Rien ne m'appartient sinon, il y aurait longtemps que Faberry serait du domaine du possible et que le Brittana serait toujours là...
Bonne lecture et on se retrouve en bas,
Enjoy ;)
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L'avion amorçait sa descente sur la piste de l'aéroport qui était encore praticable. A son bord, une délégation américaine qui venait en Allemagne. La plupart étaient des hommes en civil, venant couvrir le procès du siècle, mais il y avait une personne qui se rendait dans ce pays pour tâcher de retrouver quelqu'un.
Sanglée dans un uniforme de l'armée américaine, son fidèle Leica dans une sacoche en cuir posé sur ses genoux, une belle blonde aux yeux verts regardait le paysage depuis le hublot. Quinn se passa une main sur le visage et soupira, épuisée par les huit heures de vol, assise dans le siège inconfortable. La jeune femme ferma les yeux et se rappela la dernière fois qu'elle était venue dans ce pays.
Berlin, été 1936
Comme tous les étés depuis qu'elle avait dix ans, Quinn était en vacances chez une amie de son père qui habitait à Berlin pour parfaire ses connaissances en langues étrangères, en l'occurrence, l'allemand.
L'adolescente s'était liée avec quelques jeunes de son âge et partageait certaines de leurs activités. C'était le temps de l'avant-guerre, le temps ou le monde vivait encore au rythme des chansons de l'époque, ou la folie n'était pas encore tout à fait celle qui allait embraser le monde dans trois ans.
Comme tous les étrangers de cette époque, Quinn ne voyait aucun mal dans le National Socialisme et, à dire vrai, la politique ne l'intéressait pas beaucoup. Histoires d'adultes et non d'enfants.
L'adolescente nota que la ville de Berlin avait énormément changée depuis son précédent séjour et Leni l'informa que les Jeux Olympiques se déroulaient cette année dans la ville.
- Quels changements as-tu notés ? demanda un jour Leni au petit déjeuner à une Quinn qui se servait un café.
- Un peu plus de militaires et d'uniformes noirs. Avait répondu l'adolescente en souriant. Une ambiance un peu moins… comment dire… rigide. La Postdammerplatz est beaucoup plus animée que d'habitude et la CharlottenburgStrasse a été décorée. Y compris la porte de Brandenburg.
- Berlin est en fête pour les Jeux. Qui sait, peut être qu'un jour, ils resteront définitivement dans notre pays.
- Nul ne sait de quoi l'avenir est fait.
- C'est exact. Avait conclu Leni avec un sourire étrange. Termine ton petit déjeuner, je t'emmène prendre Berlin sous toutes ses coutures.
C'est ainsi que Quinn passa les deux premières semaines de son séjour berlinois à prendre des clichés sous la direction de l'amie de son père et à assister à tous les évènements, tels que la visite de la Maison de l'Art Allemand ou l'adolescente ne savait absolument pas s'il fallait qu'elle apprécie ou non les peintures exposées ou des avant premières de films mais jamais rien qui eu un lien avec la politique.
Et il y avait également Rachel, ravissante petite brune, qui vivait dans la maison voisine de celle de Leni.
Les deux adolescentes étaient complètement opposées : Quinn, américaine, blonde et catholique, Rachel, allemande, brune et de confession juive. Cela aurait du crée un fossé entre elles mais cela n'avait pas été le cas. Elles se complétaient. Rachel encourageait la passion de l'américaine pour la photographie tandis que Quinn lui disait sans arrêt qu'un jour, elle irait chanter à Broadway, qu'elle rejoindrai sa compatriote à Hollywood.
Il y avait un autre lien qui les unissait, quelque chose de bien plus fort que leurs passions et points communs. Quelque chose qu'elles avaient découvert l'été d'avant et dont elles ne parlaient pas. Quelque chose dont elles n'éprouvaient pas le besoin de mettre un nom dessus.
- Tu crois qu'un jour je réaliserai mes rêves ? demanda Rachel en caressant distraitement l'avant bras de Quinn qui était allongée contre elle, dans la chambre de la brune.
- J'espère bien que tu viendras me voir à New York. Répondit l'adolescente en souriant. Tu seras une star. Tu brûleras les planches en chantant du Billie Holiday et je serais la, à t'applaudir.
Le regard chocolat s'attarda un instant dans les profondeurs du regard vert et un sourire triste étira les lèvres pleines.
- Que se passe t'il ? fit Quinn, inquiète de l'attitude de sa compagne. Rachel ?
- Je suis juive. Murmura la brune.
- Et ? Je suis bien catholique moi. Répondit la blonde en se mettant sur ses avants bras.
- Tu ne sais donc rien ?
