En effet, devenir quelqu'un d'autre sans que l'on vous ai demandé votre avis, ce n'est pas évident. Mais changer de sexe ... misère.

Bonne lecture ^^


Shinya Hiiragi, major de son état et fils adoptif de la famille régnante au Japon, était plus que perplexe. Perdu serait le mot juste à vrai dire. Franchement perdu même. Et il n'était pas le seul. En face de lui se tenait l'héritier de la famille, Kureto Hiiragi, ainsi que le second frère Seishirou. Et ils avaient l'air aussi à l'aise que lui. Shinya avoua que c'était bien la première fois qu'il voyait son aîné ainsi. Kureto réfléchissait, semblait tenir une solution avant de la rejeter aussitôt. Non, il ne savait décemment comment réagir. Il y avait de quoi il fallait dire. La situation était totalement inédite, inimaginable.

« Bon alors, on fait quoi ? » demanda Seishirou.

« Eh bien nous allons … nous allons … » répondit Kureto.

Shinya afficha une mine blasée. Il avait parlé avec assurance, pour finir par montrer qu'en réalité il ne savait pas.

« Y'a-t-il seulement quelque chose à faire ? » osa Shinya.

« Forcément, on ne va pas le laisser comme ça. »

Kureto hésitait. Oh c'était évident qu'il hésitait.

« Oui ? Je te rappelle que ça a tué pratiquement tout le monde la première fois. Et comment diable pourrait-on inverser le processus ? Tu as entendu le médecin sur son analyse. Où pourrait-on trouver l'équivalent ? Est-ce que ça marcherait au moins ? » reprit Shinya, le pouce par-dessus l'épaule.

C'était là tout le problème. Les risques étaient présentement trop élevés pour arranger cette histoire. Les trois hommes soupirèrent. Quelle pagaille franchement ! Kureto était ennuyé de perdre un bon élément, Shinya un ami … bon, Seishirou nettement moins mais c'était tellement surprenant qu'il n'arrivait pas à en rire. Après un moment de silence, encore un, Kureto décida de congédier les deux autres. Il avait mal à la tête à vrai dire. Shinya referma la porte. Puis il lâcha un profond soupir tout en marchant. Dans la salle de pause, il retrouva le reste de l'équipe qui leva des yeux interrogateurs vers lui. Mais l'expression qu'il leur renvoya calma leurs espoirs.

« Navré, mais on n'a pas de solution pour l'instant. » annonça-t-il en se laissant tomber sur un fauteuil.

« Mais alors … il va rester comme ça ?! À vie ?! » s'exclama Goshi.

« Oui à moins qu'on ne trouve une solution présentant le moins de risque possible. » soupira Shinya.

Chacun échangea un regard avec les autres. Effectivement, l'histoire était encore plus complexe qu'ils ne l'avaient imaginée. À part replonger dans le silence et se remémorer comment tout était arrivé l'équipe ne put rien faire d'autre.

Tout avait commencé il y a deux mois de ça environ. Guren Ichinose avait été chargé de superviser une expérimentation humaine. Un jour comme les autres, il se rendit donc dans le laboratoire abritant cette expérience. Il composa le code, puis entra. Les scientifiques étaient déjà sur place et à pied d'œuvre. Tout au fond, un grand carré de verre dans lequel se trouvait une jeune fille reliée par des câbles au plafonds. Elle poussa un rugissement de rage et frappa contre le verre.

« Je vais vous tuer ! Tous un par un ! » rugit-elle.

Guren soupira, puis se rapprocha du chef de l'équipe qui lui tendit un bloc-notes.

« Où en est-on ? » demanda Ichinose.

« Eh bien …le résultat est mitigé j'avoue. Le corps subit des changements trop rapides et surtout inattendus. »

Guren parcourut les écrits des yeux, haussant un sourcil. En effet, c'était curieux. Mais peut-être que cela était normal après tout. Le scientifique haussa les épaules. Probablement oui. D'un autre côté, ce n'était pas comme s'ils avaient beaucoup de précédents. Une nouvelle injection fut faite à la jeune fille qui poussa un hurlement. Elle tira ensuite violement sur les câbles qu'elle finit par arracher, avant de se précipiter contre le verre qu'elle tenta de briser. Hélas, la seule chose qu'obtient le cobaye fut de s'assommer.

