Bonjour ! Me revoilà de nouveau active sur ce site après deux longues semaines de vacances ! J'ai terminé Like a Three Six il y a peu, et maintenant me voici avec « La bouche garde le silence pour écouter parler le cœur » (citation d'Alfret de Musset, il me semble) Ok j'avais pas plus long comme titre. Mais ça résume tellement bien l'histoire ! Bref amusez-vous bien et laissez des commentaires !


1. Vivre, incompris de tous.

Jeff avait neuf ans. C'était un garçon comme les autres, quoi qu'un peu grand pour son âge. Il avait de beaux cheveux blonds, coiffés à la Justin Bieber, et bruns sur la nuque. Ses yeux étaient couleur chocolat. C'était vraiment un garçon adorable.

Il allait à l'école primaire de Lima et savait désormais lire, écrire et compter. Il n'avait pas beaucoup d'amis – bon, pour être franc, il n'en avait aucun – car on le considérait comme bizarre.

Sa mère, Stormie Sterling, était une mère célibataire. Elle avait élevé Jeff sans personne, car son petit ami l'avait quittée à la naissance de son fils. Ils vivaient tous les deux dans une modeste maison, assez loin de l'école. Ils entretenaient une relation assez fusionnelle, marquée par l'abandon paternel.

Le petit blond était à l'école, sur une chaise, et regardait tranquillement la maîtresse qui parlait de grammaire. Il n'écoutait pas vraiment, en fait. Il tourna la tête vers la fenêtre et observa le ciel, les oiseaux. L'école n'était pas son univers. Il préférait la nature, il aimait être dans sa bulle.

– Jeff ?

Il sursauta. La classe ricana doucement. Il leva les yeux vers la maîtresse.

– Qu'est-ce que je viens de dire ?

Le blond chercha dans sa mémoire mais il ne trouva pas. Il haussa donc les épaules. Sa maîtresse soupira longuement.

– Bon, Jeff, viens nous réciter « Le Corbeau et le Renard », que vous deviez tous apprendre pour aujourd'hui.

Jeff déglutit. Il avait essayé, il avait vraiment essayé de l'apprendre, mais il n'avait rien retenu. Il se leva et, fronçant les sourcils pour se souvenir, balbutia :

– Le Corbeau et le Renard. Monsieur Corbeau… perché sur un chêne… tenait dans son bec un roquefort… Monsieur Renard… attiré par l'odeur… lui dit comme ça… Hé, salut, Maitre Corbeau… Que vous êtes beau… on dirait un aigle… Si je mens je vais en enfer… votre bec se rapporte à vos plumes… et vous êtes le Phénix de Dumbledore…

Il eut un énorme blanc. Apeuré, il regarda la maîtresse et les élèves. La classe rigolait à gorge déployée et la femme le regardait d'un air contrarié.

– Jeff, tu n'as pas appris ta poésie.

– Si, mademoiselle ! Je l'ai apprise !

– Non. D'abord, Maitre Corbeau tient un fromage et pas un roquefort, et ensuite, ce n'est pas le Phénix de Dumbledore.

– Ah non ? dit-il, gêné.

Pourtant, il était sûr que c'était ça le texte de la poésie. Il baissa les yeux en rougissant d'embarras. Qu'est-ce qu'il était nul ! Tous les autres élèves rigolaient en le montrant du doigt.

– Je te mets un D –.

Un D – ? Sa mère allait être furieuse… Il se rassit sans rien dire. La classe se tut. Pendant le reste de la matinée, il regarda par la fenêtre, rêveur. La sonnerie retentit et il se leva lentement.

– Jeff ?

Le blond se retourna. La maîtresse, les bras croisés, le toisait.

– Oui, mademoiselle ?

– Qu'est-ce qui se passe ? D'habitude, tu as toujours de très bonnes notes aux poésies.

– J'arrive plus à apprendre.

– Ça a un rapport avec tes copains ?

Jeff fixa ses pieds, gêné. Il n'avait pas de copains. Il secoua la tête. Il ne voulait pas inquiéter sa maîtresse.

– C'est à cause de ta maman ?

– Non.

– Alors dis-moi ce qu'il y a.

– Je sais pas, mademoiselle. J'arrive plus à me concentrer.

La femme soupira longuement.

– Je peux aller en récréation ?

– Oui, oui, tu peux.

Il sortit en courant. La femme soupira de nouveau. Jeff n'était plus le même, en ce moment.

