Quelques explications pour commencer, ou « oh non, encore elle ! v'là qu'ça la reprend ! mais faites-la taire ! ». Enfin bon, petite note d'introduction, quoi. Rrrhm.

Voici la première fic que j'avais pensé écrire. Il ne s'agissait en fait au départ non d'une potterfiction mais d'une histoire que dont j'entrevoyais les possibilités (c'est-à-dire que j'ai trouvé que j'avais des idées vachement bien, ah dis donc) depuis fort longtemps. Je suis très attachée à mes personnages ; j'ai décidé, tout comme mes deux aventurières du « Livre des Traverses » (Note de l'auteur : c'est une fic très intéressante que j'ai écrite moi-même avec mon concours ; elle est vraiment très bien, si si, vous devriez la lire), de les transposer dans le monde d'Harry Potter (je sais pas vous, mais moi quand je dis ça, j'ai l'impression de parler comme une bande-annonce de Walt Disney) : bref, de faire du recyclage. Ayant un taf monstrueux (Severogue chou, tu me pardonne, j'ai piquée ton expression préférée), j'ai décidé de l'écrire au compte-goutte. En somme, je m'en vas te me les faire bosser, moi, ce tas d'feignants ! Traduction : si vous voulez la suite, envoyez-moi plein de reviews. Nyark nyark nyark. !!! *ricanement sardonique très voldemesque*

Disclaimer : tiens ! voilà bien la preuve de l'hégémonie anglophone sur notre pauvre vieux continent. encore un mot barbare (in inneugliche in zeu texte, on dit « barbaric ». joli, non ?) qu'il me faut écrire afin d'être comprise. (paraît qu'y en a des, comme qui dirait, qui paraîtrait même qu'y z'y trouvent que quand est-ce que j'parle, on pige rieng). Ben zutre alors ! Et si j'ai envie de les garder, les persos ? Ouais, bon, d'un aut' côté, j'ai pas très envie ; j'préfère les miens (eh les loupiots, au passage : les persos que vous zavez pas vus dans « Harry Potter, le livre », c'est normâââl, comme qui dirait : c'est les miens), et puis bon. j'voudrais pas donner des noms, mais certaines excitées du bocal pourraient vouloir me chercher des noises (de bronze, hahaha), si je leur piquait Sirius, Severus, Remus, Harry, Ron, Draco, Gilderoy, Seamus, Dean, Charlie, Bill, Fred, George, Percy, Neville. les zautres aussi. Enfin bref, tous les mecs, des mignons aux potables en passant par les carrément moches, mais tous les goûts se trouvant au sein de notre mère la Nature, on va pas discuter, s'pas, mais z'enfin bon. Enfin les persos de Madame Rowling y sont pas-t-à moi, vu qu'y sont à Madame Rowling. CQFD. MAIS JE GARDE LES MIENS, NOM D'UNE BAGUETTE !

Ah, et puis j'ai oublié le principal. bonne lecture ! (je vous adore)



Prologue

Quelque part entre les ombres



« L'idée de la mort suit ma pensée comme l'ombre de mon corps ; et plus forte est la joie, la lumière, plus l'ombre est noire. » (André Gide)





Le vent jouait dans sa fourrure, dessinant de curieuses ondes sur la soie noire. Les yeux mis-clos, les oreilles tournées vers l'extérieur, les vibrisses frémissantes dans la brise automnale, immobile et souverain dans la nuit voilée, le chat observait. Nul ne s'apercevait de sa présence, car il était souple et silencieux. Un habile espion, ou un rusé chasseur, selon les circonstances, ce qui souvent revenait au même. Il se tenait sur cette pierre depuis longtemps déjà, tout au moins le temps eût paru long à un être plus pressé que lui. Mais le félin était aussi rapide, et ne craignait guère les retards. Un souffle passa, qui lui fit dresser l'oreille. Une forme sombre se profila aux abords de la colline, d'abord fragment d'obscurité vacillante, puis ses contours devinrent plus nets. Dans cette nuit où le seul mouvement perceptible était celui du vent, l'agitation désordonnée de la silhouette paraissait incongrue. Comme sensible à l'étrangeté de cette apparition, le chat frémit, tournant la tête vers la forme mouvante, ses yeux s'entrouvrant suffisamment pour lui permettre de s'adapter à la vision nocturne tout en éteignant le reflet chatoyant d'une étoile dans ses yeux mordorés. Lentement, avec une grâce hypnotique, le chat s'aplatit sur la pierre encore tiède.

