Mimi ouvrit les yeux. Avait-elle rêvée ? Est-ce qu'au moins un fantôme pouvait rêver ? C'était son impression... Peut-être qu'après un certain temps à être ainsi, les fantômes finissaient par s'endormir quelques fois et faire des sortes de rêves...

Ne se posant pas plus de question, elle releva la tête et fut soudain aveuglée par la lumière devant elle. Ça aussi c'était nouveau.

Un fantôme aveuglé par la lumière ?

Elle papillonna des yeux avant de se rendre compte qu'elle était allongée sur quelque chose d'extrêmement confortable : Un lit.

Relevant la tête, aussi surprise que terrifiée, Mimi s'aperçut qu'elle était dans une chambre. Elle ne savait pas pourquoi, mais celle-ci lui était étrangement familière.

- Mais c'est ma chambre... Murmura-t-elle.

Elle mit une main devant sa bouche surprise par le son de sa voix, si différente que d'habitude. Plus grave et plus féminine. Elle retira vivement sa main en sentant ses lèvres appuyées par celle-ci.

Incrédule, elle fixa ses mains. Elles étaient blanches. Pas transparentes. Blanches. Et recouvertes soigneusement d'un vernis rouge clair.

- C'est impossible ! Lâcha-t-elle. Merlin, si tu m'entends, dis-moi que je suis au Paradis, ou au

Walhalla, ou même au Nirvana, qu'importe !

Doucement, et avec mille précautions, elle mit un pied par terre puis un deuxième. Le parquet sous ses pieds lui apparut étrange. Elle bougea ses orteils et sursauta quand ils remuèrent. Hésitante, elle se releva et fit quelque pas.

Comme c'était étrange, elle qui pendant des années avait pris l'habitude de flotter, voilà qu'elle pouvait marcher et peut-être même danser. Sans savoir pourquoi, elle fit un pas de côté et fit une petite pirouette. Manque de chance, son pied percuta violement la table de chevet à ses côtés.

Elle lâcha un cri mélangé entre la douleur et la surprise. Elle s'assit sur le lit et observa sa cheville. Une petite rougeur, rien de bien méchant, était apparu mais elle n'y fit pas attention. Elle sourit, heureuse de pouvoir ressentir quelque chose, même si c'était dû à une blessure.

Mimi observa fixement la pièce. Tout était en place comme quand elle l'avait laissée avant de partir pour Poudlard, l'année où elle est morte. Les posters de Quidditch, l'écharpe des Serdaigles, soigneusement accrochée au dos de la chaise devant le bureau envahi de livres, les photos noires et blanches d'elle et de son petit frère, à côté de son lit...

Attendez voir ! Elle fronça les sourcils. Non, ce n'était pas elle sur la photo. C'était une jolie fille aux cheveux bouclés soigneusement coiffés et à l'allure gracieuse. Elle souriait à l'objectif de ses dents parfaitement alignées et blanches. On devinait que ses lèvres, même sans les couleurs de la fin du XXème, étaient recouvertes délicatement d'un rouge à lèvre foncé. Il y avait plein d'autre photo de cette jeune femme. Pourtant, le fantôme était sûr que c'était elle qui y était autrefois.

Mimi en avait vu des looks, des styles et de la mode, mais c'était de loin celui des années 1940, qu'elle préférait. Avec ses femmes classes et bien coiffées, se baladant dans la rue, au bras d'un marin, d'un soldat ou d'un aviateur en costume militaire, prêts à aller danser l'un contre l'autre jusqu'à l'aube.

Prise de doute, Mimi s'approcha craintivement du miroir de son armoire et se contempla bouche bée. Elle ne s'était pas trompée, c'était bien elle sur les photos. Ses cheveux bruns autrefois lisses, dessinaient des spirales de boucles étonnement parfaites sur ses épaules. Elle n'avait pas changé de taille et restait donc assez petite, mais avait gagné un peu de poitrine et des jolies formes. Pour la première fois de son existence, Mimi se trouva belle à en mourir.

