Titre : Honeysuckle (traduction = chèvrefeuille)

Auteur : lpdrunknmunky

Traductrice : Hesymi

Couple : Ichigo Kurosaki - Uryû Ishida

Coucou, me revoilà avec la traduction d'une petite histoire que j'ai découverte par hasard sur un couple que j'aime beaucoup et qui est trop rare. J'espère que vous aimerez, et si c'est le cas, n'hésitez pas à le faire savoir en utilisant la fenêtre tout en bas !


- « Mon café au lait est froid », se met à ronchonner Kurosaki contre le rebord de son gobelet en papier. « On est là depuis combien de temps ? »

- « Deux heures et… », Uryû s'interrompt pour vérifier l'heure exacte sur son téléphone, « trente-sept minutes. »

- « Putain ! »

Le rouquin se frotte le visage de sa main tâchée d'encre et la passe ensuite à travers ses cheveux indisciplinés. Uryû est dans le même état. Il soulève ses lunettes pour se masser l'arête du nez, histoire de faire passer la migraine qui semble poindre. Cela fait près de trois heures qu'ils étudient non-stop dans le petit café où ils ont passé leur commande. D'ailleurs, le reste de son thé au lait est depuis longtemps devenu tiède et les miettes de son muffin aux cranberries ont durcies. Et pourtant, ils ne sont qu'à la moitié des révisions qu'ils font en vue de leurs prochains partiels. S'il avait su que ce trimestre lui boufferait autant de temps, Uryû aurait tout fait pour s'épargner les habituels petits bobos et autres maladies infectieuses.

- « On devrait peut-être faire une pause et revenir après ? »

- « Nan. Si je m'arrête, je n'arriverai pas à me motiver pour recommencer à réviser cette merde », contre Kurosaki. Il fourrage dans les papiers autour de lui et mord dans le capuchon d'un marqueur de couleur orange. A ce stade, Uryû est convaincu qu'il se contente, en désespoir de cause, de surligner au hasard des mots ou des phrases. « Est-ce que tu as amené le livre de Physio II ? »

Tandis qu'il lui tend le livre demandé, Uryû soupire, se résignant à se replonger dans cette torture. Le problème avec médecine, c'est que vous faites ce que vous devez faire quand vous devez le faire, et après seulement, vous pouvez faire la fête. Uryû a pigé le truc lors des quinze premiers jours de sa première année. Et ça marche. C'est pourquoi, le week-end prochain, il va se bourrer la gueule. Il s'octroie ce bref instant pour rêver à ce projet qui va lui permettre de relâcher la tension.

Il est d'ailleurs tellement perdu dans ses pensées qu'il est à deux doigts de passer à côté de l'arrivée d'une voix familière.

- « Je me disais bien que j'avais détecté quelque chose de beau dans le coin. »

- « Yumichika ? », s'écrie Kurosaki. Il dévisage le shinigami tiré à quatre épingles, comme s'il était face à une hallucination. Peut-être est-ce dû au fait qu'ils ne l'ont pas vu depuis plus d'un an. Le plus notable, c'est qu'il est vêtu de son uniforme noir au grand complet, orné de sa touche personnelle. Comprenez : il ne porte pas de gigaï. « Ishida, tu le vois, pas vrai ? »

- « Oui, Kurosaki. Mais personne d'autres n'en est capable », marmonne-t-il en jetant un coup d'œil autour d'eux en guise d'avertissement. Quelques clients ont entendu le coup d'éclat de Kurosaki et en cherchent la source. « Sortons. »

Après un hochement de tête, ils remballent rapidement leurs affaires et quittent le café, Yumichika les suivant d'un air désinvolte. Derrière le bâtiment, dans une allée fort heureusement déserte, ils se retournent pour faire face au brun. Ils ont l'air grave, emplis de l'appréhension inhérente à des rencontres passées en tout point similaires. Il existe peu de raisons qui amèneraient un membre du Gotei 13 dans le monde réel, si ce n'est l'arrivée imminente d'une catastrophe. Lorsque le shinigami se met à sourire et à battre des cils en regardant Uryû, ils tombent en pleine confusion.

