Petite introduction :

L'histoire se passe au temps de Napoléon Ier. Celui-ci sera remplacé par un personnage de Twilight.

J'essaierai de respecter au maximum les termes de l'époque mais pour les lemons à venir, j'utiliserai des termes récents (sans tomber dans la vulgarité).

Si jamais un terme vous échappe, n'hésitez pas à me laisser une review pour que je vous explique.

Le commencement :

La pluie s'était abattue sur le domaine de Selton et sa campagne anglaise. Dans le petit salon, lady Elisabeth Selton buvait une tasse de thé devant le feu qui ronflait dans la cheminée. La vieille dame approchait la quarantaine en cette année 1793. Les nouvelles venant du Royaume de France étaient préoccupantes, pour ne pas dire inquiétantes. Non content d'avoir décapité son roi, le peuple français avait décidé de lyncher l'aristocratie française et d'éliminer jusqu'au dernier partisan de Louis XVI. D'où l'inquiétude de la vieille lady dont la sœur cadette avait épousé un marquis français.

En effet, Renée Selton était tombée sous le charme du marquis Charles d'Asselnat. Les familles des deux jeunes gens avaient trouvé cette union plus que convenable et les fiançailles avaient rapidement été organisées. Le 20 juin 1781, Renée Selton, alors âgée de 17 ans, épousait Charles d'Asselnat, lui-même vieux de 20 ans.

Celui-ci emmena alors son épouse sur ses terres en France, loin de sa sœur aînée Elisabeth qui se retrouvait seule. Celle-ci n'avait point d'époux car un accident de cheval dans sa jeunesse avait considérablement réduit ses chances d'enfanter, tout comme sa mobilité.

Devant ses souvenirs peu agréables, Elisabeth reposa sa tasse, saisit une canne en noyer et se dirigea en boitant vers une bibliothèque présente au fond de la pièce. Ce faisant, elle passa devant le tableau d'une jeune femme. La vielle dame appréciait particulièrement ce tableau. Sa cadette Renée resplendissait dessus, avec ses boucles blondes qui tombaient en cascade autour de son visage en cœur. Ses yeux verts, qu'elle avait en commun avec son mari,étaient encadrés par de longs cils épais et surmontés par de fins sourcils blonds. Ilsétaient rieurs tout comme son expression. Son humeur joyeuse étaient trahie par ses pommettes rouges, symbole de l'hilarité que seule son aînée savait déclencher chez elle, et ses fines lèvres rosées étaient étirées en un beau sourire. Elizabeth se souvenait très bien de quand avait été peint ce tableau.

Flash-back :

Elle avait dix-huit ans et revenait d'une longue promenade avec King, l'étalon favori, et Snowy, le beau berger colley qui avait d'ailleurs encore fait des siennes en pourchassant un pauvre renard. En entrant dans le grand salon dont la magnificence servait à la réception des hôtes, elle avait trouvé sa jeune sœur en train de poser pour un peintre. Alors que celui-ci la priait de rester immobile, Elisabeth se mit à faire des grimaces à Renée. Celle-ci avait en effet l'air d'assister à un enterrement et Elisabeth n'aimait pas voir sa sœur triste.

Devant les pitreries de son aînée, Renée ne put contenir son sourire et éclata de rire. Après s'être fait légèrement réprimandée par le peintre, elle reprit son immobilité, les traces de son hilarité persistant sur son visage.

Elisabeth était contente. Elle avait fait rire sa sœur de quinze ans

Fin du flash-back :

De cette belle époque, il ne restait rien. En effet un an plus tard, Elisabeth avait un accident. Finies les longues chevauchées dans la belle campagne anglaise qui vous laissait haletante et décoiffées tandis que King continuait de galoper toujours plus vite, finies les promenades dans la belle roseraie du manoir où l'on pouvaient observer toutes sortes d'oiseaux, finis les défilés où elle et sa sœur se parait de leurs plus beaux atouts et se prenaient pour des princesses en rêvant du beau prince charmant, finies les baignades dans la rivière de Selton dont les tourbillons pouvaient se montrer traîtres… Sa belle liberté et la vie sauvage qu'elle menait lui avaient été ôtées, remplacées par une canne. Le feu follet s'était éteint et s'était plongé dans les livres, pâles reflets de la vie qu'elle menait auparavant.

