Bonnet
Par la Halfeline
Atelier de la Lanterne Fringante de juin 2008
Sur le pairing imposé : Merry/Pippin
Avec le thème imposé : Bonnet
Nous étions au mois de janvier et Meriadoc profitait des paysages blanchis du Pays de Bouc, aux côtés de Pippin. Il se délectait à faire crisser la neige poudreuse sous la corne de ses pieds, tout en laissant son regard divaguer sur les arbres sombres de la Vieille Forêt, qui se découpaient au loin sur l'horizon gris fumé confondant ciel et terre. L'air frais avait un peu rougi son nez mais était vivifiant sur son visage. Son cher cousin était venu lui rendre une visite inopinée. Il était toujours le bienvenu et, le jeune Brandebouc ayant encore la bonne fortune de se trouver dans ses années d'irresponsabilité, il avait toujours le temps pour une petite balade dans les plaines enneigées avec son éternel acolyte. Il se tourna vers Peregrin, coiffé du long bonnet vert sinople auquel il ne faisait aucune infidélité chaque hiver, depuis trois ans. C'était Merry qui le lui avait confectionné, et il gardait de l'aventure un souvenir assez rageant. Pippin avait alors seize ans à peine et avait attrapé un méchant rhume en s'exposant à la froide bise de décembre. Pour le consoler, Meriadoc s'était alors mis en tête de lui tricoter un bon bonnet de laine en mailles serrées, afin de protéger à l'avenir les tendres oreilles du petit cousin des agressions extérieures. Mais l'entreprise ne s'était pas révélée aussi simple qu'il n'y paraissait lorsqu'on regardait la grand-mère Menegilda sucrer les fraises avec ses aiguilles, et réussir pourtant à accoucher d'un passe-montagne qui forçait le respect en l'espace de quelques heures. Merry s'était échiné trois jours durant sur ses travaux de tricot, se débattant parmi les pelotes de laine, pestant bruyamment depuis sa chambre de Château-Brande où il s'était retiré, appelant cela des activités de bonne femme, et mangeant tout juste trois fois dans la journée. Le moment où il avait attaché le petit grelot conclusif à l'extrémité de l'interminable bonnet lui avait procuré un soulagement rare. Tous ces efforts en avaient pourtant valu la peine lorsqu'il avait retrouvé les petits yeux brillant de fièvre du pauvre Took, cloué au lit sous une brouettée d'édredons. Le long bonnet vert avait ramené un sourire sur ses lèvres et il l'avait gardé près de lui pendant toute sa convalescence.
Meriadoc sourit en regardant le satané bonnet couvrir jalousement les boucles de Peregrin. Seule sa frange s'en échappait, et ainsi son complice aurait presque pu passer pour un enfant sage. Pippin n'avait pas pipé grand chose depuis son arrivée. Il semblait préoccupé, Merry le devinait en le voyant tripoter le grelot de son couvre-chef. Il décida de lui laisser le temps d'exprimer sa tracasserie. Rien ne pressait… Les deux Hobbits s'engagèrent prudemment sur le Brandevin gelé afin de gagner l'autre rive et, peut-être, d'aller faire un petit tour à Stock. Lorsqu'ils eurent atteint le milieu de la rivière, Pippin tourna enfin vers lui un air décidé.
- Merry…
Le jeune Took n'eut pas le loisir de poursuivre sa phrase car l'un de ses petons glissa sur la glace lisse. Meriadoc le rattrapa à temps en lançant :
- Oh… Prudence, Took !
Peregrin, à présent serré tout près de sa poitrine, leva vers lui des yeux un peu implorants et des joues rougies. Sans dire un mot, il retira le bonnet de ses boucles brunes, et le tint quelques instants avec un certain malaise. Il se hissa ensuite doucement sur la pointe des pieds et déposa un baiser timide mais tendre sur les lèvres de Merry.
