Yo les kiwis ! Me revoilà avec un nouveau chapitre, une nouvelle fic de nouvelles idées. Eh oui, encore une fois, c'est sur l'univers d'Harry Potter ! Mais pas l'univers de Renouveau. Ni même celui de Quelques Faits, je pense.

Bref, cette petite fic sans prétention se passe en 1988, quand Tonks est en quatrième année. Et l'histoire va suivre les péripéties de quatre tarés décrits un peu plus bas. C'est une bonne vieille crack-fic, avec un peu de sérieux mais surtout de la rigolade. Bref, j'espère que ça va vous plaire =D Un grand merci à Zeidra qui est mon Bêta pour cette fic, et qui a bien du mérite car chaque chapitre fait dans les trente pages !

Cette fic est truffée de références à mes "classiques", du genre Amphisiologie (que je vous conseille vivement !). Le titre est d'ailleurs une référence à Amphisiologie, j'ai choisi un mot tout aussi incongru x) Reconnaitrez-vous tous les clins d'oeil ?

Et sur ce, je vous laisse découvrir la merveille x)

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Septembre

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Jeudi 3 septembre 1987, Grande Salle, rez-de-chaussée de Poudlard.

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Ah, Poudlard. Ses hautes tours, ses belles pierres, ses Maisons, son impression de sécurité. Ses élèves, gentils et attachants, si mignons.

– Vous pensez quoi du nouveau prof de Défense ? demanda Kathleen après sa première tasse de chocolat. Je me demande où ils l'ont pêché celui-là. On dirait qu'il sort d'un sarcophage tellement il est vieux. Et il y a des rubans dans sa barbe. Et des barrettes. Des barrettes dans sa barbe, sérieux ! Je croyais qu'avec Dudu le barbu on avait le summum du mauvais goût, mais non, là ça bat des records !

Ses amis, attablés autour de leur petit-déjeuner, hochèrent gravement la tête. Puis Cassie, une fille aux cheveux châtains et courts, prit la parole d'une voix flutée :

– Je sais pas pour vous mais moi je trouve qu'il pue. Ça y est, c'est dit, ça vient du cœur. Non mais franchement, avec quoi il se lave, l'eau des chiottes ? Même les cheveux de Rogue ils sentent meilleur.

– Ah parce que tu sens les cheveux de Rogue toi ? fit Delmar avec intérêt.

Cassie, jusque là très occupée à faire des grands gestes pour accompagner sa tirade, se figea d'un air atterré et s'exclama avec indignation :

– Quoi ?! Non ! Bon c'est vrai qu'avec cette formulation, on pourrait penser que. Mais non.

– Tu as tort, fit gravement Kathleen en se resservant en chocolat. Il passe tellement de temps penché au-dessus de ses chaudrons que ses cheveux sentent les potions. Généralement, ça sent le thym ou le chèvrefeuille, quand je le croise dans les couloirs il y a des fois où je me demande s'il ne trimballe pas des boîtes de condiments sous sa robe.

Un silence songeur accompagna la remarque de Kathleen. Puis Nymphadora Tonks, la quatrième année qui s'asseyait systématiquement avec eux afin d'écouter leurs délires, hocha gravement la tête :

– Ben, maintenant je sais ce que je vais faire pour mon prochain cours de Potions.

– Sniffer les tifs de Rogue ? devina Charlie Weasley qui était assis à côté d'elle.

– T'as tout bon.

Le petit groupe échangea des regards réjouis. Puis Candela Panda, Préfète-en-Chef, se laissa tomber sur une place de libre et se mit à se verser du café avec un air de zombi. Il lui fallut deux tasses avant de réaliser qui l'entourait, et elle jeta un regard noir à la petite assemblée.

– Qu'est-ce que vous fichez là ?

Delmar et Cassie échangèrent un regard, puis celle-ci répondit d'un ton d'évidence :

– Ben, on mange.

– Et pourquoi êtes-vous à cette table ?

Heureusement pour Cassie, ce fut le moment que choisit Lucas pour venir prendre place. Kathleen l'accueillit avec un grand cri d'enthousiasme et se mit à le servir en biscottes juste pour le plaisir de voir Candela fulminer.

Oui, car leur assemblée était un peu disparate.

'ttention, voilà un petit récapitulatif :

En premier lieu il y avait Kathleen Diggory, de Poufsouffle. Grande et athlétique, elle avait de longs cheveux blond foncé, bouclés et rebelle, et une étincelle de folie au fond de ses yeux verts. Elle était batteuse pour son équipe de Quidditch. Bavarde, tête brûlée, toujours prompte à se jeter dans des projets loufoques ou carrément timbrés, elle était la meneuse officieuse de leur petite bande déjantée.

Ensuite il y avait Cassie Jorkins, de Serpentard. De petite taille, elle faisait à peu près une tête de moins que Kathleen, à son grand dam. Ses cheveux châtain sombre étaient coupés très courts, et elle avait un visage pointu et malicieux, lui donnant un air de lutin farceur. Elle était indisciplinée, hyperactive, et mauvaise élève au point d'être le cauchemar de la moitié des profs de Poudlard.

Puis il y avait Delmar Hirapati, un Gryffondor. D'origine indienne, il était beau comme un acteur de Bollywood : cheveux noirs, teint caramel, yeux sombres aux longs cils, sourire éclatant. Capitaine et Poursuiveur dans son équipe de Quidditch, c'était un des élèves les plus populaires, auréolé de ses exploits sportifs et de son charme naturel. C'était aussi un garçon joyeux, plein d'humour et toujours partant pour l'aventure.

Après venait Lucas Ogden, le Serdaigle de la bande. Il était de taille moyenne, plutôt petit. Cheveux blond-roux toujours bien coiffés, un visage mature et deux yeux bleus innocents, il passait pour le plus sage de la bande, la voix de la raison. Quelle erreur ! D'une intelligence brillante, inventeur de sortilèges en tout genre, et doté d'un humour sarcastique, Lucas était celui qui allait toujours jusqu'aux extrêmes. La moitié des catastrophes majeures qu'ils déclenchaient étaient de sa faute.

Ces quatre-là étaient des septièmes années, mais après il y avait tout leur petite cour d'admirateurs béats. Tonks, quatrième année de Poufsouffle. Charlie Weasley, quatrième année à Gryffondor. Maxime Adler, cinquième année de Serpentard. Et parfois, quelques autres élèves, tels Brenda Rain, sixième année de Serdaigle : ou tout récemment, Olivier Dubois, première année de Gryffondor.

Et ils squattaient la table des Poufsouffle. Encore. Comme depuis sept ans. Bon, ce n'était pas interdit (des couples et quelques fratries faisaient parfois pareil), mais c'était rare, c'était désordonné, et ça faisait tâche dans la belle harmonie des couleurs de la Grande Salle. En un mot, Candela en avait décidément par-dessus les oreilles de cette bande de clampins incapables de reconnaître les blasons !

– Retournez à vos tables ou ça va mal se passer, menaça-t-elle.

– Elle est très bien cette table ! protesta Kathleen.

– Pas toi espèce de grosse nouille, s'énerva Candela. Je parle du reste de ta bande qui monopolise ces bancs réservés aux Poufsouffles !

– Mais où on irait alors ? geignit pitoyablement Delmar.

– A la table qui porte les mêmes couleurs que celle de ta cravate, triple buse !

– Ah non ça va pas être possible je suis daltonien.

– CASSEZ-VOUS OU JE ME FÂCHE !

Et, avec des piaillements d'indignations, tous les non-Poufsouffle de leur table se dispersèrent comme une volée de moineaux. Tonks, Kathleen et Candela restèrent seules assises à table, et la Préfète-en-Chef poussa un lourd soupir.

– Heureusement que c'est la dernière année.

– Ne te réjouis pas trop vite, menaça Kathleen. On va t'en faire voir de toutes les couleurs, à toi et à tes collègues pantouflards qui n'osent pas sortir du rang.

– Sortir du rang ?! s'indigna Candela. Mais j'en ai rien à foutre que vous squattiez la table d'une Maison ou d'une autre ! Par contre dès qu'on vous laisse ensemble il arrive des bricoles, du genre Princeton enfermé dans un placard ou Marcus qui s'est retrouvé avec ses organes génitaux poussant sur son front, et y en a marre de se faire retirer des points par les profs ! Cette année, on gagnera cette putain de Coupe même si je dois tous vous enterrer vivants dans une oubliette, C'EST CLAIR ?!

Elle se rassit lourdement (elle s'était levée dans son emportement) et se beurra rageusement une tartine. Kathleen bouda deux secondes, puis finalement elle ne put s'empêcher d'ouvrir sa gueule :

– Moi j'aimais bien la tête de Marcus avec un pénis sur le front. Il ressemblait à une licorne avant-gardiste.

– La ferme ou je te poignarde dans ton sommeil.

– Tu dis ça mais au fond je sais que tu m'aimes. Hein oui qu'elle m'aime, Tonks ?

Nymphadora ouvrit de grands yeux affolés, regarda successivement Kathleen avec son grand sourire de requin et Candela qui avait un couteau à la main et l'air d'un tueur en série grognon, puis elle bredouilla quelque chose au sujet d'un devoir de Botanique et s'enfuit, faisant tomber la carafe de jus de citrouille dans sa hâte.

Normal.