« Très bien. Continuez comme d'habitude. Tant que ces changements n'affectent pas l'expérience, n'en tenez pas compte. » conclut Guren.

Il rendit le bloc-notes puis quitta le laboratoire.

Une fois dehors dans les couloirs, il s'adossa contre un mur. Quelle horreur ce projet de séraphin de la fin. Voilà un moment qu'ils étaient dessus. Pour l'heure, c'était le seul sujet qu'il supervisait. Les autres étaient morts à vrai dire. Il n'empêche que ça le dégoûtait. Cette chose avait déjà entraîné la fin du monde, plongeant le monde dans la ruine et la peur, mais non on recommençait. Guren rouvrit les yeux. Il se décolla du mur. L'homme espéra que cette expérience échoue comme les autres, qu'il en soit délivré et qu'il passe à autre chose. En attendant, il allait se changer les idées notamment en allant voir où en était son petit protégé. Yuuichiro Hyakuya qu'il avait récupéré non loin de Sanguinem, se trouvait actuellement dans la classe réservée aux civils.


L'endroit constituait dans certains cas un tremplin vers la Moon Demon Company, l'unité destinée à exterminer les vampires qui régnaient sur le monde depuis l'Apocalypse. Une fois les élèves dotés de potentiel repérés, on les envoyait dans une autre classe pour y apprendre des sorts et à résister aux armes démoniaques. De retour dans son bureau, Guren prit une feuille de papier, puis rédigea un mot à l'attention de Yuuichiro, qu'il ferait remettre par Shinoa Hiiragi. Ceci fait, il passa à des dossiers qu'il lui restait à traiter. La pause déjeuner arriva. Guren alla retrouver son équipe. En passant, il remit le mot à Shinoa. Ses amis le saluèrent gaiement quand il arriva. Dire qu'aucun ne savait ce qui se tramait dans les labos.

En y repensant, Guren manqua de perdre son appétit. N'empêche, pauvre enfant. Servir de rat de laboratoire était horrible. Mais ni lui ni elle n'avait le choix. Guren repensa à Yuuichiro. Lui aussi était passé par la case labo. Et c'était le meilleur sujet. Pour l'heure, le brun était le seul au courant. Et si tout se passait comme prévu, il aurait un aperçu de ses capacités à Shinjuku.

« Ou peut-être avant, si l'autre expérience s'avère un succès plutôt qu'un échec. » songea l'officier.

Mais il préférait la seconde version. Yuu au moins n'avait plus à subir ces atrocités. Simplement à révéler ses capacités ce qui serait sûrement moins douloureux N'est-ce pas ? Le déjeuner achevé, Guren retourna à son bureau. Il lui fallait encore faire un compte-rendu sur l'avancée du projet owari no seraph.

Le jour suivant, Guren dut retourner surveiller l'avancée de l'expérience. Une fumée épaisse avait envahi le carré de verre. Le sujet était toujours furieux. Cependant, le blanc de ses yeux avait viré au noir, et des excroissances apparaissaient dans son dos. Le prélude aux ailes de l'ange. Guren fut impressionné de constater que le sujet semblait aussi résistant à la douleur. Quoique … vu les hurlements qu'elle poussa ensuite peut-être pas tant que ça. Mais comme la veille, la jeune fille frappa la vitre en les menaçant de mort.

« Elle aurait sans doute fait un très bon soldat. Quel gâchis. » pensa Guren.

