Bonjour à tous! Voilà mon dernier projet, Souviens toi de moi. C'est une fic fleuve, 20 chapitres (ma plus longue jusquà aujourd'hui!) qui se situe en saison 4 mais je n'utilise aucun thème issu des spoilers dévoilés par Kripke sur la future saison (à part un personnage dont j'utilise juste le nom) donc pas d'inquiétude.
C'est ma fic la plus longue et c'est celle dont je suis le plus fière pour l'instant! J'espère que vous accrocherez jusqu'au bout!

Petit avertissement: C'est un peu inutile ce que je dis la mais c'est la première fois que j'écris quelque chose d'aussi construit et donc si vous souhaitez suivre, je vous recommande vivement de faire attention à tout car chaque détail peut avoir son importance dans la suite! Sur ce je vous laisse lire!

Timing : saison 4

Chapitres: 20

Disclaimer: ça sert à rien mais je tiens à dire que si je me faisais du fric avec ces histoires, ça se saurait!

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Souviens toi de moi

1

Pensées noires pour nuits blanches

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Ca faisait un mois.

Un mois pile aujourd'hui. Un mois que Dean était revenu et un mois que Sam n'avait pas fermé l'œil. Il était mort de trouille à l'idée de se réveiller seul. Si jamais il fermait les yeux trop longtemps, peut-être que Dean disparaitrait à nouveau. Il ne voulait pas – il ne pouvait pas - revivre encore ces 6 mois là.

Ces six mois sans Dean.

Il avait été en enfer lui aussi. Peut-être pas au sens propre, pas le genre d'enfer de flammes et de sang d'où Dean revenait, mais un enfer tout aussi mordant, tout aussi dévastateur. Une prison de solitude, un vide sans fond au creux du ventre que rien ne pouvait combler. La culpabilité, douleur quotidienne, sournoise, vicieuse, tambourinait dans sa tête et dans son cœur.

Mais Dean était revenu.

Le trou noir dans son ventre s'était refermé de lui-même, la douleur avait disparu aussi vite qu'elle était venue et il ne restait plus que de la joie. De la joie et de la peur. Viscérale, omniprésente. Sam était littéralement tétanisé à l'idée qu'il puisse à nouveau arriver quelque chose à son frère. Il passait ses nuits assis sur son lit, une arme à la main à le regarder. Parfois il s'endormait dans la voiture et il se réveillait en sursaut, trempé de sueur en criant le prénom de son aîné. Dean levait les yeux au ciel, faisait des blagues douteuses sur le fait que Sam fasse des rêves humides à son sujet, mais au moins, il était là.

Parfois Sam avait même besoin de le toucher. Juste pour être sûr. C'était ridicule, il le savait, et Dean n'arrêtait pas de lui rappeler. « Lâche ma main ! », « Dégage de mon bras ! », « Vire ton pied de ma jambe ! » devenaient des remarques presque aussi quotidiennes que « Bonjour » ou « merci ».

Le grand frère avait tout essayé : la compassion, l'humour, la moquerie, l'injonction… rien n'y faisait. Sammy restait toujours éveillé la nuit. En tout cas il essayait. Parce que quand Dean se réveillait pour satisfaire une envie préssante, il trouvait toujours son frère assis inconfortablement sur son lit ou sur une chaise, un arsenal à portée de main, ronflant paisiblement. Mais au moindre bruit, Sam sursautait, l'arme au poing, prêt à tirer sur n'importe quoi. Et n'importe quoi, c'était toujours Dean et son regard désapprobateur.

Sam ne voulait rien savoir et Dean avait renoncé, se disant probablement que ça finirait par passer.

Le plus jeune s'étonnait d'ailleurs que son aîné dorme aussi bien. Il s'étonnait de tout ce que faisait son frère d'ailleurs. Il s'était attendu à retrouver une coquille vide, le corps de Dean habité par un esprit complètement anéanti. Pourtant Dean semblait être… et bien, il semblait être Dean. Le sourire facile, l'humour en bandoulière. Quelque chose n'allait pas pourtant, Sam le sentait. Dean n'était pas exactement le même qu'avant, Sam le voyait malgré tous les efforts de son grand frère.

Il y avait une profonde tristesse dans ses yeux, une tristesse qui avait pris la place de la confiance qui avait toujours régné dans ces yeux là. Sam l'avait remarqué la première fois qu'ils étaient retournés dans un bar.

