Il était l'heure. Le moment état venue. Cela faisait plusieurs années que je ne les avais pas vu. Et aujourd'hui, j'allais les revoir. Nous étions en contact virtuel depuis tout ce temps, toutes ces années, et aujourd'hui nous serons en contact réel. Que penseront-ils de moi ? M'aimeront-ils toujours ? Est-ce vraiment une bonne idée que d'aller les voir ? En ai-je seulement le droit ? Tous ces questions qui tournaient en boucle dans ma tête, sans cesse. Je n'avais pas de réponse, et je savais que je n'en aurais que quand je les verrais. Mais la plus grande question que je me posais, celle qui me posait le plus de problèmes, celle qui, en fonction de la réponse pourrait me faire autant pleurer que rire.

Les décevrais-je ?

Il n'était plus l'heure aux questions, l'heure était à la rencontre. La préparation terminée, je partais de chez moi prendre le train pour les rejoindre. Dans deux heures, je serais avec eux. Dans deux heures, nous serons réunis pour la première fois en un réel contact humain. Dans deux heures, je rencontrerais enfin ceux qui m'ont sortie de la misère sans le savoir. J'étais encore plus effrayés qu'au départ, tout aussi effrayer qu'excité à l'idée de les voir. Ces sentiments étranges se mélangeant en moi, me faisant perdre tous mes moyens. Je ne voyais rien à part mes angoisses, mes doutes, mes peurs. J'étais aveuglée par tout ça. J'étais tellement terrifié mais heureuse ! Heureuse de savoir qu'enfin je pourrais les touchers, leur parler sans interférence, rire avec eux de pleine voix, être sous le même nuage qu'eux.

Les deux heures s'étaient écoulées, le temps était venus. En descendant du train, je tremblais. Excitation, Peur, Envie. Ces émotions s'écoulaient en moi, rendant le monde que je voyais terne. Je n'arrivais même plus à penser correctement, j'étais perdu. J'avançais sans trop voir où je marchais. C'est à ce moment-là, ce moment précis, alors que ma tête était baissée vers le sol où j'entendis un cri. Vous voyez les films de mauvais genre, aux ralentis et tout le blabla . Il s'est passé la même chose, bien que j'eusse honte de l'avouer. J'ai relevé la tête sans trop y croire, et je les ai vus. Ils me souriaient en faisant de grand mouvement de bras, s'attirant les regards courroucés des passants. Mais ils s'en fichaient, et moi aussi. Une fille du groupe, ma meilleure amie sans nul doute, se mit à courir vers moi, les larmes aux yeux. Et moi, je restais planté là, sentant à peine mes propres larmes couler. Au moment où elle me sauta dessus, la couleur du monde revint à moi. Tout redevint joyeux. Je l'avais su depuis longtemps mais je peinais à y croire. Je ne voulais pas y croire, et pourtant c'était si évident. Eux, m'acceptaient tels que j'étais, avec mes défauts et mes qualités. Je les avais trouvé, on avait sympathisé, on s'est compris et nous nous sommes aimées.

Je m'était acceptée.