Disclaimer : Les personnages appartiennent à Mme JK Rowling, pas à moi (dommage), mais je détiens le pouvoir d'en faire ce que j'en veux. Et je ne me fais pas d'argent avec mes histoires.

Note Très Importante de l'Auteur : Cette fanfic contient des SPOILERS très importants du tome 6. Bien que cela me déchire le cœur, je conseille aux personnes n'ayant pas lu Harry Potter and The Half-Blood Prince de passer leur chemin s'ils ne veulent pas gâcher la surprise.

Renote Très Importante de l'Auteur : SPOILERS vraiment très importants. Comme je dois être la seule auteur à faire fuir ses lecteurs, je rajoute un autre avertissement. Mais rien ne vous empêche de revenir après le 1er octobre !

Bon. S'il reste des lecteurs anglophones ou des lecteurs aimant les Spoilers, c'est par ici. Je compte poster un chapitre toutes les semaines.

Titre : DISTRAHERE

PROLOGUE

Narcissa Malfoy« Cissy » pour les intimes, détaillait soigneusement le reflet que lui renvoyait son magnifique miroir Louis XIV. Sa robe rouge flambant neuve moulait parfaitement son corps de déesse, et ses mensurations idylliques auraient collé un ulcère à toute la population féminine. Elle avait opté pour une tenue relativement simple, sans frou-frou, agrémentée de quelques joyaux hors de prix qui constituaient une partie de son héritage ancestral. Par exemple, autour de son cou gracile pendait un médaillon vert serti de pierres précieuses, d'une valeur incalculable, d'une beauté flamboyante et qui avait fait les beaux jours de la grande tante Lyne Black, la séductrice la plus réputée du XIXème siècle.

Elle avait renoncé au maquillage sophistiqué afin de conserver son air le plus naturel, se contentant du strict minimum. Afin de parfaire le tableau, elle avait laissé ses cheveux blonds si soyeux cascader librement sur ses épaules dénudées.

L'image de Mrs Malfoy lui adressa un sourire triomphant ainsi qu'un geste encourageant. Nantie de pareilles armes de séduction massive, la sœur de Bella Lestrange allait ravager l'assemblée, et nul n'en réchapperait. Et sa cible ne résisterait certainement pas à un tel potentiel aguicheur.

Trois coups frappés à sa porte arrachèrent Narcissa de son examen. Elle marmonna un vague « entrez », déterminée à peaufiner à l'extrême son apparence et à ne pas laisser un quelconque importun la distraire de sa tâche. Un elfe de maison de couleur rose criard pénétra dans la pièce. Ses yeux exorbités trahissaient une terreur abominable, et l'on pouvait distinguer de fines traces de coupures sur ses avant-bras, ainsi qu'un couteau de cuisine accroché à sa ceinture.

- Qu'y a-t-il, Elfe ?

Une centaine d'elfes de maison assurait le service dans cette maison, et l'ampleur de leur nombre avait dissuadé même les plus téméraires de tenter de retenir leur prénom. Certains avaient préconisé l'emploi de chiffres afin de faciliter leur reconnaissance, mais cette solution s'était soldée par un échec cuisant, personne n'étant apte à se souvenir d'une interminable suite de nombres.

- Maîtresse….maîtresse….le jeune maître…balbutia la pauvre petite créature terrifiée.

Narcissa pivota instantanément. Une lueur de panique traversa ses yeux bleus, puis s'estompa brièvement avant de s'installer définitivement. Dans son désarroi, elle ne remarqua pas que la bestiole rose tripotait nerveusement son ustensile.

- Draco ? Qu'est-ce qu'il a ? Il est malade ? Il souffre ? Réponds, Elfe ! Ou je t'arrache les yeux !

- Le…Le….Le…

- Quoi !

- Le jeune maître refuse de sortir de sa chambre !

L'Elfe éclata aussitôt en sanglots. Secouée de tressautements intempestifs, elle versait d'énormes larmes qui éclataient indifféremment sur le tapis. Narcissa poussa un bref soupir de soulagement. Son fils préféré puisque unique n'était pas (dans l'immédiat, mais cela ne tarderait pas) en danger mortel.