Lorsque l'homme s'approcha, la respiration sifflante d'avoir couru et trébuché, il se laissa tomber contre un providentiel amas de roches. Adossé à l'abri précaire, il cherchait à reprendre son souffle, la gorge sèche et les poumons brûlants. Ses cheveux clairs et ternes collaient en mèches humides sur ses tempes et sa nuque ; la robe qu'il portait, visiblement trop grande, lui donnait un aspect négligé, accentué par les tâches suspectes sur les manches, le bas et l'ourlet déchiré. De la terre, de l'herbe, et peut-être autre chose de plus ancien. Le chat huma l'air imprégné d'odeurs nouvelles ; senteur de l'herbe écrasée, remugle de peur et de sueur mêlées, arôme enivrant de cette autre chose, plus fluide, plus sombre, qui même en séchant sur le tissu malmené exhalait la chasse. Les sens du félin s'aiguisèrent à l'appel de l'instinct. Il pouvait à présent détecter la moindre vibration dans l'air, bondir sur sa proie avec célérité et la déchirer de ses crocs aigus. L'excitation grandissante lui fit lever brusquement la tête, le corps tendu sous son pelage lustré. L'homme reprenait son souffle. Il passa machinalement une main sanglante dans ses cheveux sales. Inconscient de ses propres effluves, il inspecta son corps, à la recherche de quelque blessure ; son regard s'attarda sur sa robe sombre et maculée, déchirée à plusieurs endroits. Il chercha sa baguette magique, tombée près de lui au terme de sa course épuisante. Il la ramassa, l'épousseta sommairement et se redressa sur un coude. Ses petits yeux rapprochés croisèrent ceux du chat. Deux émeraudes pailletées d'or vrillèrent deux flaques de boue. Comme par instinct, l'homme eut un mouvement de recul. Stoïque, le chat demeura immobile, conscient de son pouvoir, se contentant de toiser l'intrus. Toute velléité semblait s'être envolée ; son attitude dénotait une simple curiosité distante. Son appréhension quelque peu dissipée, l'homme se leva avec lourdeur. Il était de taille moyenne, la silhouette floue de ceux qui ont maigri trop vite ; la robe qu'il portait devait certainement avoir connu des jours meilleurs, mais dans un temps très ancien. Plissant ses yeux aux paupières tombantes, il chercha à distinguer davantage que cette forme sombre posée sur le rocher. Les deux petits points lumineux des yeux étant les seuls repères sûrs, il ne les quitta pas du regard. Prudemment, il raffermit sa prise sur la baguette de hêtre. Il eût été stupide de se faire attaquer par un vulgaire matou après avoir échappé à des Aurors aguerris. « Minet, minet. » murmura-t-il d'une voix doucereuse. Le chat recula d'un pas avec un dégoût évident. L'homme se demanda si c'était un comportement normal pour un chat. Surtout pour une bestiole probablement affamée, puisqu'elle ne s'enfuyait pas. « Sale bête. ». Le petit fauve lui jeta un regard où se mêlait méfiance, répulsion, et une étrange lueur de triomphe. Bizarre, donc suspect. Et par conséquent, dangereux. Par réflexe peut-être, l'homme baissa une fraction de seconde les yeux vers sa baguette, à la fois arme et bouclier, vieille complice de ses méfaits. « Avad. » Il s'interrompit. De chat, il n'y avait plus trace. Au lieu de se sentir rassuré par la pensée que, sans doute, l'animal avait enfin compris que l'être humain ne transportait rien de mangeable, ou tout simplement qu'il n'était guère animé de bonne intentions à son égard, l'homme se sentit frissonner. Où était donc passée cette maudite bête ? Ses genoux fléchirent lorsqu'il sentit un poids s'abattre sur son échine. La surprise, autant que la douleur, lui arracha un cri. Il sentit confusément le sang poisser, recouvrant les stigmates d'autres blessures, infligées à d'autres que lui-même. La souffrance lui faisait perdre la raison, et il ne pouvait s'apercevoir que ses glapissements attiraient des rumeurs confuses ; des gens au loin accouraient vers la colline. Le poids fut retiré, et il s'écroula, terrassé, à genoux. Pantelant, il leva un regard brouillé par la sueur et les larmes vers la créature devant lui. Hypnotisé et anéanti, terrorisé et stupéfait à la fois, il rencontra à nouveau le regard aussi dur que l'émeraude dans les yeux d'un fauve immense, au pelage noir et lustré, au muscles puissants et aux crocs étincelants. La terreur abjecte qui l'envahit alors fut la dernière émotion que le blessé pût encore exprimer ; l'épuisement avait eut raison de la moindre pensée cohérente lorsqu'une mâchoire immense se referma sur sa nuque pour un monstrueux coup de grâce. Le craquement sinistre et caractéristique des os, mêlé au gargouillis du sang, fut presque étouffé par les éclats de voix qui s'entendaient au bas du tertre. Avec un dernier regard pour le corps inerte affalé dans l'herbe, semblable à un pantin désarticulé et grotesque, une expression de stupeur douloureuse sur son visage meurtri, le terrible vainqueur s'éloigna prestement, disparaissant dans l'obscurité tutélaire de la forêt proche. Les hommes arrivèrent enfin au sommet. Près d'une sorte de dolmen dû aux caprices de la nature, ils découvrirent le macabre spectacle d'un corps torturé, et les signes évidents d'une lutte acharnée, mais sans espoir. Aucun d'eux ne fut très ému, car le macchabée était un criminel recherché depuis longtemps par le Ministère. A dire vrai, beaucoup des Aurors furent soulagés qu'un autre ait fait le travail à leur place. Ils savaient pertinemment qu'avec l'aide de membres haut placés et néanmoins corrompus, l'assassin s'en serait tiré, peut-être même sans procès. Il n'empêchait que l' « arrestation » anonyme avait plutôt tourné au carnage. « On fera un rapport aux autorités supérieures » dit enfin un vieil homme bardé de cicatrices, et doté d'une jambe de bois. « Et tant pis pour ce salaud, ce n'est après tout que justice. Il ne s'agit d'ailleurs sûrement qu'un d'un banal règlement de comptes entre mangemorts. Vous n'allez quand même pas chialer sur son sort, non ? » Les autres haussèrent les épaules. Certains maugréèrent, frissonnant parfois. L'un d'eux s'appuya à une pierre, le dos tourné, pour vomir. On fit appeler des Médicomages pour s'occuper du corps. Il y eut à peine un léger remue-ménage signifiant que des dispositions étaient prises pour l'enlèvement du corps ; à peine quelques va-et-vient afin d'inspecter le périmètre du sinistre spectacle. A l'aube, la colline était déserte.



