Bonjour à toutes et à tous !
Voici donc le début de cette fanfiction UshiTen. D'autres personnages joueront un rôle important dans la suite du récit - deux en particulier.
J'espère que cette histoire vous plaira. L'idée m'est venue en préparant mon rattrapage d'ORL et je l'ai développée ensuite, et j'espère qu'elle vous ravira autant que je m'amuse à l'écrire !
- Sarah
Pétales errants
Chapitre 1
De l'infortune de Tendō Satori
Cela arriva brutalement.
Comme d'habitude, Tendō fut tiré du sommeil par Ushijima ; ce dernier avait pour habitude de servir de réveil-matin personnel à son ami en revenant de son jogging matinal. Mais cette fois, lorsque Tendō ouvrit les yeux, l'expression usuellement stoïque de son camarade de chambre avait été remplacée par un air de surprise.
« Qu'est ce qu'il y a, Wakatoshi ? »
Bien qu'encore un peu engourdi de sommeil, Satori connaissait suffisamment son ami pour être capable de détecter la moindre variation dans son expression.
« Nous n'avons pas de plante dans la chambre, et pourtant ton oreiller est couvert de pétales. »
Tendō fronça les sourcils, à présent parfaitement réveillé. Il leva la tête de l'oreiller pour constater avec un cri de stupeur qu'effectivement, il était recouvert de pétales d'un rose pâle, certains humides et collant à la taie, qui était maculée de petites tâches sombres. Le jeune homme en saisit un du bout des doigts, l'examinant avec attention. Wakatoshi n'était pas du genre à faire des plaisanteries, et à sa connaissance personne n'était venu leur rendre une visite nocturne, aussi l'origine de ces pétales demeurait un mystère entier.
« On a pas laissé la fenêtre ouverte, cette nuit ? »
« Non. »
Tendō explora rapidement la pièce, mais ne trouva nulle autre trace végétale. Il ne se résigna à laisser cette énigme de côté que lorsqu'Ushijima lui signala qu'ils allaient être en retard au petit-déjeuner.
Par la suite, Satori regretta amèrement de ne pas être resté plus longtemps dans la chambre, de ne pas avoir dit à son meilleur ami qu'il le rejoindrait plus tard. Mais après tout, à quel moment de sa vie le destin lui avait-il été favorable ? Si certains semblaient jouir d'une chance inépuisable, Satori était certain que c'était au détriment de sa propre réserve bien maigre de chance.
Une fois arrivés au self, les deux adolescents remplirent leurs plateaux de petit-déjeuner avant de rejoindre Semi et Reon, déjà assis à leur table habituelle.
« Semisemi, Benkei ! » les salua joyeusement Tendō en prenant place à côté du passeur.
Reon leva les yeux au ciel, mais son sourire trahit ses véritables sentiments. Depuis leur match contre Karasuno, l'exubérant central adorait utiliser le surnom que Hinata avait accidentellement donné au numéro 4 ; cela amusait Reon plus que cela ne l'énervait. Après tout, Tendō adorait trouver des petits noms dont il pouvait affubler les gens qu'il appréciait - et ceux qui l'énervaient au plus haut point, Reon se réjouissant de ne pas faire partie de cette catégorie.
Les quatre amis se mirent à discuter de leur match d'entraînement de la veille, mais leur conversation s'arrêta bien vite, Tendō se mettant à tousser brutalement. Son visage s'empourpra, et il porta sa main à la gorge en un réflexe vain ; Semi lui tapa dans le dos, pensant que Satori avait avalé de travers, mais sans effet. Toute l'attention du réfectoire était portée sur eux, la quinte de toux du jeune homme ne semblant pas près de s'arrêter.
Les yeux sombres de Tendō s'embrumèrent et sa vision se voila, mais il parvint à distinguer la silhouette imposante d'Ushijima s'approcher de lui, avant de se sentir brutalement tiré vers le haut. Puis deux bras puissants enserrèrent sa poitrine, comprimant son thorax jusqu'à ce que Tendō vomisse une pluie de pétales roses, tombant sur le sol en amas liés par de la salive sanguinolente.
Un silence de mort s'abattit sur la cafétéria, rendant le bruit soulagé tant que souffreteux de l'adolescent reprenant sa respiration d'autant plus impressionnant.
« Ça va, Tendō ? »
La voix d'Ushijima était aussi égale que d'ordinaire, mais en se retournant vers lui, Satori put lire l'inquiétude dans son regard sombre. Il lui adressa un sourire maladroit avant de répondre d'une voix rauque :
« Je viens de cracher des fleurs, mais sinon j'imagine que tout va bien. »
C'était loin d'être la vérité. Tendō pouvait entendre des murmures tout autour de lui, percevoir des surnoms peu agréables et les regards écœurés des autres élèves, il pouvait sentir un goût de sang et de terre dans sa bouche, lui rappelant que tout cela était malheureusement bien réel loin d'être un abominable cauchemar.