Le sujet continua de se débattre avec force alors que le dosage fut augmenté. La phase critique approchait. Les autres sujets étaient morts à cet instant. Chacun retint son souffle. Le corps entier du cobaye se tendit au maximum, donnant même l'impression qu'il allait se rompre. Et puis plus rien. Elle s'était effondrée. De nouveau. Comme les précédents. Guren ferma les yeux en entendant la sonnerie longue de l'appareil chargé de surveiller le fonctionnement du cœur. Voilà, elle avait fini de souffrir. Un autre échec, tant mieux. Il n'aurait plus à venir ici chaque jour. C'était enfin terminé. Les scientifiques étaient déçus bien sûr, mais alors ça il s'en moquait éperdument. L'homme rendit le bloc-notes avec un soulagement manifeste. Le reste de l'équipe ne remarqua rien, trop préoccupée par le fait de trouver un autre sujet. Si bien qu'en vérité, personne ne vit l'oscillation de la ligne verte de l'appareil. Ni même que celle-ci oscillait de plus en plus, indiquant un retour à la vie.

Le cobaye finit même par se redresser. Elle demeura assise dans un premier temps, histoire de se ressaisir. Puis son regard se tourna vers les scientifiques. Les responsables de son malheur. De toute sa douleur. D'autres pensées vinrent se greffer. Ils avaient violé le grand tabou, commis le plus important des péchés et devaient être punis. Sur ce dernier point, elle était d'accord : ils devaient payer. Alors soit. La jeune fille se sentit comme bouillonner à l'intérieur. Comme une grosse vague en train de se former. Enfin, elle se remit debout. Les humains de leur côté, étaient toujours perdus dans leur vaine discussion.

« Maudits humains, vous allez mourir aujourd'hui. »

Elle leva le poing.

« Hé ! Elle vit toujours regardez ! » s'exclama une femme.

Guren qui avait atteint le fond du laboratoire se retourna en entendant les exclamations de joie. Il ne sut dire à cet instant, s'il était soulagé qu'elle ait survécu ou déçu. Le lieutenant-colonel n'eut cependant pas le loisir d'y réfléchir. Ce regard que le sujet leur lançait … son instinct s'éveilla aussitôt. Et il eut raison. Le cobaye abattit son poing sur le verre qui cette fois explosa en une myriade de morceaux reflétant la lumière. Puis Une onde d'énergie se répandit après l'impact. Tout le monde bascula en arrière. La porte amortit la chute de Guren, mais sa tête heurta brutalement le métal.

« Ouch ! »

Sa vue devint trouble. Cependant, il entendit très bien le hurlement de rage du séraphin. Elle sortait de sa prison. Il bascula en avant, et se rendit près de la console en rampant. La jeune fille arracha la tête d'un premier scientifique. Guren se redressa, son mal de tête persistant. Le sujet ouvrit soudain la bouche. Un gaz verdâtre en jaillit, se répandant rapidement dans la pièce. Guren appuya sur le bouton d'alarme. Le nuage sans doute toxique arriva vers lui et l'enveloppa. Il toussa fortement, sa gorge le brûlant mais parvint juste avant à actionner les ventilateurs. De partout les cris d'agonie des scientifiques lui arrivaient. Tout à coup, le sujet le saisit par le cou et le plaqua au sol avec une force peu commune.

« Je vous l'avait bien dit non, que j'allais tous vous tuer ? »

Elle ouvrit de nouveau la bouche, quand soudain le soldat dégaina son sabre et lui transperça la cage thoracique. Le sujet eut un son de douleur et de surprise mêlée, avant de s'effondrer. Guren perdit lui aussi connaissance, et le cobaye chuta sur lui.


Lorsque les secours arrivèrent, le gaz avait été évacué. On dégagea le cobaye et Guren fut emporté aux urgences. Ses aides furent prévenues, Shinya se chargea d'avertir Goshi et Mito. Tous se retrouvèrent ainsi à l'hôpital de l'armée, inquiets. Guren avait été placé dans une pièce spéciale, le temps que des examens sur ce qu'il avait inhalé soient menés. Aucun droit de visite.

« Mais que s'est-il passé au juste ? » s'enquit Sayuri.

« Je ne sais pas exactement ce qui a déclenché l'incident, mais ce qu'il faisait ou assistait à a visiblement mal tourné. Il a eu beaucoup de chance : tous ceux présents dans la pièce sont morts. Je ne sais pas quelles seront les conséquences de tout ça. » répondit le médecin chargé du brun.

« Dans combien de temps serons-nous fixés ? Et quand pourra-t-on le voir ? » demanda Shinya.

