Alors comment vous expliquer ? Je vous propose le premier chapitre d'une nouvelle fic durement arrachée à mon inspiration boiteuse depuis plusieurs mois. Il s'agit d'un défi que je me lance avec un pairing totalement inédit : un YoshikiXJin ! Jin qui ? Jin des Kat tun bien sûr !

J'entends déjà les cris d'incrédulité voir de réprobation peut-être ? ^^'' Qui ne tente rien à rien et puis ça m'amuse de faire ce couple hautement improbable. Mon but ? Le rendre crédible à vos yeux et construire une fic sympa dessus. Une fic expérimentale donc, c'est dire si vos avis vont être importants pour que je sache où je vais car je sors d'un sacré passage à vide au niveau de l'écriture et je ne sais plus trop de quoi je suis capable ( Petit mot à Marluuna : j'espère que je ne t'aurais pas fait attendre pour rien ! ^^)

Je précise également que je suis en pleine période de concours et que la suite risque d'être longue à venir.

Bon j'arrête de blablater et je vous laisse découvrir !

Jin sortait tout juste de chez le tatoueur où il venait de s'offrir une petite folie, douloureusement gravée dans la peau tendre de son aine. Lunettes de soleil sur le nez, capuche de survêtement sur la tête et mains dans les poches, il souriait de l'air satisfait de quelqu'un qui vient de faire une bêtise et qui en est ravi.

Les tatouages et les pierçing n'étaient pas bien vus au sein de la Johnny's. Il avait dû enlever celui qu'il portait autrefois au nombril mais depuis qu'il était à Los Angeles, sans le Grand Manitou pour surveiller ses moins faits et gestes, il envoyait promener son obéissance.

Les Etats-Unis lui donnaient des illusions d'indépendance. Pas étonnant qu'il ait toujours voulu revenir. Il était si bien ici qu'il se demandait parfois s'il ne s'était pas trompé de pays à la naissance.

Il était là depuis une quinzaine de jours parce qu'il donnait une série de concerts solos dans un petit club de la ville. C'était quelque chose de modeste mais il le vivait comme la chance de sa vie ! Si ça marchait bien, on lui ferait peut-être d'autres propositions ? Son rêve le plus fou avait toujours été de percer de l'autre côté du Pacifique et ici, au pays de tous les possibles, il se croyait déjà au commencement de son American Dream.

C'était la fin de la journée. Il rejoignit chez Pizza Hut deux amis qu'il s'était fait lors de son premier séjour linguistique et qu'il avait eu la joie de retrouver.

Ils étaient déjà là lorsqu'il entra. Il y avait Joey, un natif de Los Angeles qui travaillait comme technicien pour une maison de disques. Avec Jin, ils étaient comme cul et chemise. C'était son meilleur ami étranger en quelque sorte, l'autre étant évidemment son cher Yamapi qui lui manquait beaucoup. Quelles bêtises n'auraient-ils pas faites tous les deux s'il avait pu venir ?

L'autre c'était Dune. Un nom original pour une bien jolie fille même s'il n'y avait rien de vraiment ambigu entre eux. Elle était d'origine haïtienne et elle avait été malheureusement frappée de plein fouet par le terrible tremblement de terre qui s'était produit quelques mois auparavant. En visite dans sa famille, elle était dehors au moment où la catastrophe avait eu lieu. Mais la maison s'était effondrée sur ses parents.

Comme elle n'avait eu aucun moyen de donner des nouvelles à cause de la coupure des communications, Jin n'avait su que très tard ce qui lui était arrivé. Dune était ensuite revenue à Los Angeles où elle travaillait comme infirmière au Cedar Sinaï. En la revoyant, Jin s'était demandé comme agir. En parler ou pas ? Faire comme s'il ne s'était rien passé ou la consoler d'emblée ? Dune avait semblé vouloir tout garder en elle. Et puis un soir, elle avait craqué. Elle avait pleuré pendant des heures en lui racontant le cauchemar qu'elle avait vécu là-bas.

