Titre: An deine Stimme (Au son de ta voix)

Auteur: Sahad.

Note: Parce que, décidément, j'aime les faire souffrir. Après « Lass mich nicht im Stich » (merci pour toutes des reviews, elles m'ont fait très plaisir), j'ai décidé d'écrire ça, suite à quelques rumeurs...

Note 2 : Je précise que je n'ai toujours rien contre les TH. Lol. Merci à Andy pour la traduction du titre.

Chapitre 1:

Bill se laissa tomber lourdement sur le siège de la voiture, laissant échapper un soupir de satisfaction : cela faisait près de deux heures et demie qu'ils faisaient des photos au soleil ; un peu de repos au frais était le bienvenu. Son frère vint le rejoindre, attrapant une des bouteilles de coca dans la glacière, et se laissa tomber à côté de lui :

« Je suis mort... » souffla-t-il.

« Ne m'en parle pas. » acquiesça le jeune chanteur. « J'en peux plus... »

« Je vais aller m'écraser sur mon lit, à l'hôtel. » déclara Tom.

« Ça, faut pas trop compter dessus. » les informa Gustav en arrivant avec Georg.

« Pourquoi ? » demandèrent leurs cadets en chœur.

« Parce qu'on a la séance de dédicaces avant. » répondit le bassiste.

Le deux jumeaux s'entreregardèrent et, d'un même mouvement , ils s'enfoncèrent dans leurs sièges en soupirant profondément ; faisant sourire leurs aînés. Ils attendirent que leur manager les rejoigne et leur récapitule le reste de leur journée : ils devaient aller à la FNAC pour signer quelques 400 autographes, voire un peu plus, puis devraient aller aux studios d'une radio avant de finalement pouvoir se reposer dans leur hôtel. Les jumeaux ne cachèrent pas leur déception mais ne firent aucun commentaire : ils étaient fatigués, certes, mais ils ne pouvaient pas faire faux bond à leurs fans. Ils s'installèrent donc tous et le van se mit en mouvement ; les Tokio Hotel regardaient tout autour d'eux, curieux de tout : Paris était vraiment une très grande ville. Ils étaient plutôt contents des embouteillages car cela leur permettait d'observer le paysage tout en s'amusant des grognements de leur chauffeur qui râlait contre les conducteurs parisiens.

Le groupe avait déjà eu le loisir de profiter de la Tour Eiffel, des Champs-Elysées et de l'Arc de Triomphe au cours de séances de photos. D'après leur manager, ils avaient un peu de retard sur le planning mais ce n'était pas trop conséquent ; les adolescents hochèrent la tête et regardèrent par les fenêtres : une foule incroyable était dehors à les attendre. Tout ça pour eux. Les quatre garçons ne pouvaient s'empêcher de sourire, heureux ; ce fut Georg qui brisa le silence de leur petit van :

« Ça va, y a de jolis lots... »

« Ouais... » approuva le guitariste. « Mais t'as aussi de sacrés thons. »

« Tom, t'exagères, c'est méchant. » soupira son frère.

« Ah ouais ? » ricana ce dernier. « Tiens, regarde celle-là, Bill, et ose me dire que j'ai tort. »

Le jeune chanteur haussa un sourcil et s'approcha, il mit quelques secondes à trouver la fille que lui montrait son frère dans cet amas de personnes. Là, il esquissa une grimace suivie d'un sourire quelque peu forcé :

« Ah... Ouais, bon, elle est pas jolie-jolie mais c'est pas sympa quand même... »

« Mais tellement réaliste. » renchérit le dreadeux.

« Bon, on y va. » annonça David.

Les garçons hochèrent la tête en réponse à leur manager, mais à peine la porte commença-t-elle à s'ouvrir que les cris stridents les assourdirent et des mains se tendirent vers eux tel une armée en furie chargeant tête baissée. Tom, qui s'apprêtait à sortir le premier, fit un bond en arrière en hurlant :

« Ferme la porte ! Ferme la porte !! »

Aussitôt dit, aussitôt fait. Le jeune guitariste avait atterrit dans les bras du batteur, son cœur jouant les formules 1 ; il se redressa, regardant avec de grands yeux les filles qui se pressaient contre le van, le faisant bouger.

