Quelle soirée de merde ! La plus merdique de chez merdique. Si je devais lui attribuer une note, elle n'obtiendrait même pas la moyenne. Et croyez-moi, mon échelle d'évaluation ne vole pas très haut !

Mes chaussures me font tellement mal que j'en sautille sur place. Quelle idée de danser avec des escarpins neufs! Et pendant que je rumine, la pluie dégouline dans mon cou, mouille mes cheveux et trempe le peu de vêtements que j'ai sur moi. Je tiens ma pochette au-dessus de ma tête, en essayant en vain de me protéger. Comme parapluie on peut faire mieux.

Si seulement le taxi que j'avais réservé débarquait, je pourrais rentrer chez moi et m'enfermer dans mon petit nid douillet. Un endroit bien réconfortant après cette soirée mouvementée.

Diable, mes pieds me font vraiment un mal de chien ! C'est bien la dernière fois que je mets des talons de dix centimètres ! Au moment où je me dis que rien ne peut être pire, je remarque le regard insistant et aguicheur du videur de la boîte de nuit. Je tire mécaniquement sur ma robe, définitivement trop courte. Et ce taxi qui n'arrive pas !

Je me sens seule … et pathétique. La pluie a fait couler mon mascara sur mes joues, je sens l'alcool à des kilomètres à la ronde et pour couronner le tout, je viens de m'apercevoir que mes collants sont troués. Je dois vraiment avoir l'air d'une fille qui fait le trottoir…

Et voilà que mes nausées me reprennent! Je respire lentement, en espérant que mon malaise passe, mais cette fois-ci mon ventre se tord et je ne peux rien y faire. Je me penche et prends appuis sur le poteau, où je dégobille l'alcool encore présent dans mes tripes.

Après quelques longues secondes, j'essuie mes lèvres et me redresse. Je souffle, pour me redonner contenance et décroche mon téléphone qui sonne depuis quelques instants déjà.

- « Allô ? »

- « Mademoiselle Swan ? » dis une voix féminine à l'autre bout du fil.

- « Heu … oui ? » je réponds.

- « Ici l'agence de taxis, Seattle Cab. Je voulais vous prévenir qu'il y a eu quelques ralentissements sur la route dû à la pluie, mais votre chauffeur ne va pas tarder à venir vous chercher, au volant d'une Volvo noire. »

- « Dieu merci ! » m'exclamai-je.

Après quelques mots d'usages, je coupais la conversation. Je sentais encore l'alcool parcourir mes veines. Maudis pari, maudis pari...

C'est l'esprit embué que je remarquais au bout de quelques instants une voiture stationnée devant l'épicerie, les warnings allumés. Je ne m'y connais pas vraiment en voiture –et la pénombre n'aide pas- mais je peux facilement dire que c'est une Volvo.

Dans un reflex incontrôlé, je regarde à droite puis à gauche et traverse la rue quasi déserte. Arrivé à hauteur de la voiture, je m'approche et me penche sur la vitre, côté conducteur. L'homme est en train de retirer la cellophane de son paquet de cigarette. Je toque trois petits coups sur la vitre et le chauffeur lève les yeux vers moi. Et … waouh quels yeux ! Je suis plongé dans un océan vert émeraude.

Il est difficile de s'arracher à la contemplation de son visage, tandis qu'il baisse la vitre. Son nez, aquilin avec une légère bosse. Ses lèvres, pleines et pulpeuses. La petite cicatrice sur le bout de son menton, caché par une barbe d'approximativement deux jours. Et ses cheveux … Oh mon dieu ! Ce gars là était tout simplement Adonis en personne. Il respire la sensualité.

- « Je … c'est vous qui me ramenez ? » je demande. « Enfin, vous êtes le taxi ? Pour Wallingford ?! »

Le type hoche doucement la tête en répétant : « Wallingford… »

Sans plus de cérémonie je monte à l'arrière et il démarre le moteur. Le vrombissement de la voiture perse le silence de l'habitacle. Mon crane me fait un mal de chien et je le pose contre l'appui-tête tout en me déchaussant de mes abominables échasses. Je masse mes pieds endoloris et gémis doucement.