Après ce soir, Dune n'avait plus jamais reparlé de Haïti et avait renfermé son chagrin à l'intérieur d'elle. Ses amis évitaient soigneusement le sujet sensible et ne montraient aucun signe de pitié envers elle pour éviter de rouvrir ses blessures. Ce qui n'empêchait pas Jin de la chouchouter mine de rien comme une petite sœur.

Il s'assit avec eux sur la banquette en moleskine du restaurant :

- Vous avez commandé quoi ?

- La géante jambon et bœuf avec un max de fromage ! répondit Joey sachant que c'était la préférée de Jin.

Dune achevait d'arranger l'une de ses très nombreuses tresses et demanda :

- Alors ça fait mal le tatouage ?

- Ouais, surtout à l'aine, répondit Jin avec une petite grimace. J'ai vu passer les minutes les unes après les autres…mais je crois que le résultat en vaut la peine.

- Montre ! s'écria Dune qui attrapa le bord de son baggy et tira dessus ce qui fit faire un bond à Jin :

- Au secours, elle me viole !

- T'aimerais bien hein ?

- J'avoue !

- Crétin !

Jin se rajusta, sa pudeur sauvée (le tatouage descendait quand même obscènement bas !) et lança :

- De toute façon, tu ne peux encore rien voir parce qu'il y a un pansement dessus ! C'est tout rouge et gonflé pour l'instant, ça ira mieux dans quelques jours.

Les yeux de Dune brillèrent malicieusement :

- Tout rouge et gonflé ? Je te fais tant d'effet que ça ?

Les joues de Jin rosirent- les allusions sexuelles aussi crues étaient monnaie courant chez ses amis Américains mais en tant que Japonais, il n'était pas encore parfaitement à l'aise avec ! Joey lui éclata de rire et faillit recracher son Coca :

- Ca va Dune, t'es en manque ou quoi ?

- J'aime bien choquer de temps en temps notre petit Jap national ! répondit Dune en pinçant les joues de Jin.

Les joutes verbales avec elle ou Joey faisaient partie des moments que Jin appréciait le plus.

La pizza fut apportée.

- Y'a à manger pour dix là-dedans ! s'écria Dune.

- Ben le compte y est, dit Joey. Toi, moi et Jin qui mange comme huit !

- Oh ça va hein ! J'ai besoin d'énergie pour mon spectacle de toute façon !

- M'est avis que ça ne suffit pas à dépenser tout ce que tu ingurgites ! Fais gaffe, la dernière fois t'es rentré au Japon avec un petit ventre et ils t'ont chambré pour ça.

Jin fit la moue, désagréablement ramené au souvenir d'un Johnny qui lui conseillait fortement de faire du sport et de se mettre au régime sec. Il avait une image à tenir enfin ! Et ça avait été sans compter cette grande courge écervelée de Junno qui avait cru bon de lui donner l'adresse du diététicien de sa mère !

Ils attaquèrent l'énorme pizza et Dune dit soudain :

- J'ai lu que les Kat Tun allaient faire une tournée asiatique ?

- Ouais ! répondit Jin avec la bouche pleine.

- Sans toi ?

- Bien obligés.

- T'as pas les boules de manquer ça ?

- Un peu mais je n'ai vraiment pas à me plaindre. Ce qui me chiffonne beaucoup plus, c'est que j'ai l'impression de les avoir encore abandonnés. Ca m'énerve…ça me culpabilise d'être ici à m'amuser.

- C'est ton boss qui t'as permis de venir ici non ? intervint Joey. Alors il assume maintenant ! T'inquiète pas, je suis sûr que tes potes ne t'en veulent pas et qu'ils s'en sortent bien sans toi.

Joey ne connaissait quasiment rien à la carrière artistique de Jin au Japon ce qui était compréhensible pour un fan de métal, pas tellement attiré par les groupes de minets ! Dune en savait davantage et elle lui avait montré le clip de Going que le groupe avait enregistré sans lui. En y repensant, Jin se demandait si c'était son départ qui avait donné lieu à un clip aussi désolant. Il se serait cru revenu à leurs débuts !

