ATTENTION : Nombreuses descriptions et évocations de l'automutilation ! Si ce sujet vous touche, abstenez-vous.


Blade and Needle

Depuis des semaines, Kurt Hummel, élève de dernière année à l'université Parsons de New York, réfléchissait, dessinait et créait du matin au soir en perspective de la présentation de sa collection de fin d'étude sept jours plus tard.

Allongé sur le sofa de son appartement du West Village, il répondait distraitement au baiser brulant de son petit-ami, Blaine Anderson, sans pour autant arrêter de se torturer l'esprit à la recherche d'un nouveau modèle. Ce défilé était au centre de toutes ses préoccupations. Il avait travaillé si dur pour en arriver là que tout devrait être parfait, du le plus minuscule et inutile détail jusqu'à la robe de rêve qui clôturerait le show. Robe qui pour le moment ne demeurait parfaite que dans son imagination, et dont chaque esquisse se révélait fade ou incomplète à ses yeux.

Soudain, il repoussa son petit ami et s'échappa du fauteuil pour s'emparer du carnet à croquis posé sur la table base face à lui. La robe, toujours et encore cette même création. Attrapant un crayon qui traînait non loin, Kurt laissa ses doigts voler sur le papier blanc.

- Kurt ! gémit l'autre garçon en se laissant tomber tête la première contre les coussins.

Il ne lui prêta pas attention et se mit à dessiner. La première esquisse terminée, il l'arracha du carnet et la jeta dans un coin de la pièce. Il recommença ainsi deux ou trois fois avant de pousser un gémissement satisfait et de retourner vers le sofa.

- Blaine, regarde ! Regarde !

- C'est génial, marmonna Blaine toujours avachi.

- Tu n'as même pas bougé, répliqua le châtain d'une voix cassante.

Il lui lança un regard noir avant de reporter son attention sur le dessin entre ses mains. Devant ses yeux, se trouvait, enfin, le croquis sur lequel il s'acharnait jours et nuits depuis des semaines. La robe qui clôturerait son défilé, son bijoux se tenait entre ses doigts. Kurt avait enfin réussi à coucher sur papier une magnifique robe qui ne demandait plus qu'à prendre vie. Passant son index sur les contours grisâtres de sa création, il sourit fièrement.

Elle était parfaite. Exactement comme il la rêvait. Forme patineuse, manches trois-quarts, dos en cuir taupe découpé de losanges. Il ne lui restait plus qu'à se fournir les matériaux et tissus qu'il utiliserait pour la réaliser. Et Kurt savait exactement ce dont il aurait besoin.

Son esprit focalisé sur sa création, Kurt ne sentit pas immédiatement les mains fermes lui enserrant la taille. Il réagit seulement lorsque des lèvres charnues commencèrent à déposer de légers baisers dans son cou, le faisant frémir. Il grogna et essaya de s'échapper de cette étreinte, sans résultat. Blaine le serra un peu plus contre lui et remonta ses lèvres le long de la mâchoire de son petit ami.

- Blaine, souffla ce dernier. S'il te plaît…

Se détachant de lui, le bouclé fronça les sourcils. Kurt le repoussa d'une main tenant son carnet de l'autre.

- Pas ce soir. J'ai encore énormément de choses à faire.

A contre coeur, Blaine le relâcha et le regarda se sauver vers la pièce qui lui servait d'atelier, depuis que sa colocataire avait déménagé il y a quelques mois de cela.

Lors de l'arrivée de Blaine à New York, il y a trois ans, tous deux avaient décidé de continuer à vivre séparément. Kurt avait suggéré de ne pas prendre d'appartement ensemble dès l'arrivée de son petit ami en ville. Il avait insisté sur le fait que New York changerait Blaine, comme cela avait été le cas pour lui, et voulait prendre un peu de temps avant de franchir une nouvelle étape dans leur relation.

C'est ainsi qu'il resta dans le West Village avec sa colocataire, incitant Blaine à se trouver lui aussi un appartement et quelqu'un avec qui le partager. Bien que réticent à l'idée de vivre si prêt et pourtant si loin de la personne qu'il avait peiné à voir lors de son année de senior, il accepta. Le voici donc, trois ans plus tard, partageant quelques mètres carrés à Midtown avec un garçon n'ayant rien à voir avec celui dont il voulait réellement vivre.

Se levant, il rejoignit Kurt dans son atelier et s'adossa contre le cadre de la porte pour l'observer chercher quelque chose à l'intérieur d'une grande armoire remplie de tissus, boutons et bobines en tous genres. Au bout d'un moment, il en sortit quelques mètres de coton beige qu'il étala sur sa table de travail. Il ne s'occuperait de personne avant d'avoir fini ce qui lui trottait en tête. A regret, Blaine lui annonça qu'il rentrait se coucher.

N'obtenant aucune réponse et ne sachant pas réellement si Kurt avait fait attention à ce qu'il venait de dire, il attrapa sa veste et sortit de l'appartement. Il descendit les marches de l'immeuble quatre à quatre et claqua la porte d'entrée avant de rejoindre la 7th Avenue. S'arrêtant devant un kiosque à journaux encore ouvert, Blaine hésita à acheter un paquet de cigarettes. Il avait horriblement besoin de quelque chose lui permettant d'évacuer la pression accumulée depuis les dernières semaines.

