûrement esclaffée, ou lui aurait demandé d'un ton sérieux s'il avait oublié la date du carnaval.

Alors parce que Maman aurait aimé, Shannon lui sourit. C'était étrange, elle n'avait plus sourit depuis le soir où Maman était morte.

- Bonjour Shannon, lui dit le vieux crouton d'une voix bienveillante.

Elle ne répondit pas. Pas qu'elle n'en avait pas envie. Plutôt par manque d'habitude. Ça faisait longtemps qu'elle n'avait pas parlé à quelqu'un. Trop peut-être. Il sembla comprendre qu'elle ne dirait mots, car il continua, comme si de rien n'était.

- Je suis ici car j'aimerais que tu entres dans mon établissement. Poudlard …

Un établissement … L'ami de la voisine avait dit qu'il fallait mettre Maman dans un établissement. Parce qu'elle était un peu folle. Shannon aussi, elle devenait folle. Alors on allait la mettre dans un établissement. C'était logique, en fait.

- Poudlard est une école, j'en serais le directeur à partir de la rentrée prochaine.

Elle ne pouvait pas aller à l'école. Elle le savait, la directrice le lui avait dit. Elle n'avait pas le niveau. Pourtant elle était meilleure que les autres, elle en était certaine. Mais Maman n'avait pas été à l'école très longtemps et n'avait pu transmettre tout le savoir nécessaire à sa fille.

- Ce n'est pas une école ordinaire, précisa le vieil homme. N'importe quel enfant ne peut y entrer car c'est une école de sorcellerie pour les jeunes sorciers. Et il semblerait que tu y es ta place …

De sorcellerie … Pour les sorciers … Il devait être fou, lui aussi, songea la petite Shannon. Mais ça sonnait bien. Et ça avait l'air amusant. Elle avait toujours aimé les choses amusantes. Alors elle irait dans cette drôle d'école, décida t-elle d'un ton résolu dans ses pensées. Maman l'aurait voulu, si ça pouvait lui permettre de gagner sa vie autrement qu'en mettant du rouge carmin sur ses lèvres.

Oui, elle irait à Poudlard … Car dans les yeux de cet homme brillait une folie semblable à celle qui avait brillé dans les yeux de Maman.

De retour dans sa chambre, elle ouvrit grand la fenêtre et regarda dehors. Surement que Maman était heureuse de sa décision. Elle devait le faire, oui. Parce qu'elle n'était pas à sa place, ici, pensa t-elle en regardant les stupides enfants dehors.

La petite Shannon était exceptionnelle et elle leur montrerait !


Voilà, c'était l'histoire de Shannon. Peut-être comprendrez-vous mieux certaines situations concernant ce personnage à présent.

J'espère que vous avez aimé, même si c'était un peu spécial. J'ai peut-être commencé par le pire x)

Bonne continuation !