Le chauffeur reprend son paquet de clopes et en sort une de la boîte. Il la porte à ses lèvres, mais je l'interromps prestement :

- « J'aimerais autant mieux que vous ne fumiez pas pendant cette course. »

- « C'est ma voiture. » déclare-t-il en me regardant dans le rétroviseur.

- « Oui mais je suis la cliente. Et le client est roi » lui répondis-je avec un sourire satisfait.

Il eu un –magnifique- sourire en coin, mais il quitta sa cigarette dans le paquet.

-« Merci. »

- « A votre service mademoiselle… »

Le silence reprit dans l'habitacle. Je fermais les yeux quelques minutes, savourant cette délicieuse tranquillité. Mes amis étaient probablement encore dans la boîte de nuit. Mike, à chercher une quelque conque nana à foutre dans son pieu, et Jessica l'observant en retrait, désespérée. Quant à Angela et Ben, le petit couple d'amoureux, ils devaient être en train de se faire des papouilles dans un coin (s'ils n'étaient pas déjà de retour chez eux à l'heure qu'il est.)

Je les verrai demain en cours. Les cours... Je n'ose même pas imaginer la phénoménale gueule de bois que j'aurais en me levant...

Nous étions tous originaires de Forks, petit bourgade à la frontière du Canada. Mon père, Charlie, en était le shérif. Celui d'Angela était pasteur et les parents Newton tenaient un petit complexe sportif en plein centre-ville. Ben et Angela se fréquentaient déjà à l'époque de lycée. Et encore aujourd'hui, alors que nous avions tous 22 ans, les deux tourtereaux étaient toujours amoureux comme au premier jour. Quant au … « couple » Jessica/Mike … eh bien je crois que l'une à toujours rêver de devenir la future Madame Newton, et que l'autre à toujours préféré fuir cette éventualité.

Et si vous vouliez que nous abordions mon sujet …. Eh bien je dirais que c'est d'une banalité affolante. De toute manière, tout ce qui vient de Forks est banal. Répondant au prénom d'Isabelle Swan, j'ai vécu la plus grande partie de ma vie à Phoenix, en compagnie de ma mère, Renée et plus tard de son mari, Phil. Enfant unique, je suis partit seule chez mon père à mes quinze ans. De là j'ai passé ma scolarité au Lycée de Forks. C'est dans ce lycée que j'ai rencontrée les personnes avec lesquelles j'étais ce soir. Puis c'est avec ces mêmes personnes, que tous ensemble, nous avons aménagé sur le campus de L'Université de Washington (la plus célèbre université du Nord-Ouest des usa) à Seattle. La ville où nous séjournions toujours.

Nous évoluions chacun dans un domaine différent; Mike se concentrait pour devenir basketteur professionnel (d'ailleurs, il défendait ardemment les couleurs de son équipe), Ben en médecine – spécialisé dans la recherche- et sa Douce Dulcinée étudié le social. Et puis il y avait Jessica qui préparait une thèse d'océanographie (études des mondes sous-marins) et moi qui évoluais dans le milieu de la communication. U-Dub était la parfaite école d'après moi.

Je rouvris les yeux quand mon ventre se tordit une fois de plus. Je me sentie instantanément devenir pâle. Et je ne fus pas la seule: le chauffeur me regarda avec un air inquiet sur le visage.

- « Pas de cigarette pas de vomis sur le cuir. Deal ? »

- « Deeaaaal … » et je vomis dans ma pochette.

C'était la fameuse chance d'Isabella Swan vomir devant un mec sexy à se damner. Oh et puis merde ! J'étais déjà dans un sale état avant cela !

- « J'ai des mouchoirs si vous voulez ... »

- « Je… Oui j'en voudrais bien un merci. »

Le bel adonis me fit passer les mouchoirs qu'il avait dans la boîte à gants.

