Je courais au milieu des arbres en essayant de garder les yeux ouverts tant la fatigue semblait venir à bout de mes dernières forces. Depuis mon départ, je ne m'étais pas arrêté. J'avais perdu la notion du temps, tout ce dont j'étais sur c'est que ça ne faisait pas encore un an que j'étais parvenu à m'enfuir, parcourant des kilomètres dans l'espoir de venir en aide aux survivants, l'esprit rongé par la peur ne pas être en mesure de trouver ce que je cherchai.
J'avais traversé l'Europe pour découvrir que toutes les meutes y avaient été annihilés. J'étais arrivé trop tard pour eux. Bien sur, j'aurai pu me contenter de trouver la mort libératrice que je désirai tant, mais je savais pour sur qu'une meute était toujours en vie, alors comment pourrai-je fuir de la sorte sans au moins tenter de les prévenir ? Je ne pouvais pas devenir un lâche, pas après tout ce que j'avais supporté.
Pas après tant de morts.
Je m'étais donc débrouillé pour monter sur un bateau, direction l'Amérique, j'étais parvenu à atteindre l'extrême nord du Canada. Autant dire que j'avais rarement été si heureux d'être un loup. De là, je reprenais mes recherches, mais après plusieurs mois, toujours rien. Si mes informations étaient corrects, je savais que je trouverai une meute dans une réserve indienne du nord des États-Unis. Mais j'avais vraiment espéré qu'ils ne serait pas les derniers survivants.
Sans doute m'étais-je trompé.
Épuisé, je me laissai tomber sur le train arrière, bien décidé à faire une pause. Qu'allais-je faire lorsque je les trouverai ? Allais-je même être capable de les trouver ? Les Volturi étaient peut-être déjà passé par là. De ce que j'avais entendu, cette meute s'était associé avec un clan de vampires se nourrissant d'animaux, mais cela suffirait-il à ralentir Aro ?
Je tentais autant que possible de ne pas penser à ces deux dernières années, mais comment pourrai-je oublier ? Comment pourrai-je échapper à ces souvenirs ?
La torture était un mot qui avait prit un tout nouveau sens pour moi. Alors comment oublier ce qu'ils étaient parvenu à graver sur ma peau et dans mon âme ?
Impossible. La seule porte de sortie était la mort et je n'avais pas droit d'y courir.
Pas encore du moins.
Deux ans plus tôt :
La vie au sein de la meute était devenu horrible depuis qu'ils avaient apprit que j'étais gay. Les railleries étaient loin d'être les pires de mes punitions pour ma différence. Permettre à ceux qui ne s'étaient pas imprégné de prendre leur plaisir avec moi, ça c'était le pire.
Mais que pouvais-je faire d'autre que me soumettre lorsque le poids de la commande alpha m'ordonnait de les laisser faire ? De me soumettre à tous...
J'étais parvenu à garder mon secret pendant plus de six mois après m'être transformé pour la première fois, mais il était difficile de le conserver lorsque mes compagnons ne cessaient de se demander pourquoi j'étais plus petit que les autres, moins fort, pourquoi ma fourrure était si « jolie ». Pourquoi il ne m'avait jamais vu avec une fille alors que j'étais pourtant très sollicité. Ce fut lors de ma fête d'anniversaire pour mes seize ans que mon secret fut découvert.
Tous le monde avait bu et nous étions tous à rire de certaines blagues stupides lorsque la question de savoir pourquoi j'étais seul revint au milieu de la conversation. Les premières minutes, je me contentai de rire, justifiant mon manque d'enthousiasme en expliquant qu'aucune des filles que je connaissais ne me plaisait et que je préférai attendre de m'imprégner. Ce ne fut malheureusement pas la chose à dire, car pour n'importe quel hétérosexuel, des filles comme Lilas ou Jasmine étaient tout simplement magnifiques et il n'y avait aucun mal à « s'amuser » en attendant l'âme sœur.
Et puis brusquement, mon alpha totalement ivre m'ordonna de leur expliquer ce que je ne trouvais pas attrayant chez elles. Je ne pense pas qu'il se soit aperçu de suite qu'il avait utilisé sa commande, mais cela ne changea pas le fait que j'avais dû répondre.
Cette réponse avait détruite ma vie...
Le soir même, Mark, l'alpha que je respectai tant m'offrit à tous ceux qui n'étaient pas imprégné. Soit huit loups.
Seuls trois refusèrent, chacun pour des raisons différentes. Le reste s'empressa de me sauter dessus. Autant dire que ce fut la pire fête d'anniversaire de ma vie. Je m'étais senti dégradé, sale et utilisé. J'étais brusquement devenu un objet dont on se sert et qu'on jette à volonté.
