Bonjour à tous et à toutes,

Cette courte histoire m'est venue suite à la lecture du défi n°6 proposé par Rozen2356 que je remercie beaucoup pour son idée. De même, je tiens à remercie également Javier Made True pour l'aide apportée quant à la relecture et à la correction de cette histoire.

Il est bien sûr inutile de rappeler que Harry Potter ne m'appartient pas, il est l'œuvre de JK Rowling.

Je vous souhaite à tous et à toutes une très bonne lecture, n'hésitez pas à me faire part de vos commentaires.


Édité le 12/08/2011


La trouvaille de minuit

Il marchait d'un pas feutré dans les ombres de la ville. Créature de la nuit, maître en ces lieux, il semblait presque voler. La grâce de ses mouvements n'avait d'égal que la légèreté. À son approche, les lumières s'évaporaient, laissant à la lune le soin d'éclairer faiblement les ruelles boueuses. Il pleuvait beaucoup dans ce recoin du globe, mais c'était le climat idéal pour un être comme lui, qui ne craignait du temps ni la pluie ni le froid. Les épais nuages qui s'obstinaient sur cette partie de l'archipel lui rendaient un grand service. On aurait dit que le ciel et lui avaient passé un accord tacite pour se complaire l'un l'autre.

Les rues désertes ne signifiaient pas pour autant que le village fut abandonné. Quand il était de sortie, les humains se terraient à l'abri chez eux, bien souvent alertés par leur instinct de survie pour s'aventurer à l'extérieur. Pourtant, parfois, il advenait qu'une âme éperdue oubliât de prendre garde. Eût-il voulu s'en repentir que sa vie lui était déjà ôtée. Cruauté de la nuit, il était là pour servir la nature ; tout être vivant avait besoin de son prédateur… Et le diable sait à quel point lui-même n'était pas gâté !

Deux ennemis pour lui seul, voilà le prix à payer pour les dons que lui conférait sa nature. L'un se nommait « lycanthrope », bien souvent confondu avec le loup garou, lequel n'était, en réalité, que le produit engendré par la malveillance du premier. Le loup-garou était un humain qui se transformait une fois par mois en loup. Le lycanthrope ne faisait que revêtir une forme humaine pour mieux tromper ses proies et se fondre dans la masse, et donc était tout sauf un être humain. On le rencontrait rarement hors de sa horde. Mais il arrive que des loups s'éloignent de leur meute et partent chasser seuls. Le protagoniste de cette histoire gardait sur lui de profondes et éternelles cicatrices. Il était la proie principale des lycanthropes, la saveur suprême qui les mettait en appétit aussitôt que les loups le sentaient approcher.

Le second ennemi, de loin le plus impitoyable, se nommait "éternité". Coincé entre la vie et la mort, il avait visité toutes les parties du monde. Il connaissait les différentes saveurs de tous les sangs possibles. Il savait comment transpercer la peau de tous types de personnes. Il récitait dans sa tête toutes les proses qu'il avait rencontrées dans ses voyages, toutes les légendes, les récits, les histoires, le passé de chaque contrée, même les plus éloignées, même les plus dangereuses… Il avait fini par s'ennuyer. Le sang, malgré toute sa saveur, demeurait fade dans sa bouche. Il s'en abreuvait seulement lorsqu'il mourrait de faim, si bien qu'on avait fini par l'appeler "Vamp-la-soif ". Il vampirisait sa soif, il la retenait jusqu'à ce qu'il ne supportât plus de sentir sa gorge asséchée et ses membres faner, dépérir, devenir pierre par manque de vitalité…

On le respectait néanmoins pour demeurer en vie. Il faisait partie de la très haute noblesse Vamp de l'Angleterre. Il avait remporté de nombreux titres et de nombreuses victoires dans les guerres intestines ou contre des ennemis plus coriaces tels les centaures, les géants… Mais à présent, tout cela l'ennuyait. Il cessait de se remémorer ces temps heureux. Vamp-la-soif se désespérait de vivre encore une autre éternité dans ce bas monde si ennuyeux.