- Bon j'ai pas de spectacle ce soir, on va en boîte ?

- Ah désolée sans moi, je suis de garde à l'hôpital, répondit Dune.

- Moi j'ai une soirée…dit Joey avec un gros soupir.

- Ca n'a pas l'air de t'enchanter…remarqua Jin.

- J'ai la flemme d'y aller mais je ne peux pas annuler maintenant. Il y aura plein de gens de mon boulot. Je m'entends très bien avec eux mais bon, je les vois tous les jours quoi…

- Je te comprends. Avec mon groupe, les disputes éclatent le plus souvent quand on est en tournée et obligés de vivre ensemble sans arrêt.

- Tu n'as qu'à venir avec moi si t'as rien à faire !

- Je ne vais pas déranger ?

- Pas du tout ! Les autres aussi ramèneront sûrement des renforts. On fête l'anniversaire d'une de nos chanteuses. On a réservé un coin sympa rien que pour nous. Tu ne t'ennuieras pas et je m'amuserai plus si tu es là.

Jin ne voyait pas de raison de refuser. Le fait qu'il ne connaisse personne d'autre à cette soirée ne le dérangeait pas outre mesure. Il n'était pas timide, il se liait facilement et ne demandait qu'à faire de nouvelles connaissances. Il accepta donc de venir. Joey viendrait le chercher chez lui avec sa nouvelle Triumph sur laquelle Jin rêvait de monter.

Quatre ou cinq heures plus tard, Jin se déhanchait sur une piste de danse avec Joey et les nouveaux copains et copines qu'il n'avait pas tardé à se faire.

C'était la soirée parfaite à ses yeux : musique, alcool, bonne bouffe et ambiance conviviale à souhait. Il y avait à peu près une trentaine de personne réunies pour faire la fête dans le bar-restaurant spécialement réservé à cet effet. Jin était l'un des plus jeunes du groupe.

Il y avait tous les collègues de Joey de chez Extasy Records et Jin avait appris avec surprise que toutes les filles présentes étaient des chanteuses qui bossaient sur le même projet appelé Violet UK. Il les trouvait toutes belles au point de ne plus savoir laquelle draguer !

Comme cela arrive souvent, la plupart des hommes étaient assis en train de boire et les filles étaient sur la piste. Jin se trouvait donc comme un petit roi à se déhancher sous les sourires ravies de ces demoiselles.

- Tu danses bien pour un mec ! s'écria une charmante blondinette du nom de Mary à qui Jin offrit son plus beau sourire.

- Ca fait partie de mon métier ! Je suis chanteur et danseur.

- Tu n'es pas d'ici n'est-ce pas ?

- Non je suis Japonais ! Je suis là pour quelques mois.

Artiste et étranger, ces deux composantes étaient assez efficaces pour se faire de nouveaux amis et plus si affinités parce que ça aiguisait la curiosité. Le plaisir de Jin fut à son paroxysme quand il entendit le début de Boom Boom Boom des Black Eyed Peas. Oh yeah…il l'avait dans la peau ce morceau-là !

Pris dans l'ambiance, il ignorait qu'il manquait un invité. Et lorsque celui-ci arriva enfin, toute l'assemblée l'accueillit avec un grand « Aaaaaaah… » parce qu'on se demandait s'il finirait par venir.

Jin était toujours en train de danser et jeta un coup d'œil machinal derrière lui pour voir qui était arrivé et il lui fallut quelques secondes pour resituer le personnage.

Stupéfait, il chercha et attrapa Joey qui ne s'éloignait pas du buffet :

- Joey…me dit pas que ton boss c'est Yoshiki Hayashi !

- Ben si, un compatriote à toi !

- C'est surtout la plus grande superstar du Japon idiot ! T'aurais pu me le dire ! Je ne savais pas que ta boîte lui appartenait.

- Quoi t'aurais eu besoin de te préparer mentalement ? répliqua Joey en riant. Maintenant que tu l'as sous le nez, tu vas pouvoir lui demander un autographe si ça te dit.