Je n'étais plus un être humain, ni même un guerrier lutant à leurs côtés. J'étais devenu un monstre qu'il fallait faire payer pour ce qu'il était, encore et encore.
Mark avait été comme un frère pour moi. Lorsque ma mère avait péri dans un accident de voiture, il m'avait prit sous son aile. Il m'avait accueillit chez lui et sa femme, m'avait nourri, envoyé à l'école, m'avait permit de pleurer sur son épaule.
Jusqu'à ce que je lui dise que j'étais gay. Différent.
Un monstre d'après lui.
Ce soir là, après que les cinq loups en aient fini avec moi, il traîna mon corps ensanglanté jusqu'à la maison et commença une diarrhée verbale horrible, m'assurant que dieu m'avait puni pour être une telle erreur de la nature.
Dieu m'avait puni en me prenant mes parents. Mon père avait dû sentir la honte que je ferais jaillir sur lui et avait préféré partir sans attendre. Puis ma mère avait payé le prix pour avoir élevé un monstre.
Il avait continué durant des heures à hurler des horreurs et puis m'avait craché dessus avant de monter se coucher.
Les prochains mois furent une torture. Heureusement pour moi, sa femme était loin d'être aussi cruelle. Bien souvent, ce fut elle qui me permettait de manger à ma faim, elle qui me soignait lorsque les autres avaient été trop violents. Elle qui me prenait dans ses bras pour tenter de calmer mes pleurs lorsque tout ce que je voulais été mourir.
J'étais persuadé qu'il me suffirait d'être patient, de me taire jusqu'à ma majorité. Malheureusement, cette fuite me fut arraché quatre mois après m'être révélé à eux.
Je courrai ma patrouille seul comme toujours depuis quatre mois, heureux en sachant que toute la meute devait se retrouver chez Mark et Gabby. Dans mon esprit, le seul fait de ne pas les voir de toute la nuit était un cadeau en soit. Mais alors que je passai par un petit sentier afin de faire le tour de notre territoire, je fus brusquement plaqué au sol.
Surpris par l'agression car je n'avais pas sentis de vampire, je repris forme humaine, certain qu'il ne pouvait s'agir que d'un membre de la meute. En levant les yeux vers mon agresseur, je vis qu'il s'agissait de mon bêta, Garett.
- Qu'est-ce que tu fais ? Grognai-je en tentant de me libérer de son emprise
Il m'offrit simplement un sourire mauvais et me tira sur mes pieds. Je n'eus pas le temps d'ouvrir de nouveau la bouche pour le questionner que l'odeur de deux autres loups arrivèrent à mes narines. Mon alpha apparut avec Stephan à ses côtés. Tous me regardaient avec dégoût.
- Qu'est-ce qui se passe ? Tentai-je à nouveau
Un coup de poing dans la mâchoire fut ma seule réponse et on me traîna sans un mot jusqu'à la plage. J'étais complètement paniqué, me demandant s'il s'agissait là d'un autre de leurs jeux pervers, bien que ce qu'ils faisaient ne ressembler en rien à leurs habitudes.
Alors que je suivais toujours mon alpha, flanqué des deux autres loups derrière moi, s'assurant visiblement que je ne tente pas de m'enfuir, l'odeur de plusieurs vampires se fit sentir.
Je m'arrêtai net, interloqué. Les autres les avaient sûrement sentis également, pourtant ils ne réagissaient pas. Mais lorsqu'un grand coup dans mon dos m'encouragea à continuer à marcher, je m'énervais.
- Vous ne sentez pas ? Grognai-je. Il y a des vampires, nous devons...
Mon alpha se retourna, plus furieux que je ne l'avais jamais vu et m'attrapa par les cheveux pour soulever mon visage. Il avait les yeux d'un animal enragé.
- Tu vas la fermer ! Gronda-t-il la voix pleine de venin. Tu vas nous suivre et je t'interdis de phase, comprit ?
Je le regardais sans un mot, horrifié au delà du possible. Comment pouvait-il me demander de ne pas phase alors que nous allions tout droit vers les vampires ? Comment pouvait-il me faire ça ? Espérait-il ma mort ?
- Comprit ? Répéta-t-il plus fort
Incapable de résister à l'ordre, je me contentai de hocher la tête, essayant tant bien que mal de ne pas pleurer. Même si je savais qu'il me haïssait depuis qu'il avait découvert ma sexualité, je n'avais jamais imaginé qu'il me voulait mort.
Je continuai donc de marcher derrière lui jusqu'à une petite clairière dans laquelle nous attendait quatre vampires habillés de capes à capuches étranges.