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oOoOoOo

Mardi 8 septembre 1987, Serre n°5, parc de Poudlard.

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Cassie ne foutait jamais rien durant les cours de Botanique. C'était bien simple : déjà, elle n'aimait pas se salir, et en plus, elle n'était pas fichue d'avoir un être vivant dans les mains sans qu'il ne meure mystérieusement. Quand elle était petite, elle avait eu un chat, trois hamsters, et une chouette. La chouette s'était enfuie, le chat avait disparu, deux des hamsters s'étaient entretués et le troisième s'était suicidé en sautant du premier étage. Ensuite ses parents lui avaient acheté un bonsaï super-cher, qui avait crevé faute d'être arrosé régulièrement. Puis un cactus et… En fait Cassie n'avait jamais su ce qui était arrivé au cactus, elle l'avait paumé. En bref, il ne fallait rien confier à Cassie, pas même un plant de haricots.

Du coup, ses notes de Botanique n'avaient jamais été très hautes. Oh, plus hautes que celles de Potion, c'était sûr. En Potions, Cassie était un danger public. La honte de la Maison Serpentard. Elle avait eu un T à ses BUSES, la pire des notes, c'est vous dire !

Bon, elle avait quand même balancé sa louche à travers la pièce dans un grand élan de frustration causé par ces putains de griffes de caïman qu'elle n'arrivait pas à doser, mais bon. Ce genre de choses arrivait.

Bref. La Botanique.

Pour faire court, Cassie pensait que la Botanique c'était de la merde, mais elle en avait besoin pour sa moyenne. Si ça ne tenait qu'à elle, elle aurait uniquement suivi les cours d'Astronomie, de Runes, de Défense et de Divination, qui étaient d'après elle les seuls matières intéressantes proposées par l'école, mais bon, l'épreuve finale de Botanique était toujours fastoche et elle aurait besoin d'autant de bonnes notes qu'elle pouvait, alors… Alors du coup, elle se forçait à venir en cours et à ne pas traiter Chourave de vieille courge fripée quand celle-ci leur ordonnait de rempoter des choux mordeurs.

– Cassie, passe-moi la petite pelle, fit Lucas d'un ton absent en triturant la plante qu'ils étaient censés déterrer.

Dans les classes d'ASPICS, certains cours contenaient assez peu d'élèves pour que toutes les Maisons soient réunies. C'était le cas en Botanique. Mais leur petit quatuor manquait un de ses membres : Delmar avait raté sa BUSE dans cette matière. Du coup Cassie était en binôme avec Lucas, et Kathleen était obligée de squatter la table d'Ethan Bones, un de ses collègues de Poufsouffle.

Kathleen travaillait, d'ailleurs, discutant avec un grand sérieux avec Ethan. Cassie l'observa discrètement en faisant semblant de réparer une paire de ciseaux qu'elle avait préalablement cassées avec un caillou (par total accident, bien sûr). Ça faisait bizarre de voir Kathleen converser normalement avec un de ses semblables. Mais bon, ce n'était pas si surprenant : du travail était impliqué. La Botanique était une des trois seules matières où la Poufsouffle bossait pour de vrai, ce qui en faisait une voisine de table absolument inacceptable.

Cassie était là pour glander, que diable.

Lucas poussa un soupir, prit lui-même la pelle posée à côté de Cassie, et la frappa sur le sommet du crâne avec. La Serpentard émit un piaillement aigu de protestation :

– Maiiiiis-euh ! C'était pour quoi, ça ?

– Pour ton absence totale de fiabilité en tant qu'assistante jardinière, répondit flegmatiquement Lucas en se mettant au travail.

– N'importe quoi !

– … Tu veux me donner un coup de main peut-être ?

Cassie jeta un coup d'œil au chou-mordeur dont les mâchoires claquèrent bruyamment dans la terre malodorante du pot, puis elle plissa le nez et recula dans sa chaise :

– Nan, je vais me contenter de ramasser la moitié du crédit.

– Profiteuse, l'accusa Lucas.

– Stratège, rectifia fièrement Cassie. Après tout, l'élève intelligent évite le travail inutile !

Lucas se contenta de hausser les épaules :

– C'est toi qui rédigeras la rédaction qu'on aura en devoirs, par contre. J'ai des choses plus intéressantes à faire.

Tant que ça impliquait de l'encre et du papier, et pas de la boue et des plantes agressives, Cassie était complètement pour. Néanmoins, parce qu'elle avait l'esprit de contradiction, elle ne put s'empêcher de demander d'un ton goguenard :

– Tu essaies de tirer au flanc ?

Lucas lui retourna un haussement de sourcil railleur. Ce mec était impossible à énerver. Il prenait toujours tout avec un sourire en coin, une répartie parfaite, et une amabilité à toute épreuve. Il considérait les gens, les choses et les évènements avec un amusement nonchalant, comme s'il avait toujours plus important à faire mais qu'il condescendait à se laisser distraire par les péripéties occasionnelles de ses camarades.

Lucas était aussi un peu farfelu. Il testait souvent des métamorphoses sur les meubles de sa salle commune, séchait les cours qu'il trouvait ennuyeux, et squattait parfois les classes des autres années juste pour le plaisir de faires des remarques en plein milieu du cours, et perdait régulièrement ses affaires.

– Pas du tout, répondit le Serdaigle. J'ai juste trouvé un livre sur les enchantements de balais. Je vais les tester sur les balais de la réserve.

– … Ce soir ?

– Ben oui.

– Tu sais qu'il y a les sélections de Quidditch bientôt ?

– Je suis sûr que mes sorts amélioreront les balais de l'école, fit dignement Lucas.

– Et si ça te pète à la gueule ?

– Bah je foutrai le feu à la remise et ça sera le moment pour Poudlard d'investir dans autre chose que ces vieux machins tous pourris.

– Ne dis pas ça à portée d'oreille de Kath et Delmar, plaisanta Cassie en se remettant à espionner Kathleen.

La Poufsouffle et le Gryffondor de leur petit groupe étaient deux passionnés de Quidditch. Delmar envisageait même de devenir joueur professionnel. Mais bon, cette ambition n'avait pas trop de chances d'aboutir, parce que Delmar était Né-Moldu et que le racisme était bien vivant dans le monde joyeux des licornes, des lutins et des sorciers.

Ouais, fuck la société.

Mais Delmar était un passionné de Quidditch ! Plus que Kathleen, qui était quand même obsédée au point de dormir avec sa batte. Ok, ça c'était peut-être parce qu'une nuit, durant sa quatrième année, elle s'était réveillée au moment où un elfe de maison époussetait sa table de chevet et elle avait eu la peur de sa vie et l'avait frappé avec la première chose sur laquelle elle avait mis la main, nommément une figurine d'argile qui était son travail de Métamorphose pour le lendemain et sur laquelle elle avait passé trois heures. L'elfe s'en était tiré avec une bosse, Kathleen avait choppé deux heures de colles pour avoir fracassé sa statuette, et depuis elle dormait avec une batte.

Mais Delmar, s'il avait pu, il aurait dormi dans le stade, avec son balai. Cassie, bon, le Quidditch elle trouvait ça fun, mais ça cassait pas trois pattes à un canard. Enfin, elle s'y intéressait déjà plus que Lucas, qui vomissait et avait le vertige dès qu'il montait sur une chaise. Mais Delmar, alors lui, c'était un mordu. De temps en temps, lui et Charlie Weasley débattaient si longuement de stratégies de Quidditch et de modèles de balais qu'il fallait limite leur jeter un sort pour les sortir de leur transe.

… Ouais, Cassie préférait ne pas penser à ce qui se passerait si Delmar découvrait que Lucas avait mis le feu aux balais.

A moins que Lucas ne fasse passer ça pour un acte d'altruisme, bien sûr. Il pourrait dire qu'il voulait obliger l'école à leur acheter des Comètes ou des Brossdurs. Ah, comme si ces vieux croûtons allait renouveler les stocks ! C'était beau de rêver !

Dumbledore gardait toutes les finances de Poudlard pour s'acheter des robes de chambres de plouc, elle en était sûre. Les couloirs étaient super-froid, parfois dans la salle commune de Serpentard on soufflait de la buée en hiver, les tableaux étaient vieux et démodés, les rideaux s'effilochaient, les toilettes du deuxième étage étaient toujours cassées, les portes grinçaient à tout bout de champ, et Dudu trouvait le pognon de se fringuer en magenta avec des broderies d'étoiles dorées ?! Ça puait le détournement de fonds ! FRAUDE FISCALE !

– Tu penses qu'on pourrait braquer le dirlo et lui piquer son fric ? fit-elle soudain.

Lucas marqua une pause :

– Ça dépend, tu as un plan à l'esprit ?

Ah, c'était vraiment un super-copain, Lucas. On pouvait certainement compter sur lui !

– Pas vraiment, fit pensivement Cassie. Enfin, je suppose que je pourrais mettre une cagoule et l'agresser au détour d'un couloir avec un parpaing.

Lucas haussa un sourcil, apparemment pas convaincu par le génie de ce plan. Fallait dire que dès que Cassie avait une arme contondante dans les mains, la première personne qui risquait d'être blessé, c'était elle. La petite Serpentard leva les yeux au ciel, puis ouvrit soudain de grands yeux, frappée d'une idée :

– On pourrait l'empoisonner !