Il avait presque oublié l'effet que ça faisait de se faire draguer. Il n'avait pas touché une fille depuis 6 mois. Quand Dean n'était pas là, tout avait moins de saveur. Le ciel était moins bleu, les arbres moins verts, les filles moins jolies. Et puis ce genre de bars lui aurait rappelé trop de souvenirs douloureux. Il avait préféré éviter. Mais quand Dean était revenu, ils avaient repris leurs anciennes habitudes.

Ou presque.

La serveuse s'était dandinée de toutes ses forces devant Dean. Elle avait vraiment mit tout son cœur à agiter ses fesses dans sa mini jupe et à se pencher langoureusement en avant. Sam était persuadé qu'il allait devoir se taper le retour jusqu'au motel à pied. Cependant son frère avait semblé très mal à l'aise. Il s'était caché derrière sa bière, avait détourné la tête dès que la fille approchait. Il voulait juste qu'on lui foute la paix. Sam était presque désolé pour la fille mais ca ne le dérangeait pas vraiment. Le côté sex-machine n'était certainement pas ce qui lui manquerait le plus. Et puis si ça pouvait éviter à Sam d'attendre dans la voiture ou de rentrer à pied, il était définitivement prêt à accepter le changement.

Il y avait aussi toutes ces absences. Souvent Dean regardait dans le vague complètement obnubilé par un gros paquet de rien du tout qui passait par là. Il s'extasiait sur des trucs ridicules. Sam avait faillit éclater de rire deux jours après le retour de Dean, quand celui ci avait couru dehors sous la pluie. Il s'était planté sous l'averse, regardant les gouttes s'écraser sur ses mains comme si c'était la chose la plus merveilleuse au monde. Sam avait du le trainer de force à l'intérieur, bien décidé à ne pas accepter la pneumonie comme un motif valable de décès.

Mais là où Sam avait vraiment trouvé les choses très étranges, c'était quand son aîné avait pleuré devant un couché de soleil. L'ancien Dean aurait salé et brûlé le nouveau pour ça. Mais Sam n'avait même pas eu le cœur de se moquer. Il avait pleuré avec lui. Il ne savait pas pourquoi mais il avait dû utiliser deux boîtes de mouchoirs pour stopper l'effusion.

Et bien sur il y avait le silence et les cauchemars.

Le silence, ça avait toujours été le mode de défense de Dean. Comme si ses sentiments et ses cordes vocales étaient un seul et même organe. Il avait très peu parlé la première semaine, se contentant de réponses monosyllabiques et de hochements de tête. Ca s'était arrangé avec le temps. Il faisait de plus en plus d'humour, rajoutait de plus en plus de mots dans ses phrases mais ce n'était pas encore le Dean d'avant.

Et parfois il faisait des cauchemars, s'agitait sous les couvertures, se réveillait en sueur, hurlait. Rien d'anormal vu l'endroit d'où il revenait. Sam tentait de ne pas y prêter attention. De toute façon la seule réponse de son frère face à toute inquiétude était un sempiternel et magistral : « Je vais bien ».

Il refusait catégoriquement d'aborder le sujet qui commence par en- et fini par –fer. Bobby avait un œil au beurre noire en guise d'aide mémoire « Sujet : qu'est ce qu'il s'est passé là bas ? – clos. ». Sam n'insistait pas. Il savait qu'il avait tort, il savait que Dean ne pourrait pas vivre éternellement en portant seul ce poids là. Il devait l'aider à le porter. Mais pas maintenant. Dean n'était pas prêt à parler et Sam n'était pas prêt à entendre. Ca ne faisait qu'un mois, un tout petit mois, qu'il était revenu et le cœur de Sam était encore trop secoué pour le récit des tortures de son frère. Pour l'instant la situation les satisfaisait tous les deux. En dehors de ça, Dean était relativement égal à lui même.

De temps en temps, juste de temps en temps, Sam se posait des questions. Il s'imaginait ce que son frère avait subi là-bas et ça lui nouait l'estomac. Il était temps d'arrêter ça. Temps de ne plus penser à ces 6 mois et de se focaliser sur toutes les longues années qui leur restaient à vivre ensemble.