- « T'es là pourquoi, Yumichika ? »

- « Auriez-vous besoin d'aide pour un combat, Ayasegawa-san ? »

- « Oh, non. » Il écarte l'argument d'un geste de son poignet squelettique. « Rien de tout ça. »

- « Eh bien quoi ? », insiste Kurosaki alors que l'autre reste silencieux pendant quelques minutes. « Si ce n'est pas pour un combat, pourquoi t'es venu là sans gigaï ? »

- « Je me sentais l'envie de faire une petite visite à mon Quincy préféré », minaude-t-il en se tournant complètement vers Uryû. Il fait un pas en avant et plonge son regard dans celui d'Ishida. « Bien que j'ai vraiment envie d'un peu plus de contact, mon mignon, ces lunettes réfléchissent affreusement et ne font décidément pas honneur à ton incroyable regard bleu. »

Déconcerté par la remarque, Uryû se retrouve à court de mots. Il n'arrive pas à savoir si c'est supposé être une sorte de bizutage version shinigami ou un truc du genre, mais une chose est sure, ça commence à l'énerver. En ce moment, ils n'ont pas de temps à consacrer à des mecs narcissiques et ennuyeux au possible, qui n'ont rien d'autre à faire que d'emmerder leur monde. Lui et Kurosaki en font déjà bien assez en aidant à se débarrasser des hollows. Uryû est sur le point de le signifier lorsque l'homme lui arrache ses lunettes et les jette avec dédain sur le sol.

- « EH ! »

Il est coupé dans sa plainte lorsque Ayasegawa parcourt de ces doigts chaque côté de son visage et finit par s'approcher à quelques centimètres de lui. Il entend le sursaut médusé de Kurosaki faire écho au sien, tandis que l'autre homme ferme la distance entre eux et presse fermement leurs bouches ensembles. Là, tout de suite, l'esprit du pauvre Uryû est tellement ébranlé qu'il est incapable de réagir pendant quelques secondes. Secondes dont profitent Ayasegawa pour glisser ses mains sur les fesses du Quincy et les peloter amoureusement. Le geste a le mérite de le sortir de ses pensées et de repousser rudement le torse de l'homme.

- « La force, ça peut être beau aussi, Ishida-kun », dit Ayasegawa d'une voix basse et sensuelle. « Mais autant la garder pour quand on sera seul. »

- « Putain mais… »

- « Je crains de ne pas comprendre, Ayasegawa-san », fait remarquer Uryû avant que Kurosaki ne perde le contrôle. Il aimerait donner au shinigami le bénéfice du doute, puisque, par le passé, il a toujours été respectueux vis-à-vis de lui. « S'agit-il d'une blague ? »

- « Appelle-moi Yumichika. J'aimerais entendre mon prénom de ta voix si vivante et excitante. »

- « C'est Ikkaku qui est derrière tout ça ? », demande Kurosaki. « Ce mec a le sens de l'humour le plus bizarre qui soit. »

- « La seule personne qui soit derrière tout ça est moi-même. » Le shinigami a tourné brièvement la tête vers le rouquin pour cracher sa réponse. Après quoi, il se rapproche d'Uryû et lui envoie un sourire béat. « J'ai découvert le parfum d'un jeune Quincy fraichement éclos et je dois y goûter. »

Cette fois, Uryû évite le baiser. Malheureusement, le shinigami recourt au shunpo et le piège contre le mur en brique poussiéreux, juste derrière lui. C'est la première fois qu'un corps se presse contre lui, du moins ailleurs que sur un champ de bataille. La position lui arrache un cri, et il écarquille les yeux lorsque la langue d'Ayasegawa trace le contour de son oreille.

- « A-Ayasegawa-san ! »

- « Yu-mi-chi-ka », lui rappelle l'homme, en accentuant chaque syllabe dans un murmure brûlant.

- « Ishida ? », demande un Kurosaki inquiet. Uryû dont les yeux sont ancrés sur les plumes du shinigami, l'appelle au secours en bougeant frénétiquement la tête.

- « Lâche-le ! », fait le rouquin en tirant sur l'uniforme de l'autre pour l'écarter.

Suite à l'assaut dont il vient d'être victime, Uryû tente bien de se reprendre, pour finalement exhaler un cri lorsque le shinigami dégaine son zanpakutô.

- « Si tu veux la jouer comme ça, Uryû, je peux te contraindre à te laisser toucher », décrète le brun avec un sourire, tandis qu'il libère son shikai.

- « Mais putain ! », finit par lâcher Ichigo. « Est-ce que Kenpachi a détruit ce qu'il te restait de cerveau ? Ishida n'a pas envie que tu l'emmerde en ce moment. »

Et tout d'un coup, tout prend une tournure plus grave. Le rouquin prend son badge, juste au cas où les choses dérailleraient. Il ne comprend pas comment quelqu'un peut pousser aussi loin la blague, mais toujours est-il que, de là où il est, il sent émaner du kidô du cinquième siège. Quant à Uryû, depuis une fameuse nuit de beuverie avec Hisagi, il connait les capacités d'absorption en énergie spirituelle de son zanpakutô. Bien entendu, il est confiant en son aptitude innée pour puiser l'énergie des autres, même lorsque les siennes sont au plus bas. Cependant, il préfèrerait éviter cette éventualité. Il se baisse une seconde pour ramasser ses lunettes qu'il met à l'abri dans l'une de ses poches.