- Parfait ! S'esclaffa l'un d'eux en tapant dans ses mains. Il semble parfait...
- Un accord est un accord. Je ne veux plus jamais vous revoir sur nos terres ! Grogna Mark
Le vampire en question étira d'avantage son sourire et s'avança vers moi. Instantanément, je reculai, mais mon alpha se tourna vers moi en montrant les dents.
- A partir de maintenant, tu obéira à Aro. Il sera ton maître, m'expliqua Mark comme s'il s'agissait d'un ordre tout à fait commun. Tu vas les suivre et tu ne te transformera pas à moins qu'il t'en donne l'ordre...
Je clignai des yeux. J'avais la sensation de ne plus pouvoir respirer. Il était en train de m'offrir à un vampire ? Ceux là même que nous devions combattre, détruire ? Quel genre d'accord avait-il passé ? Pourquoi des vampires voudraient-ils m'emmener au lieu de se contenter de me tuer ?
Je secouai violemment la tête pour essayer de revenir à la réalité.
- Mark, murmurai-je incapable de retenir mes larmes. Qu'est-ce que tu fais ?
- Je te trouve une utilité ! Cracha-t-il avant de me pousser vers le groupe de vampires
L'un d'eux m'attrapa et je fus incapable de me défendre toujours pris par le poids de l'ordre alpha. Je tournai la tête pour regarder ceux qui avaient été mes frères, mais ils avaient déjà disparut. Mon cauchemar commença vraiment lorsque je sentis quelque chose de froid autour de mon cou.
Les enfoirés m'avait mit un collier...
Présent :
Quelques mois plus tard, j'apprenais la vérité de la bouche d'un des vampires. Mark était tombé sur quelques gardes Volturi lors d'une de ses patrouilles avec Stephan, ils avaient vite été confronté à des pouvoirs contre lesquelles ils ne pouvaient rien et avait été obligé de s'enfuir. Ils avaient été rattrapé rapidement par l'un d'entre eux qui lui avait proposé un marché.
S'il donnait volontiers l'un des loups, alors Aro laisserait la meute vivre en paix.
Mark n'avait apparemment pas hésité une seconde et avait accepté de m'offrir, certain qu'il n'entendrait plus parler de ce clan ou de moi le reste de son existence. Malheureusement pour lui, le fameux marché s'était avéré n'être qu'un jeu. Aro voulait savoir si nous étions aussi fidèles et loyaux que de vrais chiens (selon ses propres dires). Ma meute avait été exterminé le soir même.
Exterminé. Ce qui voulait dire les loups, mes aussi leurs compagnes et bien sur les enfants pour ne pas risquer d'éventuelle vengeance. Je n'avais pas voulu y croire jusqu'à ma fuite. J'avais besoin d'être sur qu'il n'y avait aucun survivant. Au fond, j'espérai que Cauis n'avait voulu que me blesser d'avantage en me racontant cette histoire. Il avait trouvé mes larmes hilarantes, connaissant la facilité avec laquelle j'avais été vendu.
Voir de mes yeux ce qu'était devenu le lieu où j'avais grandi avait été un choc. Mon village ressemblait à une ville fantôme qui n'avait plus rien de ce que j'avais connu. Ça sentait la mort. Je me souviens m'être demandé comment ils avaient pu faire pour ne pas attirer l'attention des humains. Pourtant, trente six habitants avaient brusquement disparut et personne ne semblait s'en offusquer. Les lieux paraissaient être abandonné depuis des décennies.
Je soupirai en fermant les yeux un instant. Je n'avais aucune envie de penser à ça. Je voulais juste prévenir cette meute et mourir. C'est tout ce qui m'importait à présent.
Qui voudrait continuer à vivre en ayant été vendu à une bande de vampires sadiques par ses propres frères, torturé pendant pratiquement un an de toutes les manières possibles et imaginables ? J'avais perdu tout ce qui avait compté dans ma vie depuis un bon moment, mais à présent, même en moi il ne restait plus rien à sauver. Mon esprit était tel un désert de désolation, uniquement habité par des images horribles, des sensations, des sons et des odeurs qui y resteraient éternellement gravés. On ne pouvait pas croiser le mal dans sa forme la plus pure sans en mourir à la simple vu. Je ne l'avais malheureusement pas seulement croisé, je l'avais côtoyé, il m'avait touché, s'était engouffré jusqu'au tréfonds de mon âme... et même dans mon corps.