Ce soir-là, il effectuait une promenade alors que la lune remplaçait le soleil dans le ciel toujours nuageux. Il essuya sa tempe du revers de la main et porta une rare goutte de sueur à son nez. Puis il lécha lentement cette perle salée avant de frissonner. Ce reste de vie lui procurait toujours des tremblements de plaisir. Vamp-la-soif déboutonna quelques boutons de sa chemise en se contemplant devant la vitre d'un magasin. Il se trouvait une mine affreuse, et c'était sans évoquer son teint blanchâtre, comme recouvert d'une fine couche du fond de teint blanc qu'utilisaient les geishas du Japon.

Par habitude, il se dirigea lentement vers le parc du village. Il s'agissait d'un tout petit endroit de verdure et d'arbres, occupé seulement par une pelouse, un terrain de sable où bac-à-sable et balançoire se disputaient la place ainsi que quelques bancs dérisoires, trop petits pour laisser s'asseoir plus de deux personnes à la fois. Mais pour Vamp-la-Soif qui vivait la nuit, le manque de place n'était jamais un problème.

De ses doigts longs et fins, le vampire décala le petit portillon qui servait à retenir les animaux à l'intérieur du parc et pénétra dans le terrain de jeux d'enfants. Il s'assit sur la balançoire, humant l'air goulûment et se balança doucement. L'endroit respirait encore la vie et l'agitation de filles et de garçons de bas âges, la sueur de leur corps tandis qu'ils se fatiguaient à se courir après, à suivre leurs mères, à jouer dans le sable… Une odeur exquise et qui ne se trouvait nulle part ailleurs. Un parfum qui aurait fait céder n'importe quel autre vampire.

Mais Vamp-la-Soif était différent de ses confrères, et c'était peut-être la raison pour laquelle on le respectait autant qu'on l'évitait. Depuis sa première bavure, il s'était juré de ne plus jamais se nourrir d'aucun enfant, seulement d'adultes, en particulier les plus âgés malgré leur goût de sang dépassé. Il prétendait à qui voulait l'entendre que le sang des retraités possédait un goût irremplaçable : le goût de la vie bien menée, bien vécue et passée qu'aucun vampire n'aura jamais connu. Ce sang-là, disait-il, vibrait de souvenirs et de nostalgie. A chaque fois qu'il s'en nourrissait, il inspirait littéralement la vie de sa victime. Le sang gardait en lui la trace immuable de centaines de souvenirs de la personne. Il s'agissait toujours de pans de mémoire, de scènes entrecoupées et marquantes de la vie de la victime, cependant, c'était déjà bien assez pour se faire une idée de son existence, de ses principes, de ses accomplis et de ses remords. Vamp-la-Soif appréciait de savoir quel cœur il allait éteindre. C'était un peu comme s'il partageait un instant sa vie avec lui.

Le crissement que provoquaient ses balancements résonnait dans le silence pesant du village. Ce calme intrigua le vampire qui avait l'habitude d'entendre les maisons vivre et rire, bien qu'à voix basses. Mais ce soir-là, les foyers se tenaient tranquilles, comme s'ils craignaient de troubler quelque chose. Rapidement, Vamp-la-Soif bondit sur ses pieds et se tourna vers les hauts arbustes qui limitaient la partie nord du petit parc. Sans aucun bruit, il s'avança lentement dans cette direction. Il lui avait semblé que, l'espace d'une courte seconde, un hoquet avait retenti. Un hoquet faible et douloureux. Suivi bientôt de battements de cœur, tout aussi faibles. Il pressa le pas sans provoquer aucun son ; l'herbe se pliait à peine sous son poids comme s'il lévitait.

Une fois devant l'épais feuillage, il écouta et plongea ses bras à l'endroit d'où provenaient les sons et écarta les branches. Celles-ci tombèrent à ses côtés comme si elles avaient été coupées ou abîmées. En-dessous d'elles, apparût le corps d'un jeune enfant.