– Empoisonner Dumbledore ?

– Ouais ! En mettant du somnifère dans ses trucs au citron ! Il n'y a que lui qui en mange, de ces saloperies ! C'est le plan parfait !

C'était un plan très con, et l'air sceptique de Lucas en disait long sur ce qu'il en pensait. Heureusement, ce fut le moment que choisi Kathleen (qui s'était approchée discrètement, et comment diable s'était-elle approchée sans que Cassie la voit, et d'ailleurs depuis quand est-ce qu'elle avait finit son rempotage de chou-fleur cannibale ?!) pour se laisser tomber sur le tabouret voisin de celui de Cassie :

– Moi je trouve que c'est génial !

– De droguer le dirlo et de lui faire les poches ? sourcilla Lucas. Non mais parce que quitte à braquer le plus puissant sorcier de tous les temps, moi j'aurais pillé son coffre à Gringotts.

– Je veux le faire chier, pas me faire tuer par des gobelins ! protesta Cassie.

– Sage décision, acquiesça Kathleen. Du coup, on le fait ou pas ?

– Et comment qu'on le fait !

– Cool ! Trouvez-moi où il achète ses bonbons, je m'occupe du reste !

Et avec ça, la Poufsouffle blonde se leva, l'air enchanté et une lueur carnassière dans le regard, avant de retourner prendre place aux côtés de son partenaire de Botanique. Celui-ci lui lança un regard vaguement curieux, mais se désintéressa très vite de l'air psychopathe de sa voisine : après tout, il avait l'habitude. Kathleen était une vraie tarée, qui avait un jour ramené un loup (un putain de LOUP) dans sa salle commune parce qu'elle l'avait stupéfixié durant une balade en forêt et voulait se vanter.

Lucas leva les yeux au ciel. Puis, sachant à quel point il était vain de tenter d'arrêter Kathleen ou Cassie (ou pire, les deux), il se contenta de dire :

– T'as besoin d'aide pour mener l'enquête ?

– Oh, tu ferais ça pour moi ? Merci, c'est chou !

– Ce n'est rien, vraiment. J'ai du temps libre avant d'aller mettre le feu à la remise à balais.

– Merci vieux, je t'en dois une.

Lucas haussa les épaules, puis lui tendit la truelle pleine de terre, et enfila des gants protecteurs en cuir de dragon avant de reporter son regard sur le chou-mordeur dont ils devaient encore s'occuper :

– Ne me remercie pas, j'ai encore besoin de ton aide pour remettre du fumier dans le nouveau pot de ce truc-là.

– … Beurk.

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oOoOoOo

Lundi 14 septembre 1987, salle de cours, troisième étage à Poudlard.

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– Diggory, fit froidement la voix de McGonagall.

Kathleen cessa de chuchoter avec Delmar et leva un regard rempli d'innocence vers la professeur de Métamorphose :

– Ouiiii ?

– Vous êtes censée métamorphoser cette trompette, pas vous amuser avec votre camarade.

– On avait une discussion très sérieuse ! protesta-t-elle en ignorant l'instrument de musique posé sur sa table.

– Etait-ce en rapport avec la métamorphose ?

– … C'était en rapport avec le Quidditch !

McGonagall poussa le profond soupir typique de celle qui a eut cette conversation trente-sept fois au cours de ces six derniers jours. Entre les membres de l'équipe de Gryffondor, les fans de Quidditch, Bibine, les différents profs, Dumbledore, les lettres de parents d'élèves…

– Oui, les balais de Quidditch qui ont brûlés dans l'accident seront remplacés dans la semaine.

– Par des vrais balais, pas de la camelote ? insista Delmar.

Kathleen hocha vigoureusement la tête :

– Ouais, parce qu'on les connait, vos combines de coupe budgétaire !

– Miss Diggory, ça suffit. Vous avez une trompette à métamorphoser, si je ne m'abuse !

Kathleen posa un regard franchement dubitatif sur le bel instrument de musique posé sur son bureau. La classe des ASPICS de Métamorphose était l'une des classes les plus nombreuses, et regroupait dix-neuf élèves, issus des quatre Maisons. Et du coup, il y avait toujours des tas d'incidents, entre les rivalités inter-Maisons ou biens les sabotages de concurrence. Elle avait espéré que McGonagall ne s'intéresserait pas à son cas.

Mais apparemment c'était un espoir mort-né. Kathleen aurait du s'en douter. Après tout, elle était le bouc-émissaire de la vieille McGo. Ou chèvre-émissaire ? Ah, être la chèvre de la vieille bique, elle était bonne celle-là…

L'histoire d'amour entre Kathleen et la Métamorphose avait débuté quelque part durant les dix premières minutes de son premier cours de Métamorphose, parce qu'elle se sentait ivre de puissance et qu'au lieu de transformer son aiguille en allumette, elle l'avait catapultée à travers la classe (comment, elle n'en savait rien) et l'avait planté et plein dans le postérieur de McGonagall. Et attention, hein, Kathleen n'avait rien contre McGo, à vrai dire elle avait même un peu pitié d'elle (imaginez ! Être la sous-fifre, pardon sous-directrice, de Dumbledore le cinglé barbu, et en plus être directrice de Maison des Gryffondor ! C'était un truc à se jeter du haut d'une tour ! Pas étonnant qu'elle ait autant de rides et de cheveux blancs !). Donc Kathleen aimait bien McGonagall, objectivement, mais depuis ce premier cours et cet incident avec l'aiguille, il y avait comme une tension dans leur relation. Et Kathleen ne pouvait pas se concentrer dans un cours où elle entretenait de mauvaises relations avec un prof, non, c'était impossible, elle était trop sensible pour ça.

Du coup elle avait voulu s'excuser tacitement en envoyant une aiguille se planter dans la cuisse d'un élève, pour montrer à McGonagall qu'elle n'était visée en particulier. Et puis McGo lui avait mis une heure de colle et Kathleen avait dit un peu fort que la Métamorphose ça ne servait à rien de toute façon, et elle avait eu droit à une deuxième heure de colle, et à la leçon suivante elle s'était ramenée avec une sarbacane et la guerre avait été déclarée.

Du coup, pendant les sept années suivantes, les cours de Métamorphose avaient toujours été une grande occasion de déconner pour Kathleen.

A vrai dire, elle avait tellement déconné qu'elle avait été sidérée d'apprendre qu'elle avait un Effort Exceptionnel dans cette matière. Elle avait à peine révisé ! Elle s'attendait à un Acceptable, et encore… Franchement, elle avait sous-estimé son talent inné. Comme quoi, on apprenait mieux en s'amusant. On était infusé par la connaissance sans lever le petit doigt. Delmar disait que c'était des conneries mais qu'est-ce qu'il en savait lui, hein ? Il révisait avant les examens ! Hérétique !

– C'est trop dur, se plaignit-elle.

– Vous plaisantez, fit sévèrement McGonagall. Même Jorkins a réussi depuis deux minutes.

En effet, Cassie contemplait avec fierté la poule au plumage brun qu'elle avait transformée à partir d'une cornemuse. Bel exploit, considérant que la petite brune était une grosse naze en Métamorphose et n'avait passé ses BUSES que de justesse… En fait Cassie était une grosse naze en à peu près tout, d'ailleurs. Elle avait eut un bol fou de tomber sur un examinateur gentil et des exercices faciles lors de ses examens ! Kathleen maugréa encore un peu pour la forme, puis donna un coup de baguette à la trompette, visualisant une douzaine d'œufs rien que pour embêter McGo qui s'attendait à ce qu'elle fasse apparaitre un poulet.

Il ne se passa rien. Kathleen plissa les yeux, et répéta son geste avec un tout petit peu plus d'énergie que nécessaire. La trompette émit un « POUET » retentissant… Et se transforma illico en quatorze oies blanches pas contentes du tout.

– AAAAAARGH ! hurla Delmar en tombant de sa chaise quand une oie lui sauta à la gorge. MON BEAU VISAGE !

Ah merde, elle l'avait même pas fait exprès.

Le reste des oies s'éparpilla dans la classe avec de grands cris furieux, se jetant sur les élèves comme une meute de fauves affamés. Tout de suite, ce fut le chaos. Un Serdaigle eut le réflexe malencontreux d'envoyer un maléfice sur l'un des volatiles, qui explosa comme une bombe à eau et fit redoubler les hurlements des élèves.

– Diggory je vais te tuer ! pesta Candela en immobilisant une des oies.

Une deuxième oie tenta de l'attaquer et la Préfète poussa un juron en espagnol impossible à saisir mais qui comprenait le mot « puta ».

– Vois ça du côté positif, tenta de l'amadouer Cassie (qui était montée sur une armoire et attendait que ça passe).

– Quel côté positif ?!

Kathleen métamorphosa une chaise en batte de Quidditch, et la fit tournoyer joyeusement entre ses mains avant de préparer ses appuis, visant l'oiseau le plus proche :

– Ça va être un bon entraînement de Quidditch ! Elles sont encore plus agressives que les Cognards !

– Ouais ! l'encouragea Delmar. En plus ça développe ta capacité d'adaptation, parce que imagine que les Cognards se mettent à avoir des plumes…

Du coup Kathleen se mit à castagner les oies avec sa batte de Quidditch, et en dégomma au moins trois avant que McGonagall (qui était occupée à retirer des points à deux Gryffondors qui se lançaient des piafs furieux au visage dans le but de voir qui perdrait un œil en premier) ne s'en rende compte.