Mais tout comme Tendō pouvait déchiffrer le moindre froncement de sourcils d'Ushijima, le capitaine connaissait assez bien Satori pour savoir que ce dernier mentait. Sans un mot, il agrippa la main du numéro 5 et l'entraîna à l'extérieur de la cafétéria, loin des regards et chuchotements méfiants du reste des élèves.
Ils marchèrent jusqu'à l'infirmerie sans un mot, la main de Wakatoshi ne quittant pas celle de Satori. L'adolescent aux cheveux écarlates trouva du réconfort dans la façon qu'avait Ushijima de tenir sa main, d'une poigne ferme sans lui faire mal. La peau de l'ailier était légèrement moite, trahissant l'inquiétude d'Ushijima.
« Je t'attends là. » affirma le pointu en s'asseyant sur une des chaises devant la porte de l'infirmerie.
« Aw, je ne voudrais pas qu'un élève modèle arrive en retard à cause de m- »
« Tendō. »
Le ton cassant d'Ushijima arrêta net la plaisanterie de son camarade de chambre. Touché autant qu'agacé par la sollicitude de son ami, Tendō soupira et pénétra dans la pièce de l'académie Shiratorizawa qu'il détestait le plus.
L'entretien avec l'infirmière ne dura pas longtemps. Elle ne cacha pas ses doutes devant les symptômes évoqués par son patient, n'ayant jamais vu pareille situation. Il fallut le témoignage d'Ushijima, dont la réputation d'élève modèle et honnête était connue dans toute l'académie, pour la convaincre que Tendō disait vrai. Alors seulement, l'infirmière appela les urgences et la mère de Tendō.
Le malade fut évacué dans les dix minutes suivant le coup de téléphone. Ushijima insista pour l'accompagner, mais cela lui fut refusé, au grand désarroi de Satori. Après avoir répondu aux questions des ambulanciers, Tendō resta silencieux, s'arrachant nerveusement les peaux autour de ses ongles. Il grignota la chair mise à vif, essayant de ne pas penser au fait que d'ici peu, il serait dans un hôpital.
Il est vrai que peu de personnes aiment les hôpitaux, mais Tendō nourrissait une véritable haine pour tous les établissements médicaux, du cabinet de son médecin de famille aux cliniques. Il y avait passé bien trop d'heures de son enfance, et pas les plus joyeuses, pour se sentir à l'aise à l'idée de devoir se faire hospitaliser - l'adolescent se doutait bien qu'au vu de ce qu'il s'était passé, le médecin urgentiste n'allait pas le renvoyer chez lui avec un peu de paracétamol.
Il avait beau s'être péniblement fait une raison, cela ne l'empêcha pas de protester lorsque, une fois arrivés, l'un des ambulanciers le fit s'assoir sur une chaise roulante.
« Vous savez, je peux marcher. »
« On sait jamais. »
Tendō poussa un soupir d'exaspération, sans toutefois chercher à protester davantage. Il sentit son cœur se serrer et sa gorge se nouer lorsqu'il fut conduit aux urgences ; l'odeur familière de désinfectant et de misère humaine, si propre aux hôpitaux, suffit à lui provoquer une bouffée d'angoisse.
« C'est pour quoi ? » demanda froidement l'infirmière d'accueil, jetant un regard dubitatif à Tendō.
L'ambulancier se contenta de lui tendre le dossier qu'il avait rempli avec l'adolescent pendant le trajet. Satori put voir les yeux de l'infirmière s'écarquiller de plus en plus à mesure qu'elle avançait dans sa lecture ; une fois arrivée à la fin du dossier, elle s'empara de son téléphone et pianota frénétiquement sur le clavier numérique.
« Oui, passez-moi le docteur Matsukawa s'il vous plaît. C'est pour une urgence. »
Ce fut seulement à ce moment que Tendō commença à réellement s'alarmer. Il y avait quelque chose de dérangeant dans la façon qu'avait l'infirmière de lui jeter de rapides œillades emplies de pitié et de compassion.
Le lycéen sentir presque de la colère poindre sous son stress, mais avant qu'il ne puisse demander plus d'explications un infirmier prit le relais de l'ambulancier et mena Tendō dans un petit box, à l'écart des autres. Dans un silence pesant, l'infirmier prit les constantes du jeune homme, notant les valeurs avant de quitter la pièce.