« Je dirais d'ici trois jours pour les résultats d'analyse. Mais pour ce qui est des visites il va falloir être patient. Tout va dépendre de ce que l'on va découvrir. »

Le docteur les laissa sur ces bonnes paroles. L'équipe resta un moment derrière la vitre permettant de surveiller le patient à distance. Guren avait été intubé et perfusé. Il ne restait plus qu'à attendre. Ils restèrent une bonne heure à le contempler avant de résigner à s'en aller. Il ne se passerait plus rien, ainsi que le souligna Mito à Sayuri et Shigure. Ils reviendraient d'ici trois jours pour en savoir plus.

Et donc trois jours après l'accident, toute l'équipe de Guren fut de retour attendant avec impatience les fameux résultats. Le médecin les rejoignit dans le couloir.

« Vous êtes là. Alors entrons dans le vif du sujet. A première vue, le gaz n'était pas toxique et n'a rien endommagé : les organes sont intacts, le système respiratoire fonctionne normalement. Je n'ai pas trouvé trace de poison dans son sang non plus. Taux de globules blancs et rouges normal, tout comme les plaquettes. Pas de lésion cérébrale, juste une bosse. Pour le moment, aucune réaction immunitaire. »

« Mais ? » demanda Shinya.

Car il voyait à l'expression du toubib que ce diagnostic n'était guère suffisant.

« Mais je suis surpris de ce résultat, et un peu inquiet. L'officier Ichinose a perdu connaissance et il y a forcément une raison à cela. J'ai eu vent que les ventilateurs ont été actionnés, et je doute que ce soit une coïncidence. Et surtout pas par lui. Il était le seul près de la console, je ne peux que penser qu'il y a eu un danger. Donc vu qu'il est toujours inconscient je le garde en observation, et continuerait les examens. » reprit le médecin.

Il savait très bien que Guren était un soldat aguerri, et qu'il devait en falloir pour qu'il tombe dans les pommes. Forcément quelque chose leur échappait. Le brun n'était donc pas encore sorti d'affaire.

« Mais il va bien non ? » demanda Mito, cherchant à être rassurée.

« Somme toute oui je dirais qu'il va bien. Le pronostic vital n'est pas engagé et je ne détecte pour le moment aucun dommage. Il faut juste … attendre. »

Les regards se portèrent sur Guren, toujours inconscient. Les amis du brun restèrent encore un moment. Des infirmières entrèrent porteuses de masques et de combinaisons, pour effectuer des prélèvements. Le médecin annonça qu'il serait transféré dans une chambre ordinaire dès ce soir. Les visites pourraient débuter dès le lendemain. Hélas, avec la prochaine offensive à Shinjuku qui se préparait, les examens des ados pour Sayuri plus toutes les réunions des divers commandants, ils n'auraient guère le temps de rendre visite à leur ami. Le médecin les assura qu'ils seraient prévenus au moindre changement. Vu que tout allait bien, ils n'avaient donc pas à s'inquiéter.

« Major, si ce n'est pas trop vous demander j'aimerais un dossier sur ce qu'il faisait. Ça pourrait m'aider à comprendre. » glissa le toubib à Shinya.

« Bien sûr, je vous amène ça dès que possible. »

Le docteur le remercia. Shinya fut de retour deux jours plus tard, et sortit le dossier de sa veste qu'il remit discrètement au médecin. Ce dernier fila aussitôt dans son bureau pour le lire. Le dossier était top-secret, mais l'homme ne se laissa pas surprendre. Il lut avec grande attention les comptes-rendus médicaux. Eux seuls l'intéressaient.

« ! »

Quelque chose venait de retenir son attention. Se pourrait-il que … mais si ça se trouve, ça ne ferait rien du tout à l'officier. Néanmoins, le médecin garda cette information en tête. Par précaution, il téléphona à un collègue de la morgue pour demander différents prélèvements sanguins. Ceux-ci lui furent apportés en fin de journée. Le médecin se chargea lui-même de l'analyse dès le lendemain matin.