- Obby doit se punir ! couina l'insupportable clone de Dobby en brandissant son arme.

Mrs Malfoy ne prêta aucune attention à l'elfe qui se tranchait présentement la gorge, et quitta la pièce. Elle allait effectuer une petite visite maternelle à son enfant…

Lucius Malfoy, qui haïssait profondément son second prénom et qui m'a interdit de le divulguer ici sous peine de terribles représailles, croupissait dans un cachot de 10 mètres sur 10, sans éclairage, sans lit décent et sans lieu d'aisance. Quand le patriarche Malfoy avait présenté des doléances au sujet de ces inhumaines conditions de détention, le gardien s'était bruyamment esclaffé. Malfoy, habitué aux réactions primitives de certaines larves, ne s'en était guère offusqué. Un jour, il paierait son impudence.

Mais pour l'heure, le nouveau logis du sieur Malfoy manquait du confort élémentaire attaché au domicile habituel d'une famille aussi riche : d'une saleté répugnante puisque le Ministère refusait de céder aux revendications des femmes de ménage en grève illimitée, envahie par des insectes dégoûtants qui adoraient se nicher dans l'autrefois soignée chevelure du prisonnier, la pièce était en plus parsemée de restes humains presque identifiables, et dont les anciens propriétaires s'étaient séparés à la suite de brefs accès de folie furieuse. Aucune raison de s'inquiéter, nous nous trouvions à Azkaban, forteresse perdue au fin fond de la mer du Nord, désertée par les Détraqueurs, mais toujours bourrée à bloc de pauvres victimes et surtout de malheureux Mangemorts.

En ce jour de juin 1997, Lucius gravait solennellement sur le mur lépreux une maxime empruntée à son trisaïeul Sophitius Black : « Malfoy, ou quand l'honneur surmonte l'adversité ». Elle rejoignait nombres d'autres proverbes incrustés dans la pierre pour l'éternité, autant de témoignages probants de ses ancêtres remis au goût du jour par Mr Lucius Malfoy : « les Malfoy, éternels incompris, brandiront toujours leur nom comme étendard », la première, de Godefroy Malfoy, le courageux chevalier-sorcier, qui l'avait hurlé sur le champ de bataille de Slashfield avant de se faire démembrer vivant par l'armée trolle ennemie ; ou encore « les Malfoy, dont le prestige rejaillit sur tous les sorciers anglais », fièrement prononcé par Henri Malfoy lorsqu'il chargea la cavalerie française pendant la guerre de 50 ans au XIVème siècle, avant de mourir héroïquement par la flèche traîtresse d'un vil archer français (officiellement).

Son troisième mois d'incarcération lui avait remémoré d'autres déclarations historiques : du genre « je vais t'anéantir comme le chien que tu ne cesseras jamais d'être », de Catmitius Malfoy, chef de famille au XVIème siècle, à son rival et frère Dogmitius Malfoy, avant leur fratricide duel qui s'acheva par leur mort ; « je vais violer ta femme et tes enfants après les avoir rendus orpheline et veufs ….à moins que ce ne soit le contraire ? » du peu inspiré Jason Malfoy, sportif émérite de caractère légèrement impulsif, au dénommé Peter Calwell, son concurrent direct.

Son sixième mois d'emprisonnement n'avait pas entamé la verve littéraire de Lucius Malfoy, du clan Malfoy : Il avait débuté son art par une phrase bien sentie de Dolph « Brutus » Malfoy, « je vais te crever la gueule, fils de pute », que le distingué bonhomme avait balancé en procédant au lâche passage à tabac…heu…(yeux terrifiants de Lucius) en affrontant courageusement une horde de malandrins qui l'avaient sauvagement agressé. Et s'était senti de fortes affinités à l'égard de Quentin « le découpeur »Malfoy, célèbre attrapeur du XIXème siècle, réputé pour sa puissance de frappe impressionnante « Je vais me faire cet enculé de connard, lui arracher ce qui lui sert de couilles avec mes dents et les lui faire bouffer, putain de sa race ! » dont la délicatesse toute poétique avait séché sur place le vil gardien adverse, Roberto Potter.

