Chapitre 1 : Pourquoi ?

Yann : Pourquoi t'as fait ça Kévin, hein ? Pourquoi?

Kévin : J'ai juste fais mon boulot Yann

Yann : Ton boulot ? Ton BOULOT ? T'as foncé dans la gueule du loup tête baissée ! T'as mis ta vie en jeu, là ! Tu sais ce que c'est, ça, n'est-ce pas ?

Il se saisit violemment de la main gauche de Kévin pour lui montrer son alliance. Puis il colla sa propre main à celle de son mari.

Yann : Une alliance ! Ton idée ! Mon mari !

Kévin ne quitta pas le regard de Yann.

Kévin : Il avait peur… Et son frère…

Yann lui lâcha la main, s'éloigna subitement de quelques pas, baissa la tête en soufflant, puis s'approcha de Kévin pour n'être éloigné de son visage que de quelques millimètres, avant de parler d'une voix basse, profonde et détachée qui fit passer des frissons dans le dos de Kévin.

Yann : Le surfer ?

Comme une question remplie d'une affirmation accusatrice.

Kévin : Il avait peur pour son frère Yann ! Qu'est-ce que j'aurai dû faire alors ? Le laisser aller seul affronter ces deux gars ? Ils étaient dangereux !

Yann se recula un grand coup avant de lui tourner le dos. Il se prit la tête entre les mains puis inspira et expira à pleins poumons afin d'évacuer la colère et la peur qui s'insinuaient en lui. Il releva la tête puis se tourna de nouveau vers son mari. Ses deux bras raidis contre son corps, il ferma les poings puis les rouvrit plusieurs fois, comme pour contenir son corps saisit d'une brusque envie de frapper quelque chose. Où quelqu'un. Seulement ce quelqu'un n'était pas là, et il ne voulait pas faire de mal à Kévin.

Il se rapprocha de lui, assez près pour pouvoir fixer son regard dans les yeux bleus de son mari, qui ne l'avait pas lâché un instant depuis le début de la conversation, mais assez loin pour éviter tout dérapage incontrôlé. Il ne voulait surtout rien faire à son mari, mais la rage qui était en lui monta encore un peu plus devant le regard océan plein de supplications.

Il reprit une grande inspiration.

Yann : C'est bien ça le problème Kévin. Comme tu l'as dit, ces mecs étaient dangereux !

Kévin : Yann ! Il ne s'est rien passé, je vais bien

Yann : T'as failli te prendre une balle en pleine tête !

Kévin : Qu'est-ce que tu racontes…

Yann : Ce mec t'a braqué ! Il aurait pu… Tu imagines ce qui aurait pu se passer ?

Kévin : Calmes toi, ça va j'ai rien, et puis j'étais couvert. Les collègues étaient là…

Yann s'avança jusqu'à ce que leurs corps se touchent, puis reprit d'une voix rauque, posée mais remplie de colère

Yann : Toi, plus que quiconque, sais pertinemment qu'avec un flingue sur la tempe, malgré toute la bonne volonté des collègues, si le mec avait appuyé sur la détente, ils n'auraient rien pu faire !

Fixant toujours Kévin, il inspira une nouvelle fois et souffla lentement afin de calmer son cœur qui s'était emballé, puis saisit brusquement Kévin par le cou et empoigna sa nuque, de sorte que leurs nez se touchaient presque.

Yann : Tu n'es plus tout seul, ne l'oublie pas !

Et comme pour affirmer ses dires, il resserra son étreinte sur la nuque de son mari, qui laissa échapper une grimace de douleur. Mais avant qu'une quelconque plainte n'ait eu le temps de franchir ses lèvres, Yann l'attira à lui presque violemment et l'embrassa à pleine bouche, de manière sensuelle mais brutale. Une étreinte de quelques secondes seulement dans laquelle Yann déversa son amour, sa colère mais surtout sa crainte. Cette crainte de perdre son amant, cette peur qu'il avait ressenti quand il avait appris ce qui s'était passé. Il sentit le corps de Kévin se tendre sous cette impulsion et le relâcha presque immédiatement, gardant sa main sur sa nuque, la caressant tendrement, laissant vagabonder ses doigts dans la chevelure de l'homme qui lui avait permis de revivre, et soupirant une nouvelle fois, il colla son front à celui de Kévin, sans jamais détourner son regard.

Yann : Il te plaît ?

Kévin dévisagea Yann un long moment. Il n'avait jamais été capable de lui mentir, mais s'en voulait déjà pour le mal qu'il allait lui faire, incapable de contrôler cette attirance qui l'avait frappé sans crier garde, incapable non plus de lui résister. Il ferma les yeux un moment, puis les rouvrit. Sans chercher à dissimuler quoique ce soit, sans force non plus et dans un murmure il laissa échapper à regret le mot le plus douloureux de son existence.

Kévin : Oui

Il sentit la main se resserrer dans sa nuque, et immobile tout du long, Kévin se décida enfin à passer un de ses bras autour de la taille de son homme. Il entendit une voix, comme un murmure … plaintive… trahie… déçue… méconnaissable. Celle de Yann.

Yann : Pourquoi ?

Et il sut à ce moment-là que jamais plus il ne voudrait entendre cette voix déchirée.

Kévin : Je ne sais pas. Mais…

Avant qu'un autre son ne puisse franchir ses lèvres, le front de Yann se décolla du sien avant que ses lèvres ne soient prises dans un baiser langoureux et foudroyant. Il rouvrit les yeux pour faire face à l'homme qui représentait plus que la vie.

Il sentit Yann se décoller de lui.

Yann : Tu es moi, ne l'oublie jamais !

Puis il vit son mari se diriger vers la porte, prenant sa veste à la volée.

Kévin : Yann tu vas où ?

Yann s'arrêta dans son élan.

Yann : J'ai juste besoin de réfléchir. De prendre l'air. Je reviens

Puis sans un regard pour son mari, il reprit sa marche vers la porte. C'est seulement quand il la ferma, qu'il se laissa aller à son amertume, et s'arrêtant une nouvelle fois, il envoya son poing dans le mur, qui s'effrita sous le cou. Il laissa alors échapper un cri de rage, de fureur mais surtout de douleur. Non pas pour sa main meurtrie, mais pour son cœur blessé, pour son mari qu'il aimait comme un fou, pour son âme qui venait de se déchirer.