En regardant les chaussettes sales dans l'évier et l'espèce de bout de viande nécrosé qui pourrissant dans le frigo, Sam secoua la tête. Ca allait vraiment être de très longues années.

Dean était définitivement de retour. Et aujourd'hui, il avait envie de tuer quelque chose.

« C'est qu'à deux heures de route au sud d'ici, c'est pas comme si on partait au Yémen ! » s'écria-t-il

« C'est pas la distance qui m'emmerde Dean, c'est la chasse. Tu veux pas plutôt qu'on aille chez Bobby se reposer un peu ? »

« Se reposer de quoi ? On ne fait rien d'autre que glander et se saouler la gueule depuis un mois ! Je deviens dingue là. Il faut que je tue un truc. »

« Je ne sais pas, Dean… »

Sam hésitait, il n'avait pas du tout envie de reprendre la chasse. Rectification : il n'avait pas du tout envie que Dean reprenne la chasse. Ce dont il avait envie, la tout de suite, c'était d'enrouler son frère dans du papier bulle, de coller un sticker 'Fragile' dessus et de le ranger sur une étagère. Malheureusement l'intéressé ne l'entendait pas de cette oreille.

« Sam. Je ne déconne pas. Il faut que je tue un truc. N'importe quoi. » Dean avait prit son air le plus sérieux, les deux pieds fermement ancrés dans le sol, les yeux vissés dans ceux de son frère.

Le plus jeune grimaça, il savait déjà qu'il avait perdu cette manche. Il n'avait aucun argument valable à opposer à ça et il n'allait certainement pas se ridiculiser un peu plus en essayant de surprotéger Dean.

Une demi-heure plus tard l'impala avalait les kilomètres sur les routes ensoleillées du sud de l'Idaho. Ellen leur avait parlé d'un salt'n'burn en puissance à Moscow. Une affaire facile, idéale pour se mettre en jambe.

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C'était le coup classique, une vieille maison inoccupée, les voisins entendaient des bruits, voyaient des choses étranges au travers des vitres sales… L'histoire de la maison n'était pas toute rose, d'ailleurs. Ces murs avaient vu pas mal de sang et la légende de la maison hantée commençait à se répandre sur la ville. Rien de mieux pour éloigner les acheteurs potentiels et attirer les crétins curieux.

L'un de ces crétins curieux justement avait décidé d'entrer dans la baraque pour se faire une frayeur et maintenant il fallait aller lui sauver les fesses.

Sam n'avait pas chassé en duo depuis longtemps. La dernière fois, c'était il y a plus de 3 mois, un reaper-like avec Bobby, ou plutôt un Ghun-al-marht, selon le nom officiel. Sam préférait reaper-like, c'était plus facile à dire, et surtout plus clair, parce que cette créature était comme un reaper. Elle emmenait les gens vers la mort en leur rendant visite en apparition quand ils étaient blessés. Sauf qu'elle les emmenait avant que leur heure n'ait sonnée. Quoi qu'il en soit, le Ghun-al-marht était désormais multiplement excommunié selon les rites les plus puissants de toutes les religions connues et inconnues.

La collaboration avec Bobby n'avait pas été aussi simple que ce que Sam aurait pensé. Certes il connaissait l'homme depuis des années, mais il n'avait jamais travaillé avec le chasseur. Et c'était une autre histoire. Bobby était lent. Plus lent que Dean. Bobby était un bon tireur. Mais moins bon que Dean. Bobby se plaçait instinctivement à gauche. Sam aussi. Du coup il n'y avait personne à droite. Et c'était un problème. Bobby ne faisait pas d'humour pour détendre l'atmosphère. Et ça rendait Sam nerveux. Bobby n'était pas Dean. Et ça rendait Sam malade.

Le plus triste de l'histoire c'était qu'ils avaient fini par se hurler dessus mutuellement et que Bobby avait crié « JE NE SUIS PAS TON FRERE ! ». Ca, ça avait été la goutte d'eau qui avait fait déborder le vase d'acide sulfurique qui sommeillait en Sammy. Il avait frappé, insulté, hurlé de toute ses forces ce pauvre Bobby qui avait essayé tant bien que mal de ne pas cogner en retour.