« Le médecin ne devrait pas tarder. » annonça-t-il avec un sourire désolé. « Vous avez un haricot à côté de la table d'examen si ça vous reprend. »
Une fois seul, Tendō ne put empêcher des larmes de rage et d'angoisse rouler sur ses joues. Il avait oublié à quel point il détestait les hôpitaux et la sensation de perdre son statut d'humain pour celui d'objet malade. Et comme si cela ne suffisait pas, il repartit dans une violente quinte de toux, s'emparant maladroitement du haricot. Bien lui en prit, car cette fois il n'eut pas besoin de forcer pour vomir un jet de pétales. La gorge en feu, Satori regarda avec horreur le flot rose se déverser dans le réceptacle de métal.
« Satori- oh mon dieu ! »
Tout à sa contemplation macabre, l'adolescent n'avait pas entendu la porte du box s'ouvrir. Il détourna le regard vers la personne qui avait parlé : Setsuna Tendō, sa mère.
La quadragénaire avait l'air effrayé, et Tendō ne pouvait lui en vouloir. Sa régurgitation ayant stoppé, il voulut prendre la parole mais sa mère l'en empêcha, se ruant vers lui pour l'étreindre. Le jeune homme fut surpris, car les démonstrations physiques d'affection de sa mère s'étaient faites terriblement rares depuis l'entrée du numéro 5 dans l'adolescence.
« Je vais bien, Maman… juste mangé un peu trop de terreau. » tenta de plaisanter Tendō pour masquer son malaise et sa propre inquiétude.
Ils restèrent un moment ainsi, Setsuna berçant son fils comme lorsqu'il était encore petit et sortait d'une crise d'hystérie. Elle ne s'arrêta que lorsque la porte du box s'ouvrit sur un homme d'âge moyen portant une blouse blanche. Tendō ne put s'empêcher de remarquer l'air presque blasé du médecin ainsi que ses lourdes cernes ; il appréhenda alors la consultation, devinant que le médecin sortait d'une longue garde et risquait de vouloir expédier le cas de Tendō au plus vite.
« Bonjour, je suis le docteur Matsukawa. » se présenta-t-il en serrant la main de Tendō puis celle de sa mère.
S'ensuivit une courte discussion durant laquelle le praticien fit répéter à Satori ce qui l'avait amené. Le jeune homme s'exécuta de mauvaise grâce ; mais pour une fois, il avait l'impression que le médecin l'écoutait attentivement, lui faisant répéter ou préciser certains détails.
Une fois que le central eut terminé, le docteur Matsukawa se saisit du haricot posé à côté de Tendō.
« C'est donc la troisième fois, si on compte cette nuit ? » s'enquit-il en passant des gants en vinyle.
« Oui. »
Le médecin prit quelques pétales entre ses doigts, les examinant attentivement.
« Madame, je vais vous demander de sortir s'il vous plaît. Ne vous inquiétez pas, ce n'est rien de dangereux. » s'empressa-t-il de la rassurer en voyant l'air paniqué de la mère de son patient. « Simple question de secret médical. »
Setsuna s'exécuta donc, laissant Tendō seul avec le docteur Matsukawa. Une fois la porte fermée, le médecin s'assit en face du jeune homme avant de lui demander :
« Avez-vous déjà entendu parler de la maladie de Hanahaki ? »
L'adolescent demeura pensif quelques instants, fouillant sa mémoire du mieux qu'il pouvait. Mais rien n'y fit : il était certain de ne jamais avoir entendu le nom de cette maladie.
« Non. »
« Je m'en doutais. » acquiesça le docteur Matsukawa. « C'est une maladie plutôt rare, et les patients n'aiment en général pas trop ébruiter leur condition. »
Tendō eut un rire sans joie. Au vu de la scène qu'il avait provoquée au petit-déjeuner, il pouvait être certain qu'à son retour, tout le lycée serait au courant que le troisième année bizarre de la classe 2 avait vomi des fleurs en plein milieu de la cafétéria.
« La maladie de Hanahaki est apparue au début des années 1990. » expliqua le médecin. « Il a fallu un certain temps pour étudier son origine, mais les symptômes sont toujours les mêmes : des crises de renvoi au cours desquelles le patient rejette des pétales de fleur, parfois avec un peu de sang. En général, les malades rapportent une à cinq crises par jour, selon l'intensité des sentiments. »
« Des… sentiments ? »
« Oui. Cette maladie… a une particularité assez unique. Elle est causée par un amour non partagé. »
Le regard de Tendō se voila, troublant sa vision de larmes. Évidemment… bien sûr que la personne qu'il aimait ne partageait pas ses sentiments. Après tout, qui voudrait de lui ? On lui avait assez répété qu'il était un monstre, un otaku à moitié cinglé et franchement bizarre qu'on avait accepté dans la prestigieuse équipe de volley de Shiratorizawa qu'en raison de son instinct tant remarquable que monstrueux. Mais Satori avait beau s'être fait à l'idée que celui qu'il aimait ne retournait pas son affection, en avoir une preuve irréfutable lui porta un coup terrible.