– DIGGORY ! Arrêtez immédiatement de frapper ces animaux !

– C'est de l'auto-défense, m'dame !

– Ce sont des oies !

– Ce sont des menaces contre la sécurité des élèves ! piailla Lucas. Vas-y Kath, défonce-les !

Et il envoya un sortilège de sa création droit dans la tête d'une oie, qui subit une poussée de croissance instantanée jusqu'à atteindre la taille d'un doberman, et trébucha sur ses propres pattes à cause d'un soudain manque de coordination. Le temps qu'elle se redresse, ses plumes s'étaient mises à croître et à se multiplier à toute vitesse, lui donnant vite l'allure d'une espèce de balle duveteuse qui émettait des criaillements déments tel un monstre de Frankenstein croisé avec un oreiller percé. Lucas marqua un temps d'arrêt pour admirer son œuvre, et l'oie profita de cet instant de répit pour foncer vers la fenêtre, et sauter à travers en faisant exploser la vitre.

En bas, les petits premières années qui étaient en train de suivre un cours de Botanique se mirent tous à hurler.

– Si elle mange un élève je décline toute responsabilité, crut bon de marmonner Lucas.

Delmar lui tapota sur l'épaule d'un geste encourageant :

– T'inquiète, ça sera de la faute de Kath, c'est elle qui les a créées après tout.

La Poufsouffle croisa les bras et fit la moue, boudeuse. Quoi, c'était un accident ! Ça arrivait tout le temps. Enfin, pas tout à fait tout le temps, elle avait aussi des cours normaux sans incidents (et monotones à mourir). Mais, eh, ils devraient la remercier ! Ça mettait un peu d'animation. Les cours de la vieille McGo étaient si ennuyeux. Contrairement à Delmar qui était un surdoué de la Métamorphose, Kathleen était surtout douée en Potions et en Runes. Changer une coupe en rat et une trompette en faisan, franchement, c'était pas super-palpitant. Et puis, ça allait pas lui servir dans la vie !

Kathleen ambitionnait de devenir potionniste. Comme ça elle inventerait des trucs qui font boum et d'autres qui font glou-glou. Elle trouvait que c'était une très noble ambition.

Bon, sauf que généralement, quand elle en parlait, les gens la regardaient bizarrement. Son frère Amos Diggory, lui, se contentait de la traiter de débile en riant. Amos bossait au Ministère, ce que Kathleen trouvait très saugrenu. Qui voudrait volontairement travailler dans un bureau, à moisir entre quatre murs ?

C'était un peu comme être mort, sauf qu'en plus on se faisait chier.

– Diggory ! lâcha McGonagall une fois que les oies quasiment toutes attrapées. Vingt points en moins pour Poufsouffle !

– C'était un accident !

– Vingt-cinq points.

– Mais… !

– TRENTE POINTS !

– Ok je ferme ma gueule, se hâta de dire Kathleen.

Elijah Shafiq, le Préfet-en-Chef (un grand métis beau gosse de Serpentard), étouffa un fou-rire dans une fausse quinte de toux. McGonagall semblait vibrer de rage, le visage écarlate et une veine battant à la tempe, et elle ouvrit la bouche pour donner une heure de colle à Kathleen, qui leva les yeux au ciel avec résignation…

Delmar, qui avait la dernière oie dans les bras, regarda l'oiseau, puis regarda McGonagall, puis tapota le piaf de sa baguette.

L'oie se mua en une vingtaine de minuscules singes hurlants qui s'éparpillèrent dans toute la salle.

– Oups ! fit le Gryffondor d'un air enchanté. Je suis navré professeur, ça m'a échappé !

– TRENTE POINTS EN MOINS, HIRAPATI !

Faire tourner McGonagall en bourrique était l'un de leur passe-temps préférés. Kathleen ne désespérait pas de faire exploser la veine qui battait à la tempe de leur enseignante dès qu'ils faisaient une connerie particulièrement retentissante. Comme cette fois où Marcus s'était retrouvé avec des airs de licorne avant-gardiste, d'ailleurs…

Kathleen était très avant-gardiste. Delmar disait qu'elle avait une case en moins, Cassie qu'elle était originale, et Lucas qu'elle était un poil tarée, mais non, Kathleen promouvait le futur, étaient-ils tous donc aveugles ? Elle changeait leur univers, leur offrait des perspectives ! Avant aujourd'hui, aucun de ces jeunes élèves n'aurait su combattre une oie ! Elle avait changé leur vie !

C'était fou ce qu'elle était altruiste, quand même.

Alors, dès que la prof eut le dos tourné, Kathleen leva la main, et elle et Delmar échangèrent un high-five avec un identique sourire hilare sur les lèvres. Elijah Shafiq leur adressa un regard blasé :

– Quand vous aurez fini de vous félicitez de votre débilité profonde, vous pourrez aider à récupérer les singes ?

– Awww, laisse-les tranquille ! protesta Cassie en lui jetant une boulette de parchemin froissé. Aide-moi plutôt à descendre !

Une singe essaya de lui sauter dessus, et elle glapit en se recroquevillant sur elle-même :

– Non, j'ai changé d'avis, laisse-moi là-haut !

– MISS JERKINGS, DESCENDEZ DE CETTE ARMOIRE !

– J'peux pas m'dame, y a des singes qui veulent me bouffer !

– À QUI LA FAUTE ?!

– Vous devriez vous calmer madame, c'est pas sain de vous énerver autant ! fit sentencieusement Lucas.

– Quinze points en moins pour Serdaigle !

Cassie ricana joyeusement depuis son perchoir. Première semaine de cours, et déjà Serpentard était en tête avec tous les points que Kathleen, Delmar et Lucas faisaient perdre à leurs Maisons respectives. Mwahaha, elle n'aurait pas pu concocter un plan plus démoniaque si elle avait essayé !

… Non, elle déconnait. Cassie ne faisait jamais de plans.

C'était beaucoup plus fun !

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oOoOoOo

Samedi 19 septembre 1987, bibliothèque, quatrième étage à Poudlard.

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Lucas referma d'un geste sec le grimoire qu'il consultait sur les hiéroglyphes et la numérologie qu'ils cachaient, puis appuya son menton sur sa main et se tourna vers les cinq autres personnes qui étudiaient avec lui. Ils n'étaient pas nombreux à avoir pris l'option Arithmancie pour les ASPICS. Elijah et Candela, les deux Préfets-en-Chef : Justinien Rosier, un Serpentard : et Lucien Kirkwood et Emily Selwyn, deux Serdaigle.

– Qui vient à la fête chez les Serpentard ce soir ? lança-t-il soudain.

Emily Selwyn leva la main sans même quitter des yeux son livres sur les nombres premiers dans l'astrologie chinoise. Pas étonnant : elle avait un petit frère à Serpentard, et elle squattait leur salle commune aussi régulièrement que celle des bleus et bronze.

Justinien Rosier, lui, jeta un regard noir à Lucas :

– T'es pas invité !

Rosier avait un de ces caractères de merde, c'était dingue.

– C'est une bonne chose que je ne te demande pas ton avis, alors.

Rosier se contenta de grogner comme un bouledogue. Lucas lui avait toujours trouvé une certaine ressemblance avec un molosse, de toute façon. Trapu, agressif. Baveux. Oui parce qu'il bavait, en plus, ce porc. Quand il mangeait, quand il réfléchissait, quand il écrivait durant les cours. C'était écœurant. Et puis il détestait Lucas pour une raison mystérieuse.

Hum, c'était peut-être parce que Lucas traînait avec Kathleen, et que Kathleen avait un jour demandé à Rosier de répondre à un sondage sur la répression pénale de la zoophilie parce qu'elle trouvait qu'il avait la tête de l'emploi.

– Justinien, les potes de Cassie squattent nos soirées depuis la quatrième année, lui rappela Elijah d'un ton blasé.

Lucas aimait bien Elijah, il était sympa. Ce n'était pas le genre de Préfet à se prendre la tête avec les infractions aux règles. Tant que les gens ne se faisaient pas prendre, lui, il s'en foutait. A vrai dire, il avait l'air de perpétuellement se tourner les pouces. Lucas ne l'avait jamais vu bosser de sa vie : même là, alors qu'ils étaient censés réviser, Elijah lisait un bouquin d'aventures sur les sorciers explorant les pyramides. Pas que ce soit un mauvais livre, bien sûr. Lucas l'avait déjà lu. Deux fois. La deuxième fois, Delmar le lui avait volé et avait dessiné des petits cœurs et des pénis sur un tiers des pages, parce qu'il était complètement beurré. Du coup Lucas n'emmenait plus de bouquins en soirées. Au lieu de ça il attendait que les gens s'endorment dans les canapés et il leur dessinait des trucs sur le visage avec des marqueurs indélébiles.

Bref, Elijah était un gros flemmard mais Lucas l'aimait bien. En tout cas, il le préférait à Candela, qui passait son temps à râler. Au moins Elijah ne faisait pas chier le monde sur le décompte des points (peut-être parce que sa Maison arrivait toujours en tête depuis sept ans). Et puis il était complètement aveugle à toutes les tentatives que faisait Cassie pour le draguer, ce qui était super-marrant.