Le torchon avait brûlé un moment entre les deux mais finalement chacun était revenu vers l'autre la queue entre les jambes pour finir l'affaire correctement. Il l'avait finie, effectivement, et certainement sauvé un paquet de gens dans le processus, mais Sam n'avait pas le cœur à s'en réjouir. Tout ça lui avait rappelé à quel point quelqu'un manquait dans sa vie.

Aujourd'hui c'était différent. Le duo infernal était de retour. 6 mois plus tard, c'était comme s'ils ne s'étaient jamais quittés. Sam observait avec fascination les mouvements rapides et fluides de son aîné. Il le regardait armer son Beretta, scanner les pièces des yeux en quelques secondes, se déplacer comme un prédateur. Il retrouvait cette magique alchimie qui avait toujours été leur force. En un seul geste, en un seul regard ils parvenaient à s'échanger des messages, des codes. « Vas par là. », « R.A.S », « Tiens-toi prêt », « Couvre moi ». Tout fonctionnait à la perfection.

Ils avaient parcouru tout le rez-de-chaussée et s'apprêtaient à descendre à la cave quand ils entendirent un bruit, comme un poids qui s'effondre sur le sol.

« Ca vient de l'étage. » dit Sam.

Ils allaient s'y rendre quand un bruit de verre cassé les fit sursauter.

« Et ça, c'était à la cave. » dit Dean. « On se sépare. Tu montes, je descends. »

Sam secoua la tête « Non, ce n'est pas une bonne idée ! On reste ensemble ! »

Dean leva les yeux au ciel « C'est pas le moment de me faire ta crise Sam ! On est en plein milieu d'une chasse ! »

« Justement ! C'est dangereux ! » S'écria le plus jeune qui ne voulait pas laisser son frère sortir de son champ de vision.

« Ne soit pas débile, ça va aller. On se rejoint dehors. » Et sans attendre de réaction de son cadet Dean couru en direction de la cave.

Sam détestait ça. Oh oui. Il détestait ça. Mais il obéit malgré tout parce qu'il n'allait tout de même pas passer sa vie à materner son grand frère. Il fallait bien qu'il le lâche à un moment où à un autre… Surtout que Dean n'avait jamais été le genre de personne qu'on peut tenir en laisse. Alors il prit une grande inspiration et il grimpa à l'étage.

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Il ne lui fallut pas longtemps pour trouver l'origine du bruit qu'ils avaient entendu. Dans l'une des chambres gisait le cadavre de l'abruti qu'ils étaient venus sauver. A une autre époque Sam aurait certainement éprouvé de la tristesse pour ce pauvre type mais les récentes épreuves dans sa vie l'avaient rendu plus dur, plus amer. Il était vaguement désolé pour lui, mais sans plus. C'était de sa faute. Il n'avait qu'à pas s'introduire dans une maison hanté. Il y a tellement de gens biens qui meurent sans raisons, on ne va pas commencer à pleurer sur les cons qui vont se jeter devant le danger par pure connerie.

Sam se retrouva tout à coup projeté contre un mur et manqua de lâcher son flingue. Heureusement il s'y agrippa et parvint à tirer sur la chose translucide qui avait autrefois du être une femme. Touché par une salve de sel, l'esprit s'évapora. Sam secoua la tête pour retrouver ses esprits et appela son frère.

Pas de réponse.

Le plus jeune des Winchester entreprit de redescendre vers le rez-de-chaussée, toujours aux aguets en cas de nouvelle attaque. Mais l'esprit ne se manifesta pas. Arrivé en bas des marches, Sam appela encore. Il n'obtint pour seule réponse que des bruits étouffés et des coups de feu en provenance de la cave. Ni une ni deux, il se mit à courir vers la porte où son frère s'était engouffré quelques minutes plus tôt. Avant qu'il ne puisse poser la main sur la poignée, la porte s'ouvrit tout grand, dévoilant un Dean ensanglanté.

« Oh mon dieu ! » s'écria Sammy.

Dean leva les yeux au ciel. « C'est moins moche que ça en à l'air. » déclara-t-il simplement.

Sam était livide, il scannait son frère des pieds à la tête. Il avait des marques sur le visage, comme si on l'avait frappé. La lèvre inférieure fendue et l'arcade ouverte saignaient abondamment.

« Qu'est ce qu'il s'est passé la dedans ? » demanda le plus jeune.