Emerveillée, elle approcha son visage du miroir et observa ses yeux. Ils étaient d'un bleu limpide, doux et à la fois sérieux. Elle sourit. La jeune fille avait envie de rire et de pleurer en même temps. Mais elle n'en eut guère le loisir car une voix s'éleva d'en dessous de sa chambre.

- Madeleine !

Elle sursauta à l'entente de son vrai prénom. Elle avait toujours été habituée à se faire appeler « Mimi la boutonneuse » ou « Mimi Geignarde » ou « Mimi Pleurnicharde », mais jamais « Madeleine ».

Se remettant de ce choc, elle prêta plus d'attention à la voix féminine.

- Mimi ! Le déjeuner est prêt ! Descend vite, ça va refroidir !

Avant d'ouvrir la porte elle regarda si sa tenue était assez correcte pour descendre devant sa famille. Elle ferma les yeux pour essayer de se rappeler si dans ses souvenirs, elle allait déjeuner lavée et habillée. En remarquant que ce n'était pas le cas, elle lissa les plis de sa robe de nuit blanche et ouvrit la porte.

La brune mit un pied dans le couloir et regarda avec émerveillement les grandes fenêtres au bout du mur laissant passer la lumière du jour. Elle ferma les yeux et laissa les doux rayons du soleil lui lécher la peau.

Puis se rappelant qu'elle était attendue, elle ne s'attarda pas sur les innombrables portes que contenait le couloir.

Elle descendit une à une les marches de l'escalier en bois en regardant attentivement les lieux. Tout était là où elle se souvenait avoir grandi : le rocking-chair de maman, le fauteuil de papa et les jouets au sol de Jaden.

Une agréable odeur de beurre chaud s'éleva dans l'air et Mimi n'eut qu'à suivre la douce senteur pour retrouver la cuisine. Sa mère s'y activait déjà, une cuillère en bois dans la main et un tablier autour des hanches, elle était très belle.

Pourtant, Nina ne ressemblait en rien à sa fille à part ses beaux yeux bleus. En effet, la maman était aussi blonde que Mimi était brune. Ses cheveux étaient coiffés en un chignon élégant dont aucune mèche ne sortait. Elle avait les lèvres recouvertes d'un rouge cerise et était mince et souriante.

- Bonjour, souffla Mimi, mal à l'aise.

Nina se retourna surprise et vint la serrer dans ses bras en la voyant.

- Tu as bien dormis ? demanda-t-elle d'une voix douce. Jaden n'a pas arrêter de faire des aller et retour jusqu'à notre chambre... Ton père a mis une demi-heure avant de l'autoriser à venir dormir avec nous.

Mimi se rappelait très bien que son père était un homme sévère et dure, mais particulièrement aimant quand il le voulait. A l'heure qu'il était, il devait sûrement être sortit pour acheter son journal et le lait avant le petit déjeuner.

La jeune fille s'assis à la table et avisa avec intérêt les fruits dans un panier, les pancakes préparés par sa mère et les muffins encore tout chaud.

D'une main tremblante, elle prit une pomme rouge et croqua dedans. Une saveur exquise réveilla son palet et elle savoura le goût merveilleux du fruit et n'en fit qu'une bouchée. Depuis le temps qu'elle rêvait de pouvoir manger de la bonne nourriture.

Elle se servit d'un pancake auquel elle rajouta du sirop d'érable. Avec sa cuillère, elle découpa un bout vide de toute substance dorée et le mit sur sa bouche. Elle ferma les yeux. Délicieux. Elle prit alors un autre bout, cette fois si avec le sirop. Hum... Encore plus délicieux.

C'est à ce moment-là que choisit le père de Mimi pour entrer, son journal à la main et la bouteille de lait dans l'autre.

- Richard ! Jubila Nina.