« Mais elles sont malades ! » s'exclama-t-il.

« Ça, c'est les fans françaises. » sourit leur manager.

« Je veux une assurance vie ! » clama Tom.

Le petit groupe hochait la tête d'un même mouvement, approuvant les dires du guitariste, et appréhendait visiblement sa sortie du véhicule, voyant ce dernier disparaître sous les corps des filles hystériques. David semblait amusé de la situation et attendit simplement que la sécurité fasse reculer les fans pour dire aux Tokio Hotel de sortir du véhicule. Gustav sortit le premier, préférant penser que plus vite il serait passer, plus vite il pourrait se concentrer sur autre chose ; Georg s'élança à sa suite, esquissant un sourire aux personnes présentes mais visiblement très désireux d'arriver au bout de son périple ; Tom lança joyeusement un « Geronimo ! » avant de suivre le chemin de ses comparses ; Bill secoua doucement la tête à l'écoute de son jumeau et descendit, certain de foncer vers une mort atroce et douloureuse. Ils essayèrent de marcher en fendant la masse, mais ce n'était pas chose très aisée : ils se firent passablement malmener par cette marée humaine avant de réussir à s'engouffrer dans les locaux de la FNAC.

« Ça va ? Vous allez bien ? » sourit David.

« Ouais, ça va... » répondit Georg. « Un peu de mal à passer mais ça va... »

« Je me suis prit un coup dans la mâchoire... » grimaça Gustav en la faisant craquer.

« Y a une folle furieuse qui m'a scarifié le bras ! » s'exclama le guitariste en brandissant son bras joliment décoré de trois traces rougeâtres desquelles s'échappait un peu de sang.

« On m'a arraché un rajout... » grogna son frère en se massant le cuir chevelu.

« Bon, allez, on oublie tout ça et on sourit bien. Vous allez voir vos fans, quoi ! » les motiva leur manager.

Les quatre garçons hochèrent la tête et soufflèrent un bon coup avant de rentrer dans la salle. Une file entière de fans en délire hurlaient leurs noms et chantaient leurs chansons ; le petit groupe oublia bien vite le petit incident de l'entrée et alla s'installer. On leur demanda de se relever pour quelques photos et ils retournèrent s'asseoir à leurs places respectives, attendant qu'on laisse passer les fans pour pouvoir apposer leurs signatures. Tout se passait bien, il n'y avait pas de débordements, on leur offrait des cadeaux et les quatre garçons étaient même agréablement surpris en entendant certains fans leur adresser des mots en allemand. Bill souriait à s'en décrocher la mâchoire dès qu'un appareil photo apparaissait dans son champ de vision et chacun s'affairait à sa tâche ; il y eût même des moments de grand fou rire, que ce soit une ânerie lancée par l'un des membres du groupe, ou lorsque Tom se retrouva à loucher sur une convers pour signer.

Les jeunes garçons s'amusaient bien, même si la fatigue les poussait à rêver de leurs lits. Les trois heures de dédicaces passèrent finalement assez rapidement, chacun des quatre comparse se massant la main ou le poignet. Certains fans n'avaient pas pu passer alors que d'autres y étaient allés deux fois : Bill avait reconnu quelques visages et appareils photos. Il y avait aussi une file de fans qui se tenaient tout le long de l'allée par laquelle ils devaient passer pour sortir ; Georg ouvrit courageusement la marche, suivi de Gustav et de Tom. Bill jeta un regard en arrière, discutant avec l'un de leurs gardes du corps ; il se sentit tout à coup agrippé par le bras et lança un regard surpris vers celle qui l'avait attrapé. Elle le tenait fermement en pleurant de bonheur de prendre ainsi son idole dans ses bras, le jeune chanteur tenta tant bien que mal de se dégager mais elle serrait fortement son bras. Il tira plus fort encore et parvint à s'extirper, mais il se sentit perdre l'équilibre et vit le monde basculer ; il heurta brutalement le sol, percutant une pile de produits du magasin, et une douleur lancinante lui envahit le cou alors que le goût ferreux du sang se répandait dans sa gorge. L'air lui manquait et il avait la sensation que son esprit se détachait de son corps ; sa vue s'était remplie de paillettes et tout ce qu'il entraperçu, ce fut les membres de son groupe accourir vers lui, paniqués. Leurs voix lui parvenaient, déformées.