- Non, répondit Jin en faisant la moue. Je suis pas fan, ça ferait vraiment hypocrite. Mais bon, il est assez incontournable, c'est pour ça que je sais qui il est.

Ce n'était pas du tout son genre d'aller jouer les groupies et surtout pas durant une soirée comme celle-ci, il aurait eu l'air parfaitement idiot. Il resta près de Joey et observa le nouveau venu avec curiosité, sachant pertinemment que des millions de fans au Japon tueraient pour être à sa place.

La première chose qui lui vint à l'esprit, c'était que Yoshiki était plus petit qu'il ne l'aurait cru et pour un mec qui tapait si fort, il semblait fluet voir…carrément fragile dans son jean et son blouson cintré qui ne cachait pas la minceur de ses épaules. Il avait des lunettes de soleil alors qu'on était en pleine nuit et ses cheveux blonds lui tombaient sur les épaules. Il s'excusait de son retard auprès de la reine de la soirée avec un sourire timide.

- Je ne le voyais pas comme ça, confie-t-il à Joey. J'ai jamais fait trop gaffe à ses apparitions à la télé mais je le croyais plus…plus impressionnant vu sa carrière et son statut.

- Il n'est pas le même sur scène et dans la vrai vie, expliqua Joey. On sent que c'est un mec qui a les nerfs assez fragiles. Et alors quand il pique une crise de colère, t'as intérêt à ne pas te trouver là !

Jin ne chercha pas à en savoir plus et se mit à siroter sa vodka orange d'un air indifférent. Mais il ne pouvait pas s'empêcher de jeter de temps à autre un œil vers Yoshiki car il était difficile d'occulter la présence d'une aussi grande star !

Tard dans la nuit, quand tout le monde eut bien mangé et surtout bien bu et que les danseurs eurent trop mal aux pieds pour continuer, l'endroit tomba dans cette vague léthargie qui annonce les fins de soirées.

Yoshiki n'avait pas tardé à repérer le piano placé au fond du bar et s'y était installé. Il jouait depuis plusieurs minutes un air doux et jazzy, très adapté aux lieux. Jin, qui commençait à accuser la fatigue, l'écoutait en rêvassant. Il aimait finir la nuit dans cet état-là, c'était le signe qu'il s'était bien amusé.

Yoshiki lui avait essayé de s'amuser comme les autres mais le cœur n'y avait pas été. Il avait du mal à se laisser aller en ce moment, trop préoccupé par la tonne de problèmes qui lui était tombé sur le dos.

En parlant de dos…

Il grimaça et cessa de jouer pour s'étirer un peu. Sa nuque récemment opérée et sa colonne vertébrale lui faisaient mal quand il restait trop longtemps penché sur son clavier. Il avait pris une mauvaise habitude en se tenant le dos courbé et il le payait cher à présent. Ces douleurs chroniques affectaient terriblement son moral parce qu'elles lui rappelaient qu'il vieillissait. Il fallait ajouter par-dessus ça que sa copine était partie, que X-Japan piétinait, son inspiration aussi… S'il lui avait fallu placer sur une échelle de 1 à 10, l'estime qu'il avait de lui-même en ce moment, la note n'aurait sûrement pas dépassé 5 ! Un vieux beau ringard et perclus de douleurs, c'était ainsi qu'il allait finir si ça continuait…

Oh arrête un peu de te morfondre ! Je suis dans la merde moi aussi mais je me bouge ! Allez secoue-toi, la vieillesse ça commence dans la tête !

La voix de sa conscience…non la voix de Toshi. Allez savoir pourquoi son esprit l'avait choisi lui pour lui servir de « petite voix ». Il le fréquentait trop décidemment… Le plus drôle était que Toshi était justement chez lui parce qu'ils travaillaient sur le nouvel album. Il avait eu la flemme de venir à la soirée et devait dormir depuis longtemps.

- Yoshiki-san ? Une cigarette ?