L'homme brun aux lunettes carrées embrasa sa femme sur les lèvres et déposa un baiser sur les cheveux de sa fille.

Il s'assit à ses côtés et déplia le journal.

- Mm, grommela-t-il. Encore des bombardements allemands...

Les mots prononcés firent l'effet d'un coup de poing à Mimi. C'était vrai... Elle avait vécue en pleine Seconde Guerre Mondiale !

- Les Japonais ont aussi attaqués la base américaine de Pearl Harbor, les idiots... Si les Etats-Unis rentrent en guerre à nos côtés, les Nazies n'ont plus aucune chance...

Richard savait bien de quoi il parlait. Il avait lui-même était général dans l'armée de terre anglaise avant de rencontrer Nina, infirmière à cette époque. Tombé amoureux et ayant fondé une famille, il avait pris sa retraite militaire et s'était reconverti en pharmacien, ayant fait quelques études par le passé, avant de changer de voie.

Des petit pas dans le salon sortirent la jeune fille de ses pensées et elle tourna la tête vers la porte où une tête blonde apparut bientôt.

Jaden ressemblait autant à sa mère que Mimi à son père, avec ses cheveux blonds clairs et sa joie de vivre hors du commun. A cinq ans, il était déjà d'une vivacité sans pareil pour son âge.

- Bonjour, fit-il d'une voix fluette et endormit, en se frottant les yeux.

Mimi sourit devant ce spectacle attendrissant. Elle avait oublié à quel point son petit frère était mignon à croquer, enfin, quand il ne jouait pas les petites pestes...

- Mais qui voilà ? dit Richard en levant le nez de son journal. Un petit enquiquineur... Tu es fatigué ? Tant mieux ! Ça t'apprendra à nous réveiller toutes les cinq minutes pour venir dormir avec nous...

Nina resta dubitative devant le visage angélique de son fils.

- S'il continue à faire des cauchemars, il devra aller chez le médecin... Finit-elle par lâcher.

- Non ! S'écria-t-il en courant vers son père et en s'accrochant à l'une de ses jambes. Je n'aime pas les docteurs !

- Ça, ça a au moins le mérite d'être honnête, grommela Richard.

- Mais toi, c'est pas pareil, répliqua le petit garçon en levant la tête et en lui faisant les yeux doux. Toi tu regardes pas partout si j'ai un grave problème...

- Oui, répondit le papa. Parce que je sais directement où tu as mal, parce que tu es mon fils et que j'arrive un tant soit peu à comprendre ton langage bizarre, quand tu m'expliques ce que tu as. Et puis de toute façon, personne n'ira chez le médecin. Mimi, à ton âge, faisait les mêmes cauchemars et c'était peut-être dû au fait qu'elle soit une sorcière. Et peut-être que toi aussi tu en es un, alors maintenant, si tu voulais bien lâcher ma jambe et t'asseoir, je t'en serais éternellement reconnaissant, Jaden.

Le petit blond se calma et relâcha son emprise sur son père. Il alla s'asseoir à côté de sa mère en lui offrant son plus beau sourire, comme pour lui prouver qu'au moins, son père le secourrait toujours.

Mimi rit devant ce spectacle. Elle avait toujours été heureuse d'être née dans une famille Moldue comme la sienne, sans se sentir différente de ses membres puisqu'ils l'acceptaient comme elle l'était. Ils l'encourageaient même à suivre une carrière de Médicomage.

- En fait, Mimi, fit son père. J'ai reçu un hibou de ton collège. Ils disent que la rentrée est au 1er septembre. Ta liste des fournitures aussi. Je t'emmènerai demain à Londres pour faire les courses.

La jeune fille hocha la tête.

- C'est bien, ma chérie, dit Nina. Tu rentres en sixième année, j'espère que ce ne sera pas trop dure. Mais bon, tu as eu tes BUSE avec réussite, je ne pense pas me tromper en pensant que tu n'auras aucun mal par la suite... Même cette année... Surtout que ça fait trois ans que tu n'es pas retourné à Poudlard.

