Note de l'auteur : Bonswéééér. Encore un OS inutile, mais voilà je tâte le terrain du fandom WebShows depuis trop longtemps pour rester complètement inactive, et, chose devenue rare : ça m'inspire de ouf... de fou... beaucoup, quoi. OS un peu bizarre, qui démarre dans le poético-glauque et qui termine dans le fluffy tout doux. Oui, oui, c'est un Geek/Patron. Donc peut-être que je touche du bout des doigts l'OOC (ou alors j'ai carrément le bras enfoncé dedans, qui sait?).
…... Je suis une pro pour vendre mes fics, y'a pas à dire.
« Ils » désigne bien évidemment les autres personnalités, ainsi que Mathieu.
Disclaimer : Rien ne m'appartient, tout est à Mathieu Sommet et son émission Salut les Geeks. Je ne suis pas rémunérée pour ce que j'écris (encore heureux!)
Et comme dirait Antoine Daniel : ENJOI.
I stopped breathing the moment you captured my soul with your gaze
Ils disaient que derrière ces lunettes se cachait une bête, énorme et monstrueuse, faite d'ombre et de lumière. Avec des crocs comme des poignards, qui déchiraient ses gencives. Du sang se mêlait à sa salive écumante. Les poils hérissés, les griffes sorties. Imposante, menaçante. Le chien du démon. Cette bête n'était que luxure et criminalité, bourrée de vices, transpirante de rage. Il n'y avait rien d'humain en-dedans. Ils pensaient que les lunettes étaient le seul moyen de retenir la monstruosité.
Ils disaient que derrière ces lunettes se trouvait un désert, aride et sans fin. Où des squelettes humains brillaient sous le soleil brûlant. D'ailleurs, ils disaient même que des larmes de soleil tombaient en permanence dans ce désert. Si un homme le pénétrait, il était irrémédiablement perdu et bientôt il rejoignait les ossements de ses confrères.
Ils disaient que derrière ces lunettes flottait une équation. Irrésolue, indéchiffrable. Des lettres et des chiffres qui s'agitaient d'une manière mystique dans un écran de fumée. Ils disaient qu'aucun scientifique ne pourrait la résoudre, elle était unique, insaisissable et un peu effrayante. Effrayante parce que personne ne le comprenait, et ne la comprendrait jamais.
Ils disaient que derrière ces lunettes il n'y avait rien. Juste le néant, sans âme pour danser, sans flamme pour briller. Une toile monochrome qui faisait froid dans le dos, simplement par le fait qu'il n'y avait rien. Impossible de chasser les ombres : il n'en existait point. Pas une pointe de cruauté, ni même de solitude. Pas un fond de gentillesse, d'hypocrisie maladive. Le néant.
Ils disaient que derrière ces lunettes criaient les âmes de chacune de ses victimes. Elles hurlaient à la mort du soir au matin, crachaient leur douleur et jamais ne se taisaient. Ils disaient que l'homme en noir aimait les entendre s'égosiller, qu'il se délectait de leur souffrance. Les âmes erraient dans son crâne et observaient le monde extérieur par ses deux hublots bleutés. Elles les griffaient, espérant qu'un jour, ils finiraient par se briser. Alors l'homme souriait plus encore.
C'était ce qu'ils disaient.
Ils avaient tous tort. Le Geek, lui, il savait, parce qu'il était le seul à avoir vu ce qui se trouvait derrière ces lunettes. Il se souvenait de tout : leur conversation maladroite, leurs gestes délicats, et le silence qui leur était cher. « Dis Patron, il y a quoi derrière tes lunettes ? » L'homme n'avait esquissé aucun mouvement, mais le Geek avait pu imaginer ses yeux roulant en sa direction. « Ça te regarde, gamin ? ». Il avait donc attendu, assis dans le fauteuil, les mains sous ses cuisses et ses jambes se balançant au rythme d'une musique fictive. Il avait fixé l'homme en noir, tentant de percevoir ce regard si mystérieux. Ils étaient seuls dans le salon. Il était tard. Le pied du patron avait commencé à s'agiter. La nervosité le rongeait. Le Geek n'aurait eu qu'à patienter. Il n'avait plus cherché à se retenir, considérant le Patron sans aucune gêne. Ce dernier lui avait certes balancé quelques insultes bien fleuries, mais le gamin n'avait pas bougé. Résigné, le Patron avait porté une main hésitante à ses lunettes. Ses doigts avaient accroché la branche, et il avait attendu, pensant certainement que, peut-être, le môme aurait fini par changer d'avis. Pourtant non. Alors, lentement, il retira l'accessoire, découvrant deux paupière résolument closes. Déçu, le Geek avait glissé de son siège et s'était rapproché du criminel. Il lui avait écarté les jambes afin de se trouver au plus près. Le gamer avait posé deux mains brûlantes sur les avant-bras du Patron. Ainsi, l'homme en noir relâcha ses paupières. Le souffle du Geek se coupa.