– Vous organisez une fête ? lâcha Candela d'un ton réprobateur. Vous avez l'autorisation de votre directeur de Maison au moins ?

Faudrait être taré pour demander à Rogue la permission d'organiser une soirée. Qu'est-ce que Rogue y connaissait en festivités, d'ailleurs ? Sa définition du fun était sans doute d'écorcher vivant des écureuils dans un donjon sadomasochiste secret.

… Mon dieu, cette image mentale.

– C'est pas tes oignons, fit dignement Rosier.

Elijah lui renvoya un regard navré (quel gros naze ce Rosier, même pas fichu de mentir correctement), tandis qu'Emily Selwyn émettait un reniflement hautain :

– Demander la permission, c'est bon pour les débiles qui vont se faire prendre.

Lucas hocha gravement la tête, approuvant totalement cette philosophie de vie, mais Candela fronça les sourcils et toute la tablée émit un grognement en anticipant la réprimande salée que la Poufsouffle allait leur sortir.

Vite, il leur fallait une diversion.

– Tu veux venir ? proposa Lucas brusquement.

Candela marqua un temps d'arrêt :

– Où ça ?

– Au Pakistan. A la soirée des Serpentards, andouille, qu'est-ce que tu crois ?

La Préfète-en-Chef le regarda avec stupeur. Il fallait admettre que c'était plutôt inattendu.

– T'es même pas invité.

– Il l'est, contra soudain Elijah qui avait l'air de beaucoup d'amuser.

– Il l'est ? s'indigna Justinien.

Quelqu'un lui donna un coup de pied sous la table et Rosier décida sagement de la boucler. Le regard de Candela alla des Serpentards à Lucas, et elle plissa les yeux, soupçonneuses :

– Et pourquoi je viendrais ?

– Parce que les Serpentard font les meilleures soirées, babilla Lucas avec le plus grand naturel. Certes, je le concède, chez les Serdaigle, on a des cocktails éblouissants, c'est normal c'est Kathleen et moi qui les composons : et puis les Poufsouffle sont pas loin des cuisines donc il y a toujours des tas de trucs à bouffer : et puis chez Gryffondor il y a des strip-teases et de la drogue…

– Il y a quoi ?! s'étouffa Candela.

– Mais chez les Serpentards, c'est autre chose ! clama Lucas sans l'écouter. Déjà l'alcool est de meilleure qualité parce que les Serpy sont bourrés de frics, mais en plus l'ambiance déchire grave ! Il y a des flashs colorés et des boules de lumières qui changent de teintes selon la musique ! Et bien sûr, c'est pas pour dire que les soirées des Poufsouffles sont pourries, mais quand même, on se fait vite interrompre ! Quelle idée d'avoir une salle commune au rez-de-chaussée, c'est là que passent toutes les patrouilles de Préfet, et je te parle même pas du concierge qui fait le pied de grue devant la porte pour guetter les élèves qui sortent pour aller chercher de la bouffe. Et ça casse direct l'ambiance quand tu sors te chercher un casse-dalle et que tu tombe sur Rusard planté au milieu du hall et qui te fixe comme s'il était constipé. Tandis que chez les Serpentard, c'est fête illimitée jusqu'aux petites heures du matin, y a aucun prof ou préfet assez dérangé pour patrouiller dans les cachots en pleine nuit ! Déjà il fait tout noir, mais plus ça caille. Et quand je dis que ça caille, crois-moi, ça caille !

– Je confirme, fit Cassie en s'appuyant contre le dossier d'Elijah.

Le Préfet sursauta violemment, et se dévissa le coup pour fixer la petite Serpentard avec incrédulité :

– Mais d'où tu sors ? Depuis quand tu es là ?

– Je suis une ninja, fit fièrement la jeune fille brune. Et pour en revenir à ce que disait Lucas : on se les pèle dans les sous-sols. Moi je pense que l'administration gratte du pognon dans le budget communautaire en réduisant le chauffage ! Comment ça se fait que Dudu il se fringue comme une danseuse du Moulin Rouge et que nous on grelotte, hein ?!

– … Elles sont pas nues, les danseuses du Moulin Rouge ? fit Candela en clignant des yeux.

Du coup tous les regards se tournèrent vers elle. Candela Panda, au courant des tenues (ou de l'absence de tenues) de danseuses Moldues ?! La Préfète hispanique rougit violemment, se racla la gorge, et reporta fermement son regard sur Lucas :

– Les cachots, donc.

– Ah, euh, oui, reprit le Serdaigle après un temps de surprise. Les cachots. C'est dingue ce que c'est isolé au niveau sonore quand même ! Personne entend la musique, du coup on peut la mettre aussi fort qu'on veut. Franchement, la population de Poudlard ignore totalement que les Serpentard font des fêtes, jusqu'au moment où t'as toute la Maison qui arrive en cours avec la gueule de bois.

– Rogue habite dans les cachots, objecta Candela.

– Mais il s'en fout, Rogue ! Il sniffe son shampooing dans son coin et il vient pas emmerder les élèves qui se détendent après une dure année de labeur…

– Ça fait même pas un mois que les cours ont repris !

– C'était un mois super-difficile, attends, on a été attaqué par des oies, et je ne te parle même pas du drame des balais qui ont cramé, sans compter le fait que les Gryffondor ont eut une fuite d'eau dans leur salle de bain, et puis ce cours de Sortilèges où toutes les tables se sont mises à danser le tango, et puis j'ai entendu parler d'une attaque de loups-garous mutants ninjas dans la Forêt Interdite…

– D'accord, d'accord ! Par Morgane, quel baratineur ! Je vois toujours pas pourquoi j'irais à cette fichue soirée.

Lucas retint un grognement, et changea de tactique :

– Je te demande pas d'aller à cette soirée, mais d'y aller avec moi.

Autour de la table, il y eut une grande inspiration collective. Kirkwood et Selwyn, passionnés par les ragots, s'étaient penchés en avant et observaient avidement Candela. Elijah avait haussé les sourcils, semblant honnêtement surpris. Cassie avait la bouche grande ouverte comme un poisson hors de l'eau, ahurie. Et Rosier…. Bah, Rosier les fixait avec ahurissement, et du coup il bavait. Dégueu.

Le regard de Candela changea, incrédule puis calculateur.

– Tu me dragues ?

– Ça marche ? s'enquit innocemment le Serdaigle.

– Non, lâcha la Poufsouffle d'un ton définitif. Je te donne un huit pour la créativité mais un deux pour l'exécution. La prochaine fois, offre-moi des chocolats ou un truc comme ça.

Elle referma sèchement le grimoire qu'elle feuilletait, rassembla ses affaires, et s'en alla d'un pas tranquille. Bouche bée, les autres la regardèrent s'éloigner, et Lucas poussa un profond soupir, l'air fataliste :

– Zut.

– Ça c'est un râteau ! s'esclaffa Cassie.

– Oh, ta gueule.

La petite brune rigola sans aucune compassion, puis se pencha par-dessus l'épaule d'Elijah, envahissant son espace vital :

– Tu lis quoi ? J'peux monter sur tes genoux ?

– Va chier Jorkins, lâcha Rosier sans laisser à Elijah le temps de répondre. Et si Panda bousille la soirée, je t'en tiendrai pour responsable !

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oOoOoOo

Samedi 19 septembre, salle commune des Serpentards, cachotsde Poudlard.

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Kathleen poussa un soupir rêveur, assise sur le bar établi dans la salle commune des Serpentard, puis se tourna vers Delmar :

– Hey, tu te rappelle de la fois en première année où tu m'as mis au défi de mettre un Niffleur dans la salle commune des Gryffondors ?

– Non. Je t'ai dis "ne mets pas de Niffleur dans la salle commune des Gryffondor". Et tu m'as dis "je fais ce que je veux". Et là, tu as mis un Niffleur dans la salle commune des Gryffondor.

– C'est tout à fait possible, fit sentencieusement Lucas en scrutant la foule du regard.

Kathleen sourit à ce souvenir :

– Ah, ce bon vieux Niffleur. Je l'avais appelé Paulette. Eh ben vous vous souvenez du grand frère de Lydie, celui qui était Préfet à l'époque ? Eh ben il crie comme une fille ! Faut dire qu'il s'attendait sans doute pas à ce qu'une bête poilue lui saute dessus dans sa douche. Bref, je pense à ça parce que Lydie a l'air de s'emmerder, il lui faudrait un animal de compagnie vous pensez pas ?

– Je te préviens je t'aide pas à faire rentrer un Niffleur dans les cachots ! prévient Delmar.

– … Comment tu sais ce qui s'est passé dans les douches des mecs de Gryffondor ? s'étonna Lucas.

– Delmar m'a raconté, fit nonchalamment la Poufsouffle. D'ailleurs, Delmar, repose cette bouteille, tu crois qu'on t'as pas vu ?

– Maiiiiiis ! geignit le Gryffondor. Juste un verre !

Delmar tenait très mal l'alcool : il chantait, devenait super-tactile (du genre gros câlin, j'vous aime les gars, mais il avait aussi roulé le patin du siècle à Bill Weasley une fois), était incapable de marcher droit, et parfois il fonçait droit dans les murs parce qu'il manquait la porte.