Mimi avala de travers et commença à toussoter. Pour se calmer, elle prit un verre de jus d'orange et le bus d'une traite. Trois ans ? Qu'est-ce que ça voulait dire ? Ses parents la regardèrent avec des yeux ronds et elle préféra ne pas poser de questions qui auraient pu sembler étranges. Elle se renseignerait plus tard auprès de Jaden...

Quand tout le monde eut fini, Mimi retourna à sa chambre pour s'habiller. Elle choisit une jolie robe jaune à dentelle, serrée à la taille par une ceinture du même tissu. Après s'être lavé, elle décida de se rendre à la bibliothèque. Ne sachant plus où se trouvait l'endroit, elle se balada dans la maison, ouvrant quelques portes, ci et là, quand elle arriva dans une grande pièce étrange.

C'était sa pièce à elle, là où avant, elle venait se réfugier pour s'échapper l'espace de quelques instants du monde au dehors.

Mimi avait un don pour écrire des histoires et les écrivait le plus souvent ici.

Elle s'approcha de la table ronde en verre et effleura les parchemins neufs du bout des doigts. Elle sourit béatement en voyant ses affaires de sorcellerie posées dans un coin. Arrivant vers une étagère remplie de livres de potions et de métamorphose, elle vit la petite boîte en bois dans laquelle se trouvait, soigneusement rangée, sa baguette.

Prise d'une grande excitation, Mimi prit la boîte reliée de cuir et l'ouvrit. Sa baguette en bois de saule l'attendait patiemment. La particularité de l'objet était qu'il n'y avait ni ventricule de dragon, ni crin de licorne à l'intérieur. Mais une chose beaucoup plus rare et précieux qu'une plume de phénix : un cheveu de sylphe. D'après ce qu'avez compris la jeune fille, les sylphes avaient disparus depuis des lustres.

La baguette avait appartenue à quelqu'un avant elle, mais à l'époque, Mimi n'avait pas tenu trop compte de ce que radoter Ollivander. Après tout, elle n'avait que onze ans, et presque soixante -quinze ans sont passés depuis.

Subjugué par le bout de bâton dans sa main, elle le fit tourner entre ses doigts. Elle allait prononcer une formule quand elle se rappela que la Magie en dehors de Poudlard était interdite.

Déçue, elle reposa sa merveille délicatement dans son écrin.

Un bruit la fit sursauter et elle se retourna vers la porte. Deux yeux bleus la fixaient intensément.

- J'entre ! Fit sans ménagement Jaden.

Il vint jusqu'à elle et s'assit sur l'une des chaises de la table. Sans le quitter des yeux, la brune l'imita et choisit une chaise devant lui.

- Dis-moi, commença-t-elle. Toi qui sais tout...

Mieux valait flatter l'ego du petit blond, avant un interrogatoire. Mimi sourit en voyant son frère prendre un air digne.

- Pourrais-tu me dire pourquoi je n'étais pas à Poudlard ces trois dernières années ?

Jaden prit un bonbon dans sa poche et entreprit de déballer le sachet avant de le mettre dans sa bouche.

- Ben, t'étais à Beauxton, marmonna-t-il comme si c'était évident.

"Il doit vouloir dire Beauxbâtons", pensa Mimi, "seulement, le caramel ne doit pas l'aider à prononcer correctement le nom de l'école."

- Et pourquoi ? demanda-t-elle, faignant l'indifférence en regardant ses écrits sur une feuille.

- Section français, fit-il en haussant les épaules. Mais comme y a la guerre, t'étais bien obligé de rentrer !

Tout s'expliquait à présent. Mimi y voyait très clair. Mais une nouvelle question s'imposa alors dans son esprit.

Qu'elle réputation avait-elle donc laissé à Poudlard pendant son absence ?


Verdict, chers passagers ?