Deux ans plus tard, Renée épousait Charles, la laissant plus seule que jamais. Avec Renée elle perdait l'amie, la confidente, la compagne de jeu… Pour cela, elle avait maudit Charles qui lui volait sa sœur. Toutefois il rendait sa sœur heureuse et elle lui en était reconnaissante. Elisabeth aurait juste préféré que le couple reste au manoir de Selton dont elle était devenue l'unique propriétaire après la mort de son père, emporté par une maladie.

Avec un soupir, la vielle lady attrapa un livre au hasard dans sa bibliothèque et retourna s'asseoir dans son fauteuil. Alors qu'elle avait entamé sa lecture, une vieille domestique apparu dans la pièce.

« -Veuillez m'excuser lady Selton, mais un voyageur vient d'arriver et demande une rencontre. Il s'est introduit comme l'abbé de Chastenay.

-Faites-le entrer Mary et guider le jusqu'ici.

-Bien Milady, répondit la servante en se retirant. »

L'abbé de Chastenay. Ces mots provoquèrent différentes réactions chez Elisabeth Selton. La première était l'hostilité. En bonne anglaise, la lady avait été élevée dans le culte du protestantisme et était une fervente pratiquante. Or l'abbé était catholique ce qui dérangeait la lady au plus haut point.

La deuxième réaction était la joie. En effet, l'abbé de Chastenay se trouvait être le frère de Charles d'Asselnat. Elisabeth l'avait rencontré au mariage de sa sœur. De par leur religion opposée s'était ensuivies une vive dispute qui avait ravi la lady. Son accident l'avait rendue assez aigrie et elle adorait la distraction que lui procurait une discussion animée. Elle avait d'ailleurs été à l'origine de plusieurs esclandres dans ce mariage.

La troisième réaction était l'inquiétude. Pourquoi l'abbé venait-il lui rendre visite ? Ils n'étaient pas d'excellents amis et ne s'était vu qu'une fois.

L'entrée d'un homme dans le petit salon coupa ses interrogations. Lady Selton détailla le nouveau venu. L'abbé de Chastenay n'avait guère changé. Il était toujours aussi maigre que vingt ans plus tôt. Seules quelques rides étaient venues prouver qu'il n'était plus tout jeune et ses traits tirés montraient sa fatigue. Ses yeux bruns exprimaient une grande lassitude et son long manteau noir trempé et couvert de poussière confessait la dureté de son voyage.

« -Et bien, quelle surprise !! Je ne m'attendais guère à vous voir, abbé, le salua lady Selton.

-Mes hommages Milady. Je n'étais, moi non plus, préparé à vous revoir mais certaines circonstances font de ces retrouvailles une nécessité.

-Avant de me conter les raisons de votre venue, donnez donc vos effets à Mary, répondit Elisabeth en désignant la domestique qui avait précédé son visiteur. Et Mary, veuillez nous apporter deux tasses de thé ainsi qu'une bouteille de cognac. Cela réchauffera notre ami. Que diable tenez vous là ? » Continua la vielle lady alors que la domestique emportait le manteau de l'abbé.

Celui-ci, dont les bras auparavant cachés par sa cape de voyage étaient à présent visibles, tenait un paquet entouré d'une couverture dans ces bras. On pouvait apercevoir de légers mouvements qui provenaient de ce paquet.

« -Ceci est la principale raison de ma venue,répondit l'abbé. Mais avant de tout vous raconter toute l'histoire, puis-je…, fit-il en désignant un fauteuil.

-Bien entendu », répondit lady Selton en prenant elle-même place face à l'homme alors que Mary déposait un plateau contenant deux tasses, une théière et une bouteille de cognac sur la table qui séparait les deux personnes.

