Bonjour ! Voici une fic qui me tient vraiment très à coeur ! N'hésitez surtout pas à donner votre avis, c'est important pour moi ^^
Mon couple fétiche y est, ça, ça ne change pas de d'habitude, mais je me suis un peu défoulée surles caractères et l'intrigue ! Il y a la musique, aussi, presque troisième personnage principal.
Enfin vous verrez bien ! C'est un peu flou encore, j'espère que vous ne m'en voudrez pas sur cette part de mystère :D
Un immense bisou à Pikanox, qui donne envie d'écrire, plus vite, plus loin, plus long, plus beau... Merci !
Et surtout... Enjoy it ***


Prologue.

La neige, lorsqu'elle tombe, semble couvrir la terre d'un manteau de silence. Je ne peux m'empêcher d'en être violemment oppressé. Elle recouvre, enveloppe, plonge dans l'oubli. L'indifférence.

Sous son apparente pureté, elle est cruelle. Toute cette innocence n'est que tromperie, toute cette clarté n'est que mensonge.

Derrière mes yeux voilés, les blancs et les gris se mêlent. C'est la première fois, depuis longtemps, que le monde est aussi blanc. Pourquoi aujourd'hui ? Pourquoi maintenant ? Je hais la neige. D'un mouvement d'abandon, je me tourne vers mon piano. Le noir attire mon œil, puissant et immuable. J'envie depuis toujours cette tranquillité je suis un fleuve bouillonnant sans cesse, âme perdue et frivole, agitée. Le siège émet un léger soupir. Sous mes larmes, je ne sais plus quoi regarder les blancs, les noirs, se mélangent et se moquent. Je ferme les yeux. Sur les touches glacées, je laisse courir mes doigts. Vite, plus vite encore, pour combler ce silence terrifiant. Les sons qui coulent de mes mains chuchotent à mon âme, elle est là, tout près, dedans ou dehors, je ne sais plus. Et les larmes qui coulent laissent des trainées tièdes sur mes joues qui ne s'effacent pas. Encore plus vite, au bord du gouffre, je veux me perdre et j'y parviens presque.

- Junsu, il est l'heure.

Mes doigts bondissent, ils sont les milles flocons qui recouvrent notre terre de leur empreinte glacée.

- Tu m'entends ?

Mes mains volent, elles sont les yeux vifs des oiseaux auxquels le ciel n'appartient plus.

- Junsu, s'il-te-plait.

Je trébuche, vacille, me rapproche du gouffre. Le son se meurt et mes mains se posent, inertes et ternes, sur mes genoux. Je n'ai pas rouvert les yeux.

Mes tempes me brûlent, je semble n'être que la frustration d'une mélodie longtemps inexprimée. Une mélodie aussi lancinante que douloureuse. Je me lève, nouveau soupir du siège. Un coup d'œil au miroir me renvoie mon reflet de cadavre. Teint de neige, sillons profonds sur les joues à la peau trop fine, reflets bleutés de ma rage sous les yeux noirs bouffis. Je m'écarte, presque violement, me jette dans l'étreinte encore chaude de ma mère. Je tremble.

- Il est l'heure.

La neige, lorsqu'elle tombe, semble vouloir faire taire les pleurs. Paresseuse, elle se moque nonchalante, elle rit de nos malheurs. Alors qu'elle recouvre même les tombes, je ne parviens plus à distinguer ce qui appartient au ciel et ce qui nous appartient encore. Je hais la neige. Elle m'a pris mon père. Derrière mes yeux voilés, au paysage immaculé s'amoncellent les costumes noirs du deuil. Le paysage n'est plus que le sourire, éternel, d'un piano. Mon père est mort. Je vibre de rage, d'incompréhension, de peur et de solitude nouvelle. Ils pleurent tous avec moi, le silence étouffe à peine la voix des vivants. Les marteler. Marteler leur souffrance hypocrite, leur tristesse trompeuse. Je suis le seul à devoir pleurer mon père. Il est le premier et le dernier à avoir ouvert pour moi les portes inconnues de la musique. Celui qui me parlait souvent, lui parlait souvent, nous faisait parler ensemble mon père, moi, le piano tranquille qui nous livrait ses secrets. Les doigts fins, caresses autant qu'autorité, sur ma joue et la sienne. Maîtres d'une beauté insondable. Ils n'ont pas le droit de pleurer !

