Alec :
Ma sœur rentre dans la salle, aussi belle que d'habitude. Elle porte une longue robe dorée foncé, son collier rouge et ses cheveux noirs sont lâchés sur ses épaules. Elle regarde Simon et Clary, qui lui adressèrent un sourire, puis se tourne vers nos parents qui l'observent d'un air fier. Elle se place à ma gauche, puis c'est au tour de Lydia d'entrer. Ses cheveux blonds sont noués en une tresse et elle est habillée d'une robe de mariée blanche et dorée. Elle me lance un sourire que je n'arrive pas à lui rendre. Je suis en train de faire la plus grosse bêtise de ma vie. Comment pourrais-je sourire ? Elle n'en tient pas compte et continue à avancer, souriante et heureuse.
"Wow." lâche Simon.
Il a raison, Lydia est très belle. Mais je suis gay, je ne pourrais jamais l'aimer. Je n'aurais jamais dû la demander en mariage, mais je ne peux plus revenir en arrière, je dois l'épouser pour l'honneur de ma famille. Elle lance un sourire éblouissant à mes parents tandis que je tente d'éloigner mes mauvaises pensées. Je lui tend ma main pour l'aider à monter, sans même parvenir à sourire à mon tour.
Isabelle tend le coussin vers Lydia, qui prend doucement le bracelet et le passe à mon poignet. Je lui adresse un sourire forcé, puis me tourne pour prendre délicatement le collier. Il est posé sur un petit coussin doré, entre les mains de mon parabatai. Jace laisse échapper un petit sourire : il a l'air fier de moi. Autant que mes parents. Si seulement ils savaient...
J'attache le collier autour du cou de ma fiancée, des sombres pensées tourbillonnant dans la tête. Bordel, qu'est-ce que je suis en train de faire ?
"Il est temps pour Alec Lightwood et Lydia Branwell de se marquer l'un à l'autre les runes de mariage. Une rune sur la main, une rune sur le cœur. Une union est née."
Lydia prend la stèle et touche la rune de mariage marquée sur la glace avec la pointe de celle-ci. Puis elle prend ma main et me regarde un instant. Sait-elle que je regrette ma décision ? Pour la rassurer, je me force à sourire et elle baisse la tête, s'apprêtant à appliquer la pointe de la stèle sur mon poignet. Mon cœur me hurle de ne pas la laisser faire, mais ma conscience me réprimande : je ne peux plus reculer.
Soudain, un bruit résonne et nous levons la tête vers les portes qui s'ouvrent.
C'est lui.
Mon cœur s'emballe dès que je le vois passer les portes, le regard fixé sur moi. Je le dévisage, bouche bée, et je n'arrive pas à empêcher un petit sourire de franchir mes lèvres. Mes sentiments me frappent de plein fouet, m'empêchant de respirer. Je n'arrive pas à y croire : il est venu pour moi. Plus tôt dans la journée, je l'ai rejeté. Je l'ai accusé de jouer avec moi. Et pourtant, il est là. Je suis incapable d'encore résister à mes sentiments. J'essaye de le faire depuis que je l'ai rencontré, mais impossible, il ne veut pas lâcher l'affaire, et mon cœur non plus. Je l'aime, et me marier avec Lydia n'arrangera rien. Ça ne servira qu'à nous faire souffrir, à nous détruire.
"Qu'est-ce qu'un sorcier fait ici ?" lance ma mère avec dégoût.
Il n'en tient pas compte, et moi non plus. Je ne réagis pas quand elle se tourne vers moi. Je reste figé comme de la glace, regardant Magnus dans les yeux.
"Izzy, appelle Jace en baissant la voix. Est-ce que Alec a invité Magnus ?
-Je l'ai invité, répond ma sœur. Mais je ne pensais pas qu'il se montrerait."
Alors c'est elle qui l'a invité. Je t'adore, Izzy. Elle me connaît par cœur et a toujours voulu mon bonheur. Ça ne m'étonne pas qu'elle se soit directement rendu compte de mon attirance envers Magnus.
Voyant que je ne réagis toujours pas, ma mère se lève pour rejoindre Magnus au bout de l'allée.
"Magnus, quitte ce mariage maintenant." siffle-elle.
Je n'aime pas du tout la façon dont elle lui parle.
Sans se soucier des autres, Magnus s'avance vers le milieu de l'allée d'un air déterminé, et il lève deux doigts pour lui signifier de ne pas s'en mêler.
"Maryse, c'est entre moi et ton fils. Je partirais s'il me le demande."
Mon cœur s'affole, il tambourine si fort que j'ai l'impression qu'il va s'arrêter.