La domestique versa le thé et rajouta quelques gouttes de cognac dans chaque tasse avant de se retirer.

Après avoir bu quelques gorgées, Elisabeth, dont la patience n'était pas la principale vertu, demanda :

« -Alors ? Que venez vous faire ici ?

-J'imagine que vous êtes en parfaite connaissance des évènements qui secouent la France depuis peu ? répondit l'abbé.

-Bien évidemment, qui n'est pas au courant?

-Et bien c'est en partie à cause de ces évènements que je suis ici, dit l'abbé. Vous n'êtes pas sans ignorer que le roi Louis XVI a été guillotine et que le peuple français réserve le même sort à tous ses partisans. Malheureusement votre sœur ainsi que mon frère ont toujours été d'ardents défenseurs de feu sa majesté.

-Serait-il possible qu'ils aient été… l'interrompit la vielle lady qui semblait être en état de choc en regardant l'abbé avec l'espoir qu'il démentisse cette possibilité.

-Hélas oui, approuva l'homme. J'étais là et ai assisté à toute la scène. La foule est venue les chercher à l'hôtel* que possédait mon frère à Paris. Lui et sa femme y avait élu résidence depuis une dizaine d'années. Il était de notoriété publique que Charles et son épouse étaient profondément attachés à notre souverain étant donné qu'ils l'avaient défendu lors du procès de ce dernier.

La population a abattu leurs portes et saccagé leur hôtel. Puis elle les a mené jusqu'au palais de Justice où leur a été intenté un procès. Ils ont été condamnés pour traîtrise et attentat envers la République. Le jury les a condamnés à mort, à moins qu'ils ne renient Louis XVI. Même s'il était mort, Charles gardait fidélité à son roi. Votre sœur Renée a pris la même décision. Une heure plus tard, la tête du marquis d'Asselnat tombait, suivie par celle de sa fidèle épouse.

J'ai réussi à récupérer le médaillon de cette dernière. J'ai pensé qu'il vous revenait de droit »,conclut l'abbé en tirant un médaillon de sa poche.

Les larmes coulèrent sur les joues d'Elisabeth Selton quand elle saisit le médaillon. Celui-ci était en or et renfermait une mèche dorée. C'était tout ce qu'il restait de Renée Selton, la sœur tant chérie et aimée. Malgré la mort de cette dernière, Elisabeth ne pouvait s'empêcher d'être fière de sa sœur. Elle avait suivi ses convictions et son mari jusqu'à l'échafaud, faisant ainsi honneur à la fierté et au courage des deux familles.

Un instant de silence suivit où la vielle femme se recueillit et pria pour le salut de l'âme de sa sœur et de son mari.

« -Je vous suis infiniment reconnaissante, abbé, le remercia Elisabeth. Ce souvenir sera longtemps chéri. Toutefois, j'imagine que vous n'avez pas fait un tel voyage seulement pour me remettre un médaillon, n'est-ce pas ?

-En effet Milady, répondit l'abbé de Chastenay. Il se trouve que ce médaillon n'est pas le seul souvenir de Renée et de Charles d'Asselnat. Le couple avait eu un enfant.

-Un enfant ? Sursauta la vieille lady. Est-ce lui que vous tenez dans vos bras ? »

Pour toute réponse, l'abbé opina de la tête et lui tendit le paquet qu'il tenait dans les bras. Elisabeth saisit le bébé avec d'infinies précautions et le blottit contre sa poitrine sans réveiller le nourrisson. C'était une fille. On voyait en elle son père à travers les boucles brunes et la forme volontaire de sa mâchoire. Sa mère était représentée par les longs cils fournis, ainsi que le teint de craie. Elisabeth reconnaissait même son propre nez fin et délicat, la seule chose qu'elle avait aimé chez elle. Elle voyait aussi la finesse des mains que l'enfant avait héritée de son oncle l'abbé.

La seule héritière des Selton et des Asselnat avait pris les plus beaux traits de chaque famille.

L'émotion nouait la gorge de la vieille lady et se fut l'abbé qui reprit la parole après un long silence.

