Qu'est-ce que le destin ? Y a-t-il une fatalité à l'existence ? Sommes-nous destinés avant même notre création à servir un intérêt plus vaste, pions d'un plan universel dont l'étendue et la finalité échapperait à toute imagination humaine ?
Le soleil brillait dans le ciel sans nuage, la chaleur écrasante et impitoyable n'avait pour seul adversaire qu'une légère brise qui parvenait tout juste à rafraichir quelque peu les villageois qui avaient eu la chance d'obtenir de bonnes places sous l'ombre des rares arbres ou des imposants bâtiments d'Izlude.
Sous l'atmosphère écrasante du soleil de plomb qui s'abattait sur la région depuis plusieurs semaines, la ville semblait en arrêt, tous les habitants cherchaient à trouver un coin de réconfort dans la fraicheur providentielle des magasins et les rares voyageurs qui osaient s'aventurer si prêt des régions désertiques proches de Morroc ne tardaient pas à partir vers le nord, où un air plus frais pourrait soulager la sensation de poids qu'ils sentaient s'abattre sur eux en cet été particulièrement chaud, même pour les habitants, pourtant habitués, de la région.
A travers une fenêtre où le soleil perçait, amenant avec lui toute la chaleur que cette mince paroi de verre ne pouvait filtrer, un jeune homme écoutait le cours que dispensait le professeur à lui-même et au reste de sa classe.
Ce jeune homme était très particulier, en effet, il possédait des cheveux cours d'un rouge vif ainsi que des yeux de la même couleur, chose inhabituelle, même en utilisant de la magie. Tout comme le reste de sa classe, étant presque essentiellement composée de garçons, il était en âge, après des années d'études et d'entrainement de devenir un Swordman.
Le jeune homme écoutait ce que le professeur disait à propos de l'examen final lorsque sa chaise fût brusquement tirée et qu'il tomba au sol, attirant toute l'attention sur lui.
Un problème, Balthazar ? Demanda le professeur
Un problème, Balthazar ? Chuchota derrière lui un élève de la classe, imitant la voix du professeur afin de se moquer du jeune homme qu'il avait fait tomber.
Le jeune garçon se releva, très gêné, repris sa chaise et retourna s'asseoir en jetant un œil à celui qui l'avait fait tomber.
Ce n'était pas étonnant, il s'agissait de l'un des redoublants de la classe, la moyenne d'âge était de 16 ans lorsque les élèves passaient leur épreuve afin de devenir officiellement Swordman, mais ces élèves étaient âgés de 18 à 20 ans, pas en raison de leur capacités, car elles étaient excellentes, mais à cause de leur désobéissance lors des tests finaux qu'ils avaient passés, la discipline n'était pas leur point fort et ils venaient de le prouver une fois de plus.
Non monsieur, il n'y a rien, excusez-moi… répondit alors le jeune Novice, confus.
Le cours reprit alors, tandis que les ricanements des anciens couvraient la voix du professeur de telle sorte que celui-ci ne les entende pas tout en empêchant Balthazar de se concentrer. Les anciens commencèrent alors à envoyer des boulettes de papiers mâchées à une jeune femme qui serrait les dents afin de ne pas répliquer lorsqu'un cri soudain alerta toute la classe.
Balthazar se retourna et vit l'un des anciens au sol, sa chaise avait un pied cassé, derrière lui se tenait l'un des rares amis de Balthazar, sifflant en se regardant les ongles tandis que sa victime se relevait, furieuse.
On peut savoir ce qui te prend, Bahamut ?
Disons que j'avais envie de m'amuser un peu moi aussi…
T'amuser ? Tu as donné un coup dans le pied de ma chaise pour que je tombe alors que j'écoutais le cours ! Monsieur ! S'exclama l'ancien en se tournant vers le professeur en montrant Bahamut du doigt, celui-ci toujours vautré sur sa chaise avec un air décontracté.
Tu crois vraiment que je vais croire une seule seconde que tu étais en train d'écouter le cours, Rushia ? Répondit le professeur en provoquant des rires dans la classe. Mais Bahamut, tu vas tout de même sortir de la salle, tu n'as pas à casser le pied d'une chaise pour faire tomber l'un de tes camarades…
Bahamut se leva tranquillement, prit ses affaires, fit un discret smack dans les airs en réponse aux gestes grossiers de la main que faisait le groupe des anciens à son passage et fit un clin d'œil à Balthazar en passant à coté de lui avant de sortir de la salle.
Balthazar lui sourit lorsqu'il le vit sortir et attendit avec impatience que le cours soit finit pour aller rejoindre son ami qui l'attendait surement dehors.
Malgré tout, il se sentait un peu responsable, il savait parfaitement qu'il avait fait ça pour venger sa chute, lui-même n'osait pas se dresser face à ces hommes plus âgés que lui, Bahamut et lui avaient 16 ans, pourtant, celui-ci n'hésitait pas une seule seconde à défendre ce en quoi il croyait, quitte à en subir les conséquences, comme cela venait de se produire.
Bahamut et Balthazar avaient grandit ensemble et se connaissaient parfaitement, celui-ci avait perdu ses parents très jeunes, lors de la guerre contre les démons qui sortaient du trou de Morroc, fait à ce qui se disait par le Diable lui-même.
Les parents de Bahamut étaient de fiers Cruzaders, ils étaient alors allés combattre pour ce qu'ils appelaient la Guerre Sainte, peu après la naissance de leur fils et avaient perdu la vie durant le combat. A partir de ce jour, Bahamut grandit avec l'idée de devenir un grand défenseur de la justice, tout comme ses parents et d'achever leur mission, les démons ayant gagné la bataille et infestant à présent tout Morroc, gardant la « Porte des enfers ».