- « Merci … »

- « Oh, mais de rien. » Puis après une courte pause il reprit : « Je m'appelle Edward. Et vous ? »

Je me fige un instant. C'est dans ses habitudes de demander le nom de ses clientes ?

- « Heu … Bella » je finis par lui répondre.

- « Tu portes très bien ton nom ! » puis il reprend : «On peut se tutoyer ? C'est plus simple pour moi, surtout que je suis à peine plus âgé que toi. »

Je sens le sang afflué à mon visage.

- « C'est gentil. Oui si tu préfères.»

- « Tu es encore à l'université n'est-ce pas? »

- « Oui. »

- « Je me souviens de ma période à la Seattle University. C'était fantastique. Tu étudies quoi ? » Demande-t-il en me jetant un coup d'œil dans le rétro.

C'est quoi ces questions, merde ?! Je veux juste avoir la paix. Est-ce trop demandé ?

Arretes Bella, ce n'est pas tout les jours qu'un canon tel que lui engage la conversation avec toi.

- « Moi j'suis à U-Dub. Dans la communication. »

Il me jette inexorablement un autre sourire en coin. Plus mystérieux cette fois-ci.

- « Je t'ennuis avec mes questions ? » demande-t-il.

Je soupire.

- « Pas vraiment. J'mennuis toute seule parfois. » J'ai un rire sarcastique. « Mais je crois bien que j'ai passé la pire journée de toute ma vie..." Je m'arrete, me demandant si me confier à un parfait inconnu est la meilleure chose à faire, mais je continue contre toute attente. " Ce matin mon copain m'a largué et des amis à moi m'ont proposé de les accompagner en boîte pour me remonter le moral, sauf que je déteste ce genre d'endroit, plus particulièrement quand les gens sont bourrés – et je t'interdis de dire que je suis moi-même soule ! C'est juste qu'on a dû faire un stupide pari avec la table voisine. »

- « Je n'ai rien dit de tel. Quel genre de pari ? » dit-il en souriant.

- « Le genre de pari avec quinze verres de vodka sur la table. »

- « Ô je vois. Et alors ? Tu as fini torchée ?»

- « Je sens le vomis à plein nez. Mais j'ai au moins le mérite d'avoir battu la Barbie siliconée qui m'affrontait. Tu as ta réponse ? »

- « Oui. Et malgré que tu sentes mauvais tu restes irrésistible. » Il a chuchoté la fin de sa phrase et je ne suis pas sur d'avoir bien compris.

- « Pardon ? »

- « Rien. Tu as parlé de ton ex qui vient de te larguer … tu veux en parler ? » Propose-t-il.

- « Et bien mis à part que c'est le plus gros con que la Terre n'est jamais portée… »

- « Laisse-moi deviner il t'as largué pour une autre ?» Une expression indéchiffrable traverse son visage.

- « Non … enfin disons que j'ai tout fais pour qu'ils finissent ensemble, j'ai quasiment foutu Jake dans le pieu de Leah. Tu vois, il disait que je ne lui accordais pas assez de temps, que je voyais un mec dans son dos et j'en passe. Que du baratin d'un mec typiquement jaloux. »

- « Es-tu triste ? » me demande-t-il.

- « Qu'on ne soit plus en couple ? » Je réfléchis « Non pas vraiment. C'était inévitable. J'veux dire, nous sommes tellement opposés par certains aspects que c'était dur d'imaginer que l'on puisse être amoureux. C'était plus une relation fraternelle… et encore j'exagère ! » Déclarai-je sarcastique.

- « J'en déduis que c'est une bonne chose ! »

- « Oui s'en est une ! » je lui souris. « Cela fait de moi la nouvelle célibataire de la bande… Tu sais que tu es vraiment beau ? »

Il rigola.

- « Est-ce l'alcool qui parle ? »

- « Arrête de poser tout un tas de questions. Et puis pour ta gouverne, j'en suis déjà au stade avancé du dégrisement. C'est juste que tu es vraiment sexy … » je me mordille la lèvre.

Il garde le silence quelques instants, concentré sur la route.