– Laisse tomber, Delmar, tu n'en boiras pas une goutte, intervint Lucas d'un ton catégorique. Je ne tiens pas à te traîner une nouvelle fois à travers le château pour te ramener dans ta salle commune.

– Allez, je sais qu'au fond de toi, tu adores ces moments d'amitié inédits !

– Tu m'as bien regardé ?

Boudeur, Delmar reposa sa bouteille d'alcool non-identifiée, et se saisit à la place d'une canette de Bièraubeurre. Kathleen lui tapota sur l'épaule avec compassion, puis descendit gracieusement du bar et, avant de s'enfoncer dans la foule, lança par-dessus son épaule :

– Vous venez danser ?

– C'est contre ma religion, refusa Lucas.

– T'as une religion ? s'étonna Delmar en posant sa cannette pour se joindre à Kathleen.

– Ouais, la flemme.

L'hindou éclata de rire, puis disparut dans la foule, laissant Lucas au bar. La salle commune des Serpentards était vraiment la meilleure pour faire la fête : obscure, uniquement éclairée par des flashs de lumières ou des boules brillantes flottant au plafond, elle était également vaste, et pousser les quelques meubles sur le côté permettait d'avoir une grande piste de danse. Les murs de pierre faisaient résonner la musique à merveille, amplifiant les basses au point de faire vibrer la poitrine des danseurs. On aurait dit une boîte de nuit.

La soirée était déjà bien avancé alors c'était aussi la folie. Et pas seulement sur la piste, même si tous les danseurs se trémoussaient en hurlant et bondissaient tels des kangourous sous cocaïne. Déjà que les Serpentards étaient louches en temps normal, là ils pétaient tous un câble. Eh oui ! Vous pensez que les Serpentards ils étaient tous bien propres, bien soignés, sophistiqués et tout ? Nope ! Que dalle ! Ils étaient aussi tarés, boutonneux, débiles, hormonaux et maladroits que n'importe quel ado attardé ! Ils rotaient, ils pétaient, ils copiaient sur leurs voisins, ils s'échangeaient des petits mots en cours, ils perçaient leurs boutons d'acnés, ils organisaient des fêtes clandestines sans en parler au directeur de Maison, ils faisaient le mur à Pré-au-Lard et ils bouffaient des biscuits en classe comme tout le monde, oui madame ! Et du coup, quand il y avait de l'alcool impliqué et une soudaine baisse d'inhibitions, et ben il y avait du spectacle !

Et le mieux, c'était les septièmes années. Ben oui, c'était leur dernière année ici, il fallait en profiter pour déconner un max !

Déjà il y avait Rosier qui faisait un karaoké perché sur un canapé avec une canette vide en guise de micro et sa voix complètement noyée sous les hurlements de la musique, et puis il y avait Danny Valentine et Eveline Heart qui étaient en train de discrètement métamorphoser les fringues de Jason Bulstrode qui n'avait pas encore remarqué que son pantalon était en train de se transformer en tutu rose, Cameron Dublin qui s'engueulait avec un rideau, Ludovic Cole qui ronflait couché sur un fauteuil, Franklin Silvernus qui dansait sur une table en enlevant ses vêtements avec tellement peu de coordination qu'il allait sans doute se casser la gueule d'ici trois minutes, Lydie Amarin qui était en train de lancer des miettes de pain sur la foule des danseurs d'un air ennuyé, et…

– Elijaaaaah ! s'exclama Cassie en sautant en cou du grand métis. Viens danser avec moi !

Le Préfet leva les yeux au ciel, souleva Cassie du sol, et la colla dans les bras de Kathleen qui passait justement par là :

– Tiens, occupe-toi d'elle !

– KAAAATH ! beugla Cassie avec allégresse en serrant son amie dans ses bras. Danse avec moi ! Ou mieux, fais-moi un câliiin !

– Oh là là, qu'est-ce qu'elle a bu ? fit la Poufsouffle avec méfiance en essayant de se dégager de la prise de Cassie qui s'accrochait à elle comme un koala particulièrement tenace.

– Je sais pas, je suis pas sa baby-sitter ! râla Elijah.

Il n'empêche que la remarque de Kathleen avait du lui donner mauvaise conscience parce qu'il se pencha vers Cassie, et que du coup la petite brune attrapa le visage d'Elijah entre ses mains et l'approcha du sien si brusquement qu'ils se cognèrent le front (manquant de faire tomber Kathleen parce que Cassie se cramponnait toujours à elle avec ses jambes, sérieusement, cette fille était à moitié poulpe ou quoi ?!), puis le fixa des les yeux et lui chuchota :

– J'aime tes sourcils.

– Euh, merci ? hésita le Préfet-en-Chef.

Cassie hocha gravement la tête puis relâcha dignement Elijah, avant de tourner un sourire béat vers Kathleen :

– Sois pas jalouse, j'aime tes sourcils aussi ! Ils sont trop beaux. Symé, samatri, sy…. Symétriiiques. Et en plus ils sont de la même couleur ! Awww.

– Ok, toi t'as pas bu que du jus de pommes, fit Kathleen d'un ton résigné avant de brandir trois phalanges. Combien tu vois de doigts ?

Cassie loucha sur la main de Kathleen, lui adressa un large sourire, puis s'écroula comme une masse et se mit à ronfler. Elijah et Delmar (qui semblait s'être matérialisé comme par magie à côté d'eux) la rattrapèrent de justesse avant qu'elle ne s'écrase par terre.

– Définitivement pas que du jus de pommes, marmonna Kathleen.

– Ah, la décadence de la jeunesse d'aujourd'hui, fit sentencieusement Delmar. Qu'est-ce qu'elle a, elle est bourrée ? Elle tient super bien l'alcool d'habitude !

– Non, d'habitude elle s'endort direct.

– Quoi ? Mais à chaque fois qu'il y a une soirée c'est elle qui se souvient de tous les trucs embarrassant dont les autres ont aucun souvenir !

– Oui ça c'est parce qu'elle les invente, fit la Poufsouffle en levant les yeux au ciel.

– … Elle m'a fait chanter durant trois mois en me disant que si je lui faisais pas ses devoirs de Sortilèges elle raconterait partout que c'était moi qui avais vomi sur Manda ! réalisa Elijah. Quelle menteuse !

Delmar lui jeta un regard blasé :

– Heureusement que t'es mignon. Elle ne t'a pas fait payer.

– Payer ?

– Ouais, Manda a du payer six Noises pour que Cassie ne raconte pas partout qu'elle s'était vomie dessus ! lui révéla Kathleen hilare.

Ça c'était de la stratégie. Kathleen avait toujours pensé que Cassie devrait faire arnaqueuse professionnelle, plus tard. Ou avocat. Enfin, un métier d'escroc, quoi. Elle se ferait un max de blé, elle était super-douée pour ça !

– Non mais je rêve, pesta Elijah. T'as la conscience tranquille, Cassie ?

La Serpentard rouvrit brusquement les yeux (les trois autres sursautèrent violemment) et déclara d'un ton docte :

– Une fois j'ai volé le chat d'Eléonore Davies et quand elle a mis des affiches pour qu'on lui rende son chat contre récompense, je lui ai rendu et j'ai gagné de quoi m'acheter un nouveau sac à main !

– Faudrait qu'on l'évacue avant qu'elle ne confesse avoir assassiné quelqu'un, souffla Kathleen à Delmar.

– T'es une criminelle en fait ! réalisa Elijah. Pauvre Eléonore ! Elle a pleuré quand elle a perdu son chat ! Comment tu peux dormir la nuit ?

Cassie se pencha vers lui et lui chuchota sur le ton de la conspiration :

– En me roulant toute nue dans les Gallions.

– Ok ça suffit ! lâcha Kathleen bien fort. Cassie, tu viens avec moi, c'est l'heure d'aller faire dodo. Tu va squatter mon lit ce soir. Et si tu me vomis dessus, je te fais dormir dans le parc !

Cassie hocha gravement la tête :

– Ouais, t'as raison. Je vais attendre qu'on soit dans la salle commune des Poufsouffles, et après je vomirai sur Candela.

– Je préfèrerai qu'on évite les régurgitations mais bon après c'est ton choix de vie, marmonna son amie Poufsouffle en l'entraînant vers la sortie.

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oOoOoOo

Mercredi 23 septembre 1987, salle de cours abandonnée, septième étage de Poudlard.

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– Pourquoi on se réunit ici ? pesta Delmar. On pourrait pas comploter dans un endroit avec des chaises ? Et moins de poussière ?

– Lopette va ! se moqua Cassie.

– Qui tu traites de lopette, la naine ?

– JE SUIS PAS PETITE C'EST L'ÉCLAIRAGE QUI DONNE CETTE IMPRESSION.

– Eh ! cria Kathleen. Silence vous deux ! Plus vite on en aura fini avec ça et plus vite on pourra retourner dans un endroit avec des chaises, compris ?

– Mais pourquoi on est là en premier lieu ? geignit le Gryffondor.

– Pour pas être espionnés, débile ! On est en train de monter un projet top-secret pour dévaliser le directeur, je te rappelle !

– On est en train de quoi un quoi ?!

– Ah oui t'étais pas là, se rappela Cassie.

– Ah ben carrément ! Je me casse deux secondes et vous préparez un braquage de banque ?!

– Non on veut juste le pognon qu'il cache dans son bureau, l'informa Kathleen. Et le droguer aussi. Et l'emmerder de manière générale.

