Les personnages de la série ne m'appartiennent pas. Ils sont la propriété exclusive de : Jeff Davis. Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en situation dans cette fiction.

AVERTISSEMENT : Cette fiction dans sa version courte, dans l'esprit de la série d'origine, contient des mentions de tortures et viols, rien de trop graphique cependant mais si vous ne supportez pas ce type de texte, abstenez-vous de lire.

La couleur de la mort

Chapitre 1

Ils se promenaient main dans la main, comme tous les couples amoureux. Le parc d'attraction était bondé et les rires éclataient autour d'eux. Ils n'avaient pas si souvent l'occasion de se détendre sans arrière pensées, lui trop occupé par l'attitude de son chef direct envers lui et elle dans le stress de ses derniers examens pour obtenir son internat. Mais aujourd'hui ils avaient décidé de ne plus penser pendant une journée à cette compétition impitoyable qui les poussait en avant et leur donnait trop peu souvent le temps de se laisser aller à la joie de vivre qui aurait dû être les leurs du haut de leurs 25 ans respectifs.

Alors cette plongée dans une atmosphère bon enfant, loin des tracas du bureau pour l'un, des cris des blessés, des gémissements des malades et des exigences de leurs familles pour l'autre, c'était un vrai bonheur.

Dakota se tourna vers Tennessee. Encore une chose qui les liait : tous deux portaient pour prénom le nom d'un état des Etats-Unis, ce qui leur faisait dire, en riant, que leurs parents manquaient cruellement d'imagination, les uns comme les autres, même si Tennessee avait pris l'habitude de rétorquer que, pour sa part, son prénom était un hommage au grand dramaturge dont ses parents n'avaient pourtant jamais lu une ligne.

Dans les yeux de l'homme qu'elle aimait, la jeune femme lut autant d'amour qu'il devait y avoir dans son propre regard et elle lui adressa ce sourire resplendissant qui le faisait fondre à chaque fois, celui qui l'avait conduit à lui adresser la parole trois ans plus tôt, dans cette fête d'étudiants. Il était plutôt réservé d'habitude, mais cette fille blonde, au teint clair, même si elle avait les traits tirés, ce qui n'était pas le signe d'une propension à faire trop la fête, mais de longues heures passées à l'hôpital où elle était alors externe, comme il devait vite l'apprendre, cette fille blonde donc, avait des yeux azur dans lesquels n'importe quel homme normalement constitué aurait eu envie de se perdre et un sourire à faire se damner un saint. Et s'il n'était pas un démon, Tennessee était loin d'être un saint. Il avait tenté sa chance, et celle-ci lui avait souri.

Le jour où, pour la première fois, Dakota s'était donnée à lui, plusieurs semaines après cette première rencontre, il avait su qu'il avait trouvé celle qui partagerait ses jours jusqu'à la mort. Depuis un peu plus de deux ans, ils vivaient ensemble, laissant leurs familles respectives se lamenter sur ce concubinage qu'ils n'appréciaient pas vraiment, le mot seul leur paraissant en totale contradiction avec les valeurs qu'elles avaient tenté de transmettre à leurs enfants. Mais les deux jeunes gens, bien que certains de leur amour, voulaient se donner le temps. Ils envisageaient le mariage lorsque Dakota aurait décroché son diplôme et trouvé un emploi, comme l'avait fait Tennessee, l'année précédente, dans un cabinet d'architecture. Le salaire que touchait maintenant le jeune homme, permettait au couple de vivre un peu plus confortablement à Détroit et surtout d'avoir enfin un appartement à eux, sans colocataires pour parasiter leur besoin de se retrouver ensemble, rien que tous les deux.

L'homme se pencha sur sa compagne et déposa un baiser tendre sur ses lèvres, goûtant au passage le sucre glace de la gaufre qu'elle venait de manger. La jeune femme noua ses mains derrière la nuque de son compagnon et l'attira vers elle, approfondissant le baiser et allumant instantanément un brasier au creux des reins de son compagnon. Il désirait cette femme comme il n'avait jamais désiré personne ! Il pensait ne pas pouvoir se rassasier d'elle un jour et leurs ébats étaient toujours certes pleins de tendresse, mais aussi sauvages et passionnés. C'est avec Dakota qu'il avait découvert le sens du mot jouissance.

Le baiser se prolongeait, devenait torride et les deux corps se frottaient l'un à l'autre, sans se soucier du monde autour d'eux, ce monde qui, lui, se rappela à leur bon souvenir sous l'aspect d'une mère de famille tirée à quatre épingles, qui surveillait une couvée de trois enfants de moins de dix ans et qui s'exclama d'un ton pincé :

- Vous pourriez vous retenir tout de même ! Il y a des endroits pour ça ! Ce n'est pas un spectacle pour les enfants !