Son dixième mois s'était caractérisé par une désolante baisse de régime, affaiblissement regrettable qui s'était traduit par quelques citations par-ci par-là, sans grand intérêt. Ainsi, le fameux « mourir me sied et je vous emmerde », de Caton Malfoy, remarquable stoïcien du 1er siècle avant Jésus Christ et adepte confirmé de la mort programmée. Ou encore« Finissons-en une bonne fois pour toutes, vivre m'est trop douloureux », de Bland Malfoy, au cours de son exécution dramatique par écartèlement, au beau milieu d'une arène remplie de spectateurs surchauffés. De plus, notre Lucius s'était découvert un certain talent artistique : il se tailladait régulièrement la peau pour obtenir un peu de peinture, et dessinait d'admirables natures mortes. Ses croquis offraient souvent quelques ressemblances avec des instruments de tortures ou des piloris, mais détonnaient par une vive originalité, différence revendiquée par son auteur.

C'est au cours du onzième mois qu'un poignant évènement avait privé Lucius Malfoy de son ennemi le plus redoutable : alors qu'il s'arrachait un ongle pour améliorer l'ornementation de sa dernière œuvre, intitulée « la fontaine de sang », Rufus Scrimgeour, le responsable ministre de la magie (coup d'œil appuyé vers Fudge), lui avait rendu une petite visite de courtoisie. Le grand ponte s'était lui aussi déniché une nouvelle vocation, celle de la persécution psychologique préméditée, et effectuait des petites tournées mensuelles chez d'innocents prisonniers. Et en particulier chez Lucius.

Flash Back

Ce jour-là, cette vieille carpette ambulante de Scrimgeour traînait un visage sombre, et épargnait son affreux sourire moqueur à Lucius, qui avait déjà bien assez de problèmes sans devoir supporter les tortures verbales de ce maniaque. Il paierait lui aussi.

- Lucius.

- Rufus.

- Cela ne vous dérange pas si j'empiète sur votre territoire ? De toute façon, vu la place qu'il y a…

- Mais je vous en prie.

Lucius observa calmement le ministre épousseter un quart de pierre et s'y asseoir nonchalamment. Il lui ferait un jour ravaler son rictus de dégoût, à ce parvenu de Sang-de-Bourbe.

- Je ne peux malheureusement pas m'attarder, Lucius, s'excusa presque Scrimgeour. L'extérieur m'attend, vous savez ce que c'est…enfin, vous saviez ce que c'était….

Lucius, qui était doté d'une parfaite maîtrise de lui-même, mais qu'il ne fallait tout de même pas pousser trop loin, serra les dents. Une tentative de meurtre n'avait aucune chance d'aboutir, mais des pulsions sangdebourbicides lui tenaillaient cruellement l'estomac. Il préféra ne pas laisser ses lèvres s'ouvrir. Il risquait de déshonorer son nom en déversant des flots d'insultes bien senties.

- Je vous ai apporté les nouvelles, Lucius, continua Scrimgeour sur le même ton. De nombreux évènements se déroulent dans le monde, vous savez, enfin, dehors….

Self control, self control. Lucius avança une main tremblante de rage vers le journal que lui tendait l'odieux bonhomme. Dans un avenir proche, ce fichu impur baignerait dans ses excréments et dans ses tripes fumantes, se jura le terrifiant chef Malfoy en lui dardant un regard assassin.

- Vous êtes peu bavard, Lucius.

- Je n'ai rien à dire à un Sang-de-Bourbe. Fichez le camp et foutez-moi la paix une bonne fois pour toutes.

Une lueur d'irritation obscurcit fugacement le visage léonin de Scrimgeour, qui se leva. Mais personne n'impressionnait l'ancien chef des Aurors. Et surtout pas cette loque pathétique de Lucius Malfoy.

