Un retour dans le monde de la fanfiction avec un Craig et un Kenny en perdition. Je ne sais pas trop vers quoi ceci va aller mais se sera un genre de roadtrip distribuant les personnages de South Park hors de leur village natal.
Bonne lecture
HAPPY OFFLINE
J'écorche mon reflet de mes doigts. La vitrine remplie de bouteilles colorées me donne un air blême, bleuissant, spectre de moi même. Chui déchiré... un toxico en pleine pente. Mes yeux s'imbibent des icebergs de ce rayon réfrigérant. Vert au Titanic... ils boivent la tasse. J'm'attache du regard à un pack de bière qui m'fait de l'œil. Sec. Le désert dans un océan.
Pfff
Je me retourne j'ai pas de tune. Craig me regarde fixement. Dépité. Il a des poches sombres où flottent des pupilles d'un bleu délavé. On dit que je suis son jumeau... connerie. J'ai rien à voir avec lui bordel. J'complexe de ce charme de grand brûlé qui nous hante. J'sais pas si les gens nous fixent parce qu'on a des gueules de drogué ou parce que derrière nos airs de voyou il y a une beauté de Martyr... pareil à Jésus...
J'lève la tête, les néons blancs font une tâche petit à petit sur ma rétine. Je porte la main à mon cou, longe la ficelle qui l'encercle, sur mon débardeur blanc ressort une petite croix d'argent, je la sers.
Je ne voudrais pas blasphémer, mais j'crois que Dieu a parfois un curieux sens de l'humour.
Happé par un halo de lumière... Je voudrais me confondre à un ange...
« Kenny ?
... »
J'ai pas envie d'parler. Ma gorge se sert, la langue pâteuse, elle se colle aux muqueuses de ma bouche... J'aurais envie de chialer tant je suis mal. Il le voit, il le sait... il est un peu comme moi. Sec.
La caissière nous épie entre les lignes. Elle lit du Kafka, je crois. On se ressaisit. Craig part vers le rayon magazine, moi je me dirige côté pharmacie. Je regarde l'étalage, passe sur leurs noms barbares, récitant dans ma tête leurs propriétés prescriptives...
Anxiolytique... Myorelaxant... Hypnotique... Anticonvulsif...
Je mâche ces mots, d'imperceptible syllabe posée sur mes lèvres, l'œil distrait par la faune du drugstore et par ma faiblesse. J'sors une main de mes poches, furtif je saisis quelque boîte de narcotique, les enfournes bien au fond de ma large veste et retourne vers Craig, incognito.
Il a les yeux fourrés dans un magazine de mode. Il bug sur une nana super bien gaulée... il réagit même pas quand je lui tape le dos ou quand j'épelle d'une voix fade son nom. J'alterne entre la photo et son visage pétrifié... Je lui tire la manche... Rien. J'panique... commence à trépigné comme un môme ayant une envie pressante, les yeux larmoyants.
« P'tain Craig grouille !
... »
Rien. Toujours rien. J'harcèle son vêtement du poignet, passe ma main sur ma nuque. Le stress m'embarasse, et dans ma poche quelque chose pèse sur mon cœur.
Fait chier.
J'rapproche mon visage du sien, mes lèvres se posent sur la commissure des siennes. Il a un léger mouvement de recul, l'air exorbité comme s'il venait de se réveiller d'étrange chimère. Il regarde l'article puis moi, mes yeux l'implorent. Il prend le magazine. J'le suis comme un chien. Il paye. Je suis agité derrière lui. C'est à peine si la caissière nous a regardés. On sort.
La température nocturne nous balafre la figure. On frissonne. Hésitant. On s'éloigne. Je lui montre discrètement le fruit de la pêche. Il est brillant... j'crois qu'il est content.
On se glisse, on se faufile dans ce paysage noctambule. Les bars résonnent des basses de la musique qui s'y diffuse. Dedans, ça gigote, ça danse. C'est plein de couleur qui se mélange.
Craig est devant moi. J'ai rabaissé ma capuche depuis la sortie du drugstore, j'supporte pas ces yeux qui pèsent sur moi toute la journée. Des mèches d'un blond terne me picotent la peau de la figure. J'ai l'corps qui m'démange de plus en plus... une supplique fend mes lèvres.
« Craig... J'suis en train de crever. »
Il se retourne. L'air désolé.
« OK »
On se cale dans une ruelle informe. Des bennes à ordure s'adossent aux murs, des déchets rampent au sol parmi les dalles dégueulasses et les bouches d'égout croupies. Il fait noir, j'me pose le cul sur une benne close, Craig face à moi contre un mur jonché de vulgaires graffitis. Je lui jette une boîte de pilule. J'en ai ingurgité plusieurs. Je me laisse aller en arrière, ma tête frappe légèrement la brique crade, les yeux fermés, attendant la rédemption.
Au loin j'entends le craquement des plaquettes dans les mains de Craig, il en extrait un par un les cachetons avant de se les gober. J'entends sa glotte se serrer, il avale. J'crois qu'il m'parle...
« Kenn', pourquoi tu m'as embrassé t-à l'heure ? »
« ...Pour te réveiller »
« ... »
J'fouille dans une de mes poches, en tire un paquet de clopes. Machinalement je l'allume et absorbe ses vapeurs. Cercle de fumée du bouchon de ma bouche. Ça s'élève, ça s'élève vers le ciel nocturne où danse la pleine lune parmi les nuages urbains.
« Je veux partir Craig, j'ai envie d'me barrer de cette putain de ville, il y a trop de monde qui m'regarde. Même toi tu m'regarde... arrête de m'regarder ! On prend une caisse et on s'en va. Partout. Ailleurs. Dans le désert. Il y a personne dans le désert, si ? On pourrait dormir à la belle étoile. Un vrai ciel tu vois ?... »
« Tu délires déjà Kenny... »
« On serait seul, avec des grains de sable, un soleil de plomb, une lune d'argent. Les animaux comme fourrures et les dunes comme cimetière... Il ferait bon vivre, non ? Craig, on se casse de c'te ville viens ? »
« T'es Rimbaud mec, tu finiras par tous nous mener en enfer... »
Je n'écoute pas ce qu'il me dit. Je suis déjà sur mes jambes, vers l'avenue principale. Il y a une voiture, une vieille Ford, 4x4 sablé. Une barre de fer à la main, je brise la vitre sèchement. M'infiltre. Craig est derrière, il m'observe, me suit, claque la porte derrière lui. J'suis sous le volant jouant l'électronicien. Le moteur démarre. Ma main goûte le cuire du volant, glisse subrepticement.
Ronronne chaton... pars pour la liberté.
« Passe par chez moi avant. »
« Hn
... »