Le blond alla dans la cour. Les enfants jouaient à cache-cache, ou au loup glacé. Jeff baissa les yeux et rejoignit sa petite cabane. Ce n'était techniquement pas sa cabane, mais personne d'autre que lui n'y allait jamais. Elle se trouvait tout au fond de la cour et était faite en bois. Il entra et murmura :

– Salut.

Bien sûr, il n'y avait personne. Il n'y avait jamais personne. Aucun enfant ne voulait jouer avec lui, il était trop différent. Pendant toute la récréation, il ne cessa de parler seul. Et, de toute façon, à qui d'autre pouvait-il parler ?

– Aujourd'hui, j'ai dû réciter la poésie. J'ai essayé de l'apprendre, je le jure ! Mais en ce moment, j'arrive plus à rien. Maman veut m'aider, mais ça sert à rien. C'est peut-être parce que je n'ai plus envie ? Ou alors parce que personne veut être mon ami.

Il baissa les yeux. Oui, c'était parce qu'il n'avait pas d'amis qu'il ne voulait rien faire. Et tous les gens de sa classe qui se moquaient de lui, ça n'arrangeait pas la situation.

– J'en ai marre que tout le monde se moque de moi. J'ai rien fait. Je voudrais juste un ami. Ce serait bien d'avoir un copain. On pourrait jouer tous les deux et je pourrais même l'inviter à la maison. Mais personne veut être mon ami.

Avant qu'il ne puisse finir, la cloche sonna. Il retourna en cours en soupirant.

A la récréation du soir, alors que Jeff se dirigeait vers sa cabane, un groupe de garçons s'avança vers lui. Peut-être venaient-ils pour jouer avec lui ? Jeff abandonna tout de suite son idée. Il n'y avait personne qui voulait s'amuser avec lui. Le plus grand, un certain Dave, lui dit en ricanant :

– Alors, ça va, Dumbledore qui sent le roquefort ?

Jeff baissa les yeux. Dave se mit à le refaire grâce à des mimiques ridicules et en prenant une voix aigue :

– Monsieur Corbeau, perché sur un chêne, tenait dans son bec un roquefort. Monsieur Renard, attiré par l'odeur, lui dit comme ça : Hé, salut, Maitre Corbeau, que vous êtes beau, on dirait un aigle. Si je mens, je vais en enfer. Votre bec se rapporte à vos plumes et vous êtes le Phénix de Dumbledore.

Tous ses acolytes rirent. Jeff baissa la tête, honteux et confus.

– T'es vraiment nul, Sterling ! lui dit Dave. Tu sers à rien et t'as même pas d'amis !

A ces mots, le blond se mordit la lèvre pour se retenir de pleurer.

Sterling n'a pas d'amis, il est nul, il est zarbi ! chantonnèrent-ils en chœur.

Même si Jeff ignorait ce que "zarbi" voulait dire, il savait que ça avait un rapport avec son étrangeté. Dave s'arrêta de rire, suivi des autres. Il s'avança vers le blond et le poussa légèrement. Celui-ci vacilla mais ne tomba pas. Dave lui dit, menaçant :

– Hé, Sterling, pourquoi tu réponds pas ? T'as perdu ta langue ou quoi ? De toute façon, ça sert à rien que t'en aies une, vu que tu parles jamais à personne ! Et quand tu parles, tu dis que des bêtises !

Jeff ne put se retenir plus longtemps et sentit une larme couler sur sa joue. Ce que disaient ces garçons lui faisait vraiment mal. La vérité blesse toujours.

– Oh, regardez-moi ça ! Bébé Sterling est en train de pleurer ! C'est qu'une fille, Sterling ! Sterling, c'est qu'un bébé, il pleure toute la journée ! chanta Dave, suivi par ses acolytes.

Les larmes continuèrent de couler sur la joue du blond, chaque mot l'enfonçant un peu plus bas que terre. Dave, riant de plus belle, lui dit en le poussant :

– Allez, réponds ! Montre-nous que t'es un homme, un vrai !

Comme Jeff ne disait toujours rien, Dave le poussa plus fort et, au bout de trois fois, le garçon tomba par terre. Sa tête tapa le sol et il leva ses yeux pleins de larmes vers les cinq garçons.

– Allez, parle !

– T'es muet, ou quoi ?

– Réponds-nous !

– Qu'est-ce que t'attends, le débile ?

