Titre : hors de caractère
Fandom :
Claymore
Paring : IsleyRigald, IsleyPriscilla (implicites)
Rating : PG-13
Warning : Euh, yaoi implicite ?
Interprétation peut-être vaseuse des personnages (j'ai
toujours peur de donner dans l'OOC, avec ma foutue tendance à
rendre des méchants sur-émotifs). Ah, et je n'aime pas
beaucoup Priscilla (et non, pas seulement parce qu'elle s'interpose
entre Rigald et Isley, ça date d'avant même qu'elle ne
s'éveille). Je suppose que ça se sent, encore qu'on
s'en fiche, parce qu'il est peu probable que Rigald la porte dans son
coeur.
Ca ne lui ressemblait tellement pas, cette gentillesse - même
feinte - cette attention. Radicalement opposé à son
caractère. Isley était fort. Le plus fort de tous,
n'est-ce pas ? Il était le premier des Abyssaux, le plus âgé,
le plus malin, le plus expérimenté, le plus dangereux.
Il ne se souçiait jamais des autres, les maniait avec
désinvolture comme autant de pions sur un échiquier
qu'il était le seul à voir, qu'il les flatte avec un
sourire moqueur ou les envoie à l'abattoir.
Rigald les
regarda en silence, lui agenouillé, sans paraître se
préoccuper de son bras en moins, et elle, avec son expression
naïve et infantile, et entendit presque toutes les choses qu'il
avait crues éternelles s'écrouler à cet instant,
avec un long craquement d'os brisé.
Passée la frayeur des premiers jours - le souvenir de la
forme éveillée de Priscilla continuait de lui donner
des sueurs froides - Rigald fut pris d'une terrible envie de rire à
chaque fois qu'il croisait Isley et la morveuse. Bien sûr, ce
rire était intérieur. Son visage restait aussi
dépourvu d'expression qu'un bloc de marbre, et son corps ne
perdait rien de son attitude soumise. Hors de caractère, ça
aussi, mais son caractère, il l'avait joué et perdu le
jour où il avait défié l'Abyssal Isley. Tout ce
qui n'était pas l'obsession qu'il avait pour cet homme s'était
progressivement estompé jusqu'à ce qu'il ne soit plus
que l'ombre de l'orgueilleux numéro 2 des Claymores.
Ou
l'ombre d'Isley. Question de point de vue. Comme si quelque chose
d'aussi futile pouvait encore avoir un sens, à présent.
Retrouver papa et maman. Mettre sa vie en jeu pour ça.
Sans jamais remettre quoi que ce soit en doute. Ne plus la
lâcher d'une semelle, lui parler le premier au lieu d'attendre
pour la mettre mal à l'aise comme il en avait l'habitude.
Il
semblerait que je ne puisse pas y aller en jouant à "attendre
et voir".
Le rire emplit le crâne de Rigald tandis
qu'il regardait Isley parler à Priscilla, de cette voix douce,
avec ce ton attentif et patient, qui lui donnait l'air étrangement
humain. C'était presque comique, de le voir redevenir homme au
moment où il s'apprêtait à tout perdre de
lui-même. Rigald se demanda s'il avait eu l'air si humain, lui
aussi, à ce moment là. Le rire redoubla, ses tempes se
mirent à battre douloureusement. Il s'éloigna à
grandes enjambées. Tout ça lui donnait la nausée.
Et bien sûr, voir Isley s'imaginer, se persuader avec
l'énergie du désespoir qu'il était encore maître
de la situation, étendre cette persuasion à son
entourage avec ses sourires faux n'arrangea rien à son
agacement. Isley ne l'avait probablement pas encore compris, ou bien
se refusait à faire l'analogie - Rigald s'était entêté
à nier, lui aussi, il savait comment ce genre d'idées
se frayerait malgré tout un chemin dans l'esprit de l'Abyssal,
insidieusement, jusqu'à venir à bout de sa résistance.
Le rire cruel résonnait dans son esprit, lui vrillant les
entrailles autant qu'il le réconfortait.
Isley l'Abyssal, numéro un des claymores, avait cessé
d'exister à l'instant où il s'était agenouillé
devant cette fillette. Le reste n'était plus qu'une formalité
: effondrement progressif et inéluctable d'une batisse aux
fondations affaiblies. Rigald seul avait conscience d'assister à
l'anéantissement de celui qui avait été presque
un dieu pour eux tous, dans un silence intérieur entrecoupé
de hurlements moqueurs et de brèves pensées cyniques.
Il tenait enfin la revanche après laquelle il avait couru
pendant tant d'années, avant de jouer et de perdre.
Voir
le responsable de sa déchéance subir le même sort
n'avait rien de réconfortant, en fin de compte, réalisa-t-il
avec un reste d'amertume.
Floué jusqu'au bout.
Le
rire se tut, laissant place à un insupportable sentiment de
vide. D'abandon. Le sourire sur les lèvres de celui qu'il
avait juré de servir lui devint brusquement insupportable,
mais son visage conserva son impassibilité, et il resta
immobile, incapable de cesser de le regarder.
Même
cassé, il t'obsède.
S'il s'appartenait encore,
il se serait mordu la langue pour faire taire cette voix désagréable.
Il ne put que fixer le responsable de tout ce gâchis, dans
l'attente d'une dernière échappatoire qu'il savait ne
jamais venir. Cet homme l'obsédait, et était désormais
obsédé par cette gamine. La seule chose qu'il parvenait
à regretter, c'était qu'elle ait volé sa place
au côté de l'Abyssal, le reléguant au rôle
d'intermédiaire, toujours à courir les terres gelées
du nord, sans jamais voir son obsession plus d'une demi-heure.
Même
pas de colère. Juste cette sensation de vide, et Isley qui
n'avait d'yeux que pour la morveuse.
Enfoiré.