« Et… est-ce qu'on en guérit ? Ça se soigne ? » parvint-il à articuler, serrant les poings si fort que ses ongles y incrustèrent des marques en croissants de lune.
« Les pétales disparaitront dès que la personne chérie vous aimera. Le parasite pulmonaire qui les produits mourra aussitôt, et votre corps se chargera de l'évacuer. »
« Mais si on n'est pas aimé en retour ? »
Un bref silence plongea la pièce dans une atmosphère pesante. Tendō fut certain de déceler de la pitié dans le regard de son interlocuteur ; mais avant qu'il ne puisse s'énerver contre la condescendance du praticien, celui-ci reprit la parole.
« Alors, il n'y a plus qu'une solution. La chirurgie. Le parasite est retiré, et avec lui disparaissent les pétales… mais aussi les sentiments. »
Les yeux humides de Tendō s'écarquillèrent.
« Vous voulez dire… qu'on ne ressent plus rien pour celui qu'on aimait ? »
« Non. » confirma le docteur Matsukawa. « Mais je ne vous conseille pas de prendre de décision hâtive, vous pourriez le regretter. Amèrement. Si vous le désirez, je peux essayer de vous mettre en contact avec d'anciens patients. »
Le lycéen demeura silencieux. Le médecin dut prendre son absence de réponse pour un accord tacite, car il tira un carnet de sa poche, sans nul doute pour y noter les coordonnées du jeune homme. Ce dernier, le regard attiré vers la poche de la blouse que portait le praticien, en profita pour regarder pour la première fois le badge du médecin.
Il sentit son cœur s'accélérer et comprit pourquoi sa mère avait semblé encore plus désespérée à l'arrivée du spécialiste.
Dr Matsukawa Ichigo
Psychiatre
Satori se sentit partir en arrière, dix ans plus tôt. Lorsqu'un nombre incalculable de médecins l'avaient vu et examiné sans jamais pouvoir dire ce qui n'allait pas chez lui, ce qui le poussait à se taper la tête contre les murs en hurlant qu'il voulait mourir pour que tout s'arrête. Lorsqu'il avait enfin, ayant mené ses propres recherches de son côté, compris ce qu'il était, trouvé le mot qui détenait la clé de l'énigme, le mot que son père lui avait renvoyé au visage en criant que Satori était tout simplement fou à lier.
Si Tendō détestait les médecins, il haïssait les psychiatres, ces pseudo-spécialistes de l'esprit humain qui n'avaient jamais accepté son diagnostic, lui collant à la place des étiquettes qui ne lui convenaient absolument pas. Schizophrène, antisocial, psychotique, autiste - la liste lui revint en mémoire en même temps que les heures passées dans des couloirs d'hôpital à pleurer sur les genoux de sa mère.
« Je dois y aller. » dit-il brutalement en se levant de la table d'examen. « Merci pour tout. »
« Est-ce que vous êtes sûr que ça va aller ? »
L'espace d'un instant, Tendō décela de la chaleur dans le regard du docteur Matsukawa, et il fut tenté de lui dire à quel point non, ça n'allait pas aller. Mais le badge rouge du médecin attira son regard, et il quitta le box sans se retourner.
« Je suis de retour ! » annonça Tendō d'une voix faussement enjouée en entrant dans la chambre qu'il partageait avec Ushijima.
L'ailier se leva aussitôt de son lit pour accueillir son ami. L'intensité du regard d'Ushijima mit Tendō mal à l'aise ; il était clair que l'adolescent attendait des explications quant à ce qui était arrivé à son camarade de chambre. Mais Satori se garda bien de les lui donner, Ushijima étant la dernière personne à qui il avait envie de parler de la maladie dont il souffrait.
Dans un lourd silence, Satori tenta tant bien que mal d'ignorer la carrure impressionnante d'Ushijima, ses muscles puissants que son court pyjama n'aidait pas à dissimuler, sa prestance majestueuse, son regard émeraude sombre qui ne quittait pas Tendō du regard, empli d'inquiétude tant que d'impatience.
Bien entendu, Satori ne parvint à faire abstraction d'aucun des éléments qui caractérisaient tant Wakatoshi.
Et quand la main d'Ushijima se posa sur son épaule en un geste maladroit qui se voulait rassurant, Tendō comprit à quel point sa lutte contre la maladie de Hanahaki était mal engagée.
Alors, je ne déteste pas les médecins et encore moins les psys - je suis étudiante en médecine et veux devenir pédopsychiatre. Simplement, il y a malheureusement trop de médecins qui traitent la maladie et non le malade.
Quand au diagnostic de Tendō (et la raison pour laquelle il est rentré tard à l'académie), ça sera pour un prochain chapitre. Cette fic contiendra mon interprétation personnelle de ce personnage que je trouve hyper intéressant.
Bisous à tous ! ~