Delmar leva les bras au ciel comme pour prendre le plafond à témoin du fait qu'il était entouré par des débiles congénitaux aux plans foireux :

– Splendide ! Et vous préparez ça depuis quand ?!

– Bah, quasiment un mois, fit innocemment Lucas.

– Et vous m'en avez même pas parlé ! fit Delmar d'un ton dramatique.

Si c'était ça qui l'offensait le plus, ça en disait long sur sa mentalité.

– Ça m'est sorti de l'esprit, avoua Kathleen en passant une main dans sa crinière de cheveux blonds. J'avais des préparatifs à faire, j'étais très occupée !

– Pareil, fit aussitôt Lucas quand Delmar tourna vers lui son regard accusateur.

Cassie prit le temps de réfléchir, puis haussa les épaules :

– J'avoue, j'ai zappé.

– Mais qu'en est-il de notre amitié ? pleurnicha le Gryffondor. Notre complicité ? Nos promesses de loyauté éternelle ?

Kathleen lui tapota le dos avec commisération :

– C'est bon, maintenant t'es dans le complot. Tu veux commettre cette potentielle infraction pénale avec nous ou pas ?

– Tu me prends pour qui, ma vieille ?

Et du coup ils passèrent au sujet principal : comment droguer Dudu et lui faire les poches.

Oui parce que c'était bien joli de doser les bonbons du vieux, mais c'était pas tout ! Il fallait entrer dans le bureau, trouver où était le pognon, pas se faire chopper par un prof ! Comme quoi c'était super-compliqué d'entamer une carrière criminelle. Kathleen allait rester sur son bon vieux projet de potionniste pour gagner sa vie.

Violer la loi devait uniquement être un loisir récréatif.

– On pourrait lui piquer son phénix aussi ! s'enthousiasmait Lucas.

– Pourquoi, tu veux un phénix ? s'étonna Delmar.

– Carrément ! Pas toi ? Ils ont des capacités magiques qui n'ont pas été toutes étudiées, ça serai génial de les découvrir. Et puis, un piaf qui brûle, c'est parfait pour les longues nuits d'hiver.

– Ah, si le piaf tient chaud, je le prends ! déclara fermement Cassie. Il y en a marre de se geler dans les donjons ! Sérieux, l'hiver dernier on aurait dit qu'il y avait un concours de castagnettes tellement ça claquait des dents dans mon dortoir !

– L'hiver dernier t'as passé quatre mois à dormir dans mon lit, sourcilla Kathleen.

– Justement ! Il faisait beaucoup trop froid dans mon dortoir !

– Ouais, ben Candela est persuadée que tu es somnambule, du coup.

– Ah mais la détrompe pas, je suis sûre que je peux employer cette tactique encore une ou deux fois. Et cet hiver, je remets ça, je t'avertis !

Oui parce que pour éviter de dormir dans son dortoir glacé, Cassie avait pris l'habitude de se lever, de prendre son oreiller, et de se rendre directement dans le dortoir de Kathleen. Un pas régulier, un visage inexpressif, et le tour était joué. Il suffisait d'ignorer les regards ahuris (le pyjama en pilou orange de Cassie faisait parfois hausser plus d'un sourcil) et de faire la sourde oreille aux gens qui essayaient de la réveiller, et hop, le tour était joué !

– Comment ça se fait que tu t'es jamais fait choppée par Rusard ? fit pensivement Kathleen. Parce que parfois, u me rejoignais assez tard…

– Ah, ça… Delmar a corrompu son chat, et quand je venais chez toi je portais un pull de Delmar pour que Miss Teigne reconnaisse son odeur et me foute la paix.

Kathleen se tourna vers le Gryffondor, les yeux étrécis :

– T'as corrompu Miss Teigne ?!

– Yep, fit fièrement l'hindou. Avec du pâté de canard. Trois ans de dur labeur avant qu'elle accepte de me laisser vadrouiller la nuit sans en avertir son patron !

– Je fréquente des délinquants, déclara Lucas à personne en particulier.

Il n'avait pas totalement tort, mais ça n'empêcha pas les trois autres de prendre l'air indigné, comme s'ils étaient victimes d'ignobles calomnies. Puis Cassie ouvrit de grands yeux :

– Oh tiens, ça me fait penser ! Mon mot de passe a changé, maintenant c'est « Viviane » !

– Le mien aussi a été changé, se rappela Delmar. C'est « Pâtisserie ».

– Ah ah, ça a nettement moins la classe, ricana la Serpentard.

– Ouais, ben au moins c'est plus original que de prendre des noms de sorciers célèbres à tout bout de champ ! contra Delmar.

Il marquait un point. Ça devait bien faire six ans (depuis que Rogue était devenu directeur de Maison en fait) que les mots de passes de leur salle commune étaient des noms de grands sorciers, qu'ils aient été Serpentards ou pas. Bah, ça changeait de Slughorn ! Kathleen, Delmar, Cassie et Lucas n'avaient eut Slughorn comme prof qu'un an, mais Cassie leur avait révélé après coup que durant cette époque, leurs mos de passe étaient des noms de politiciens, de joueurs de Quidditch ou autres célébrités que Slughorn avait connues…

– Faudrait soumettre le problème à Rogue, songea Lucas à voix haute. Franchement, quitte à mettre un mot de passe, autant faire preuve d'imagination.

– Ah ouais ? rigola Cassie. Allez, qui est partant pour aller dire à Rogue qu'il manque d'imagination ?

Personne ne leva la main. Bah ouais, ils trouvaient tous Rogue un peu louche. Et pas seulement parce qu'il était moche, même si c'est vrai, le fait qu'il ait la peau jaunâtre, les cheveux gras, les dents mal alignées et toutes jaunes, des cernes, les yeux injectés de sang, un nez crochu, des fringues sinistres et l'air perpétuellement en rogne, bon, ça aidait pas à établir une image positive. Fallait le dire : Rogue avait une sale gueule.

Mais ouais, en plus d'être moche comme le cul d'une chèvre, Rogue était louche. Déjà il était pas super-pédagogique (même s'il fallait admettre que dans sa classe, il y avait zéro accident, contrairement à ce qui se passait à l'époque de Slughorn !), et mais plus il fichait les jetons ! Avec ses fringues de vampire, sa voix douce et menaçante digne d'un narrateur de film d'horreur, les deux trous noirs qui lui servaient de globes oculaires, ça vous faisait pas flipper peut-être ? Parce qu'il fallait être sacrément marteau pour pas avoir la trouille de Rogue !

Du coup, ouais. Pas de volontaire pour aller dire à Rogue que ses mots de passe étaient merdiques, ça c'était évident.

– De toute façon, c'est pas comme si ça avait une grande importance pour nous, finit par dire Kathleen.

La salle commune des Poufsouffle avait le même mot de passe depuis des siècles : un rythme de musique tapé sur le couvercle d'un des tonneaux devant l'entrée. Quant à la salle commune des Serdaigle, elle était protégée par une énigme à résoudre, qui changeait pour chaque élève : pas de code mensuel non plus. Serpentard et Gryffondor étaient les seules Maisons assez paranos pour utiliser des mots de passe. Ils avaient peur de quoi, que la Maison rivale vienne les égorger dans leur sommeil ? De toute façon, Cassie et Delmar donnaient le mot de passe à quiconque le demandait (même s'il s'agissait essentiellement de Kathleen et Lucas), alors c'était pas d'une utilité transcendantale…

– C'est complètement con comme système, râla Cassie. Ça empêche les visites cordiales entre Maisons !

– En parlant de visites cordiales, vous n'êtes pas encore venus dans la salle commune des Serdaigle, songea Lucas. Va falloir que vous vous invitiez, un de ces quatre ! Quand je pense qu'il y a encore des premières années qui ne connaissent pas vos têtes…

– Demain ? proposa Delmar. On a un devoir à faire en Runes de toute façon, on comparera nos brouillons.

Runes était l'une des matières qu'ils avaient encore tous les quatre cette année, du coup ils s'entraidaient à la moindre occasion.

– Vas-y pour demain, décida Kathleen. Cassie, tu ramènes la bouffe ?

– Comme d'hab quoi.

Les membres de leur petite bande squattaient régulièrement la salle commune des uns et des autres, ce qui faisait complètement disjoncter leurs Préfets respectifs. Difficile d'instaurer un climat de méfiance des Gryffondors envers les Serpentards quand Cassie faisait irruption dans la salle commune des rouges et or avec un paquet de gâteaux encore chaud dans les bras !

– Pour en revenir aux Gryffy et aux Serpy, on devrait changer les mots de passes pour que ça soit toujours le même ! déclara Kathleen en croisant les bras. On perd un temps fou à essayer de se souvenir de ce truc, et il change deux fois par mois !

– J'ai essayé de changer celui des Gryffondors, l'informa Delmar. Aucun succès. C'est les directeurs de Maisons qui décident, ou bien le tableau de la Grosse Dame du tableau.

– Pourquoi on le supprime pas ? tenta Kathleen.

– Je crois que c'est une prérogative du directeur ça, fit remarquer Lucas.

– Ah évidemment ! pesta la Serpentard. S'il faut compter sur lui, on est pas sortis du sable ! Quel glandu celui-là !