Puis... Plus rien.

OoOoO

Sa gorge lui faisait mal. Son corps lui était douloureux. Sa tête le lançait... Il entrouvrit doucement les yeux, aveuglé par la lumière présente dans la pièce. Que c'était-il passé... ? Il se trouvait dans une chambre d'hôpital. Il était au moins sûr de ça, mais comment s'y était-il retrouvé ? Il ferma les yeux et fronça les sourcils, se concentrant pour essayer de dissiper le brouillard qui emplissait son esprit. Il y avait eu les séances photos... Le van... Les fans en furie... La séance de dédicace... Et puis quoi ? C'était flou. Il ne parvenait pas à s'en rappeler.

Mais ce qui le gênait le plus c'était cette sensation de douleur : à chaque fois qu'il avalait sa salive, il avait l'impression de se racler la gorge avec une éponge à récurer. Il voulut se la masser et remarqua alors les bandages. Pourquoi en avait-il ? Il essaya une nouvelle fois de se rappeler mais sans grand succès... Il aurait voulu que les autres soient là pour lui expliquer, lui dire ce qu'il se passait. Il se redressa un peu et avisa le bouton pour appeler l'infirmière et appuya dessus : peut-être pourrait-on l'aider. Une jeune femme arriva au bout de quelques minutes, vêtues de son uniforme blanc, elle devait avoir entre vingt-cinq et trente ans. Elle lui adressa un sourire et commença à lui parler. Sa voix était douce et apaisante, mais il s'aperçut très vite qu'il ne comprenait pas un traite mot de ce qu'elle disait : il ne parlait pas français ! Elle dut le comprendre à son air perdu car elle esquissa un sourire gêné et hocha doucement la tête ; elle leva les mains et lui fit signe d'attendre puis sortit. L'adolescent se sentit paniqué : comment allait-il faire s'il ne comprenait rien ni personne ? Où étaient son frère et les autres ? Il ne s'était jamais retrouvé tout seul dans un endroit qu'il ne connaissait pas...

L'infirmière revient avec un homme. Probablement un médecin. Celui-ci commença à lui parler, mais il ne comprit toujours pas ; l'infirmière expliqua quelque chose à l'homme, peut-être pour lui dire qu'il ne comprenait pas le français... ? Le médecin acquiesça d'un signe de tête aux propos de la jeune femme et reporta son attention sur Bill ; le jeune chanteur ne sut que faire et se contenta de lui rendre son regard. Il essaye une nouvelle fois de lui dire quelque chose mais sans plus... Lorsqu'il répéta une nouvelle fois en articulant bien, l'adolescent crut discerner le nom de son manager. Cela voulait-il dire que celui-ci arriverait bientôt ? Il l'espérait.

Il attendit en réalité un peu moins d'une demi-heure : dès qu'il avait appris le réveil du jeune chanteur, le manager avait sauté dans la première voiture et avait foncé en direction de l'hôpital avec le trio restant. Tom fut le premier à passer la porte de la chambre, courant à moitié et se jetant sur son frère :

« Biiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiill ! » il l'attrapa alors par les épaules et entreprit de le secouer comme un prunier. « Imbécile ! Je me suis fait un sang d'encre pendant tout ce temps où tu étais dans les pommes ! »

Le jeune brun sourit, amusé par les exagérations de son jumeau ; il fut ravi de voir entrer leurs deux amis, David et l'interprète. Le médecin s'entretint d'ailleurs un moment avec ce dernier, pendant que Tom racontait avec enthousiasme ce qu'il s'était passé alors que Bill était inconscient, Georg rajoutant quelques fois des détails et Gustav approuvant d'un simple signe de tête. Le jeune chanteur écoutait avec attention, le sourire aux lèvres en voyant son guitariste faire de grands gestes pour s'expliquer, il voulut lui faire une remarque mais eût la sensation que ses paroles se bloquaient dans sa gorge, la lui brûlant tel du fil barbelé. Il porta la main à son cou alors qu'un son enraillé à peine audible en sortit, proche du gargouillement, grimaçant de douleur. Le sourire de ses amis disparut alors qu'un air inquiet prenait sa place sur leurs visages, Tom se pencha vers lui :