Il lui fallut trois secondes pour réaliser qu'on lui parlait en japonais. Il leva la tête et aperçut un jeune homme, manifestement légèrement éméché et fatigué qui lui tendait un paquet de cigarettes. Il en prit une :

- Merci, dit-il en l'allumant, je vois que nous sommes des compatriotes.

- Oui, je m'appelle Jin, je travaille pour la Johnny's Jimusho.

Pourquoi Jin était-il venu lui parler ? Il n'en savait rien ! Il s'était levé pour s'en aller et en passant à côté de lui, il lui avait adressé la parole.

De son côté, Yoshiki savait bien ce qu'était la Johnny's et il ne la tenait pas en très haute estime pour ne pas dire qu'il la méprisait totalement ! Lui, rockeur et compositeur classique qui s'était fait tout seul, qui s'était hissé au sommet à la seule force de son talent ne pouvait pas voir d'un bon œil ces boys band préfabriqués aux chansons mielleuses, uniquement taillés pour faire fantasmer quelques pisseuses à peine pubères ! Avec ma mine de petit minet, celui-là avait tout à fait la tête de l'emploi !

Il retint un sourire ironique. Allez, ce gamin ne méritait pas qu'il se montre désagréable.

- Vous connaissez Sonia ?

C'était la fille dont on avait fêté l'anniversaire.

- Pas du tout, avoua Jin. Je suis un ami de Joey qui travaille chez vous.

- Ah d'accord ! Vous faites partie de quel groupe ?

- De Kat Tun.

Ah oui…à chaque fois qu'il allait au Japon, il tombait soit sur une pub, soit sur une émission de télé avec eux.

Jin finit par s'asseoir sur le piano, ayant totalement oublié qu'il avait voulu partir. Il ne se passa rien d'intéressant pourtant. Yoshiki n'était pas très loquace, il fumait sans dire grand-chose, le regard perdu vers on-ne-savait quelle pensée.

Quelques minutes plus tard, Joey vint se pendre à son cou en titubant :

- Je suis bourré et épuisé…Tu vas conduire la moto à ma place.

- Hein ? T'abuses Joey ! Ta moto est trop puissante pour moi et je n'ai même pas mes papiers ! En plus j'ai bu moi aussi !

- C'est pas grave, je vous ramène, proposa Yoshiki en se levant. Seulement j'espère que vous retrouverez la moto là où vous l'avez laissée !

- Cool merci Yoshiki !

Joey fit un clin d'œil à Jin et murmura pendant que Yoshiki allait chercher ses clefs :

- Un tour en Lamborghini mon vieux !

C'était une chance mais Jin ne put s'empêcher de se sentir un peu gêné lorsqu'il se retrouva assis à côté de Yoshiki sur un siège recouvert de cuir noir dans une voiture qui devait coûter deux ans de salaire à la Johnny's.

- C'est fou, on se croirait dans la Batmobile !

Pris d'une inquiétude soudaine, il se retourna vers Joey :

- Hé ! T'as pas envie de vomir au moins ?

- T'inquiète si c'est le cas, je sauterai en marche plutôt que d'abîmer cette merveille ! Hein Yoshiki ?

- Ou tu paieras le nettoyage, ce sera moins dangereux, répondit Yoshiki pince-sans-rire.

- Pour mes finances c'est pas sûr !

La voiture était étonnamment silencieuse pour sa taille et adhérait si bien à la route qu'elle avait l'air d'y glisser. De plus en plus somnolent, Jin se laissa aller sur son siège en regardant les lumières de la ville. Au bout d'un moment, il jeta un coup d'œil par-dessus son siège :

- Bon, ça dort derrière…dit-il en japonais.

A Yoshiki qui devait conduire en mode automatique tellement il avait l'air ailleurs :

- Si vous vous posez la question, je sais qui vous êtes.

- Pourquoi tu me dis ça ? Je ne m'attends pas à ce que chaque Japonais que je rencontre soit fan de moi.

- Ben je sais pas…je me disais que si j'étais à votre place, je me demanderai si le type à côté de moi sait qui je suis. Pas de façon vaniteuse mais quand même…vous êtes une sacrée pointure dans le milieu !