« L'esprit s'est un peu énervé sur moi. Rien de grave. »

« T'es sûr ? »

« Oui. Tu as trouvé quelque chose à l'étage ? »

Sam ne répondit pas, il regardait son frère de haut en bas, cherchant une hémorragie, un couteau planté quelque part ou la marque d'un train qui lui serait passé dessus.

« Sam ? »

« Euh… oui. J'ai trouvé le mec qu'on est venu sauver. C'est trop tard pour lui. Il ne reste plus qu'à sortir de là et saler et bruler le… »

Sam ne termina pas sa phrase, Dean pointa son arme et tira une salve de gros sel sur l'esprit qui venait d'apparaitre un peu plus loin. Il le manqua d'une bonne dizaine de centimètres et l'esprit avança vers eux. Sam pointa et tira à son tour. Il fit mouche, l'esprit s'évapora.

« Faut qu'on sorte de là. » dit simplement Dean

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Le salt&burn avait été rapide. C'était une affaire de débutants. Sam se demandait vraiment comment son frère s'était débrouillé pour se retrouver dans un tel état. Il ne le lâchait pas des yeux. Il l'avait observé pendant qu'il conduisait, pendant qu'il creusait pour bruler le corps, pendant qu'il commandait à manger, pendant qu'il regardait la télé. Dean n'arrêtait pas de soupirer, de grogner, de dire à son frère se s'occuper de ses fesses mais rien n'y faisait. Il y avait quelque chose qui clochait avec son grand frère, mais Sam n'arrivait pas à mettre le doigt dessus. Quand Dean s'était finalement endormi, Sam avait quitté discrètement la pièce pour passer un coup de fil à Bobby.

« Hey, Sam. Quoi de neuf ? » Lança la voix du chasseur après la troisième sonnerie.

« Comment tu sais que c'est moi ? »

« Qui d'autre oserait m'appeler à 2h du mat ? »

Sam grimaça et se gratta l'arrière de la tête, gêné. Bobby n'avait pas tort. Pendant les terribles 6 mois d'absence de Dean, le plus jeune s'était retourné vers la seule personne qui restait. Oh, bien sur il y avait eu Ellen. Elle avait essayé d'aider, de toutes ses forces. Mais Sam n'avait jamais vraiment été à l'aise avec une image maternelle. Il ne savait pas quoi faire des regards plein de compassion de leur amie. Alors que Bobby… et bien c'était Bobby. Il était à la fois l'ami, le père, l'oncle et le frère. Tout ce qui manquait à Sam.

Le vieux chasseur était un élément du décor de la vie du jeune Winchester depuis des années. C'était un homme, comme toutes les figures importantes de son existence. Et c'était surtout quelqu'un qui avait connu Dean. Qui l'avait vraiment connu. Pas comme Ellen qui n'avait eu qu'un aperçu. Non. Bobby avait vu le « vrai Dean », celui que personne ne voit jamais. Et Bobby était donc tout aussi ravagé que Sam. Personne ne pouvait comprendre aussi bien que lui la douleur de cette absence là. Dans un monde qui ne lui promettait que de la solitude, cette douleur qu'il partageait avec Bobby était tout ce qui maintenait Sam debout.

Il l'avait appelé à toute heure du jour ou de la nuit pour lui raconter tout et surtout n'importe quoi. Le vieux chasseur n'avait jamais fait de remarque sur les horaires. Il était resté au téléphone à écouter le plus jeune Winchester, complètement ivre, baragouiner à propos des étoiles et des martiens pendant toute une nuit sans l'envoyer paître une seule fois. Au retour de Dean, Bobby avait pensé qu'il pourrait enfin dormir tranquille, mais ce fut tout le contraire. Pendant la première semaine, Sam appelait dès que son frère s'endormait. « Tu crois qu'il va bien ? » « Aujourd'hui il a fait ci. » « Aujourd'hui il a dit ça », « Tu crois que je devrais faire ci ?», « Tu crois que je devrais dire ça ?». Bobby avait, comme d'habitude, écouté patiemment, conseillé aussi bien qu'il pouvait et finalement Sam avait arrêté de le harceler.