« Hey, Bill... ça va ? »

L'intéressé secoua négativement la tête avec la cuisante impression d'avoir la gorge raclée au papier de verre. Son frère posa la main sur son épaule, ne sachant que faire et accablé de voir cette souffrance sur le visage de son jumeau. L'interprète se tourna alors vers David et lui répéta à l'oreille ce que le médecin venait de lui dire, le jeune manager parut stupéfait, il n'en croyait visiblement pas un mot et lança un coup d'œil au médecin, comme pour s'assurer de la véracité de ce qu'il venait d'entendre. Le médecin hocha simplement la tête. Les épaules de David s'affaissèrent et il noya sa main dans ses cheveux en inspirant fortement ; les quatre garçons le regardaient, attendant qu'il parle, mais comme rien ne venait Tom brisa le silence pesant qui s'était abattu dans la petite chambre :

« David. » l'intéressé leva les yeux dans sa direction, croisant son regard qui, comme sa voix, était moins sûr qu'il ne l'aurait voulu. « Nous aussi, ça nous concerne. »

L'homme considéra un long moment les jeunes garçons, indécis, puis il inspira à nouveau un grand coup en se massant la nuque et murmura, d'une voix faible mais parfaitement distincte :

« Les cordes vocales de Bill ont été sérieusement touchées... Il ne pourra peut-être plus jamais parler... »

Le petit groupe en était bouche bée, les yeux écarquillés. Bill... ? Ne plus jamais parler ? Le jeune brun demeura un long moment interdit, sentant un gouffre engloutir tout son être. Etait-ce seulement possible qu'il puisse un jour... Perdre sa voix... ? Les paroles de leur manager tournaient en boucle dans son esprit tel une scie qui déchirait ses pensées. Ses yeux allaient rapidement d'un point à l'autre alors qu'il essayait encore de comprendre pleinement cette phrase : lui, Bill Kaulitz, ne chanterait plus...

« C'est pas... Possible... » souffla doucement Tom, aussi choqué que lui.

Gustav, qui avait d'habitude toujours un mot réconfortant, ne disait rien et semblait avoir autant de mal que ses cadets à enregistrer l'information ; Georg déglutit et la voix qui sortit de sa gorge était si faible qu'il eût lui-même du mal à la reconnaître, exprimant tout haut ce qui avait frôlé l'esprit de la plupart d'entre eux :

« Et... Que va devenir Tokio Hotel... ? »

OoOoO

« A présent, les garçons, je vais vous poser la question que tout le monde se pose : qu'en est-il de l'avenir de Tokio Hotel ? »

Les trois garçons s'entreregardèrent, puis les deux aînés regardèrent leur cadet : c'était de loin le plus touché par toute cette histoire et peut-être le plus à même d'exprimer sa pensée sur ce point. Tom hésita un long moment, revoyant encore cette scène qui le hantait depuis maintenant une semaine ; il releva finalement ses yeux noisette vers le journaliste, bouillonnant d'envie de lui envoyer son poing dans la figure pour faire disparaître ce sourire commercial qui l'exaspérait en de pareilles circonstances. Ne pouvait-il pas au moins faire semblant d'être attristé ?