A présent, je n'avais plus de famille, plus de meute, plus d'amis, plus d'avenir. J'étais parvenu à m'échapper grâce à la bêtise et à l'arrogance de ces monstres, mais je me doutai que Demetri devait être sur mes traces. Je n'avais aucune idée de l'avance que j'avais sur lui, je ne savais pas non plus s'il se doutait de ce que j'avais l'intention de faire, toutefois, s'il me suivait, il avait certainement deviné.
Il me fallut environ une semaine pour atteindre Forks. Je ne pouvais qu'être heureux d'être parvenu à voler suffisamment d'argent pour de pas avoir à me balader nu en ville. Je m'étais offert une chambre d'hôtel et un repas chaud, ce qui était relativement rare dans mon cas, puisque la plupart du temps, je me contentais de me nourrir sous ma forme de loup.
Après avoir pris une douche, je restai un moment à me regarder dans le miroir, comptant chaque cicatrice jonchant mon corps avec un sourire amer. Le garçon plein de vie que j'étais avait disparut depuis longtemps, remplacé par un homme brisé, mais depuis ma capture, cet homme brisé était tout simplement mort de l'intérieur. Ce fut déjà un miracle que je sois capable d'utiliser mon corps après toute les sévices qu'il avait dû endurer, mais mon esprit lui, ne répondait plus qu'à un mécanisme dicté par les instincts primaires de mon loup, la survie était bien sur le plus puissant, mais derrière, il y avait la protection, parce qu'au fond, c'était ce qu'était mon loup; un protecteur.
Seul mon loup me maintenait en vie. Non pas pour moi, mais pour ceux qu'il devait protéger, la mission pour laquelle il avait été créé.
Je soupirai en regardant mon torse avec dégout. J'étais devenu horrible et seul mon pouvoir me protégeait du regard des autres. Le pouvoir que m'avait offert les Volturi par mégarde.
Après être parvenu à arracher mes yeux du miroir, j'allais me coucher, pas plus de trois heures. Je ne pouvais pas me permettre de rester au même endroit trop longtemps.
Comme toujours, mes rêves n'étaient fait que de souvenirs horribles, de douleur... je revivais encore et encore mon année de capture. Souvenirs que je ne pourrais jamais effacer. Qui aurait cru qu'une misérable année pouvait ressembler à l'éternité ?
Pov Jacob
Le dernier essai n'avait pas fonctionné comme je l'aurai souhaité. Bella n'avait visiblement pas apprécié que je l'ai embrassé. Cependant, elle pouvait répéter qu'elle ne m'aimait pas autant qu'elle voulait, moi je savais que c'était faux.
Je le voyais à sa façon de me regarder, à ses gestes, la tendresse qu'elle m'accordait.
Elle m'aimait.
Malheureusement, je n'avais pas ce que pouvait lui offrir le monstre. Ni l'argent, ni le moyen de lui offrir la jeunesse éternelle. Je n'étais pas stupide. Ce qu'il y avait entre Bella et la sangsue n'avait rien à voir avec de l'amour. Comment peux-tu tomber amoureux du sang de quelqu'un ? Même pour un vampire, je trouvais ça énorme. Bella m'avait tout dit, tout raconté. Il s'était intéressé à elle parce qu'il était intrigué de ne pas entendre ses pensées et parce que son sang l'attirait plus que le sang de quiconque. Quand à elle, si ça n'avait pas été pour le mystère qu'il représentait, puis pour ce qu'il pouvait lui offrir, elle ne ce serait pas retourné sur lui une seconde.
Si le sang de Bella n'était brusquement plus aussi attrayant et si Cullen pouvait tout aussi soudainement redevenir humain, ils comprendraient l'un comme l'autre que ce qu'il y a entre eux n'a rien à voir avec de l'amour...
Mais c'était tellement plus facile d'appeler cette attirance « amour ». Cullen avait certainement été seul un peu trop longtemps et Bella avait toujours été fasciné par le surnaturel, sans parler du fait qu'elle avait grandit avec une mère qui était malade à l'idée de vieillir.
Voilà donc pourquoi Bella tenait absolument à être transformé au plus vite. La peur de vieillir était une chose, bien sur. Mais aussi et surtout la peur qu'Edward décide de l'abandonner à nouveau s'il prenait enfin conscience de la réalité. Parce qu'au fond, tous les deux connaissaient la vérité.
C'est la raison pour laquelle je n'arrivais pas à lâcher le morceau. Je n'avais pas l'argent, ni le moyen de calmer sa peur du vieillissement, mais moi je l'aimais vraiment.
En soupirant, j'ouvrais la porte de ma chambre et m'installais sur le lit, espérant que la nuit me porte conseil et me permettre enfin de trouver une solution définitive pour parvenir à faire Bella mienne.