– Stop, dit Dave à ses copains. On va le forcer à parler, vous allez voir. On va lui faire dire quelque chose de marrant.

Il prit Jeff par le col de sa veste et le souleva. Bien que Jeff soit plus grand qu'eux tous, Dave était bien plus fort.

– Dis : « Je m'appelle Jeff Sterling et je sers à rien. »

Les garçons ricanèrent. Les lèvres de Jeff restèrent closes, pourtant.

– Dis-le.

Comme Jeff ne disait toujours rien, Dave le secoua.

– Dis-le ! répéta-t-il.

Dave le jeta par terre. Jeff se fit mal au coude et laissa échapper un gémissement. Dave lui donna un coup de pied et ordonna :

– Dis-le.

Sous l'effet de la peur et de la douleur, Jeff chuchota :

– Je m'appelle Jeff Sterling et je sers à rien.

– Plus fort, on n'entend rien !

– Je m'appelle Jeff Sterling et je sers à rien !

– Voilà qui est parfait, ricana Dave, accompagné des autres.

– Qu'est-ce que t'es nul ! dit un autre garçon.

– Sterling, il sert à rien !

– Tu parles, il aura jamais de copains !

– Et encore moins de copines !

Jeff continua de pleurer en silence. Dave dit à ses amis :

– Allez, venez, les gars. Ça sert à rien de perdre son temps avec quelqu'un d'aussi inutile que Sterling.

Ils partirent, le laissant seul, à terre, en pleurs. Jeff s'essuya les yeux et se releva péniblement, se tenant le coude. Il rejoignit sa cabane et se laissa tomber sur le banc. Pourquoi est-ce qu'ils étaient toujours obligés de l'humilier ? C'était vraiment injuste. S'il avait eu un ami, celui-ci l'aurait réconforté. Mais il n'avait pas d'amis.

Jeff se releva péniblement, se tenant le coude, comme la sonnerie avait sonné. Il marcha lentement jusque dans la salle de cours, sans aucune conviction.

Alors que la journée se terminait, le blond sortit de l'école et attendit patiemment sur un petit mur en pierre que la voiture de sa mère arrive.

– Hé, Sterling ! le héla quelqu'un.

Il tourna la tête. Dave et un de ses amis lui firent signe de la main en riant. Jeff savait qu'ils riaient encore de lui, mais fit mine de les ignorer. Les deux garçons vinrent à sa rencontre. Dave le poussa. Jeff tomba à la renverse sur son coude. Il cria de douleur, pendant que les deux enfants se moquaient de lui.

– T'as mal, hein, sale mauviette ?

Jeff ne répondit pas et se leva lentement.

– Réponds, espèce de naze !

– J'ai pas peur de toi, Dave, dit Jeff d'une voix faible.

Dave regarda son ami en haussant les sourcils. Ils éclatèrent de rire.

– T'as pas peur de moi ? T'as pas peur de moi ? Eh ben, j'vais t'expliquer un truc, sale abruti. Tu devrais avoir peur de moi.

Dave le poussa et il retomba au sol. Jeff ne se releva pas, cette fois.

– Viens, on s'en va, grommela Dave à son ami. Et fais gaffe, Sterling ! Demain, tu aurais affaire à moi ! Et je peux te promettre que tu auras peur de moi !

Une ou deux secondes seulement après le départ des deux enfants, un adulte se pencha au-dessus du petit garçon.

– Jeff, ça va ?

Il leva les yeux. Ce visage angélique, ces yeux bleus, ce sourire mêlé d'inquiétude, et ces beaux cheveux blonds. C'était sa mère.

– Oui, maman.

– Pourquoi est-ce que tu es par terre ?

Elle l'aida à se mettre debout puis épousseta sa veste et son pantalon.

– J'ai trébuché, mentit le blond.

Stormie regarda Dave et son ami qui s'en allaient en ricanant et demanda :

– Ce sont tes copains, eux ?

– Non.

– Alors pourquoi est-ce qu'ils sont venus te parler, tout à l'heure ? Je les ai vus, de loin.

Jeff se mordit la lèvre. Il ne voulait pas parler de ces garçons à sa mère. Il ne voulait pas lui dire qu'il se faisait persécuter et qu'il était l'objet de moqueries plus horribles les unes que les autres. Il ne voulait pas la mettre au courant, pour ne pas l'inquiéter. Il l'aimait trop pour ça.

– J'sais pas, fit-il au bout d'un certain temps en haussant les épaules. J'crois que c'était par rapport à… un jouet qu'ils avaient perdu.