- Je devrais savoir quoi ?
- Que je n'ai pas la même vie que toi ou que celle de mes concitoyens.
- Je ne vois vraiment pas. Dit Quinn en fronçant les sourcils.
- Oublie ce que je viens de dire. Rétorqua t'elle doucement.
- Si tu aurais un problème, tu me le dirai n'est ce pas ?
- Oui. Mentit Rachel. Je te le dirai.
« mais il faudrait que tu te battes contre toute une nation »
L'été toucha à sa fin sans que les deux jeunes femmes ne s'en aperçoivent. Elles avaient passé le plus clair de leur temps ensemble, sans se soucier des autres, sous le regard bienveillant et protecteur de Leni qui savait que cette période n'était qu'une accalmie.
Le jour du départ de Quinn approchait à grands pas et l'atmosphère entre les deux jeunes femmes était un peu plus tendue que d'habitude. L'angoisse du départ de l'être aimé et la peur de l'inconnu pour Rachel qui savait pertinemment que tout allait reprendre. Les brimades, les vexations… Elle allait encore revivre les évènements de l'année précédente. La brune savait qu'elle n'allait jamais réaliser son rêve et ne voulait pas éteindre l'enthousiasme de sa compagne là-dessus.
Leur dernière nuit se passa comme si c'était la dernière fois qu'elles se voyaient. Aucun mot ne fut échangé cette nuit là. Il y avait juste ce langage universel, celui de l'amour qui faisait parler leurs corps. Ce ne fut que le lendemain, en ayant Rachel dans ses bras, que Quinn murmura, la voix brisée par l'émotion, comme si elle savait qu'elle ne reviendrait pas avant un long moment :
- Je t'aime Rachel. Quoique tu fasses, ou que tu sois, je t'aime et je t'aimerais toujours….
- Je t'aimerais toujours. Murmura Quinn en fermant les yeux.
La jeune femme sentit à peine l'avion se poser sur la piste défoncée par les récents bombardements. Comme un automate, la blonde descendit de l'appareil et suivit ses coreligionnaires jusqu'au checkpoint.
Après les formalités d'usage, Quinn resta un moment à l'extérieur de ce qui restait de l'aéroport, contemplant les ruines de ce qui avait été un hôtel.
- Qu'est ce que je viens foutre ici… marmonna la photographe.
Pendant l'heure qui suivit, la jeune femme marcha sans but dans Nuremberg, essayant de se rappeler comment était la ville avant. Quinn prit de nombreuses photos, capturant la vie quotidienne des Allemands et se retournant dès qu'elle apercevait une chevelure brune.
Elle arriva enfin à l'hôtel occupé par la délégation américaine et, à sa plus grande surprise, quand elle récupéra sa clé, découvrit que sa chambre était l'une des seules qui avait encore l'eau chaude et une salle de bain fonctionnelle.
Epuisée par les huit heures de vol, la blonde entreprit de se faire couler un bain. Tant pis si elle n'avait plus d'eau chaude avant un long moment mais là, elle ne désirait plus qu'une seule chose, se laver. Retrouver Rachel se ferait que le lendemain.
Une semaine plus tard, Quinn était assise sur les marches du palais de justice ou se déroulait le procès. La jeune femme était écœurée par ce qu'elle avait entendu.
Plusieurs témoins s'étaient succédés à la barre pour raconter ce qu'ils avaient endurés sous les regards méprisants des accusés et ceux, dubitatifs voire mal à l'aise, des juges et avocats. La photographe entendait encore le témoignage d'un homme à qui le régime honni avait fait d'horribles expériences sous le prétexte qu'il était de confession juive.
Je suis juive
Et ? Je suis bien catholique moi
Je suis juive. Je suis juive. Je suis juive.
- Mon Dieu Rachel…. Fit la blonde en se penchant en avant pour retenir son envie de vomir.
Au fil du procès, Quinn prit conscience de l'ampleur des horreurs qui avaient été commises mais ce qui l'acheva littéralement, ce fut la diffusion d'un film tourné lors de la libération des camps de la mort. Comme beaucoup de personnes présentes dans la salle, la blonde fut obligée de sortir car elle ne se sentait pas bien. Les images la révulsait et lui donnait envie de prendre une arme et de tuer un par un les accusés pour tout le mal qu'ils avaient fait. Cela lui donna encore plus l'envie de retrouver Rachel, de savoir ce qu'elle était devenue.
Était-elle morte dans un camp comme beaucoup de ses semblables ou était elle une rescapée ?
Quinn finit par complètement délaisser le procès pour se concentrer sur sa recherche. Elle envoya un courrier à Leni pour savoir ce qu'il s'était passé depuis l'été 36 et, en attendant d'avoir des nouvelles, passait tout son temps libre au bar de l'hôtel.