- « J'apprécie l'offre, Yumichika-san », commence-t-il sur un ton agréable. Se faisant, il fait un geste à Kurosaki pour qu'il se décale, ce que ce dernier fait aussitôt. « Toutefois, je ne peux accepter vos sentiments. »

- « Hm. Rejeter l'amour n'est pas très reluisant. »

- « Quand bien même, je me dois de décliner. »

Immédiatement, il saisit le bras de Kurosaki pour décamper au plus vite. Usant du hirenkyaku, il fait trois bonds et supprime sa signature spirituelle, avant qu'ils ne s'éloignent encore un peu plus loin, pour parer à toute éventualité. Ils débarquent à la périphérie de la ville, où, pantelant, Uryû s'appuie contre un arbre.

- « Est-ce que ça va ? »

- « Oui. Pas l'habitude de faire ça… à deux. »

- « Je voulais parler de Yumichika », précise Ichigo en fixant le brun. « Bon sang, j'ai rien compris à ce qui vient de se passer. »

- « Etrange », confirme succinctement le brun.

La vérité, c'est qu'il est profondément choqué, indépendamment bien sûr de l'invitation quelque peu spontanée d'Ayasegawa. Déjà, pourquoi lui ? Ils se connaissent depuis plusieurs années et le shinigami n'a jamais montré un intérêt pour lui, si ce n'est un commentaire de temps à autre sur son apparence. Bien qu'il le suspectait, Uryû ne savait même pas qu'il était gay. Et surtout, lui n'a jamais dit à qui que ce soit qu'il l'est. Contrairement à Hisagi, Kira et Matsumoto, il ne devient pas bavard lorsqu'il est ivre.

- « Peut-être qu'on devrait contacter la Soul Society et… »

- « Non, je suis sûr qu'il s'agit d'un de ses caprices. Il est probablement déjà retourné dans sa dimension. » Uryû ne tient pas à rajouter plus d'embarras qu'il ne vient d'en subir. L'idée même qu'on recherche une explication au comportement du shinigami, lui retourne l'estomac. C'est déjà assez difficile que Kurosaki ait été avec lui. « Mettons ça sur le compte d'un mauvais jour et voyons-nous demain de bonne heure pour les révisions. »

- « Si tu le dis », fait Ichigo en haussant les épaules tandis qu'Uryû acquiesce. « Tu me lâches chez moi ? »


Uryû a réussi à rentrer chez lui sans incident. Il ne sent plus le reiatsu d'Ayasegawa, ce qui ne veut pas dire grand-chose. Tout en préparant le dîner, il reste vigilent à la moindre fluctuation d'énergie autour de lui. Il parvient à manger près de la moitié de ses nouilles, lorsqu'il est interrompu par une nouvelle intrusion. Par chance, celle-ci vient de frapper à la porte plutôt que de débarquer en plein milieu de sa cuisine. Il ouvre la porte et se fige de surprise de voir Abarai dans l'entrée, en train de le regarder en souriant.

Il est perplexe et ne le cache pas puisque, c'est en fronçant les sourcils qu'il salue l'homme : « Abarai. Quelque chose ne va pas ? »

- « Nan. Tout va bien. Je peux entrer ? »

- « Mm. »

Le rouge pénètre dans l'appartement, son gigaï moulé dans un jean, un t-shirt et une veste en cuir. Il enlève ses chaussures et se met à analyser l'espace autour de lui. Uryû referme la porte. Il s'apprête à ouvre la bouche pour interroger Abarai lorsqu'il est devancé par celui-ci.

- « J'ai entendu que Yumichika était passé plus tôt. »

- « C'est exact. »

- « Le connard m'a doublé », marmonne-t-il. « Comme d'hab. »

- « Pardon ? »

- « Ishida, je sens que ça va te sembler bizarre mais… » A cet instant, le lieutenant de la sixième s'approche. Uryû se crispe, prêt, si nécessaire, à se faire la malle dans la seconde. « Je t'aime vraiment beaucoup. Est-ce que tu voudrais sortir avec moi ? »

- « Euh… »

Alors qu'il regarde dans les yeux de chiots d'Abarai, Uryû est presque cloué sur place par ce qu'il vient d'entendre. Tout comme Kurosaki, lui et Abarai se sont toujours querellés à propos de presque tout en dehors de la guerre. Non, même pendant la guerre, ils n'étaient pas d'accord. Et contrairement au rouquin, il n'a jamais développé avec le rouge de lien plus profond qu'une simple interaction et une compréhension mutuelle. Il connait plus ce shinigami qu'Ayasegawa, mais pas suffisamment pour justifier une déclaration d'amour !

