L'air glacé ne changeait rien à la chaleur cuisante du soleil d'après-midi, et des flammes infernales du dragon. La bête était venue, avait tout détruit puis était repartie. Seuls les Dieux savaient où elle était maintenant. Avriel, lui, savait qu'elle était loin et qu'il était vivant. A genoux au milieu des cadavres calcinés une seule pensée lui vint à l'esprit : le blé est doré. Il essaya de se lever, mais les Impériaux lui avaient cassé les genoux pendant l'embuscade. Alors, malgré ses épaules et ses coudes déboités, malgré des mains en miette, malgré les flèches, les entaillent et les brûlures, Avriel rampa vers la porte la plus proche. Le Dragon avait tout détruit : les remparts brûlaient encore.

Le Haut-elfe n'avait pas d'espoir particulier. Il sortait d'Helgen, mais il savait qu'il n'ira pas loin dans son état. Au milieu de nul-part, loin de chez lui, il avait plus de chance de tomber sur des loups ou un tigre que sur des visages amicaux. Les siens l'avaient abandonné et Skyrim sera sa tombe.

« Regardez ! »

Avriel avait entendu ce mot alors qu'il s'adossait péniblement contre le mur d'enceinte du village. Alors que ses yeux ne montraient qu'un paysage en flou artistique, une silhouette apparue devant lui. Une femme, cheveux foncés, peau pâle. Elle avait un accent. Son ami, habillé en bleu, en avait aussi un.

« C'est un Thalmor ! Egorgez-le et allons-nous-en ! » Lâcha-t-il.

« Plutôt crever ! » S'exclama-t-elle. « Les elfes l'ont trahi, il allait mourir après moi et dans son état il n'ira pas loin seul. »

Avriel sentit la douleur lentement s'évaporer. Il reconnut un sortilège basique de soin. Le brouillard disparu un peu. Puis la femme lui remis les articulations en place à la force de ses bras : l'elfe lâcha un râle. Sa tête tourna. Il sentit le sol voler et virevolter. Un bras s'enroula autour de son cou et il senti son visage être presser contre l'épaule de quelqu'un. La sensation de rebondit suggérait que c'était la femme.

« Il perd connaissance. Aidez-moi… ! »

Quand l'elfe retrouva ses esprits, ses pieds dépassait d'un lit. Quand on mesure deux mètres dix, ce genre de chose était loin d'être inhabituel. Le plafond était en bois : d'épais troncs d'arbre et des poutres soutenaient un toit de chaume. Il entendait de crépitement d'un feu de bois et il y avait un parfum de poisson cuit avec des herbes. Les peaux du lit étaient douces. Il avait mal, mais pas autant qu'avant. Quand est-ce que c'était, ce « avant » ? Avriel essaya de se lever. Mais son corps protesta furieusement, alors il laissa sa tête retombée sur un oreiller de fortune fait de tissu et de laine. Il entendit quelque chose tombé sur le plancher en bois, puis cavaler vers une porte. Un enfant. Au son de sa voix, une fille. D'autres pas. Avriel ne se sentait pas en danger, mais il se concentra un instant pour sentir sa magie. Elle était à nouveau là. Ses mains étaient raides mais capables de générer de l'énergie, si besoin.

« Je ne suis pas que cela soit… »

« Hadvar, tu peux rester dehors si cela te gène mais moi j'y vais. »

Avriel reconnu la voix. C'était celle de la femme qui l'avait aidé. Elle marcha avec énergie et s'assit sur le tabouret à côté du lit avec détermination.

« Comment vous sentez-vous ? » Demanda-t-elle.

Avriel ouvrit les yeux et les tourna vers elle.

La femme était une nordique de grande taille, avec des bras fort. Elle devait avoir environ trente-cinq ans. Elle avait retenu ses cheveux sombre en queue de cheval pour faciliter son activité, mais Avriel avait l'impression qu'elle les portait habituellement sur les épaules, avec seulement quelques tresses de part et d'autre de son visage. Les couleurs sur son visage et des gouttelettes de sueurs sur son front, ainsi que sa tenue de travail et l'odeur de sciure de bois suggéraient qu'elle revenait tout juste d'un moulin à bois. Les cicatrices sur son visage et ses bras indiquaient qu'elle n'a jamais vécu dans le calme.

« Je ne sais pas si vous vous souvenez de moi. » Dit-elle. « Nous étions dans la même charrette quand les Impériaux nous ont capturé. Quand le Dragon est parti, je suis sortie de ma cachette pour voir s'il y avait des survivants. Je vous ai trouvé puis amené ici. Vous êtes à Rivebois. »

Avriel détourna les yeux pour regarder autour de lui encore une fois. Rivebois. Dans son esprit, une carte du continent se dessina. Rivebois était un village de Skyrim, situé entre deux montagnes, sur les berges d'une rivière et dans l'ombre d'un tertre. Il n'y avait jamais mis les pieds jusqu'à présent.

« Je me sens lourd… » Grommela-t-il.

« C'est les effets secondaires de mon sortilège de soin. Il est basique et je ne suis pas très douée… Navrée. » Expliqua la femme. « Je vais inspectez vos blessures, si cela ne vous dérange pas. »

Avriel ne répondit rien, alors elle souleva délicatement les bandages. Elle commenta qu'il guérissait vite, même sans le sortilège. Elle ajouta qu'il avait été inconscient pendant une semaine, et qu'ils étaient chez le forgeron. Quand elle avait trouvé le haut-elfe, l'homme qui avait fuit avec elle refusa d'aider un Thalmor, alors il l'abandonna. Elle avait dû le porter seule, jusqu'ici.

« Je suis une forte et solide ! » S'exclama-t-elle dans son explication. « Mais vous êtes plus grand et plus lourd que vous en avez l'air. »

Avriel esquissa un sourire. Les autres espèces de Tamriel avait toujours semblé faire une fixette sur la taille des haut-elfes. Dans son monologue à grande vitesse, la femme avait oublié de dire son nom. Quand Avriel trouva l'énergie de se redresser et de s'asseoir sur le bord du lit, elle se tut, réalisant que même assit, il était plus grand qu'elle.

« Votre nom ? » Grommela-t-il, sa voix rauque et sa bouche en coton.

« Erika. Vous ? »

« Avriel. Enchanté. »

Erika sembla surprise par ce dernier mot et n'hésita pas une seule seconde à lui faire remarquer.

« Depuis quand les Thalmors sont polis ? »

Avriel eut un rire nerveux. Le premier sourire depuis des années. Il eut la sensation que son visage se craquela. Son cœur se souleva, mais il n'était pas malade. Il était soulagé. Rassuré. Apaisé…