Sa mère fronça les sourcils.

– Tu es sûr ?

Il hocha lentement la tête.

– Tu ne mens pas, j'espère ?

– Non, maman.

Elle soupira doucement et le prit par la main pour l'emmener à la voiture. Ils roulèrent sans discuter. En arrivant à leur maison, Jeff sortit de la voiture et rentra directement pour manger un peu. Sa mère lui fit des tartines de Nutella qu'il mangea avec gourmandise.

– Ta journée s'est bien passée ?

– Oui, mentit le blond. Comme toujours.

– Tu as eu des notes ?

Il s'arrêta de manger et se mordit la lèvre. Tremblant, il dit tout bas :

– J'ai eu un D – en poésie.

Sa mère le regarda d'un air étrange. Elle était partagée entre la colère et la surprise.

Un D – ? Mais je croyais que tu l'avais apprise par cœur ?

– Oui, j'ai essayé, maman. Mais j'y arrivais pas.

– Pourquoi tu ne m'as pas demandé ? J'aurais pu t'aider.

– Ça n'aurait servi à rien.

– Un D –, Jeff ! répéta-t-elle.

Il baissa les yeux en continuant à manger. Sa mère posa sur lui un regard inquiet.

– Tu es certain que ça va, Jeff ?

– Oui, maman.

– Tu me le dirais s'il se passait quelque chose ?

– Oui, bien entendu.

Elle hocha la tête. Alors que Jeff sortait jouer dehors, Stormie lui dit :

– Mets un manteau, mon chéri. Tu vas attraper froid !

Il grommela quelque chose, mais obéit tout de même. Il s'amusa dans la terre avec ses petites voitures. Alors que la pluie commençait à tomber, il rentra et, sans le faire exprès, se cogna le bras gauche contre un meuble. Il cria en se tenant le coude. Sa mère arriva en trombe et le prit dans ses bras.

– Qu'y a-t-il, mon amour ?

– J'ai… Je me suis fait mal au coude.

– Fais-moi voir ça.

Elle lui retroussa la manche pour voir ce qu'il avait. Son coude était tout égratigné – suite aux violences de Dave et ses amis –, rouge et ensanglanté.

– Comment est-ce que tu t'es fait ça ?

– Je… C'est parce que je suis tombé.

Elle le regarda attentivement.

– Jeff, est-ce la vérité ?

Il hocha lentement la tête en baissant les yeux. Il détestait mentir à sa mère. Mais c'était pour son bien. Stormie soupira puis alla chercher du désinfectant. Après que la plaie soit propre, elle lui mit un bandage et l'embrassa sur le front.

– Allez, file dans ta chambre. Et fais attention.

– D'accord, maman ! dit-il en courant à l'étage.


Lana soupira. On venait de la demander dans le hall d'entrée de l'orphelinat. Et elle savait ce qui l'attendait. Elle dévala les marches des escaliers et trouva le spectacle habituel. La nouvelle famille de Sebastian, les traits tirés par la fatigue, attendait, assise sur des bancs. Sebastian la vit arriver et ne lui adressa même pas un regard. Il semblait fier de lui, presque hautain.

– Monsieur et madame Schuester, je présume ?

L'homme bouclé acquiesça. Il se leva et dit :

– Nous sommes vraiment désolés, mademoiselle, mais nous ne pouvons pas continuer. Sebastian est… très gentil, mais-

– C'est un casse-pieds qui ne tient pas en place et qui hurle sans raison ! le coupa sa femme.

Lana soupira et jeta un regard à Sebastian. Le petit garçon de sept ans était assez grand pour son âge, il avait des cheveux châtains, magnifiques yeux bleu azur et un sourire séducteur. Bien qu'il ait un visage d'ange, c'était un vrai petit diablotin. Son visage s'éclaira d'un mince sourire victorieux. Il savait qu'il avait encore gagné.

Sebastian enchainait famille sur famille. Il avait eu une enfance difficile : un père alcoolique, une mère souvent absente… Puis il était arrivé à l'orphelinat et avait rencontré plusieurs familles qui voulaient l'adopter. Mais, chaque fois, il leur avait rendu la vie impossible et était revenu illico à l'orphelinat.

– Venez, monsieur. Nous allons remplir les papiers…

– Ah non ! Ne me laissez pas toute seule avec ce monstre ! supplia la femme.