Je ne quitte toujours pas Magnus des yeux. Ma respiration est saccadé, je n'arrive plus à aligner mes pensées. Que dois-je faire ?
"Ça ne te dérange pas ?" me demande Jace.
Je ne parviens pas à répondre. Je n'arrive plus à le quitter du regard.
"Alec ?" dit Lydia.
"Tu perds ton souffle à chaque fois qu'il entre dans la pièce." La voix de Magnus résonne encore dans ma tête.
J'essaye de reprendre mon souffle en me tournant vers elle.
"Hey.
-J'ai...j'ai du mal à respirer, lui dis-je avec beaucoup de mal.
-Je sais. C'est bon."
Je roule des épaules et reprend ma respiration.
"Je ne peux pas faire ça."
Son sourire s'efface mais je continue. Je ne peux pas vivre dans le mensonge.
"Je pensais faire une bonne chose mais...ce ne l'est pas.
-Tu n'as pas à t'expliquer, fait Lydia en secouant la tête.
-Lydia, je suis désolé.
-Hey."
Elle pose une main sur ma joue et me la caresse de son pouce.
"Tu mérites d'être heureux, continue-t-elle alors que je souris un peu plus franchement. D'accord ? Je vais bien."
Elle hausse légèrement les épaules, fait glisser sa main le long de mon épaule puis la retire. Ma volonté à me battre contre mes sentiments flanche, les limites que je m'étais fixés tombent.
C'est alors que je décide de suivre mon cœur. C'est ce qu'il m'avait conseillé un jour, mais ce jour-là je n'assumais pas encore mes sentiments et je pensais que mon cœur me guidait uniquement vers ma famille. Mais non. Mon cœur me guide vers Magnus, et c'est vers lui que je me tourne. J'embrasse la salle du regard, personne ne se doute de ce que je vais faire. Mes parents vont être furieux, et les autres shadowhunters ne vont plus m'approcher. Mais qu'importe ? Comme Lydia l'a dit, je mérite d'être heureux. Magnus aussi. Je le regarde avec calme, il n'a pas non plus l'air de comprendre ce que je vais faire.
Je le trouve magnifique, avec son costume noir, ses yeux marrons qui deviennent jaune-verts comme ceux des chats quand il fait de la magie, et ses cheveux noirs ébouriffés dont la pointe est rouge aujourd'hui. Il est maquillé, comme souvent, de paillettes noires sur les paupières et d'un trait de crayon sous les yeux. Je l'ai toujours trouvé beau malgré ses goûts étranges pour la mode.
Après l'avoir observé pendant quelques secondes, je me sens enfin prêt. Prêt à lui prouver que je l'aime. Prêt à être heureux.
Je descends les marches de l'hôtel et je marque un temps d'arrêt pour être sûr de ne rien regretter. Est-ce que mon amour pour lui vaut le coup de gâcher ta relation avec tes parents ? La question ne se pose même pas.
J'avance dans sa direction en le regardant dans le blanc des yeux. Ses yeux paraissent me dire tellement de chose que je n'arrive pas à deviner quoi.
Ma mère comprend que ce que je fais ne va pas lui plaire et tente de s'interposer :
"Alec, qu'est-ce que tu fa...
-Assez." lui dis-je d'une voix ferme sans quitter Magnus des yeux.
Tout le monde me regarde d'un air sidéré, mais au fond je n'en ai rien à faire. La seule personne qui compte, c'est lui. Une fois à quelques mètres de lui, je comble l'espace entre nous deux en le tirant par le col de sa veste, puis je l'embrasse avec tout l'amour que j'ai pour lui. Je n'ai jamais embrassé personne, mais peu importe. Je sens qu'il est très étonné, mais il s'empresse de répondre à mon baiser.
Personne ne doit rien comprendre à ce qu'il se passe. Pour une fois, je m'en fiche.
Je sens les mains de Magnus me rapprocher en me tirant par la taille, et je continue de l'embrasser. Je me retire pendant une seconde, encore sonné par la tournure des événements et je le regarde encore une fois dans les yeux. Je sais qu'il en veut plus, et je compte lui donner. Baissant les yeux vers ses lèvres, je replonge vers celle-ci et tente de lui communiquer mon amour à travers ce baiser.
On s'embrasse avec fougue comme si on étaient seuls, et cela me paraît aussi naturel que si ce n'était pas la première fois que je l'embrassais. Nos lèvres sont faites pour se rencontrer, nos cœurs sont fait pour battre à l'unisson.
On finit par se séparer, lentement, et j'ouvre doucement les yeux.
"Tu ne cesseras jamais de m'impressionner, Alec."