Yoshiki se mit à lisser avec deux doigts la petite mèche qui lui tombait sur les yeux. C'était un tic qu'il avait souvent.

- Dans ce cas, je suis content que tu ne sois pas devenu hystérique ou que tu sois resté paralysé devant moi. Ca me change…

- C'est normal, je ne suis pas fan de vous ! lâcha Jin qui regretta aussitôt ses mots.

La franchise c'est bien mais il fallait quand même qu'il apprenne à se taire parfois…

Il essaya maladroitement de se rattraper :

- Enfin j'veux pas dire que c'est pas bien ce que vous faites ! C'est juste que…

A sa grande surprise, Yoshiki se mit à rire :

- Arrête, je te dis que je m'en fiche ! Je rencontre suffisamment de flatteurs pour apprécier autre chose de temps en temps. Et toi, tu dois avoir suffisamment de filles accrochées à tes basques pour ne pas te vexer si moi je te dis que j'ai jamais aimé le concept de la Johnny's.

- Ca ne me surprend pas, répondit Jin en haussant les épaules. A la base, c'est vrai que nous sommes des « boys band » et formés pour un certain but. Et je vous avoue que, moi-même, je me demande comment j'ai pu chanter certaines chansons.

Là c'était le Jin de vingt-cinq ans qui parlait du haut de l'expérience qu'il avait acquise depuis ses débuts. Il abaissa un peu sa vitre pour sentir l'air du dehors lui fouetter le visage avant de reprendre d'un ton léger :

- Maintenant que nous avons posé les bases de notre non-admiration commune, nous pouvons continuer à discuter !

Yoshiki pouffa de rire :

- Comment tu dis ça !

- Ben quoi ? répondit Jin en souriant de toutes ses dents. Je vous préviens, j'ai la mauvaise manie de parler avant de réfléchir !

- J'en prends note. Et je commence par une question qui ne demande pas trop de réflexion : qu'est-ce que tu fais à Los Angeles ?

- Je suis en tournée ! Ma première tournée solo ! Et j'ai de bonnes chances de faire d'autres villes des Etats-Unis après.

- Ah tiens…je croyais que ton agence répugnait à envoyer ses poulains à l'étranger !

- C'est un peu ça mais moi j'ai eu de la chance. J'ai toujours été attiré par les Etats-Unis. Il y a quelques temps, j'ai même réussi à partir une première fois pour venir ici apprendre l'anglais.

Le sourire de Jin se teinta d'une légère ironie :

- Au fond, ils sont bien contents d'avoir sous la main un mec qui parle et chante en anglais correctement ! C'est bien beau de vouloir introduire des paroles en anglais pour faire cool mais si c'est pour les prononcer comme des vaches espagnoles c'est pas la peine !

Yoshiki ne pouvait qu'approuver, lui qui était trilingue parce qu'en plus de l'anglais, il s'était mis au français depuis quelques années. Par le passé, il s'était querellé un nombre incalculable de fois avec Toshi à propos de son accent anglais. A présent, il était en train d'essayer de lui apprendre un peu de français pour le cas où ils arriveraient enfin à faire un concert à Paris. Son pauvre chanteur avait encore plus de mal avec cette langue-là !

- Qu'est-ce que tu écoutes comme musique ? demanda Yoshiki qui se demandait s'il allait lui sortir les niaiseries pop à la mode au Japon.

- Justin Timberlake, Michael Jackson, les Black Eyed Peas…, lista Jin.

- Tu sais que j'ai connu Michael Jackson ?

- Sérieux ?

- Pas très intimement mais on se croisait parfois. C'était un mec vraiment gentil, pas du tout comme l'ont décrit les journalistes.

- J'ai été un peu influencé par lui. A la Johnny's, on nous montrait parfois des vidéos de lui en cours de danse.

- En même temps, t'es fan de Timberlake qui est l'un de ses disciples. Tu t'inscris dans une vaste filiation !

Un grognement à l'arrière les interrompit.

- Ca va Joey ? demanda Jin.

