Chapitre 1 : Chemns séparés
Thorin était vivant ! Bilbon Sacquet avait soupiré de soulagement en apprenant cette nouvelle et s'était laissé glisser le long du mur pour s'affaler sur le sol. Il était à bout de forces !
La bataille avait été longue et insupportable. Les vagues d'orques, de gobelins et de wargs avaient combattu les armées des elfes, des nains et des hommes. Mais, contre toute attente, les armées combinées avaient réussi à repousser l'ennemi. Alors que la bataille touchait à sa fin, Thorin était tombé sous les coups des ennemis mais grâce à l'intervention de ses neveux, le roi avait pu être soigné et sauvé.
La bataille était désormais terminée et Bilbon avait rejoint les rangs des nains de retour à Erebor pour avoir des nouvelles de son roi, de son ami, de son amant. Peu importe les mots acérés que Thorin avait prononcé, peu importe à quel point Bilbon les avait mérités, le hobbit était certain qu'une fois qu'il serait en mesure de parler au roi, tout s'arrangerait.
Il patienta donc pendant deux jours dans le hall avec des groupes de nains pour pouvoir parler à Thorin, attendant avec impatience, un bras encerclant ses jambes. Il apercevait Balin et Dwalin rentrer et sortir des appartements royaux. Fili et Kili furent également autorisés à s'y rendre, une fois leurs blessures soignées. Bilbon attendait que l'un d'entre eux vienne le voir mais personne ne l'aborda. Nori et Dori étaient passés devant lui sans lui accorder un seul regard.
Il les avait appelés pour avoir des nouvelles de Thorin mais les frères l'avaient tout bonnement ignoré. Bilbon était conscient que sa trahison était inadmissible aux yeux de la Compagnie et qu'il avait eu tort mais tout ce qu'il avait voulu, c'était les sauver, sauver leurs vies et celle de Thorin.
Il fixa piteusement le sol où il était assis et respira profondément pour réprimer les nausées qui l'assaillaient. Thorin avait survécu et il allait vivre. C'était tout ce qui comptait !
Il resta ainsi pendant une demi-heure tandis que la salle se vidait peu à peu, les nains ayant eu les informations qu'ils désiraient. Il se concentrait de plus en plus sur sa respiration lorsqu'une paire de bottes recouvertes de sang et de boue entra dans son champ de vision. Il releva la tête pour voir Balin qui se tenait debout devant lui, flanqué d'Ori et de Bofur.
-Puis-je lui parler maintenant ? pria Bilbon en se levant, plein d'espoir à l'idée de pouvoir enfin tout dire à son roi et d'avoir la possibilité de tout réparer entre eux.
-Il ne veut pas vous voir, avoua sombrement Balin en détournant le regard.
-Balin, s'il vous plaît, il faut absolument que je..., commença Bilbon qui avait blêmi sous l'effet du choc.
-Il a été très clair, mon garçon, coupa Balin. Il ne souhaite plus jamais poser les yeux sur le "traître" que vous êtes. Il a ordonné qu'on vous donne votre part du trésor, un poney et toutes les dispositions nécessaires pour que vous rentriez chez vous sain et sauf. Et il a ajouté que vous ne serez plus jamais le bienvenu à Erebor.
-Alors il va encore me rejeter comme un moins que rien ! s'écria Bilbon, rempli de désespoir. Je ne veux pas de son trésor. C'est lui que je veux.
Le pauvre hobbit se maintenait tant bien que mal debout et passa subrepticement une main sur son ventre avant de demander :
-Ai-je au moins le droit de faire mes adieux au reste de la Compagnie avant d'être banni ?
-Un poney et une escorte de nains vous attendent pour passer les Montagnes Bleues avant d'atteindre les frontières de la Comté, avoua Balin en grimaçant. Je lui ai dit de vous laisser un peu de temps pour faire vos adieux mais je ne l'ai jamais vu ainsi.
Balin s'arrêta avant de croiser le regard de Bilbon et posa affectueusement ses mains sur ses bras :
-Je vous souhaite bonne chance, Bilbon Sacquet.
-Merci Balin, à vous aussi. Je suis vraiment désolé, tout ce que je voulais, c'était le sauver, se justifia tristement Bilbon qui se tourna vers Bofur et Ori. Pourriez-vous présenter mes excuses et mes adieux au reste de la Compagnie, s'il vous plaît ?
Bofur et Ori acquiescèrent avant de le prendre tour à tour dans leurs bras.
-J'ai quelque chose pour vous Bilbon, déclara Ori en lui tendant un rouleau de parchemin. Thorin m'avait demandé de le faire pendant notre voyage mais il m'a dit de m'en débarrasser. Je me suis dit que vous voudriez peut-être le prendre.
Bilbon déroula le parchemin pour se retrouver nez à nez devant un portrait de lui-même, magnifiquement exécuté. Il remercia gentiment le jeune nain :
-Merci Ori, vous êtes vraiment très doué !
Il salua une dernière fois ses trois amis avant de traverser le dédale de salles qui menaient vers la sortie, entouré de part et d'autre par des gardes qui s'assuraient qu'il ne resterait pas ici. Comme si il resterait dans un endroit où, manifestement, personne ne voulait de lui. Si le Roi sous la Montagne ne voulait plus de lui dans son royaume, alors il s'en irait.
Lorsque le hobbit atteignit les portes, un poney l'attendait ainsi qu'un groupe de nains comme l'avait stipulé Balin. En se rapprochant, il aperçut la haute silhouette de Gandalf qui se tenait sur un cheval. Bilbon se hissa sur la selle et se mit au niveau du magicien. Le petit groupe commença alors à avancer et Bilbon dit :
-Balin ne m'avait pas dit que vous veniez avec nous, Gandalf.
-Je dois informer le Seigneur Elrond et Saroumane le Blanc de notre victoire et je ne voulais pas que vous voyagiez seul.
Ils s'éloignaient peu à peu de la montagne lorsque Bilbon lança un dernier regard derrière lui et passa une nouvelle fois sa main sur son ventre.
-Ne vous inquiétez pas Gandalf, je ne pense pas que je resterai seul très longtemps.
Gandalf ne comprit pas où il voulait en venir mais il vit la volonté briller dans les grands yeux noirs du hobbit qui tentait de dissimuler la souffrance qui régnait dans son coeur. Ni lui, ni Gandalf, ni les autres membres de la Compagnie ne virent la silhouette qui se dressait sur un des balcons d'Erebor et qui regardait le hobbit quitter définitivement le royaume des nains.