Lana regarda Sebastian. Madame Schuester fixa le garçon.

– Bouh ! cria-t-il.

La femme hurla en tombant par terre.

– Vous voyez ? C'est le diable en personne !

Alors qu'une employée de l'orphelinat passait par là, Lana l'arrêta :

– Tara ! Tu peux me ramener Hunter, s'il te plait ?

– Hunter ? Mais il doit être en train de faire sa sieste, là. Si je le dérange, il ne va pas être content.

– Sebastian est revenu.

Tara hocha la tête et partit chercher l'enfant. Hunter avait quatre ans. C'était un petit garçon curieux et très autoritaire. Même s'il était un peu méchant avec les autres enfants ou adultes – surtout les filles – c'était compréhensible. Son père avait quitté sa petite amie enceinte pour une autre. Après sa naissance, sa mère s'était mise à boire comme un trou, et le frappait parfois. Elle était allée en prison et avait remis son enfant de trois ans à l'orphelinat. Hunter était le seul – le seul et l'unique – qui arrivait à calmer Sebastian. Le seul à qui il ne ferait jamais de mal. Hunter, c'était comme son frère, son âme, sa raison de vivre. Et ça faisait plaisir à Lana que Sebastian ait trouvé quelqu'un qu'il ne haïrait pas.

Lana emmena le bouclé et sa blonde de femme dans son bureau et leur fit signer quelques papiers, disant qu'ils ne désiraient plus avoir l'enfant sous leur responsabilité.

En sortant de la pièce, elle sourit en voyant Sebastian, toujours assis sur un banc du hall d'entrée, emprisonnant un Hunter fatigué et qui suçait son pouce dans un câlin empli de tendresse.

– Mais… Qu'est-ce qu'il est en train de faire ? demanda madame Schuester.

– Il fait un câlin à son ami.

– Son "ami" ? On dirait plutôt que vous leur apprenez à être gay dès le plus jeune âge, commenta la femme.

Dieu que cette blonde était horripilante ! Monsieur Schuester lui fit un bref sourire et lui et sa femme partirent enfin. Sebastian ouvrit un œil et regarda Lana. Elle lui sourit. Il ne fit rien. Puis le châtain déposa son ami par terre et, lui prenant la main, lui dit d'un ton mielleux, qu'il réservait à lui seul :

– Allez viens, mon Hunty, on va lire une petite histoire avant de faire la sieste. Tu veux ?

– Oh oui ! s'exclama le petit garçon à la peau mate en levant la tête vers son interlocuteur. Tu les racontes si bien, les histoires, Sebby !

Sebastian le gratifia d'un sourire, avant de l'embrasser sur la joue, puis commença à marcher, entrainant le garçon avec lui.

Lana se tourna vers son bureau et allait rentrer à l'intérieur, quand quelqu'un tira sur son pantalon, comme font les enfants. Elle baissa les yeux mais savait déjà qui se trouvait là.

– Que veux-tu, Nick ?

Le petit garçon brun cligna plusieurs fois des yeux. Il montra du doigt le couloir.

– Tu… veux faire un tour ?

Il secoua la tête et montra le couloir une deuxième fois.

– Tu as envie… que je t'accompagne dans ton dortoir ?

Il leva les yeux au ciel et réfléchit. Puis il montra sa bouche, et encore une fois le couloir.

– Ah ! Tu veux aller chercher quelque chose à manger aux cuisines ?

Il acquiesça vivement.

– Je suis désolée, Nick, mais je n'ai pas le droit de te donner de la nourriture en-dehors des heures de repas.

Il baissa les yeux.

– Et si tu allais jouer avec tes amis ?

Elle se mordit la lèvre. La gaffe. Nick n'avait pas d'amis. Le petit garçon de neuf ans baissa la tête et mit ses mains derrière son dos.

– Pardon, je ne voulais pas dire ça… Nick, va dans ta chambre. Tu veux faire des coloriages ?

Il soupira et courut dans le couloir. Elle le suivit du regard. Nick était un garçon vif et intelligent. Il était arrivé dans l'orphelinat il y avait environ un an. Son père était un alcoolique qui battait sa femme. La mère de Nick était très gentille mais se laissait faire par son mari. Un jour, le père de Nick avait battu la mère du petit devant ses yeux. Il l'avait tuée, sans le vouloir. Et le garçon avait tout vu. Il avait été en quelque sorte traumatisé et avait arrêté de parler. Il était devenu muet. On l'avait recueilli à l'orphelinat, mais il n'y avait pas trouvé sa place. Il ne s'était pas fait d'amis et tout le monde se moquait de lui. On le trouvait bizarre. Le pauvre enfant.