Le prêtre se tait.

Notre monde s'est écroulé, comme un château de cartes après un coup de vent. Je vais devoir avancer seul, dialoguer seul avec les sons, m'habituer au silence. Je ne serais plus que le seul confident du grand piano noir. Une fois la dernière note jouée, pas de remarques, pas de reproches, pas d'étreintes. Mon père m'écoutait jouer pour m'apaiser ensuite par les mots. Il disait que lorsque mes doigts parcouraient le clavier, on pouvait y lire mon âme, et qu'ainsi mes notes étaient les plus belles du monde. Je ne sais pas lire mon âme, je ne sais pas m'apaiser. Je ne trouve plus les chemins pour me connaître. « Tu dois revenir. Je ne me connais pas assez pour vivre seul, je me fais peur ! Tu dois revenir ! » Qu'ils se taisent, tous. Ils ne savent pas qu'en perdant mon père, je perds en même temps une partie de moi-même. Je me perds moi-même.

Les gens s'avancent, tour à tour. Je n'ai pas bougé. Le temps est comme une flèche. Une fois la cible trouvée, comment remonter vers la lumière ? Tout est oublié déjà, je ne me souviens plus de la vie sans cette plaie affreuse en moi. Son odeur, son rire, les trois rides qui naissaient au creux de ses yeux alors qu'il souriait. Sa voix tranquille, le grain de beauté discret près de sa bouche où j'aimais poser mon doigt. Où sont-ils ? Mais où sont-ils… ?

Ils me regardent. Je suis le seul qui n'a toujours pas bougé. Je reconnais des voisins, des cousins, des gens qui le connaissaient à peine. Ils me dévisagent. Je suis resté seul entre les tombes, encore loin, seul sous la neige qui me glisse entre les doigts. J'aimerais ne pas avoir à avancer, j'aimerais refuser cette mort, j'aimerais continuer à croire à un cauchemar. La tombe est ouverte, une dernière fois. Avant qu'il n'y ait plus que du noir. « Papa, sous terre, ne fait-il pas plus chaud qu'ici ? Je t'imagine encore en train de sourire. Papa, sur terre, comment pourrais-je à nouveau me réchauffer ? » Mes poings sont tellement serrés que je ne les sens plus. Le silence est total, à part mon souffle. Je gémis mais je ne m'entends pas. A peine quelques pas me séparent de la tombe encore ouverte, je me refuse à les faire. Ce serait signer avec la mort. Accepter l'inacceptable. On m'a volé mon père !

- Junsu, il te faudra du courage.

Je n'ai rien vu venir, la main posée sur mon épaule est un viol intolérable. Je hurle :

- Lâche-moi !

Je cours, trébuche, me relève. Le trou est béant, le cercueil posé au fond ridiculement petit. Je refuse à croire mon père à l'intérieur. Pourtant j'y saute, pose mes deux mains sur le bois tiède. Les mains qu'il a engendrées. Les mains qu'il aimait caresser, les mains dont il était fier. Je pleure, jamais je n'ai pleuré au point de ne plus rien voir, mais je lui parle. Pour la dernière fois.

« Écoute, d'où tu es, la voix du piano.

Je reste incapable de me comprendre. Continue à écouter, j'y jouerais pour toi le plus beau des requiem.

Je ne pourrais vivre que comme ça.

Le piano sera ma voix véritable.

Écoute, écoute ! »

Lorsque je remonte parmi les vivants, il a cessé de neiger.