- Votre langage semble régresser, mon pauvre ami. Des contrariétés ? Vous devriez prendre l'air pour vous ressaisir…

- C'est toi que je vais saisir, fils de pute !

Et le corps de Lucius décrivit un impressionnant arc-de-cercle avant de se faire cueillir au vol par le ministre. Ce dernier, qui avait pour lui l'avantage de la baguette, la pointa impitoyablement sur le prisonnier et lança un sort non-verbal qui projeta violemment le misérable sur le mur. Lucius s'effondra, sans connaissance.

- Ce Lucius. Quel farceur….

Scrimgeour quitta alors la pièce. Malgré le deuil qui venait de frapper la communauté magique, il avait retrouvé un semblant de gaieté, grâce à Lucius Malfoy. Jamais il n'abandonnerait ses petites séances de thérapie émotionnelle en compagnie du brave Lucius. D'ailleurs, c'était avant tout pour se remonter légèrement le moral, qui souffrait d'une nette tendance à la baisse en ce moment, qu'il inspectait régulièrement la cellule n°541.

Lorsque Lucius reprit ses esprits, il souffrait d'une atroce migraine et d'une dégradation sensible de confiance en lui. Trop de vulgarité, trop de vulgarité….mais où était le Lucius Malfoy (non, je ne vais toujours pas révéler son second prénom) d'antan, la puissance et la classe incarnée qui faisait trembler même le ministère ? Le sorcier dont la richesse flanquerait des complexes à Crésus ? L'homme dont le maintien princier tétanisait toute la minable populace masculine et suscitait des crises d'évanouissement chez la gent féminine ? Oui, où était-il, le fringant Lucius qui en imposait au conseil d'administration de Poudlard ?

Dans un recoin sombre de la mémoire d'une pauvre épave qui se mourrait inexorablement, tapi au sein d'un sinistre cachot au milieu de la mer du Nord. Au bord des larmes, ce qui prouvait incontestablement l'abyssal niveau de sa déchéance, Lucius saisit le journal que Scrimgeour lui avait généreusement prêté. A Azkaban, nul n'avait droit aux possessions personnelles.

En lisant la une du Daily Prophet, Lucius oublia soudainement sa dépression chronique. Ses yeux gris retrouvèrent spontanément leur absence de vie, alors qu'ils balayaient frénétiquement la première page.

La Mort de Dumbledore. Dumbledore est mort. Dumbledore est mort. Le vieux fou est mort ?

Le Daily Prophet consacrait un encart spécial à Albus Wulfric Brian Perceval Dumbledore, directeur de Poudlard, commandeur de l'Ordre de Merlin, Docteur ès sorcellerie, Enchanteur-en-chef, Manitou suprême de la confédération internationale des Mages et Sorciers, Président-sorcier du Magengamot, (ouf), ignoblement assassiné à Poudlard. Lucius, qui se sentait à présent revigoré, se força à regagner un semblant de calme, et, tout à sa joie, parcourut plus attentivement la meilleure nouvelle qu'il avait reçue depuis le début de son abusive captivité.

« Le monde sorcier en deuil »

« C'est avec tristesse, horreur, et incompréhension que nous informons nos lecteurs assidus du terrible séisme qui vient de secouer l'entière communauté magique. Albus Dumbledore n'est plus. Le plus puissant mage de notre temps, qui avait eu le courage de se lever vaillamment contre Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom, résistant fièrement aux lâches dénégations de certains, le sorcier admiré de tous, l'homme enfin, qui ne résistait jamais à une bonne partie de bowling, Albus Dumbledore, est mort.