Lana soupira et alla à l'infirmerie. Maria, l'infirmière, s'occupait d'un petit garçon et d'une petite fille atteints de la mononucléose. Finn et Quinn. C'était les amoureux modèles de l'orphelinat. Ils avaient tous le deux douze ans et sortaient ensemble depuis peu. La mononucléose, ou « maladie du baiser », avait contaminé Finn qui l'avait donnée à sa copine.

– Maria ? Tout va bien avec eux ?

– Oui. Il faudrait juste qu'ils arrêtent de s'embrasser continuellement. Dans quelques jours, ils seront guéris.

Alors que Lana allait sortir, deux enfants entrèrent. Nick et Hunter.

– Hunter ? s'étonna Lana. Mais où est Sebastian ?

– Il fait dodo dans mon lit.

– Pourquoi tu es debout ?

– J'sais pas, mademoiselle. Nick est venu me voir et il a failli réveiller mon Sebby alors je me suis mis en colère, moi. J'veux pas qu'on réveille mon Sebby quand il fait dodo. C'est mal.

Lana lui caressa les cheveux. Le garçon brun se dégagea vivement de sa main. Il n'aimait vraiment pas qu'on le touche – surtout les personnes de sexe féminin. Le petit de quatre ans mit son pouce dans sa bouche et regarda Nick.

– Nig vouyait à manyer. Iy a dit que si ye yui en donnait bas, iy ayait réveyer mon Sebby.

– Il l'a dit ? demanda Lana en fronçant les sourcils.

– Nan, mais iy y'a fait gombrendre à moi. Aveg ses mains.

– Hunter, tu pourrais arrêter de parler avec ton doigt dans la bouche ? Je ne comprends rien.

– Mon Sebby, yui, iy grombrends dout ye demps guand ye barle comme ça.

– Oui, mais je ne suis pas Sebastian.

Hunter obéit en soupirant.

– Nick voulait-

– Oui, je sais ce que tu as dit, le coupa la femme. Mais pourquoi tu es allé les déranger, Nick ?

Elle se tourna vers le brun. Il haussa les épaules en jouant avec ses pieds, regardant par terre.

– Tu as vraiment autant faim ?

Il hocha lentement la tête.

– Maria ? Tu n'as pas un petit bout de quelque chose pour lui ? Sinon, il va aller embêter tout le quartier, je le connais.

Lana ne le vit pas, mais Nick croisa les bras sur sa poitrine, sa manière à lui de montrer qu'il était vexé.

Maria donna un biscuit sec à Nick. Il remercia l'infirmière d'un hochement de tête et dévora le gâteau. Puis la gérante de l'orphelinat dit :

– Bon, Nick, tu veux bien ramener Hunter à son dortoir ? Evite de réveiller Sebastian, tu sais comment il est.

Nick obéit en soupirant. Il mit sa main dans le dos du petit de quatre ans et le traina avec lui.

Hunter regarda Nick. Dans son petit esprit d'enfant, il ne pouvait pas s'empêcher de penser à combien Nick était étrange. Il ne l'avait jamais encore entendu parler. Avec un effort, il tenta de se rappeler ce que Sebastian lui avait dit à propose de Nick. Sebastian lui disait pleins de trucs à propos de tout le monde. Parfois, Hunter oubliait. Alors il demandait à Sebastian de raconter encore.

« Nick est bizarre. Il est muet, mais toi, tu sais pas ce que ça veut dire. Muet, ça veut dire que tu parles jamais. Tu comprends, Hunty ? Et Nick n'a pas d'amis, aussi. Il en veut pas de toute façon. Il est très bien tout seul et voilà. Y a pas grand-chose à dire sur lui, en fait. Juste, Hunty, je veux pas que tu t'approches de lui, ok ? J'ai envie que tu restes avec moi. C'est compris, mon Hunty ? »

Hunter s'en souvenait, maintenant, de ce que lui avait dit Sebastian sur Nick. Il jeta un coup d'œil vers le brun et soupira. Sebastian lui avait dit de ne pas s'approcher de lui, pourtant… Le petit garçon de quatre ans arriva dans son dortoir. Sebastian était allongé sur son lit et dormait profondément. Le petit garçon sourit en le voyant comme ça, il avait l'air si serein et si sage. Nick lui tapota l'épaule. Hunter baissa les yeux, conscient qu'il ne devait pas adresser la parole au garçon. Le brun de neuf ans lui fit comprendre qu'il partait et que Hunter devait dormir.