« Voyez-vous ça. Qu'est-ce que c'est que ça ? On dirait bien qu'il va me falloir de l'aide en fin de compte. »

Les jours défilèrent. Un mois passa, Guren restait inconscient. Par contre, il faisait l'objet d'une attention accrue du médecin, ainsi que le nota Shinya. Goshi lui en toucha deux mots.

« Évite d'en parler aux filles. Elles se font assez de mauvais sang comme ça. » recommanda Shinya.

« Et que dit le toubib ? » questionna Norito.

« Il n'est pas inquiet. Mais je crois qu'il attend que quelque chose se passe. »

En attendant, ils entrèrent pour voir leur ami. Après un moment passé à le regarder et lui avoir parlé, Shinya pencha la tête.

« C'est moi ou il a l'air différent ? »

« Comment ça ? » s'étonna Goshi.

« Ben je sais pas, mais son visage a un petit quelque chose de changé. » répondit Shinya.

« Hmmm … non je ne vois pas. »

« Bon alors je dois rêver. Bien, il faut que j'y retourne. » conclut Shinya.

« Et moi donc. » fit Goshi.

Les deux hommes quittèrent la pièce. Le médecin poursuivait ses recherches. Il avait découvert un ensemble de molécules inconnues, aussi bien dans le sang de Guren que dans celui des scientifiques. Restait à les identifier et découvrir leur influence dans l'organisme. Leur taux était très élevé toujours, or le médecin était certain qu'elles n'étaient pas si développées un mois plus tôt. Il avait donc ordonné le confinement du patient, dans la crainte de la propagation d'une nouvelle maladie.


« Raaaah je manque de données ! Comment savoir si ces molécules ont une action sur les autres corps ? Ils sont morts et enterrés à présent. Bon, le lieutenant-colonel en est toujours au même point. Je dois poursuivre les analyses. » songea le médecin.

Malheureusement, à cette époque là il ne pouvait en faire part à aucun autre confrère à l'étranger. Leur aide aurait certainement été bien utile pourtant. Hélas, il devait poursuivre avec le peu de collègues compétents en la matière. Il s'octroya une pause avant de poursuivre. Finalement, un autre mois passa. Deux mois s'étaient ainsi écoulés depuis l'accident du laboratoire. Le médecin vint pour ausculter son patient. Il écarta le rideau et resta figé. Puis un moment plus tard, il souleva littéralement le haut du pyjama dont on avait revêtu le soldat.

« Oh seigneur ! » s'écria-t-il dans son casque.

Car il avait fallu quelques précautions tant que l'on ignorait à quoi on avait affaire. Le docteur regarda alors dans le pantalon.

« Mais c'est impossible ! Comment … si vite … mais alors, les molécules … »

Comment n'y avait-il pas pensé plus tôt ? La seule chose qu'il n'avait pas pensé à analyser. Le médecin préleva du sang, et courut en laboratoire sans même ôter sa combinaison.

« Vite ! Une analyse d'urgence ! » s'écria-t-il en déboulant.

Ses collègues échappèrent des cris de surprise. Le professionnalisme reprenant le dessus, une femme prit le tube de sang pendant qu'elle demandait ce qu'elle devait chercher. Le médecin ôta sa combinaison à la hâte pendant que l'examen était en cours. Deux heures après, le résultat était positif. Il demanda alors que l'on se penche sur ces fameuses molécules en se basant sur le résultat. Mais il leur faudrait la journée pour ces dernières. Le médecin acquiesça. En attendant, il fit transférer le patient dans une chambre ordinaire.

Le soir venu, Guren reprit enfin connaissance. Il se réveilla vaporeux. Sa vue finit par se stabiliser.

« Où suis-je ? »

Lorsqu'il remarqua sa perfusion au bras, il comprit qu'il était dans un hôpital. Tout lui revint. Le cobaye, son apparent décès puis son réveil et enfin l'attaque. Le gaz … il en avait inhalé, Guren en était sûr. Il parvint à s'asseoir, et ôta la perfusion. Il se sentit soudain une envie pressante. Avec difficulté, il se leva et tâcha de trouver les toilettes. Bon, s'il était réveillé c'est qu'au moins il était vivant, pensa-t-il en se positionnant devant la cuvette. Chambre ordinaire, donc pas de soins urgents. Après, tout dépendait de combien de temps il était resté inconscient.