Kathleen leva les yeux au ciel mais se garda bien de prendre la défense du directeur. Déjà parce qu'elle n'avait pas un immense respect pour lui (la preuve, elle s'apprêtait à l'empoisonner !) mais en plus parce que même si Cassie en faisait parfois des tonnes, elle n'avait pas tort sur un point : Dumbledore n'avait pas vraiment à cœur l'épanouissement des élèves.

Et non, Kathleen ne parlait pas du fait qu'il favorisait les Gryffondor, ou bien du fait qu'il encourage tacitement les luttes entre Maisons (même si elle, et surtout Lucas, auraient pu écrire une thèse dessus). Non, Kathleen n'aimait pas Dudu le barbu pour une excellente raison : les elfes de maisons.

CES SALOPERIES ENTRAIENT DANS LES SALLES COMMUNES ET TOUT, C'ETAIT UN SCANDALE !

Oui parce que c'est dégueulasse un elfe, et en plus c'est moche, plus moche qu'un cul de chèvre, plus moche que Rogue, peut-être même plus moche que le cul de Rogue ! Et ces machins se baladaient librement dans le château, ils faisaient peur aux élèves innocents la nuit, c'était une HONTE !

Hum. Voilà, bref. Kathleen n'aimait pas les elfes. C'était d'ailleurs pour ça que c'était Cassie qui se chargeait de ramener de la bouffe, parce que Kathleen ne mettrait pas un orteil dans les cuisines, même si on la payait ! Il y avait des bestioles répugnantes partout dans cette pièce !

Un de ces jours elle ferait une pétition pour qu'ils débarrassent le plancher, Dudu n'allait pas savoir ce qui allait lui tomber sur la gueule.

– Je vais me procurer plus de produit pour droguer les bonbons de Dumbledore, déclara-t-elle soudain. Si ça se trouve il y en aura assez pour neutraliser la moitié des elfes, ça sera toujours ça de fait !

– Ah non, laisse les elfes tranquilles ! s'indigna Lucas.

– Ouais ! Ils font de la bonne bouffe !

– Delmar, t'es vraiment un ventre à pattes…

– J'avoue. Bon, si on en revenait au projet principal ? On a toujours pas déterminé si on utilisait du somnifère ou des hallucinogènes dans les bonbons de Dudu…

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oOoOoOo

Lundi 28 septembre 1987, salle commune de Serdaigle, tour ouest de Poudlard.

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– Lucas, tu peux pas emmener tes potes ailleurs ? geignit Lauren Pattison. Genre, je ne sais pas moi. Au fond d'une oubliette. Avec des serpents venimeux.

– Je dois me sentir visée par cette allusion aux serpents ou pas ? interrogea Cassie à la cantonade.

Les seize élèves assis autour d'eux pour piocher dans l'énorme sachet de bonbons qu'elle avait ramenés secouèrent tous la tête avec véhémence, Lauren grinça des dents, et tout le monde prétendit ne rien avoir entendu.

– Vous savez ce qu'il manque dans le programme ? disait Kathleen en ignorant l'interruption inopportune. Un cours d'éduction sexuelle. Je vous jure, ça soulagerait tout le monde.

– T'as besoin qu'on fasse ton éducation ? se marra Delmar.

– Nan, débile, mais hier y a un petit deuxième année qui a demandé à Chourave ce que ça voulait dire "tailler une pipe", j'ai cru qu'elle allait faire un malaise !

– C'est fou ce que les gamins sont vulgaires de nos jours.

– Nan mais attend, c'est pas le pire ! Le petit, il avait entendu ça à Poudlard, au petit-déjeuner ! Deux Gryffondors qui en parlaient, au vu et au su de tous, à portée d'ouïe des petites oreilles innocentes des gnomes qui envahissent le château tous les ans.

– … Les premières années ?

– Ouais, les nains quoi. Ils sont tout petits, des fois j'a peur de marcher dessus. ENFIN BREF. Un cours d'éducation sexuelle. Si possible pas dispensé par le directeur de Maison, parce que vous imaginez McGo vous expliquer les troubles de l'érection, ou Rogue vous parler de menstruation ?

Cassie émit un bruit à mi-chemin entre le couinement et le grognement et se cacha le visage. Delmar était devenu un peu vert. Lucas, avec son éternelle patience, roula juste des yeux :

– Du coup, qui donnerait le cours ? Toi peut-être ?

– N'importe qui, du moment que je ne sois plus confrontée à la vision d'un petit deuxième année parlant de sexe oral avec ma directrice de Maison, fit dignement Kathleen. Bon ! On a bouclé l'Astronomie, on passe à quoi maintenant ?

Delmar secoua la tête pour s'éclaircir les idées, puis sorti son énoncé de son sac

– Les runes grecques. Je vous préviens, j'ai rien capté à la leçon.

Runes était une autre des matières qu'ils avaient tous les quatre. En fait, ils avaient un tronc commun de matières : Métamorphose, Défense, Histoire, Astronomie et Runes. Delmar avait raté la Botanique, contrairement aux trois autres : et Cassie ne suivait plus les cours de Potions et de Sortilèges car elle avait raté ses BUSES. En revanche Cassie avait Divination, Lucas avait Arithmancie, Delmar avait Soins aux Créatures Magiques, et Kathleen prenait des cours d'Alchimie par correspondance.

Bref, ça taffait dur en septième année.

– C'est simple, tu vas voir ! fit doctement Kathleen en lui prenant son devoir des mains. Regarde, les premières Runes c'est la mer, les vagues, un Thêta et là tu reconnais le nom de Thétis. Alors c'est… ?

– … Une pub pour une croisière ?

– Une légende sur Thétis, glandu !

– C'est qui Thétis ?

– La mère d'Achille ! vitupéra la Poufsouffle en le frappant avec un dictionnaire. Le mec qui a trucidé Hector de Troie ! Mais tu vis dans une grotte ou quoi ?

– Eh, ça s'est passé il y a huit mille ans, excuse-moi si je suis pas chaud au niveau actu de la mythologie grecque !

Un des Serdaigles au fond de la salle émit un reniflement moqueur et marmonna quelque chose qui ressemblait à Né-Moldu. Lucas et Cassie échangèrent un bref regard avec Kathleen (Delmar n'avait pas entendu), et la Poufsouffle fit un discret signe de tête. D'un pas sautillant, Cassie se leva et se dirigea vers le Serdaigle moqueur.

– Thétis, reprit Kathleen en se tournant vers Delmar. C'est qui Thétis, c'est une divinité de la mer, c'est…

– Un thon ?

VLAN ! Re-coup de dico. Le Gryffondor émit un gémissement de douleur feinte, faisant rigoler leur petit public de Serdaigles, et l'une des filles lui souffla sa réponse. Le visage de Delmar s'illumina :

– Une Néréide !

– Voilà, souffla Kathleen en reposant le dictionnaire sur la table. Du coup le texte va parler de dieux, de déesses, de marchés entre eux et les mortels, et surtout de flotte, parce que les Néréides c'est aquatique comme bestiole.

Parmi leur quinzaine de fans, les trois septièmes années qui faisaient Runes eux aussi se hâtèrent de sortir leurs propres textes à traduire. Kathleen était l'une des premières de la classe en Runes, alors si elle leur mâchait le boulot, ils n'allaient pas hésiter à en profiter !

– L'année dernière, l'examen final portait sur les Runes grecques, lâcha Lucas en feuilletant son dictionnaire de grec ancien. C'est Thomas Declan qui me l'as dit.

– Ah ouais ? s'intéressa Delmar. C'était sur quoi ?

– Les quatre saisons dans un poème lyrique grec sur le voyage.

– Ah, les quatre saisons, fit rêveusement Kathleen en déroulant un nouveau parchemin. Mouillé, chaud, Halloween et Noël.

Delmar plongea sans sa traduction pour dissimuler un fou-rire, et Lucas se contenta de toussoter discrètement.

– Noël, ma saison préférée ! s'exclama Cassie en reprenant sa place. La neige, le vent, les cadeaux, les rhumes, la cheminée, les édredons des Poufsouffles ! Quelle délicieuse saison.

– Les édredons des Poufsouffles ? ne put s'empêcher de demander un Serdaigle.

Cassie agita vaguement la main :

– C'est une longue histoire impliquant du somnambulisme et les fraudes fiscales d'un barbu du Moulin Rouge. T'inquiète. Eh, qui a pris mon dico ?

Lucas leva la main sans quitter des yeux les pages qu'il tournait :

– Moi. J'ai perdu le mien.

– Comment tu fais pour perdre toutes tes affaires comme ça, c'est pathologique, rouspéta Cassie en se penchant pour lire par-dessus son épaule.

Au même moment, à l'autre bout de la salle, un élève émit un hurlement aigu : toutes les têtes se levèrent juste à temps pour voir passer l'autre snob de tout à l'heure en courant et en dansant sur place, tandis qu'une cinquantaine de petites araignées s'échappaient des manches et du col de sa chemise.

– Quel idiot, fit Kathleen d'un ton détaché. On dirait qu'un nid d'araignée lui est tombé dans le col.

Lucas hocha gravement la tête :

– Ça c'est pas de bol.

Et il passa un bonbon à Cassie, avant de décaler son dictionnaire pour qu'ils puissent partager plus facilement.

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A suivre ! J'espère que ce premier chapitre vous a plu !