Deux yeux.
Parfaitement identiques, avec deux iris clairs comme de l'eau, eux-mêmes percés de pupilles d'un noir intense. Et bien sûr qu'il y avait une âme : torturée et par mille fois écorchée. Suintante de douleur, elle se tordait derrière les fenêtres oculaires. Rien de factice, tout était vrai. Un miroir de vérité si intense que son porteur préférât le cacher. Le dissimuler sous d'épais verres sombres, l'enterrer au plus profond de son être. Obstruer les portes de son âme pour ne pas avoir à se justifier. Souffrir en silence pour que les autres n'aient pas à s'y intéresser. Le Geek l'avait lu. Oh, il n'avait pas la prétention de lire dans l'âme de qui que ce soit. Mais jamais, au grand jamais il n'avait vu pareille souffrance. Fasciné, le gamin avait entrouvert ses lèvres, et ses grands yeux bleus étaient écarquillés au possible. Ils étaient très près l'un de l'autre. A la fois troublé et agacé, le Patron lui plaqua sa paume de main contre le visage, l'obligea à reculer. Il remit ses lunettes et reprit son air arrogant qui lui seyait si bien. Le Geek, encore remué de ce qu'il avait eu le privilège d'apercevoir, resta un long moment muet, les bras ballants. Il avait envie de les revoir, encore et toujours, il sentait qu'il ne pourrait plus supporter ces lunettes noires. Il oubliait qui se trouvait en face de lui, et n'avait de considération que pour les deux orbes bleues qu'il venait d'observer. Le Patron se leva du canapé, poussa le Geek pour qu'il puisse passer, et se dirigea vers les escaliers. Il les monta quatre à quatre, marcha jusqu'à sa chambre. Sombre, chaude. Il dormirait bien.
Le Geek, encore un peu sonné, éteignit les lumières et imita le Patron. Mais une fois devant la porte de sa propre chambre, il hésita. Sa tête se tourna vers l'entrée d'une autre. Le criminel avait mal. Il avait besoin de lui. Heureux de se sentir utile, le Geek avança d'un pas décidé. Il ne frappa pas. Le Patron, allongé dans son lit, une cigarette rougeoyante entre les lèvres, sursauta. Le petit soleil orangé vibra un instant avant de se stabiliser. « Ça va pas, gamin ?! Sors d'ici avant qu'j'te- ». Il fut coupé par le gamer qui, loin d'être parti en entendant la menace, venait de se rapprocher du lit. L'homme en noir, surpris, ne dit mot. Il entendit le môme lui murmurer de sa voix geignarde « Je sais que tu vas pas bien, mais tu pourrais arrêter de faire semblant, juste pour une nuit. Oublier la personne que tu veux être, te souvenir de celle que tu es... » Le Patron ne comprenait pas. Qu'est-ce qu'il racontait ? Oublier ? Oublier quoi ? Il n'oubliait rien, il dissimulait. « En gros, tu veux pioncer dans mon plumard ? ». Le Geek sourit, dans l'ombre. Oui, c'était à peu près cela. Il s'apprêtait à grimper sur le lit quand une main se posa contre son torse. Une grande chaleur, agréable, douloureuse, piquante. « Tu craques, gamin ! Pour toi ce sera le pied du lit». Le gamer haussa les épaules et se coucha tout contre le bois. Le Patron retomba sur ses oreillers. Il tira une dernière latte, écrasa son mégot. Le soleil venait de tomber.
Au petit matin, le Geek pensait être enveloppé dans un cocon. Quelques rayons de soleil s'infiltraient entre les rideaux noirs et lui caressaient la joue. Il soupira d'aise en sentant la chaleur d'une couverture épaisse recouvrant son corps fin. Et cette odeur, un peu agressive qui mêlait fumée, sexe et alcool. L'odeur singulière qu'il avait appris à apprécier. Mais par dessus tout, il y avait ce bras qui enserrait sa taille. Une protection unique. Le Patron avait le nez niché dans son cou, ainsi, leur deux corps s'emboîtaient parfaitement. Le Geek se retourna progressivement. Il ouvrit les yeux. Papillons dans le ventre. Nœud dans la gorge. Myocarde affolé.
Ils disaient que, finalement, le Patron n'avait sûrement pas d'yeux. Le Geek savait. Le Patron avait les plus beaux yeux du monde.
Je vous avais dit que ça virait cul-cul ! Vous pouvez me crier votre mécontentement dans une review. Ou... pas. Faîtes comme bon vous semble ! Que votre journée soit belle !
E.T.