Il avait d'abord raté une audition importante à cause d'un problème de métro, puis avait eu un trou de mémoire sur scène en répétant la derrière pièce montée par sa professeur de théâtre à Juilliard et s'était vu passé du rôle principal à celui de figurant en moins de cinq minutes. A cela s'ajoutait le fait que son colocataire payait systématiquement le loyer en retard et que c'était sur lui que tombait son idiot de propriétaire. Et pour finir, son petit ami accordait plus d'importance à sa machine à coudre qu'à lui. Blaine se sentait dépassé. Il avait besoin d'un moyen d'évacuer, de re-contrôler sa vie. Mais il savait également que se remettre à fumer ne serait pas la bonne solution, et Kurt le tuerait en l'apprenant. Non, il avait besoin d'autre chose. De quelque chose de plus efficace et agréable, qui l'aiderait à se détendre et à se vider l'esprit pour la nuit. Il avait une petite d'idée de comment procéder.

Sa décision prise, Blaine héla un taxi. Il ne passerait pas sa soirée avec Kurt comme il l'avait prévu, mais soudain le fait de se retrouver seul dans son appartement ne le dérangeait plus.


Une fois chez lui, Blaine interpella Lewis, son colocataire, qui comme d'habitude n'était pas encore rentré, puis posa sa veste sur le canapé et se dirigea immédiatement dans sa chambre. Il ouvrit le premier tiroir et se mit à retourner le tas de polos qui s'y trouvaient, mais sans résultat. N'ayant pas trouvé la boîte désirée, Blaine fit de même pour son tiroir à noeuds papillon, puis celui à chaussettes et ainsi de suite jusqu'à en arriver au dernier. Il fit glisser le compartiment du bas pour l'ouvrir et déplaça les différentes piles de cardigans soigneusement pliés à la recherche d'une fine boîte à cravate noire. Il la trouva quelques instants plus tard sous un gilet en cachemire prune et l'extirpa immédiatement. Blaine s'assit sur le parquet et observa l'objet durant un long moment sans oser l'ouvrir. Il passa timidement une main sur le couvercle et se mordilla la lèvre inférieure. Il avait tellement envie d'en redécouvrir son contenu, mais en même temps était réticent. Ouvrir cette boîte signifiait aller jusqu'au bout et Blaine ne pouvait s'empêcher de revoir les magnifiques yeux céruléens de Kurt remplies de tristesse à cause des différents objets qu'elle contenait.

Prenant une inspiration, Blaine ferma les yeux et retira le couvercle. Il ne voulait pas blesser son petit ami, mais c'était plus fort que lui. Il en avait besoin.

Il se releva et quitta la pièce pour aller chercher une bouteille de désinfectant et des bandages dans la salle de bain avant de fermer la porte de sa chambre avec précaution. Il s'empara de sa boîte à cravate abandonnée sur le parquet vieilli et observa l'impressionnante collection de lames de rasoirs, de tailles et d'épaisseurs différentes. Blaine eu besoin d'un certain temps avant de porter son choix sur une de taille moyenne qu'il désinfecta en vitesse avant de remonter sa manche gauche jusqu'au coude. Durant un bref instant, il jugea les fines lignes blanches striant son poignet et son avant bras, puis positionna la lame avec précaution entres deux cicatrices. Sentant le métal glisser le long de sa peau, il soupira d'aise.

Depuis son arrivée à New York, il ne s'était plus coupé et n'en avait pas spécialement ressenti l'envie. Sa boîte patientait sagement cachée derrière ses vêtements depuis son emménagement. Mais ce soir, c'était différent. De plus ce n'était pas réellement une rechute, n'est-ce-pas ? Il ne comptait pas se remettre à se mutiler chaque soir, ni à se suicider. Blaine avait toujours refusé de se qualifier de suicidaire. Il n'avait jamais désirer mettre fin à ses jours. Il cherchait juste à ressentir un divin sentiment de contrôle.

Enfonçant la lame plus profondément, il poussa un profond soupir au contact du liquide chaud coulant le long de son avant-bras. Il se sentait bien, extrêmement apaisé. Pour la première fois depuis de longues semaines, il avait le pouvoir sur quelque chose. Il oublia ses auditions multiples et sans réel succès, sa difficulté de briller continuellement à Juilliard, mais surtout et principalement les rejets multiples de son petit ami.

Une fois terminé, c'est tout naturellement que Blaine essuya sa lame avant de la remettre à sa place. Il banda sa coupure et rangea le tout. Puis il envoya un message à Kurt pour lui souhaiter bonne nuit avant de se glisser sous les draps pour une longue nuit de sommeil paisible.


Note de l'auteur : J'espère sincèrement que ce premier chapitre vous aura plu. Ceci est ma première fanfiction et ça me ferait énormément plaisir d'avoir votre avis.

Merci de votre lecture et à bientôt.