-« Dis moi il faut tourner à droite ou à gauche ? » dit-il en regardant la route.

Hein ?! Il est censé connaitre la ville par cœur ! Je me suis penchée sur par-dessus les sièges et j'ai regardé les panneaux.

- « Droite. »

- « Merci. »

- « T'es nouveau dans la profession ? »

- « Non cela fait trois ans que je bosse à la tête de l'entreprise… » Il se coupa subitement dans sa phrase.

- « Ah bon ? Eh bien laisse-moi te dire que pour un chef, tu connais bien mal la ville. »

- « … Ouais, il faut croire. » Puis reprenant le fil de la conversation, il me lance : « Sans me vanter la plupart des femmes trouvent que je ressemble à James Dean. C'est ça qui fait tout mon seax-appel » Je lui fous une tape sur l'épaule. « Quoi ?! C'est vrai toutes les femmes le disent ! » Il me fait son sourire en coin – je commence à m'y habituer.

- « Essaies-tu de me dire qu'il y a une liste d'attente avant de pouvoir te baiser ? »

Il parait légèrement surpris mais me fait un franc sourire.

- « Je ne l'aurais pas formulé comme ça, mais sache que si tu es partante, je peux te prendre là, tout de suite, à l'arrière de la bagnole. Tu n'auras pas besoin de liste d'attente pour arriver au Nirvana.» Il s'humidifie la lèvre avec sa langue… hum.

Je déglutis difficilement.

- « C'est une proposition ? » je demande.

- « En bonne et due forme ma belle ! »

Du calme Bella...

Mon téléphone vibre soudain. Je m'étonne : il est plus de 1h du matin et si quelqu'un prend la peine de m'appeler à cette heure-ci, c'est que se doit être important … ou bien c'est tout simplement ma mère qui à oublié de me dire qu'elle ne retrouve plus son ticket pour une exposition d'art, et qu'elle me demande de l'aide pour le lui retrouver ( bien qu'elle vive à plus de 1000 kms) . C'est forcément un des deux de toute façon.

Je m'arrache à sa contemplation et décroche mon Smartphone.

- « Oui allô ? »

- « Mademoiselle Swan ?! »

Je reconnais la voie de la standardiste de tout à l'heure. Je m'apprête à lui dire que le taxi est bien arrivé quand elle m'interrompt :

- « Je viens tout juste de recevoir un appel de votre chauffeur ! Il est à l'adresse que vous nous avez indiquée mais selon lui, il n'y a personne. »

- « Le chauffeur ? Pardon mais ce doit être une erreur je suis actuellement avec lui, en route pour mon domicile… »

Mon interlocutrice garde le silence pendant un long moment.

- « Vous êtes toujours là ? » finis-je par demander.

- « Ecoutez mademoiselle… Je crains qu'il n'y ait un terrible malentendu; la voiture que vous avez commandée vous attend en ce moment même devant le club Rocksport. J'en suis certaine, et si actuellement vous vous trouvez dans un autre véhicule, alors celui-ci n'est pas indiqué dans le registre. »

- « Vous pouvez être plus claire ? » dis-je, totalement perdue.

- « Vous êtes dans une voiture qui ne fait pas partie de notre société. Elle n'est pas un taxi Seattle Cab. »

Je regarde Edward, qui m'observe du coin de l'œil.

- « Vous m'avez dis une Volvo ! Et je suis dans une Volvo, noire qui plus est ! »

La voiture se gara sur le bas côté de la route puis le moteur s'arrêta. L'adonis aux yeux verts se retourna vers moi.

- « Non. Ma voiture est grise. Tu as simplement étais leurrée par le noir. Et mon nom est Edward Cullen; je dirige une multi-nationale, pas une agence de taxis. » Je déglutis difficilement. « Quand à toi jeune imprudente, tu es à ma merci. » ajouta-t-il avec un sourire carnassier.

Puis soudain, il m'arracha le téléphone des mains tout en s'approchant de moi, sur la banquette arrière, tel un prédateur.