Quant à Balthazar, il était sans famille depuis sa naissance, les combattants qui l'avaient trouvé sur le champ de bataille de Morroc l'avaient alors ramené à Izlude afin qu'il soit pris en charge par la ville, supposant que ses parents avaient surement été des habitants de la ville détruite et qu'ils étaient probablement morts durant la grande explosion.
Depuis, Balthazar et Bahamut vivaient seuls, chacun dans un petit appartement que la ville leur avait offert, dans le quartier des Swordman, où les guerriers s'étaient occupés d'eux depuis leur plus tendre enfance.
La cloche sonna enfin, tirant Balthazar de ses rêveries, il prit ses affaires à la hâte et sortit afin de rejoindre Bahamut à l'ombre de l'arbre où ils se retrouvaient d'habitude, cependant, il vit que cette fois, il n'était pas seul : Rushia et sa bande étaient déjà en face de lui, grands et intimidants.
Bahamut ne semblait pas avoir peur malgré l'expression du visage de Rushia qui semblait sur le point d'exploser. Balthazar s'immobilisa, il savait pertinemment qu'une bagarre allait surement se déclencher, les anciens étaient 3, et Bahamut était seul, si bataille il y avait, il aura surement besoin d'aide, mais à 2 contre 3, ils n'auraient probablement aucune chance, les redoublants étant connus pour être des brutes et être très doués au combat.
Mais le jeune homme n'eut pas le temps de prendre une décision car déjà, Rushia avait tenté une attaque surprise en sortant son épée du fourreau à une vitesse surprenante avant de fendre l'air de sa lame et de frapper Bahamut sur le coté gauche.
Heureusement, Bahamut était prêt à réagir et réussit à parer l'attaque en dégainant son épée tandis que Balthazar ne prit plus le temps de réfléchir : il sortit son épée et chargeât les deux acolytes de Rushia qui allaient venir lui prêter main-forte.
Le combat s'engageât alors, Balthazar combattant deux ennemis en même temps tandis que Bahamut était confronté à Rushia qui ne voulait apparemment pas faire marche arrière et enchainait les attaques à grande vitesse avec une grande puissance destructrice que Bahamut contrait en contre-attaquant pour éviter que son adversaire ne prenne l'avantage.
De son coté, Balthazar semblait être en furie, combattant pour protéger son ami, il perdait peu à peu l'avantage prit sur ses deux adversaires, pris au dépourvu et impressionnés par la vitesse et la précision des coups portés, ils avançaient de plus en plus sous l'assaut de la lame furieuse du jeune Novice qui avait de plus en plus de mal à tenir.
Ca suffit maintenant !
La voix de leur professeur stoppa net les adversaires de Balthazar alors qu'ils venaient de désarmer le jeune homme et qu'ils allaient commencer à le rouer de coups, cependant, Rushia ne semblait pas l'entendre de cette oreille : blessé dans son orgueil, il voulait prouver qu'il était de loin supérieur à Bahamut, mais celui-ci ne semblait pas vouloir se battre, il se contentait simplement de parer et d'obliger son adversaire à battre en retraite.
Rushia allait foncer à nouveau sur son ennemi lorsqu'il vola sur quelques mètres après avoir paré le coup de son professeur, atterrissant tant bien que mal sur ses jambes et semblant enfin retrouver ses esprits.
Alors vous voulez de l'action ? Vous irez tous les six en travaux pratique pour une retenue, nettoyer les locaux avant l'épreuve finale du test devrait vous calmer un peu…
J'ai autre chose à faire que nettoyer cette école ! J'en ai marre d'être ici depuis toutes ces années, surtout avec des abrutis pareils ! Ragea Rushia en désignant Bahamut et Balthazar.
Voyez-vous ça ? Si tu avais écouté ce qu'on te disait de faire la première fois que tu as passé ce test, tu l'aurais obtenu depuis longtemps, Rushia… Rendez-vous demain à l'aube, juste avant l'épreuve, ça devrait vous échauffer… Et je ne veux plus de bagarre, dégagez d'ici !
Rushia tourna le dos au professeur et à Balthazar en jetant un regard noir à Bahamut avant de partir en direction du centre-ville tandis que l'instructeur rentrait à nouveau dans l'école et que la foule d'élèves qui avait assisté au combat félicita discrètement Bahamut et même Balthazar par des pouces levés dans leur direction, des sourires, des clins d'œil mais guère plus, Rushia n'était pas très loin et celui-ci inspirant une vive frayeur parmi les élèves.
Balthazar se sentait mal à l'aise de recevoir tous ces compliments muets, c'était la première fois que quelqu'un osait mettre une correction à Rushia et ses acolytes et de voir ceux-ci perdre en 2 contre 3 était d'autant plus satisfaisant qu'il s'agissait en plus de jeunes de 16 ans.
Belle performance. Commenta Bahamut lorsqu'il se rapprocha de Balthazar.
J'ai juste utilisé les techniques qu'on a appris en cours, et celles qu'on a travaillé à l'entrainement tous les deux… Mais ça n'a pas suffit… Répondit Balthazar, encore essoufflé.
N'empêche que tu connais nos adversaires et tu sais qu'ils sont bons, malgré ça, tu as réussi à tenir un bon moment ! Répliqua Bahamut avec un sourire.
Ouais… J'ai surtout eu de la chance que le prof s'en mêle, faut vraiment que j'apprenne à me débrouiller seul... Répondit finalement Balthazar en souriant timidement tandis qu'ils rentraient à l'intérieur sous les regards approbateurs, un peu de repos avant leur retenue et l'épreuve finale du lendemain afin de devenir Swordman ne serait pas de trop.