Le jeune dreadeux inspira profondément et soupira avant de tendre la main pour prendre le micro et se redresser un peu. Il hésita une nouvelle fois, passant la langue sur ses lèvres, pesant chacun de ses mots :

« En tant que deuxième leader du groupe... Et au vu des circonstances... Je vais dissoudre le groupe. »

Des exclamations sur le plateau se firent entendre dès que l'interprète traduisit ses dires et, bien que ses deux amis s'attendaient à cela, ils avaient du mal à accuser le coup. Le jeune guitariste inspira une nouvelle fois, choisissant encore ses mots avec minutie et luttant contre cette boule qui se formait dans sa gorge :

« Il est hors de question... De choisir quelqu'un d'autre pour occuper la place de chanteur. Et... Pour moi, Tokio Hotel est un groupe que nous avons fondé tous les quatre. Bill, Georg, Gustav et moi... Il évident que si l'un d'entre nous vient à manquer... Tokio Hotel n'est plus Tokio Hotel, alors... Georg et Gustav pourront continuer à jouer et former un nouveau groupe s'ils le souhaitent, mais moi... J'arrête. Je ne jouerai plus de guitare. »

Un lourd silence emplissait la pièce et le regard de Tom se perdait dans l'assemblée de ceux qui avaient été choisis pour être sur le plateau. Des fans ou des figurants, il ne le savait pas et s'en moquait : la seule personne à laquelle il arrivait à penser, c'était Bill, son jumeau, actuellement allongé sur un lit d'hôpital. Ses lèvres tremblèrent et il reprit :

« Je... Je pense que Georg et Gustav peuvent s'en sortir. Ils ont un bon potentiel et... Je crois en eux et... Leur souhaite bonne chance... »

Les deux intéressés levèrent les yeux vers lui, peu surpris par ses dires, lui adressant un regard empreint de compassion et d'amitié. Tom sentit les dernières barrières de sa résistance céder et une boule plus douloureuse encore obstruer sa gorge ; sa vue se brouillait alors que ses yeux s'emplissait de larmes. Il se mordilla la lèvre inférieure mais sentait bien qu'il ne les retiendrait pas longtemps, aussi il se leva et, d'une voix qui se brisait, il murmura :

« Excusez-moi. »

Et sur ces quelques mots, il laissa le micro à ce garçon qui était à présent son ancien bassiste et se retira dans les coulisses. Non, il ne pouvait pas, il ne voulait pas affronter cette douloureuse réalité et pourtant... Pourtant il n'avait pas le choix. Cette sombre pensée acheva de briser cette image de personnage fort et joyeux qu'il s'était donné pendant toutes ces années. A présent, il n'était plus que lui-même, plus que Tom Kaulitz, un gamin de 17 ans comme les autres, fragile et vulnérable. Ne regardant pas devant lui, il percuta violemment quelqu'un et tomba à la renverse.

« Tom... »

C'était David. Leur manager. Non... Leur ancien manager. Le jeune châtain ne se sentit pas la force de se relever et baissa la tête, sentant des larmes acides perler le long de ses joues. Son aîné le regardait avec tristesse et pitié, il s'agenouilla et prit le jeune garçon dans ses bras, ne sachant que dire pour le réconforter et le laissant simplement pleurer toutes les larmes de son corps contre son épaule. La voix enrouée et gémissante de l'adolescent lui parvint entre ses sanglots :

« Pourquoi... ? Pourquoi est-ce que ça nous arrive ? Pourquoi à Bill... ? Si ça avait été moi, ça aurait été moins grave... ! Mais pourquoi Bill... ? Pourquoi... ? »

David ne savait pas vraiment quelle était la réponse approprié à cette question, ni même s'il y en avait une, mais il réfléchit longuement et murmura doucement, d'une voix aussi apaisante que possible :

« Ne dis pas ça... Bill ou quelqu'un d'autre du groupe, ça aurait été tout aussi malheureux... C'était un accident... »

« Je les déteste... ! » gémit le dreadeux contre l'épaule de son vis-à-vis, ses doigts menaçant de déchirer son t-shirt à force de le serrer. « Je hais les fans... ! Je hais les filles... ! Je hais la France ! »

Le manager ne sut à nouveau que répondre, passant simplement une main dans le dos tremblant de son cadet et essayant vainement de calmer ses sanglots, sa peine, sa douleur, sa haine et sa peur. Le jeune guitariste en avait mal aux doigts de tant serrer le t-shirt de son ancien manager et, même s'il pleurait toujours, il le repoussa doucement, s'écartant.