« Qu'est-ce … » dit-il, la main dans le pantalon.

Main qui visiblement ne trouvait pas ce qu'elle cherchait. Guren la déplaça. Le fait qu'il ne rencontre que du vide le réveilla complètement. Il baissa la tête, pour découvrir une première chose qui n'aurait jamais, au grand jamais dû se trouver là. Ichinose tira le haut de son pyjama. Il devait rêver ce n'était pas possible ! Puis il regarda dans son pantalon. Enfin, il se regarda dans le miroir au-dessus du lavabo … et poussa un hurlement anormalement aigu.

Son cri s'entendit depuis le couloir, à fortiori lorsqu'il sortit de la salle de bain en hurlant comme un possédé.

« GUREN ! » s'exclamèrent ses amis d'une seule voix.

Shinya ouvrit la porte à la volée pour se pétrifier. Devant lui se tenait … une femme. Enfin, il croyait, car elle avait des traits pas très féminins. Donc la demoiselle va-t-on dire ne cessait de crier tout en regardant dans son pyjama et en se touchant le buste et le bas-ventre.

« Où est Guren ? C'est qui celle-là ? » questionna Mito.

C'est alors que la brunette les remarqua.

« Shinya … Mito … qu … qu'est-ce qui m'arrive ?! » s'écria-t-elle complètement paniquée.

« Qui êtes-vous ? Où est Guren-sama ? » demanda Sayuri, autoritaire.

« Mais c'est moi Guren ! »

« Mais bien sûr. » fit Shigure.

Déjà elle sortait un premier kunaï. Shinya avait froncé les sourcils, mais était toujours incapable de bouger. Cette fille … elle ressemblait bougrement à Guren quand même. On aurait dit sa sœur. Seulement il était certain que Guren n'avait pas de sœur. Et si tel était le cas, d'où sortait-elle ?

« Ah. Il est réveillé. » fit une voix.

Le médecin. Il s'était faufilé entre Shinya et Mito, et ne paraissait pas surpris de ce qu'il voyait.

« Monsieur … euh mademoiselle… Ichinose, si vous voulez bien vous calmer je vais tout vous expliquer. » dit-il en levant les mains.

Une exclamation de surprise sonore se fit entendre.

« Attendez attendez ! Vous ne voulez quand même pas dire … que c'est Guren ça ?! » s'exclama Goshi en pointant la concernée.

« J'en ai bien peur. Voilà un moment que je remarque quelques changements, et ce n'est que depuis une heure que je viens de comprendre. »

Le médecin pria tout le monde d'entrer, et ferma la porte. Enfin, il se tourna vers un auditoire totalement choqué. Il pria avant toute chose le lieutenant-colonel de s'asseoir, pressentant un choc psychologique. Ensuite, il révéla ce qu'il avait appris :

« J'ai parcouru le dossier sur le sujet dont vous vous êtes occupé, mons … mad … enfin Guren si vous me permettez que je vous appelle ainsi. »

« Oui oui, allez-y. » dit-elle en balayant l'air de la main.

« Merci. Et ce qui m'a le plus étonné c'est cette croissance rapide de son corps. Alors qu'elle n'avait que onze ans elle a développé des atours si je puis dire, qu'on trouverait plutôt chez une femme adulte et pleinement formée. Et ce depuis le début de l'expérience. Autrement dit, ce n'était pas du tout naturel. J'ai gardé cette piste en tête, malgré son absurdité. C'est ce qui m'a conduit à examiner le sang des scientifiques sous un nouvel angle. Surtout quand j'ai remarqué que vous commenciez vous aussi à vous métamorphoser. » commença le médecin.

Shinya arrondit les yeux. Il n'avait donc pas rêvé quand il avait cru remarquer une différence chez son ami. Le fait était que le gaz inhalé était la cause de ce changement.