Etrangement, le vieux chasseur s'était senti rejeté. Presque jaloux. C'était ridicule, il le savait, mais il ne pouvait pas s'en empêcher. Quand Dean n'était plus là, Bobby devenait le centre de gravité de Sam, celui qui lui maintenait les deux pieds au sol. Il avait donné beaucoup de son temps et de sa personne pour être toujours là pour le jeune Winchester. Et juste comme ça, dans un claquement de doigts, Dean revient et Bobby n'existe plus. Il savait que c'était ridicule mais il était un peu jaloux malgré tout.

« Euh… je suis désolé… je te rappellerai plus tard… » Bredouilla Sam.

« Ben maintenant que tu m'as réveillé autant que tu dises ce que t'as à dire. Histoire que je ne me sois pas levé pour rien, tu vois. »

Il n'en fallut pas plus pour convaincre Sam. Il raconta toute la chasse et ce sentiment bizarre qui lui nouait l'estomac.

« Sam, tu sais bien que ton frère n'est pas du genre à parler de ce qu'il ressent. Peut-être qu'il n'était pas vraiment prêt à repartir à la chasse. Laisse-lui du temps. »

« Je ne demande que ça. Si ça ne tenait qu'à moi on ne chasserait plus du tout. »

« Et vous vous prendriez une petite maison sur la côte, Dean aux fourneaux toi au tricot. Comme le vieux couple que vous êtes. Quelle bonne idée. »

« Tu sais quoi Bobby, toi et Dean vous avez chassé trop longtemps, ça à atteint le cerveau. Pour vous la vie c'est forcément soit du sang partout, soit la maison en pain d'épice d'Henzel et Gretel. »

« Il y a une sorcière dans cette maison Sam. Donc techniquement, ça reste du sang partout. »

Sam soupira. « Ce que je veux dire c'est que c'est possible d'avoir une vie normale. Sans pelouse parfaite, sans démons, juste une vie normale avec une pelouse normale et un boulot normal. Et puis je ne vais pas me marier avec Dean, il aura sa maison, j'aurais la mienne ! »

« Tiens donc. Je demande à voir, j'ai toujours cru qu'on vous enterrerait dans le même cercueil

« C'est censé être drôle ? »

« Nop. C'est juste pour dire que j'ai du mal à vous imaginer l'un sans l'autre déjà, alors dans une maison différente, avec un boulot différent… Je ne sais pas. Pourquoi pas, si c'est ce que vous voulez, mais j'ai pas l'impression que ce soit d'actualité. »

« Ouais en effet. Pour l'instant l'actualité c'est de savoir ce qui cloche avec Dean. Je me demande si… »

« Quoi ? »

« Ben tu sais… on a jamais vraiment parlé de ce qu'il s'était passé… tu sais… là bas. Alors quand je l'ai vu couvert de sang je… Enfin… »

« Ca t'a retourné l'estomac et tu penses que ça doit être encore pire pour lui. » résuma Bobby.

« Ouais. » souffla Sam. « Il a été torturé pendant 6 mois. Dieu seul sait combien de temps ça fait en enfer. Je ne veux pas qu'il revive ça. »

« Tu ne peux pas le protéger de tout. Surtout si c'est lui qui insiste pour chasser. »

« C'était trop tôt. On n'aurait pas dû y aller… Il était choqué quand il est remonté de la cave. Je l'ai vu tout de suite, quelque chose n'allait pas. Il à même manqué l'esprit en lui tirant dessus. Dean qui rate un cible à moins de 50m t'as déjà vu ça ? »

Bobby soupira. « Je sais pas quoi te dire, Sam. Tu dois lui laisser du temps. Il va revenir doucement à lui-même. Levez le pied un moment. Pourquoi est ce que vous ne passez pas chez moi hein ? » Proposa-t-il

Sam sourit. « On verra ça demain. Merci Bobby. »

« Ca veut dire que je peux aller me recoucher ? »

Sam raccrocha. Les paroles du vieux chasseur avaient réussi à le rassurer un peu. Il retourna dans la chambre. Son frère dormait paisiblement dans le lit le plus proche de la porte, comme toujours. Sam le regarda un long moment puis se glissa sous les couvertures. Pour la première fois depuis un mois, il se mit au lit avec l'intention de dormir. Il devait laisser son frère respirer et, très honnêtement, lui aussi avait besoin d'air. Il gardait quand même un arsenal à portée de main… au cas où.

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TBC, chapitre 2 : Reno Parano