Sa tragique fin a tristement conclu l'attaque perpétrée par des Mangemorts sur l'école de sorcellerie Poudlard (voir notre article page 8) : après une résistance héroïque, Albus Dumbledore fut traîtreusement assassiné, d'un Avada Kedavra, par le professeur de Défense contre les Forces du Mal, Severus Snape. Cet odieux personnage a ainsi exposé au grand jour sa véritable nature, celle du loyal partisan de Vous-savez-qui, ainsi qu'il avait été soupçonné il y a une quinzaine d'années (voir notre article sur les origines et les liens de Snape avec les arts ténébreux). Cette révoltante trahison a bien entendu choqué nombre de personnes (voir nos interviews page 9). Malheureusement, le meurtrier et ses complices ont pu prendre la fuite, et ce malgré la présence opportune d'Aurors. Les recherches effectuées pour les capturer n'ont rien donné pour l'instant.»

Lucius ignora délibérément les 6 pages de la biographie de Dumbledore et sauta directement au passage explicitant l'attaque des Mangemorts.

« Les serviteurs de Vous-savez-qui, les Mangemorts ont réussi à pénétrer dans l'école, pourtant bénéficiant de hautes protections magiques (….)par l'intermédiaire apparent d'un élève de l'établissement , Draco Malfoy, fils du Mangemort bien connu Lucius Malfoy, qui purge une peine de prison à perpétuité à Azkaban. »

Lucius reposa le journal. Ainsi, c'était son fils, son propre fils, qui avait permis la fin de l'ancêtre complètement gâteux ? Il savait pertinemment qu'il lui avait transmis sa remarquable ingéniosité, sons sens de l'intrigue, son intelligence, bref, toutes les qualités indispensables à la survie. L'émotion le submergea tout d'un coup et il éclata en sanglots. Heureusement, sa dignité resta sauve : aucun témoin n'irait rapporter que le bloc granitique aussi connu sous l'appellation de Lucius Malfoy pleurait comme une fillette dans son cachot. Sa réputation lui importait encore. Et il déversa le contenu de ses glandes lacrymales quelques heures, sans même s'apercevoir que Scrimgeour lui avait offert un autre présent : un splendide pot de gel, estampillé Goldéal, qui trônait hardiment dans un coin de la pièce.

Fin du Flash-back

Mais à présent, c'est-à-dire le lendemain, Lucius s'était à peu près remis de sa crise manifeste de sensibilité exacerbée. Il sifflotait même en relisant la devise de Sophitius Black. Tout un pan de mur exposait deux mille ans d'histoire malfoyenne à travers la psychologie des membres de la famille, et il y avait de quoi s'enorgueillir. C'était la seule trace de son passage qui resterait à Azkaban. En effet, Lucius était persuadé que le Seigneur des Ténèbres s'occuperait réellement de son cas dans un avenir proche. A présent que son fils Draco avait rehaussé le prestige dynastique en accomplissant les desseins du Maître, Lucius ne doutait pas qu'il quitterait bientôt son lieu actuel de villégiature, qu'il embrasserait tendrement sa Cissy et qu'il féliciterait chaleureusement (enfin, autant qu'il était possible) son fils bien-aimé.

Il s'attendait à une offensive mangemorte d'une seconde à l'autre, le Seigneur des Ténèbres ne pouvant manquer de profiter du désarroi général occasionné par le trépas de la vieillerie pour tenter une audacieuse percée dans les rangs ennemis. Lucius avait en conséquence tenté de restaurer son apparence quelque peu délabrée ces derniers temps. Il remercia mentalement, pour la première fois de sa vie, Scrimgeour, ce méprisable arriviste, pour le pot de gel, qui gisait, à présent, complètement vide. En effet, Lucius avait occupé ses deux dernières heures à discipliner sa chevelure rebelle, en se peignant avec les moyens du bord (ses doigts), et en appliquant force gel. Malheur à l'inconscient qui se hasarderait à passer ses mains dans ses cheveux ! Et aussi aux bestioles effrontées qui ne se gênaient pas pour tourmenter Malfoy. Il procédait fréquemment à quelques sérieuses vérifications de son œuvre capillaire, à l'aide d'une flaque d'eau non potable mais assez claire qui partageait sa cellule. Certes, sa coupe improvisée n'était pas un ouvrage de maître, mais le résultat tout à fait honorable établissait définitivement la supériorité d'un Malfoy en n'importe quelles circonstances : constat concernant particulièrement la coiffure sans peigne et sans miroir. Justeen usant de quantités astronomiquesde gel hors de prix, de doigts crasseux et de beaucoup de volonté.