- Sommeil…

- Bon il est HS là ! On y est presque Yoshiki-san, c'est juste à droite. J'espère qu'on ne vous a pas fait faire un détour trop grand.

- Mais non ça va, je n'ai pas sommeil et j'aime conduire la nuit.

Yoshiki se gara devant un petit immeuble de standing. Joey et Jin sortirent de la voiture, le premier essayant de prendre une meilleure contenance devant son employeur.

- Merci Yoshiki. Je suis désolé de t'avoir dérangé.

- Ca va je te dis. Va dormir et essaie de récupérer ta moto assez vite.

- Allez zou, j'suis fatigué moi aussi ! s'écria Jin en poussant Joey vers l'immeuble. Merci Yoshiki-san !

Yoshiki répondit par un signe de la main et reprit la route vers Beverly Hills où il résidait.

De retour dans son immense villa blanche, il trouva Toshi endormi sur le canapé en cuir noir du salon. La télé était allumée mais les programmes étaient terminés depuis longtemps. Au bruit de ses pas, Toshi se réveilla.

- Ne me dis pas que tu m'attendais, je risque de te rire au nez ! dit Yoshiki.

- Ca fait longtemps que j'ai arrêté de jouer les nounous avec toi ! répliqua Toshi en se redressant. Je me suis endormi devant la télé c'est tout.

Il avait l'air ensommeillé et un épi dans les cheveux, vision qui emmena un sourire sur les lèvres de Yoshiki. Toshi n'allait pas fort depuis son divorce et cette terrible affaire avec Masaya qui piétinait. Yoshiki le savait même si aucun des deux n'en parlait ouvertement. Leur prochain album avait plutôt été un prétexte pour l'attirer à LA et lui offrir un refuge au calme, loin du Japon et de ses problèmes. Et puis, c'était agréable de l'avoir avec lui, dans cette maison trop grande pour une seule personne.

- Je te fréquente trop tu sais ? clama-t-il en ôtant son blouson.

- Hein ? Pourquoi ? dit Toshi en réprimant un bâillement.

- Ma conscience me parle avec ta voix maintenant !

- Ta consc…qu'est-ce que tu racontes ?

Toshi éclata de rire :

- Ca n'arrive qu'à toi ce genre de bizarreries !

Yoshiki se mit à rire aussi mais tout d'un coup, une grimace crispa son visage et il porta la main à sa nuque. Toshi se leva aussitôt :

- Tu as mal ? Tu n'es pas allé faire l'idiot j'espère ?

- J'ai joué du piano c'est tout. T'en fais pas, ça finit toujours par passer.

- Tu veux mettre un sac de glace dessus ?

Yoshiki le regarda pendant quelques secondes et se remit à rire.

- Toshi va te coucher ! On a trop l'air d'un vieux couple tous les deux avec toi dans le rôle de la femme !

- Ah ben merci ! répondit Toshi, un brin vexé. Et question couple foireux, j'ai déjà donné !

- Oui je sais…, répondit Yoshiki avec douceur. Sérieusement, vas dormir. Ca va déjà mieux et puis j'ai l'habitude maintenant d'avoir mal à la nuque. Les médecins ont dit que ça ne s'arrangerait pas si vite.

- Bon d'accord, céda Toshi qui savait à quel point Yoshiki était têtu. Bonne nuit alors ou ce qu'il en reste !

Son ami rentré dans sa chambre, Yoshiki s'installa devant son ordinateur. Il était insomniaque depuis son enfance. Bizarrement, il se sentait de meilleure humeur qu'au début de la soirée. Son esprit dériva vers Jin. Il avait comme une impression de pas assez. Leur conversation était bien partie et elle aurait pu durer longtemps. Il était également surpris de penser que Jin était sympa et intelligent. S'était-il vraiment attendu à l'inverse ?

Ce n'est pas bien d'avoir des préjugés !

Toshi dors et fiche-moi la paix !

Bon ok, s'il commençait à discuter mentalement avec sa propre conscience, il allait vite réserver un lit à l'hôpital psychiatrique le plus proche !