One-shot assez court, sur un personnage resté trop longtemps discret.
Le bruit de la mer. L'odeur de la mer. Le goût de la mer.
Elle n'en pouvait plus. Cette étendue claire, cet océan allant jusqu'à l'horizon sans jamais finir. Ni oiseau, ni rire, ni pleurs, juste les vagues se fracassant contre les rochers. La mer. Elle la voyait tous les jours. Tous les ans. Tous les siècles. Et elle la détestait. C'était elle qui l'enfermait, entre des murs d'eau et d'écume, et qui l'empêchait de voir le monde.
La tension du silence. Le poids du silence. La tristesse du silence.
Elle ne le supportait plus. Sa voix paraissait s'éteindre chaque jour un peu plus. Elle était seule au monde, perdue sur une île inatteignable, inconnue du monde extérieur, sans personne à qui parler. Sans personne avec qui rire ou pleurer. Sans personne à aimer.
Enfin...ce n'était pas tellement vrai. Elle avait déjà aimé, de nombreuses fois, avec passion, avec tout son coeur, si fort que cela l'avait détruite. Les hommes qui s'échouaient ici, elle ne pouvait qu'en tomber amoureuse. Et ils ne pouvaient que partir. Et l'amertume se mêlait au désespoir à chaque fois.
La beauté des fleurs. La fragilité des fleurs. La facticité des fleurs.
Elles étaient belles, resplendissantes, de toutes formes et de toutes couleurs. Certaines ne fleurissaient que la nuit de pleine Lune, leurs pétales d'argent rivalisant d'éclat avec l'astre. Certaines avaient des corolles si magnifiques que même le plus talentueux des artistes n'aurait pas pu les représenter. Certaines embaumaient un parfum délicieux qui enivrerait un dieu.
Mais aucune ne mourait. Elles fleurissaient indéfiniment, sans jamais perdre leur fraicheur. Le temps ne les froissait même pas.
Elle détestait ces fleurs. Elle était elle-même une fleur perdue au milieu de l'océan.
La souffrance. L'abandon. La colère.
La rancune. La douleur. Le désespoir.
Elle ne pouvait rien y faire, elle resterait ici pour toujours. Les dieux l'avaient punie pour avoir soutenu son père. Son père, celui en qui elle croyait, celui qu'elle aimait, celui dont l'ichor coulait dans ses veines. Les Olympiens, ces dieux infâmes, ces despots divins, s'étaient octroyés de droit de justice.
Ils l'avaient bannie et enfermée pour l'éternité dans un endroit pire que les Enfers. Avec un sort pire que les Titans.
Calypso resterait toujours à Ogygie. Et personne ne viendrait jamais pour elle.