Il espérait naïvement que personne ne ferait de remarques lapidaires sur sa tenue négligée, sinon il commettrait une agression plus que sanglante. Depuis le temps, çà lui manquait un peu de ne plus être capable d'avadakedavériser le tout venant. Mais pour l'heure, son état d'esprit avoisinait le « euphorie totale » et il se sentait apte à danser la gigue. Il s'apprêta à esquisser un souple pas de danse, enfin, autant qu'il est possible avec des articulations rouillées, lorsque la porte s'ouvrit brusquement. Lucius se retourna….et en resta comme deux ronds de flanc. Une créature peu commune se tenait à l'entrée du cachot, une forme humanoïde dissimulée sous une vaste cape noire. Cependant, un sorcier expérimenté et cultivé ne pouvait douter de sa nature : il s'agissait d'un Harvester, mort-vivant agressif et dénué de toute humanité aux origines nébuleuses et aux objectifs nocifs. Le sorcier moyen s'avérerait incapable de les identifier précisément, mais l'œil entraîné d'un Sang-Pur qui plus est versé dans la magie noire comme Malfoy ne s'y tromperait pas. Ces oiseaux de mauvais augure portaient toujours un pendentif représentant une faux. Et si on ne les employait plus guère depuis le XVIIIème siècle, les Harvesters traînaient une mauvaise réputation entièrement fondée : ils étaient chargés par les autorités compétentes de jeter des malédictions (de réputés spécialistes) ou d'appliquer des sentences.

- Que…

C'est donc un Lucius presque sans voix qui observa le Harvester pénétrer dans sa modeste piaule. La créature repoussa sa capuche en arrière, dévoilant un visage vaguement humain, mais ravagé par un collectif de maladies de peau, comme la lépre ou la peste bubonique pour ne citer que les plus célèbres. En comparaison, un cadavre en décomposition avancé aurait pu concourir pour une épreuve nationale de beauté. L'horreur mouvante ouvrit une bouche garnie de pustules et de chicots répugnants. Lucius ne put réprimer un geste de recul.

- Lucius (bip) Malfoy.

La créature reprit son souffle. Aligner un second prénom aussi ridicule et ne pas éclater de rire relevait de la gageure. Etre un Harvester et la volonté de ne pas nuire à la réputation de son espèce l'y aida.

- J'ai l'honneur de vous remettre une convocation pour le tribunal.

Le Harvester remit solennellement un pli cacheté d'un sceau inconnu au captif. Ce dernier, d'autant plus ébahi que son procès s'était déjà déroulé, à huis clos et à la sauvette, quelques mois auparavant, le prit machinalement. Le Harvester salua Lucius, et quitta la pièce, tout en songeant qu'il fallait absolument qu'il retienne le second prénom de 541. Aucun danger, une originalité pareille, ça ne s'oublie pas.

Resté seul, Lucius déchira l'enveloppe et en extirpa une petite lettre jaunie, qu'on aurait pu croire ancienne si la date inscrite à droite n'indiquait pas le jour même. Il la lut une première fois, puis une seconde, et ainsi de suite, jusqu'à ce que ses globes oculaires se tordent de douleur. Il fixa alors le vide, complètement catastrophé : il était fichu. Non sans compter que son vocabulaire se relâchait de plus en plus.

Narcissa, après quelques heures de marche dues à la superficie indécente de la bâtisse, parvint à sa destination : la chambre (ou plutôt le hall de gare) de Draco. Désireuse de ne pas salir sa robe, elle enjamba précautionneusement les corps entremêlés de la douzaine d'elfes qui encombraient le passage. Et toqua délicatement à la porte.

Aucune réponse.

- Draco ?

Toujours rien.

Une nouvelle tentative infructueuse engagea Narcissa à passer à la vitesse supérieure. Elle frappa de nouveau, déterminée à faire usage d'une méthode peu reluisante, le chantage. Elle ne reculerait devant aucune bassesse pour son fils chéri.