« Tom ? »

« Ça va aller... » répondit celui-ci, dissimulant son visage sous sa visière. « Ça va aller, j'en suis sûr... »

« Tom... » souffla son aîné.

« Oui, ça va aller. Parce que c'est mon frère, parce que c'est Bill Kaulitz. »

Ces mots, il les avait prononcés d'une voix brisée, autant pour convaincre David que pour se convaincre lui-même. Son vis-à-vis le savait, il connaissait bien ce jeune garçon à présent : un gamin un peu fou-fou et toujours souriant pour ne pas montrer ses faiblesses ni inquiéter qui que ce soit. Il avait toujours été le boute en train du groupe... Mais lui, qui l'animerait maintenant ? Tom passa le revers de sa main sur son visage avant d'adresser un sourire forcé à son ex-manager et murmurer :

« Ça va aller. »

Et sur ce, il se releva et passa à côté de lui, se dirigeant vers la sortie. David se retourna pour regarder s'éloigner ce qui, au fond, n'était encore qu'un enfant ; un enfant à qui on avait donner le bonheur pour mieux le lui arracher une fois qu'il y avait goûté.

« Tom ! »

L'adolescent s'arrêta, tournant légèrement la tête sur le côté, mais ne se retourna pas. Il l'écoutait, mais il fuyait son regard. Lui, Tom Kaulitz, avait peur de le regarder. David déglutit avant de reprendre :

« Rien ne t'empêche de continuer à jouer. »

« David. Bill et moi, on a commencé ensemble, c'était notre rêve, nos moments, notre satisfaction, notre joie... » murmura son cadet. « Je joue pour Bill et Bill chante pour moi. L'un sans l'autre, nous ne sommes rien. Sans Bill, je ne peux pas exister. »

Il avait prononcé ces paroles sur un ton très calme, comme lorsqu'on expliquait quelque chose à un enfant. Le manager hocha doucement la tête, signe qu'il comprenait et acceptait la décision de Tom ; il ajouta :

« Si tu as besoin de quoique ce soit, appelle-moi ! »

Le guitariste leva la main, brandissant son pouce, puis disparut derrière la porte...

OoOoO

Les yeux rivés sur la télévision, Bill sentait les larmes perler sur ses joues, fixant son frère qui annonçait la dissolution du groupe. Au fond, il s'en était douté à l'instant même où on lui avait annoncé qu'il ne pourrait peut-être plus parler... Mais l'entendre... Ses doigts se crispèrent sur les draps du lit, ses articulations devenant d'une blancheur effrayante jusqu'à lui en faire mal. Mais ce n'était rien comparé à la douleur qui hurlait en lui. Tokio Hotel était dissout. Même s'il s'y attendait, il avait peine à y croire et sentait son cœur se serrer. Il leva encore les yeux vers la télévision, vers le visage de son jumeau. Lui aussi, il pleurait... Sa gorge le brûlait et aucun son n'en sortait, mais il aurait souhaité pouvoir crier, hurler au monde entier la peine qu'il ressentait, ce sentiment d'injustice, de désarroi, d'impuissance. Tout, absolument tout, avait été balayé en quelques instants par une fille qui disait l'admirer, l'aimer : son rêve, sa joie, sa vie, son frère... Tout, elle avait tout détruit. Et le pire, c'est qu'il n'arrivait même pas à se raisonner : il savait très bien que c'était un accident, que ce n'était la faute de personne... Mais il avait besoin de détester, besoin de haïr quelqu'un.

Des larmes acides perlèrent à nouveau le long de ses joues, ses doigts se crispèrent un peu plus sur les draps de son lit d'hôpital, alors que les mêmes questions tournaient et retournaient dans son esprit : Pourquoi ? Qu'avaient-ils fait pour mériter cela ? Il baissa la tête, se laissant aller à des sanglots silencieux et étouffés. Même pleurer lui devenait difficile... Il resta ainsi, immobile, tentant tant bien que mal de respirer. Il pouvait entendre les infirmières dans le couloir et, même s'il ne comprenait pas le sens exact de leurs paroles, il savait qu'elles parlaient de lui, qu'elles le plaignaient. Pour une obscure raison, il avait la sensation que ça le désespérait un peu plus, comme une nouvelle preuve de son cauchemar éveillé.