« Il contenait des molécules d'un genre nouveau, qui se sont répandues dans tout votre système avec une mission : dévorer les hormones mâles. Mais surtout, elles ont délivré à la place des œstrogènes particulièrement actives. Elles se sont très vite développées au point d'atteindre un taux anormalement élevé, même pour une femme. Ces hormones féminines ont entrepris de vous faire littéralement changer de sexe. Je pense que ce changement est déjà en phase terminale. Bientôt, vous serez une femme de la tête aux pieds. » expliqua le médecin.

« Mais … mais je veux pas être une femme ! » s'exclama Guren, horrifié.

« Et que peut-on faire docteur ? » questionna Shigure.

« Pas grand-chose j'en ai peur. Pour le moment comme vous le voyez, il a encore une apparence assez androgyne. Je vais devoir effectuer de nouveaux prélèvements afin de prédire une date de fin de … transformation. »

Un silence choqué suivit ces révélations. Guren devenait une femme. La personne qu'ils connaissaient depuis près de neuf ans était en train de disparaître, du moins physiquement. Et ils ne pouvaient rien y faire. Le nuage avec lequel le sujet du séraphin de la fin avait cru les empoisonner avait eu un tout autre effet.

« Je crois que je vais m'évanouir. » fit soudain Guren.

Ses yeux remontèrent, et il/elle bascula sur le dos. Heureusement qu'il avait écouté le médecin et s'était assis sur son lit. Le docteur vint l'allonger avec l'aide de Goshi. Ceci fait, il congédia l'équipe, arguant que le futur ex-homme aurait besoin de calme à son réveil, pas plus qu'il ne devait être prêt à affronter leur regard. Le toubib en profiter pour prélever un échantillon de sang. Il alla ensuite chercher des sels afin de ranimer le militaire.

« Docteur ? Ah j'ai fait un affreux cauchemar. Mon corps … » dit-il en reprenant connaissance.

« Est en train de changer, je sais. Malheureusement, ce n'était pas un cauchemar. J'ai fait mon prélèvement, et je cours l'analyser. De votre côté, je vous conseille de réfléchir à tout ça. Je vous apporterais des documents sur l'anatomie féminine, je pense que vous en aurez besoin. »

« Oh non. Par pitié dites-moi que vous pouvez inverser le processus ! » gémit Guren.

« Je ne parierais pas là-dessus à votre place. Tâchez plutôt de vous habituer à votre nouveau corps. Ce changement est trop profond pour espérer un retour à la normale sans risques. » répliqua le médecin.

Et de le laisser là. Guren resta pétrifié un long moment. Puis au bout de deux heures, il se leva et se rendit dans la salle d'eau. Il se pencha vers le miroir. Tournant la tête, il examina son visage. Bon, il se reconnaissait encore. Ses traits étaient juste plus fins. Mais selon le docteur, c'était encore en plein changement tout ça. Que resterait-il de lui ensuite ? Les yeux violets tombèrent ensuite sur le buste d'où pointaient deux formes. Avec hésitation, Guren ôta son haut. Ah oui, c'était bien des seins qui prenaient la place de pectoraux. Ceux-ci étaient en effet en plein … arrondissement. Ils avaient déjà le contour de la poitrine féminine et commençaient à ressortir en avant.

La taille s'affinait également. Ses bras aussi et il perdait du muscle. Il baissa son pantalon. Misère ! Son engin n'était plus là. Du tout. Guren frissonna. Il n'osa pas aller explorer le coin. Cela le révulsait pour le moment. Déjà que les transformations du haut l'effrayaient alors celle du bas … Il décida de se rhabiller, apeuré par ce qu'il voyait. Puis il alla carrément se cacher sous la couverture de son lit. C'était un cauchemar ! C'était forcément un cauchemar ! Il devait se réveiller, il devait à tout prix quitter ce monde. Une fois réveillé, il retrouverait son corps tel qu'il l'avait toujours connu. Tout serait en place et avec la bonne forme, les bonnes proportions.

Il finirait par rire de ce rêve ridicule.

Malheureusement, lorsque Guren reprit connaissance vers la nuit tombée … rien n'avait changé. Il était bel et bien condamné à devenir une femme.