- Draco, si tu n'ouvres pas cette porte, je vais devoir révéler publiquement ce qui s'est passé dans la nuit du 24 décembre 1995….

Manifestement, cette menace obtint l'effet escompté, car de brefs pas résonnèrent à l'intérieur de la pièce. Elle entendit ensuite une voix murmurer des formules, afin de supprimer les barrières magiques protégeant la pièce, puis une main défit les douze loquets. Draco était vraiment très méfiant. Enfin, la porte s'ouvrit en grinçant, et une geste las l'invita à entrer.

Narcissa s'avança sur le seuil, alors que Draco Malfoy, vêtu d'une chemise de nuit aux armes de la maison Malfoy, s'en allait reprendre la place qu'il avait quittée : son lit. Il s'effondra lamentablement sur la couverture argent et enfouit sa tête dans les coussins.

- Draco, murmura-t-elle doucement en s'asseyant sur le lit. Qu'est-ce qui ne va pas ?

- Hmpf, marmonna le susnommé.

- Draco, malgré l'étendue de mes connaissances, je n'ai jamais su comprendre le langage ogre. Alors exprime-toi plus clairement. Et regarde moi !

Un « hmpf » renfrogné lui répondit. Narcissa adorait son fils unique, mais n'était pas du genre à supporter un tel manque de respect. Elle usa donc d'une arme redoutable. Le surnom niais.

- Ma crème en sucre….

Cette méthode quelque peu triviale fonctionnait à tous les coups. Draco émergea vivement de son refuge. Ses yeux lançaient des éclairs. Bon signe.

- Mère, je ne suis plus un enfant, protesta-t-il.

- Tu n'as que 16 ans Draco !

- J'ai 17 ans Mère ! Et depuis le 5 juin !

Narcissa prit une profonde inspiration. Aider un adolescent déprimé et rétif à toute intervention extérieure représentait le pire des défis pour une mère.

- Draco, qu'est-ce qui ne va pas ? répéta-t-elle d'un ton calme.

- Rien.

- Draco, tu ne veux pas venir à la fête ?

- Non.

- Draco, le seigneur des Ténèbres n'appréciera pas…et moi non plus, rajouta-t-elle après un instant de réflexion.

- M'en fiche.

Adulte ? Mature ? Tout ce que Narcissa voyait, c'était son petit garçon qui s'enfonçait délibérément dans une longue phase de bouderie. Il avait subi une profonde contrariété, et son orgueil démesuré l'empêchait de s'en affranchir définitivement. Qu'il était mignon.

- Ecoute, Draco, tu m'as dis que ton entrevue avec lui s'était bien passée, alors où est le problème ?

- Par « bien passé », j'entendais la chance que j'ai eu qu'il ne m'ait pas tué, Mère, rajouta notre blondinet.

Il s'assit en tailleur, fatigué de rester couché. Ses yeux las s'ornaient de splendides cernes, et ses cheveux impeccablement coiffés d'habitude présentaient un triste spectacle. Il leva lentement la tête vers sa mère.

- Tu peux tout raconter à ta mère, Draco, l'encouragea celle-ci en lui tapotant la tête.

Toute autre personne qui se serait avisée de faire subir ce traitement dégradant à Draco Malfoy serait morte sur le champ, avec en prélude au trépas une longue série de tortures inventives et cruelles.

- Mère, arrêtez ça.

Narcissa, dépitée, retira sa main.

- Il m'a passé un savon, murmura Draco, alors qu'un joli rouge vif teintait ses joues cadavériques.

- Pardon ?

- Il m'a passé un savon !

- Et alors ?

- Mère, il a dénigré mon travail ! s'emporta Draco, irrité de l'incompréhension manifeste de sa mère. Un an de dur labeur, de souffrances intenses, de pleurs dans les toilettes…

- De quoi ?

- Heu non…bref, de réflexion cartésienne, de surmenage scolaire, tout ça pour enfin parvenir à ouvrir le passage ! Et même pas une seule félicitation !