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Dans son vaste manoir, Armand de Karell apprenait la nouvelle d'une arrestation surprenante en lisière de la Forêt Interdite, non loin du collège Poudlard. A demi soulagé, il se détourna du feu, où la tête d'un responsable du Ministère venait de disparaître avec un « plop », et se dirigea vers ses appartements. La disparition d'un tel homme n'était pas en soi une tragédie, la victime étant un criminel reconnu, responsable de la mort de nombreux innocents, mais il pensait à la sauvagerie du meurtre avec quelque appréhension - lui-même n'habitait qu'à l'autre bout de la Forêt Interdite. Armand de Karell avait deux enfants, et la possibilité qu'ils encourent un danger était sa plus grande crainte. Comme toujours lorsqu'il était préoccupé, il se rendit dans le vaste salon du manoir, où il était à peu près sûr de trouver Morgane. Il appréciait sa compagnie et sa conversation, sa présence réconfortante. Armand de Karell était veuf depuis de nombreuses années, et sa fille aînée représentait une présence féminine de substitution à sa défunte femme. Elle était âgée de vingt-quatre ans, soit neuf ans d'écart avec son frère Christophe ; c'était tout naturellement qu'elle s'était investie du rôle de mère. Mûre avant l'âge - elle avait onze ans à la mort de Mme de Karell - Morgane possédait une finesse de jugement qui enchantait son père, cultivé et méditatif. Mr de Karell occupait un poste important au Ministère de la Magie, mais on ne savait lequel, car ses activités étaient tenues secrètes. Ses nombreuses et pesantes obligations ne lui faisaient qu'apprécier davantage son foyer. En ce soir brumeux d'automne, la grande cheminée du salon flambait allègrement. Morgane de Karell était confortablement avachie sur un des fauteuils de cuir ; une attitude peu conforme aux règles à respecter dans un tel endroit, mais propice au calme d'une soirée intime entre membres de la famille. Dans un coin de la pièce, Christophe lisait tranquillement un ouvrage traitant du Quidditch ; le sport le plus populaire dans le monde sorcier, passionnant tous les garçons entre sept et soixante-dix-sept ans sans exception aucune. Armand de Karell ne fut guère étonné de trouver, affalé dans son fauteuil préféré, le jeune Wilhelm Vremler. Celui-ci était un habitué des soirées au coin du feu ; fils de deux Aurors réputés et collègues regrettés d'Armand, Klaus et Ingrid Vremler, Wilhelm avait été dans la même classe que Morgane durant leur sept années à Poudlard, l'école des sorciers. Après la mort de ses parents, survenue peu après celle la mère de Morgane, il était venu habiter chez les de Karell. Vivant à présent d'un salaire de professeur - et surtout de pique-assiette, suivant les dires de Morgane - il continuait néanmoins à hanter régulièrement le vaste Manoir. Mr de Karell ne se serait risqué à l'avouer, mais il appréciait énormément la présence de jeunes gens dans sa maison ; sans eux, le petit château aux sombres murs de pierre lui aurait semblé bien plus froid et humide. Le Manoir avait été ainsi nommé, il y avait de cela plusieurs siècles, par les gens habitant ses dépendances, aujourd'hui détruites. La grande demeure avait été une place forte, et elle en avait gardé une allure solennelle de gardien. La famille de Karell était d'origine française. On se souvenait plus très bien quand au juste, un couple était venu s'installer en Grande- Bretagne afin de collaborer avec le Ministère anglais ; ils n'en étaient jamais repartis. Armand de Karell était à présent le dernier d'une longue lignée d'Aurors, de ministres de la Magie, de diplomates et autres personnalités. le tout à la tête d'une fortune considérable. Les héritiers de Karell n'avaient épousé que des françaises - par snobisme ? - perpétuant la tradition jusqu'à Armand de Karell. Lui-même avait convolé - en justes noces, comme qui de droit - avec une femme étrange du nom de Kelly, ou Kellian - quelque chose dans ce goût-là. Les gens ne connaissaient pas grand chose de la famille de Mr de Karell (ce qui était un exploit dans un milieu où chacun aime à décortiquer la vie de ses semblables), bien que lui- même fût très apprécié ; on savait qu'il était veuf, que sa femme lui avait laissé deux enfants et, avant toute chose, qu'il était très riche. Ce détail était plus volontiers retenu par la gent féminine ; mais malgré le fait alléchant que Mr de Karell fût encore bel homme, feue « Kelly » continuait d'accaparer ses pensées ; outre cela, l'un des rejetons était adulte et l'autre adolescent. Toutes profiteuses restaient donc relativement à l'écart. Lorsqu' Armand de