Le bruit de la porte attira son attention, il releva lentement la tête, comme si ce mouvement lui coûtait. Son regard noisette en croisa un autre ; ils s'entre-regardèrent un long moment, puis Tom esquissa un sourire qui lui était peu naturel :

« Salut, frangin. »

Ne s'attendant à aucune réponse, il s'avança jusqu'au lit et s'y assit. Il n'osait pas regarder une nouvelle fois son jumeau et planta ses yeux sur un coin de la pièce, murmurant doucement :

« Voilà... Je... Je vais me trouver un petit boulot... Ah, t'as le bonjour de Gustav et Georg... Et David aussi. »

Un lourd silence plana dans la pièce. Tom balançait ses jambes dans le vide, ne sachant que dire de plus, il y avait pensé sur le trajet mais avait tout oublié à présent. Il sentit la main de Bill se poser sur son bras et releva lentement la tête pour affronter son regard ; son frère s'efforçait de lui adresser un sourire, mais ce n'était qu'une très pâle copie de ceux qu'il affichait avant. Le jeune guitariste sentit son cœur se serrer et se pencha pour prendre son frère dans ses bras.

« Ça va aller... On va rentrer en Allemagne... Maman nous attend. Tout ira bien... »

L'ex-chanteur hocha doucement la tête mais cela ressemblait plus à de la résignation qu'autre chose. Tom essaya de sourire aussi sincèrement qu'il le pu et posa son front contre celui de son frère, plongeant son regard dans le sien :

« Ça va aller, tu vas voir... J'ai dissout le groupe mais on le reformera quand tu auras retrouvé ta voix, ok ? »

Bill le regarda à son tour, lui adressant un regard proche du désespoir. Avait-il seulement une chance de pouvoir reparler un jour ? Pourrait-il seulement laisser échapper un son inarticulé de sa gorge douloureuse ? Il se mordilla la lèvre inférieure et hocha de nouveau la tête. Son vis-à-vis lui ébouriffa les cheveux et murmura :

« Allez, courage. Je crois en toi. »

Sur ce, il se leva, affirmant qu'il allait rassembler leurs affaires à l'hôtel en prévision de leur retour prochain en Allemagne, et il sortit de la pièce, s'engouffrant dans le couloir. Mais à peine eût-il fermé la porte qu'il s'adossa au mur, s'y laissant glisser, pour se recroqueviller par terre et pleurer en silence. Voir son frère ainsi était douloureux. Trop douloureux. Il revoyait encore le regard désespéré de son jumeau lorsqu'il avait mentionné sa guérison... Ses doigts se crispèrent sur ses coudes alors qu'il noyait son visage dans ses bras, posés sur ses genoux repliés. Il n'y avait que dans ces moments-là où il pouvait se permettre de laisser parler sa douleur : il avait craqué devant David, mais on ne l'y reprendrait plus ; il fallait qu'il se montre fort pour Bill, qu'il lui montre qu'il y croyait, qu'il avait confiance.

Essuyant ses yeux du revers de la main, il inspira profondément avant de se relever et de traverser les couloirs de l'hôpital, perdu dans ses pensées, seul...

Le jeune chanteur, lui, fixait les draps de son lit, les larmes aux yeux et une boule lui griffant la gorge. Tom croyait en lui, il ne pouvait pas le décevoir... Relevant les yeux vers la télévision, il vit les deux autres membres du groupe dissout ; Georg essayait de garder contenance, souriant comme il le pouvait en répondant aux questions qu'on leur posait, pendant que Gustav restait en retrait, l'air grave. C'était fini... De nouvelles larmes perlèrent sur ses joues : il était hors course désormais.

A suivre...

Sahad : Finalement, je vais la couper en plusieurs chapitres, sinon vous n'en aurez pas avant un bon moment. Et puis ça me permet de réfléchir plus longuement sur la suite... Parce qu'elle n'est pas encore vraiment à mon goût. J'espère que ça vous plaira.