- Draco, reprit sa mère d'un ton sérieux, tu es quand même le seul à avoir trouvé la solution à l'entrée clandestine dans Poudlard. Et ce, au nez et à la barbe de Dumbledore ! A ton âge, c'est un exploit !

- Merci, Mère, dit Draco. Mais le Maître m'a reproché de ….de…

- Oui ?

- De ne pas avoir tué le vieux fou !

- Mais ce n'est pas grave mon chéri ! compatit Narcissa. Tu feras mieux la prochaine fois !

- Il n'empêche, mère, que c'est Snape qu'il a remercié !

- Le professeur Snape, rectifia machinalement Narcissa.

Draco la toisa, étonné. Il ressentit l'impression persistante qu'il avait déjà vécu cette scène. Sa mère ne paraissait pas s'être aperçue de sa bourde monumentale. Pour ce qu'il en savait, Severus Snape ne risquait plus de recouvrer sa place dans le corps professoral à présent…

- Mère, Snape n'est plus professeur.

- Ah oui, j'ai du mal à m'y faire. L'habitude, s'excusa Narcissa. Alors ?

- Snape n'a rien fait ! hurla Draco, habité par une terrible révolte contre l'injustice dont il était victime. Il s'est juste contenté d'apparaître et de lancer un Avada Kedavra. C'est à la portée d'un gosse de deux ans !

Narcissa, exaspérée par la mauvaise foi flagrante de la chair de sa chair, resta pourtant immobile, l'observant gesticuler frénétiquement. Elle attendit quelques secondes que ce dernier ait fini de déverser ses griefs et sa colère. Lorsque Draco se fut suffisamment essouflé, Narcissa reprit la parole.

- Draco, dit-elle, le professeur Snape….

- Snape, corrigea Draco automatiquement.

- Snape est quelqu'un de beaucoup plus expérimenté que toi. Mais sache que tu es déjà très doué pour ton âge, et que je ne doute pas que tu rempliras parfaitement la prochaine mission que te confiera le seigneur des ténèbres. Et, continua-t-elle en voyant Draco prêt à l'interrompre, le maître est exigeant. Mais il sait reconnaître la valeur de ses hommes, et s'il ne t'a pas récompensé tout à l'heure, c'est parce qu'il a considéré que tu n'avais pas respecté ses ordres à la lettre. Quant il aura reconsidéré la situation, il s'apercevra réellement de tes qualités et te donnera ce que tu mérites.

Draco garda le silence pendant un laps de temps très court. Puis, un sourire étira ses lèvres fines, illuminant son visage pointu. Et son corps sembla se relâcher, libérant toute la tension qu'il avait accumulée depuis sa dangereuse escapade sur la tour d'Astronomie.

- Vous croyez, Mère ? demanda-t-il.

- Evidemment !

- Merci, mère, dit-il simplement.

- Puis-je compter sur toi ?

- Oui, Mère, répondit Draco.

- Alors habille-toi. Et, Draco ?

- Oui, Mère ?

- Fais-moi le plaisir d'arrêter de provoquer des suicides collectifs chez les elfes de maison. C'est une infection, dans ce couloir.

FIN du prologue.

Et voilà une bonne chose de faite !

Lucius furax : non mais, tu as vu la manière dont j'agis dans ce chapitre ?

Auteur, gênée : Où est le problème ?

Lucius encore furax : JE SUIS UNE MAUVIETTE !

Auteur : non, tu es un être sensible !

Lucius, brandissant sa baguette : Tu vas voir si je suis sensible !

Heu…la suite de cette intéressante discussion (ou tentative d'assassinat ?)au prochain chapitre. En espérant que cela vous a plu. Et en espérant aussi que vous laisserez une review, cela ne prend pas beaucoup de temps et ça fait plaisir au malheureux auteur ! Enfin, pitoyable plutôt… n'hésitez pas, critiquez, aplaudissez ! Et signalez-moi si j'ai fait des erreurs au sujet de la chronologie…