– D'accord, chuchota Hunter. Au revoir.

L'enfant muet partit et le petit garçon s'allongea près de son meilleur ami. Sebastian ouvrit un œil et lui murmura, fâché :

– Hunter, où tu étais ? Je viens de voir Nick s'en aller. Ne me dis pas que tu étais avec lui !

– Si, Sebby. J'suis désolé, Sebby. J'voulais pas. Pardon. Tu m'en veux pas, hein, dis, tu m'en veux pas ?

Sebastian soupira longuement. Il se redressa pour se mettre en position assise et tapota son ventre pour que son ami vienne contre lui. Le petit brun se blottit tout contre son torse et s'accrocha à son cou en fermant les yeux.

– Non, je t'en veux pas, mon Hunty. Mais je veux plus te voir trainer avec lui, ok ?

Hunter sourit et déposa un baiser dans le cou de Sebastian. Ce dernier l'enlaça tendrement dans ses bras. Ils s'endormirent tranquillement, silencieux.

Nick avait regardé toute la scène. Il n'était pas parti, en fait. Et ce qu'il avait entendu l'avait vraiment rendu triste. Il savait qu'il était bizarre et que beaucoup de gens ne l'aimaient pas, mais il ne pensait pas que Hunter pouvait faire partie de ceux-là. Hunter était vraiment très gentil – avec les garçons, plutôt – quoiqu'un peu moins depuis qu'il avait rencontré Sebastian.

Nick n'avait pas aimé entendre le grand châtain dire à son copain de ne plus s'approcher de lui, ni de lui parler. Il aurait bien aimé que Hunter devienne son ami. Il aurait aimé avoir un ami, au moins. Parce qu'il n'en avait pas, et ne pas avoir d'amis le rendait triste. Personne ne voulait jouer avec lui ou même lui adresser la parole. Il en souffrait. Il n'en laissait rien paraitre, mais il brûlait de l'intérieur. Il se sentait si seul, et il ne pouvait rien partager avec personne. Les enfants de son âge avaient besoin de compagnie, mais lui en était privé, seulement parce qu'il était un tout petit peu différent.

Il soupira et ferma la porte du dortoir de Hunter et Sebastian. Il courut dans l'orphelinat et gravit les escaliers, allant toujours plus haut. Il finit par atteindre le dernier étage – le grenier. C'était son Endroit. La seule pièce du bâtiment où il se sentait chez lui. Il y était bien. Il y avait là tout ce dont il avait besoin : des jouets – un peu usés, certes, mais encore bons –, des couvertures – si jamais il avait sommeil –, une fenêtre – pour regarder le ciel et le jardin – et même des livres. Il n'avait que neuf ans, mais il lisait très bien. Il adorait ça, lire. Ça le plongeait dans un autre univers. Il se sentait comme les autres enfants. Il se sentait normal.

Nick s'assit sur un vieux coussin et prit son jouet préféré : une petite boîte à musique un peu rouillée. Même si elle n'était plus toute neuve, elle fonctionnait encore. Et Nick adorait chanter. C'était sa passion. Bien sûr, il ne chantait pas vraiment, mais dans sa tête. Il actionna la mise en marche et commença à dire les paroles en rythme, dans sa tête :

« Une souris verte, qui courait dans l'herbe, je l'attrape par la queue, je la montre à ces messieurs. Ces messieurs me disent : trempez-la dans l'huile, trempez-la dans l'eau, ça fera un escargot tout chaud. »

Il sourit en regardant l'objet en verre. L'Endroit était vraiment le meilleur havre de la Terre. Il y était tellement bien, il y était tellement en paix.


Alors, ce premier chapitre ? Comment trouvez-vous la vie de Jeff ? Et celle de Nick ? Que pensez-vous des bourreaux de Jeff ? Et de sa mère ? Avez-vous aimé la scène avec les Schuester ? Et le Huntbastian ?

Hum à part ça, quelques détails sur la fiction. Je posterai chaque semaine, enfin j'essaierai. Ensuite, il y a en tout six chapitres. Tous à peu près aussi longs que celui-là. Voilà ! Plein de Niff hugs pour vous les amis. Ciao !