« -Je l'ai trouvée dans l'hôtel, dit-il doucement. Charles et sa femme étaient des personnes prévoyantes et ont fit construire une alcôve attenant à leur chambre. Il était impossible de la trouver pour qui ne savait pas qu'il y avait une pièce là. Charles me l'avait montré en me disant que c'est là qu'il cacherait son enfant si un malheur venait à leur arriver, à lui et à sa femme. Ils se savaient en danger de par leurs convictions politiques et étaient sur le qui-vive.

Je me suis glissé dans les ruines de l'hôtel juste après que les Asselnat soient escortés par la foule au palais de Justice.

J'ai traversé l'hôtel dévasté en prenant bien garde d'être le plus discret possible et ai trouvé l'enfant dans l'alcôve.

Après avoir assisté à l'exécution de ses parents et récupérer le médaillon de sa mère, j'ai pris un cheval et galopé jusqu'à Calais où j'ai embarqué pour votre royaume. La petite a beaucoup aimé la traversée, ajouta l'abbé en souriant. J'ai débarqué à Douves et de là, j'ai rejoins votre domaine.

J'espérais que vous accepteriez d'élever cet enfant. Bien que l'envie soit là, je ne peux la prendre en charge, l'évêque m'envoie perpétuellement par monts et par vaux. Ce n'est pas une vie stable pour cette demoiselle et je pensais qu'à Selton, elle grandirait heureuse, si toutefois vous acceptez sa charge ? »

Elisabeth garda le silence, réfléchissant.

Il était de notoriété publique qu'Elisabeth Selton était une grande solitaire. Elle ne supportait guère la compagnie des gens, préférant celle de ses livres. Elle n'avait de contacts amicaux qu'avec Mary, sa domestique, et Jack, le chef des écuries du domaine.

Toutefois, malgré son attrait pour la solitude, elle ressentait un manque depuis le départ de sa sœur. Elisabeth était née avec un besoin désespéré. Celui d'aimer. Ce besoin avait été projeté dès son enfance sur sa famille et plus particulièrement sur sa sœur. Une fois celle-ci mariée et leur père mort, la lady s'était retrouvée seule. Peut être que si elle s'était mariée les choses auraient été différentes. Peut-être qu'elle aurait été plus heureuse, plus comblée que maintenant. Mais personne n'était venu demander sa main et Elisabeth Selton s'était retrouvée seule, sans famille, sans personne.

Ce bébé, c'était sa chance. Elisabeth l'avait aimé depuis que ses yeux s'étaient posés sur ce visage angélique. Elle allait élever ce bébé, l'éduquer, lui faire connaître toutes les joies de son enfance comme sa passion des chevaux et des chiens, la natation, les romans… Cette petite orpheline allait devenir sa famille et elle-même serait la famille ce petit ange venu la tirer de sa perpétuelle solitude.

Alors, à la question de si elle acceptait ce bébé, Elisabeth répondit par une autre question :

« -Comment s'appelle t-elle ?

-Isabella, répondit l'abbé de Chastenay dans un souffle. Isabella d'Asselnat, en l'honneur du sang italien qui coule dans les veines de tous les Asselnat. Renée tenait aussi à ce que le prénom de sa fille soit un reflet du votre. »

Devant cette ultime confession, une larme s'échappa des yeux d'Elisabeth. Elisabeth. Isabe. Isabella.

« -Bienvenue à Selton, Isabella d'Asselnat Selton, marquise d'Asselnat et lady Selton. »

Doucement, la vielle lady passa le médaillon qu'elle avait gardé dans sa main autour du fragile coup de l'enfant. A ce contact, Isabella ouvrit les yeux. Des yeux d'un vert infini. Les yeux de ses parents.

* Un hôtel était la demeure des nobles de l'époque On en trouvait surtout à Paris Ces grandes maisons s'élevaient sur environ trois étages et possédaient généralement une cour d'entrée où s'arrêtaient carrosses ainsi qu'un jardin de fleurs à l'arrière de la maison.