Trois semaines s'écoulèrent sans que la blonde ne reçoive de nouvelles jusqu'à un matin, alors qu'elle buvait un mauvais café, un groom lui amena une lettre. Après l'avoir remercié, Quinn décacheta l'enveloppe et commença à la lire.
Quinn,
Pour répondre à ta lettre, je n'ai pas de nouvelles de Rachel depuis l'année 1941.
Tu dois savoir que certaines lois, promulguées en 1935 à l'encontre des juifs, avaient déjà considérablement restreint les activités de ton amie mais elle et ses parents avaient fait le choix de rester malgré ce qu'il se passait dans notre pays.
Tout s'est précipité lors de la Kristallnacht. Petit à petit, ils ont perdu leurs droits civiques et, à la veille de la guerre, leurs cartes d'identités ont été barrées d'un J.
Rachel traversait cette période avec son optimisme habituel. Elle se disait que tout cela n'était qu'un mauvais moment à passer, que l'Allemagne allait bientôt recouvrer la raison mais ses certitudes volèrent en éclat quand elle fut obligée de porter l'étoile.
Un beau jour, je ne l'ai plus revue et, à l'heure actuelle, malgré certaines recherches que j'ai faites, je suis incapable de te dire si elle est vivante ou non.
J'espère sincèrement que tes démarches aboutiront et sache que ma maison t'est toujours ouverte.
Leni
Quinn posa la lettre et se passa une main dans les cheveux, désemparée. A quoi bon retrouver Rachel si c'était pour savoir qu'elle était morte ? A quoi bon remuer ciel et terre pour apprendre qu'au final la personne que vous aimez n'est plus de ce monde ?
La photographe fini par sortir de sa chambre pour aller boire un verre. Dans l'état dans lequel elle se trouvait, n'importe quel alcool ferai l'affaire.
Quinn commanda un whisky et alla s'assoir à sa place habituelle, qui était située non loin d'un piano. Chacun pouvait en jouer et il était mis à la disposition de tout le monde. La blonde avait passé des heures entières à écouter Debussy, Chopin, Beethoven, Ravel, Mendelssohn… Tous joués avec plus ou moins de brio mais les pianistes avaient au moins le mérite de faire oublier, le temps d'une musique, toutes les horreurs vues et entendues.
Elle faisait tourner le liquide ambré dans le verre, indifférente à ce qui se passait autour d'elle. Plus rien n'avait d'importance depuis que Quinn avait eu la lettre de Leni mais quelque chose la fit sortir de sa torpeur. Une voix qu'elle n'avait pas entendue depuis dix ans. Une voix qui chantait en yiddish. La jeune femme ne comprenait pas les paroles mais se laissait porter par la voix sauve et envoûtante. La blonde risqua un œil vers la chanteuse et, de surprise, en renversa son verre.
Rachel s'arrêta de chanter et sursauta en entendant le bruit de verre brisé. Son premier réflexe fut de s'enfuir à toutes jambes mais une main se posa sur son avant bras gauche.
- Ne me touchez pas. Gronda t'elle en regardant le propriétaire de la main.
S'attendant à tomber sur un homme, Rachel fut surprise de voir deux prunelles vertes qui la regardaient avec un mélange de surprise et de joie dans un visage féminin. Elle cligna des yeux et ouvrit la bouche pour parler mais Quinn murmura, tout en retirant sa main :
- Je ne voulais pas te faire peur.
Ce visage n'était pas inconnu à Rachel mais elle n'arrivait à mettre un nom dessus. Comme si elle avait oublié tout ce qui faisait sa vie avant.
- Tu ne me reconnais pas ? dit Quinn en cachant sa déception.
- Non. Je suis désolée.
Quinn eut un sourire triste et murmura en allemand, de façon à n'être entendue que par la chanteuse :
- Je t'aime Rachel. Quoique tu fasses, ou que tu sois, je t'aime et je t'aimerais toujours….
En entendant ces simples mots, Rachel se souvint de la personne qui se tenait en face d'elle. Quinn. Celle dont le prénom et les promesses lui avaient permis de tenir toutes ces années.
- Tu es là. Dit la brune d'une voix étranglée par l'émotion.
- Je suis là. Répondit la blonde en la prenant dans ses bras. Je suis là.
L'étreinte se voulait tendre et rassurante mais cela signifiait autre chose pour les deux jeunes femmes. Cela signifiait qu'elles s'étaient enfin retrouvées. Cela signifiait la fin du calvaire du couple et le début d'un commencement.
Reste à savoir si cela vous a plu et si vous voulez une suite!