Les deux amants se séparèrent, tentant de prendre l'air contrit, mais ne parvenant qu'à se rejoindre dans un éclat rire joyeux que la femme prit pour une moquerie. Un éclair de fureur passa dans ses yeux et elle passa son chemin, poussant sa progéniture devant elle comme si elle les protégeait du diable tout en grommelant :

- Si c'est pas malheureux de voir ça !

Dakota et Tennessee échangèrent un regard joyeux. Le jeune architecte sentait son désir augmenter à chaque seconde où il regardait sa magnifique compagne et, d'une voix chargée de sous entendus, il lui murmura :

- Et si on rentrait ?

- Je voudrais faire un tour de grand huit ! protesta la jeune femme.

Il l'attira contre lui et lui susurra à l'oreille :

- Si on rentre maintenant, je te promets de te faire personnellement le grand huit ! En mieux !

Elle se détacha de lui et lui tira la langue :

- Mais écoutez-moi cet affreux macho ! Crois-tu vraiment pouvoir me donner autant de sensations ?

- Et plus encore jeune demoiselle.

Comme à chaque fois qu'il posait sur elle ces yeux empreints de désir, Dakota sentit un délicieux frisson la parcourir, tandis qu'une étincelle s'allumait au creux de son ventre. Elle savait que lui seul saurait la faire devenir brasier jusqu'à ce qu'elle explose en mille soleil et, à son tour, le besoin s'empara d'elle.

- D'accord, abdiqua-t-elle, mais tu n'as pas intérêt à m'avoir fait des promesses en l'air sinon…

Le reste de sa phrase se perdit dans le baiser enflammé qui les unit de nouveau, puis, main dans la main, ils se dirigèrent vers la sortie, inconscients des regards qui s'attardaient sur eux, certains pleins de compréhension, ceux d'autres amoureux qui les voyaient aussi heureux qu'eux-mêmes, certains emplis de bienveillance, avec ce sourire qu'on attache sur les amants qui nous réchauffent de leur foi en l'avenir, certains emplis de nostalgie au souvenir de leur propre jeunesse et de leurs propres amours, certains pleins de jalousie, ceux des personnes seules ou dont les histoires avaient volé en éclat et dont le cœur était trop meurtri ou trop étriqué pour leur permettre de se réjouir que d'autres connaissent le bonheur qu'ils n'avaient pas trouvé, et puis il y avait quelques regards réprobateurs, ceux des gens pétris de préjugés et handicapé des sentiments, qui ne voyait pas un couple d'amoureux mais juste une blanche et un noir. Parce que si Dakota était le type même de l'américaine blonde aux yeux bleus, grande fille saine au teint clair, Tennessee était, lui un afro-américain dont la peau ébène tranchait avec celle si blanche de sa compagne et il existait encore trop de personnes qui n'appréciaient pas ce genre de liaison. Les deux jeunes gens avaient appris à faire avec. On ne pouvait rien contre les imbéciles, répétait toujours Tennessee et puis, malgré tout, ils avaient la chance de n'être pas trop en bute au racisme. La plupart des personnes acceptaient leur couple, les autres le toléraient. Quant à ceux qui ne voulaient pas comprendre qu'aucune barrière ne peut vaincre l'amour : ni une frontière, ni une religion, ni une opinion, ni la couleur de la peau, tous deux s'en moquaient, les plaignant plus qu'ils ne les méprisaient.

Alors les deux amants ne prêtaient pas attention à tous ces regards qui les suivaient, souriant à ceux qui leur souriaient, ignorant les autres. Pourtant, parmi tous ceux-là il y en avait un qui s'attachait sur eux avec une intensité particulière et la seule chose qu'on y lisait c'était la haine, une haine sans borne, une haine meurtrière.

Lorsque Tennessee avait rencontré Dakota, son cœur avait sauté dans sa poitrine. Lorsqu'elle s'était donnée à lui, il avait su qu'elle serait la femme de sa vie.

Lorsque Dakota avait rencontré Tennessee, elle avait reconnu le prince dont elle avait rêvé quand elle était petite fille. Certes il n'avait pas la couleur qu'elle lui prêtait alors, mais c'était lui, il avait ses mots, sa douceur, son intelligence…. Et lorsqu'elle avait décidé de lui faire cadeau de cette virginité qu'elle destinait à son futur époux, elle l'avait fait comme un engagement, parce qu'elle savait qu'il serait le seul homme avec lequel elle partagerait sa vie, jusqu'au bout de leurs jours.

Ce que ne savait ni l'un ni l'autre des jeunes gens, c'est qu'ils allaient effectivement s'aimer jusqu'à la fin. Parce que leur vie venait de se terminer, ce soir-là, dans ce parc, à l'instant précis où les yeux haineux s'étaient posés sur eux et où un esprit malade avait décidé de leur sort.

On les retrouva trois jours plus tard, dans une décharge publique.

(à suivre)