Karell pénétra dans le vaste salon, les « enfants » étaient plongés dans une joyeuse discussion portant sur les mérites de la Mandragore. Morgane se tourna vers son père : « - Will me soutient qu'on doit l'utiliser chaque fois que c'est possible. Mais la Mandragore est dangereuse, c'est exactement comme si tu refilais de la belladone, ou de l'arsenic à chaque petit rhume ; ça fait bien effet, on guérit vite, mais à long terme c'est l'empoisonnement. - Morgane, si tu avait été attentive (Wilhelm jeta un regard en coin à Mr de Karell), enfin plus attentive en Botanique, tu te rendrais compte qu'il suffit de bien doser et. - A court terme ! Ce n'est pas parce que nous sommes sorciers que nous devons utiliser des formules à tort et à travers ; qui sait si les générations futures ne pâtiront pas de nos excès de sortilèges ? - Si cela peut te rassurer, ma petite fille, une certaine branche du Ministère se doit de travailler sur de tels problèmes », intervint tranquillement Mr de Karell. (Il s'installa dans un fauteuil près du feu puis reprit la parole avec une sorte de demi-sourire :) « Je pourrais peut- être te confier un poste, afin que tu diriges les opérations ? Tu aurais un grand bureau, avec sans doute un secrétaire ennuyeux mais compétent, du parchemin en-tête à ton nom, et beaucoup de gens sous tes ordres. Qu'en dis- tu ? » Sous une cascade de cheveux noirs, Morgane fit une grimace aussi horrible qu'éloquente. « Je crains que notre chère Morgane ne soit pas encore prête pour la vie de bureau », remarqua Wilhelm gaiement. Christophe leva enfin le nez de son livre pour ajouter avec une fausse candeur : « On dirait que notre chère Morgane est mûre pour une carrière d'Auror ronchon : elle ressemble de plus en plus à Fol'Oeil » Morgane leva un sourcil, avala beaucoup d'air puis se tourna vers son frère. « Notre petit Chris pourrait faire un bon Gilderoy Lockhart, étant donnée la manière dont il tourne autour de Nephariane. » Wilhelm émit un son étranglé, comme s'il avait voulu parler et avaler en même temps. Nephariane était sa s?ur adoptive. Christophe prit une couleur de framboise bien mûre et sa s?ur se rencogna dans son fauteuil avec un air boudeur. Leur père écarquilla les yeux exagérément, avec un mélange de peine feinte et de fausse surprise, puis s'enfonça dans son propre siège en joignant les mains. Morgane donna le signal de la détente en éclatant de rire, ce qui fit s'enfuir un chat noir posé sur l'ottomane. Au bout d'un moment, Mr de Karell se redressa et signala l'extinction des feux. Wilhelm se retira après une ultime poignée de main (et une bise tendre à Morgane, tableau que contempla Christophe avec un air narquois de conspirateur) et la famille de Karell se retrouva seule. S'inclinant légèrement, leur père souhaita une bonne nuit aux deux enfants, puis se retira dans ses appartements. Morgane et Christophe regagnèrent l'aile du Manoir qui leur était réservée, bras dessus-bras dessous. Après un baiser très doux déposé sur la joue de son petit frère, Morgane de Karell s'éloigna vers sa chambre, laissant une traînée de parfum délicat. Elle se retourna à mi-parcours, pour faire un clin d'?il magistral de ses grands yeux d'émeraude. Virevoltant, elle partit enfin, vision étrange de longues boucles noires glissant sur des épaules d'albâtre, à la démarche souple de félin. Christophe la regarda disparaître aux détours d'un couloir. Sa s?ur était vraiment une personne étrange, aussi changeante qu'une flamme, parfois douce et tendre, parfois aussi dure et cruelle qu'un fauve. Secrète. Imprévisible, et pourtant si droite. Il gagna sa chambre en songeant aux grands yeux verts de Morgane, d'un vert profond, brillant et dur comme la pierre, au regard clair et franc, qui semblaient posséder leur propre vérité, et tant de secrets. Elle avait les yeux de sa mère. de leur mère, qu'il n'avait que si peu connu. Christophe sentit confusément une tristesse douce le gagner, comme à chaque fois qu'il évoquait ces souvenirs enfuis ; Morgane avait été sa vraie mère, et tous les secrets du monde n'y pourraient rien changer. Il avait en elle une confiance aveugle et méritée ; il la connaissait mieux que quiconque. Il pouvait presque lire dans chacune de ses pensées, réputées insondables ; mais ce soir. « N'empêche. je me demande ce qu'elle cachait. » Et une inquiétude confuse, sinistrement familière, se glissa dans tout son être. Avec cette étrange clairvoyance qui s'emparait de lui lorsqu'un danger menaçait, cette prescience héritée de sa mère et qui lui rappelait tout son désarroi, Christophe sentit l'abîme tout proche. Quelque chose approchait.



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Dans le ciel brumeux d'automne, au plus profond de la nuit, dans les dernières heures précédant l'aube, la lune semblait perdre un peu de son éclat. Sa lueur étrange et énigmatique évoquait un ?il grand ouvert, éclairé par une lampe. Une sorte de reflet surnaturel, presque malsain, reflet d'une lumière autant que d'un feu intérieur. Une clarté à la fois artificielle et naturelle, comme si cette luminescence était empruntée, ou volée. Dans la Forêt Interdite, là où les rayons lunaires ne pouvaient même pénétrer, un petit être glabre, aux longs doigts palmés, léchait avidement une tache sur le sol moussu. Cet être était habitué à l'obscurité ; il voyait très bien sans lumière que cette tache était rouge. D'un beau rouge carmin. Mais c'était surtout très bon. Un animal quelconque avait du s'écorcher contre l'arbre décharné mais menaçant, à moins qu'un prédateur y ait fait un bon repas. Avec sa langue verte, l'être aux longs doigts continuait le sien. Quelque part ailleurs, au creux de son abri plongé dans l'obscurité, un autre être dormait d'un sommeil agité. Un mouvement brusque lui arracha un gémissement : son bras était entouré d'un épais bandage, déjà rougi. Un ?il entrouvert tandis que la clarté opalescente de la lune se coulait dans la chambre, et un éclat de jade s'alluma un instant dans les pupilles dilatées. Un éclat perlé découvrit des dents blanches et aiguës. Puis le calme revint. La lune disparaissait silencieusement, annonçant l'aurore.



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Ah. et bien voilà la fin de cette mise en haleine. Qu'en pensez-vous ? Dois- je subir vivats ou insultes ? Les deux me feraient plaisir (avec toutefois quelque préférence pour la première réaction), et j'espère que vous aurez le courage de m'écrire un petit mot. D'avance merci ^-^