- « J'ai pensé à toi ces derniers temps. Tes cheveux et tes mains, et la façon dont ton pantalon se serre aux meilleurs endroits. J'ai songé à la forme de tes yeux et à combien ils ont l'air surpris… tiens comme maintenant. Pour ta bouche… »

- « Abarai, c'est quoi ça ? », s'écrie le brun complètement perdu. « D'abord Ayasegawa, et maintenant toi… C'est quoi, une sorte de compétition à celui qui me fera le plus peur ? »

- « Non, bien sûr que non ! Tu as peur là ? Je ne voulais pas te faire peur. »

- « Alors pourquoi tout ça maintenant ? Pourquoi moi ? »

- « Parce que… regarde-toi » Pour s'expliquer, Abarai le montre d'un geste. « Tu es à tomber, Ishida. Et tu sens incroyablement bon. »

Les mots figent Uryû, ouvrant la voie pour qu'il reçoive son second baiser d'un shinigami de la journée. Pour être tout à fait honnête, ce baiser-là est plus agréable que le premier. Sans doute parce qu'il est donné par Abarai qu'il trouve plus sympathique et plus son type que le tristement célèbre Yumichika Ayasegawa, réputé beau et critique. D'ailleurs, qu'il le veuille ou non, le fait qu'il soit un jeune homme inexpérimenté en pleine santé et que deux superbes mâles soient attirés par lui, l'a mis dans un état d'esprit quelque peu ouvert.

C'est pourquoi, cette fois, il ne le repousse pas. Doucement, il répond au baiser. Une simple pression, c'est tout ce qu'il fallait pour encourager Abarai. Les grandes mains du rouge viennent épouser le dos du Quincy et le serrer contre sa large poitrine. Ses yeux se ferment sous la force et la chaleur qui émanent contre lui. Il comprend désormais pourquoi les filles gloussent toujours en se racontent combien il est relaxant d'être enlacé par un homme. Uryû a toujours pensé qu'il s'agissait d'un truc de fille. Bon sang, qu'il se trompait !

Cherchant son souffle, il entrouvre légèrement ses lèvres, ce qu'Abarai interprète comme une invitation. Il approfondit le baiser en glissant sa langue qui s'en va câliner avec adresse la lèvre supérieure du brun. Autorisant l'intrusion, Uryû laisse échapper un étrange hum et imite son partenaire. Son geste est intercepté par la langue d'Abarai, et s'il trouvait jusque-là la sensation drôle sur sa lèvre, c'est une toute autre histoire de sentir la langue du shinigami sur la sienne. La dextérité de ce dernier, dont le langage est si peu châtié, le surprend. Mais il ne s'en plaint pas. À n'en pas douter, le résultat de décennies d'apprentissage.

Ce qui le ramène au plus important : pourquoi est-ce qu'Abarai lui fait subir ça ?

Il se détache de lui pour lui poser la question, mais l'autre continue de l'embrasser dans le cou, jusqu'à ce qu'il en atteigne la base qu'il suce et marque. Uryû pousse une sorte de gémissement qui ne fait qu'exacerber la volonté du shinigami, qui lâche alors un grognement rauque, avant de passer ses mains sous le T-shirt d'Uryû et de traîner ses paumes sur son dos, dans le seul but de descendre ses ongles émoussés vers la chute de rein. En même temps, il rive son attention vers l'épaule qu'il dénude légèrement et sur la peau de laquelle il laisse une trainée humide.

- « Attend, Abarai », tente Uryû en repoussant le shinigami à l'aide de son uniforme.

A présent, il sait qu'ils apprécient tous les deux ce qui se passe. Un peu trop d'ailleurs. Preuve en est la pression toute en chaleur qu'il ressent contre sa hanche. Et Uryû n'est pas loin derrière. Mais, il trouve que la journée entière s'est déroulée trop bizarrement et il refuse de plonger dans quelque chose d'aussi nouveau sans y réfléchir au préalable. Et ce, en dépit de la réponse inattendue et l'impatience de son propre corps.

- « Ishida », marmonne le lieutenant. Se pourrait-il qu'il se rende compte avec qui il est ?

- « On est en train de faire quoi ? »

Sans répondre, Abarai fait sauter la rangée de boutons de la chemise, se saisit d'un des mamelons, son autre main s'ancrant fermement contre la hanche pour le maintenir le Quincy qu'il emporte dans un baiser enragé. Uryû se tortille, partagé entre l'envie de se laisser aller au plaisir et la sonnette d'alarme qui retentit en lui.

Les yeux violets emplis de luxure d'Ayasegawa surgissent dans son esprit. Ce regard trouble qui s'est focalisé sur Uryû d'une manière inconnue pour lui jusqu'alors. Un peu comme s'il savait que seul Uryû pouvait le délivrer de son besoin. C'est à ce moment précis qu'il revient à la réalité : les yeux d'Abarai sont identiques. Il le pousse et le dévisage pour avoir confirmation. Le scientifique en lui est en train d'évaluer, de cataloguer, d'établir des hypothèses à ce sujet. Au-delà du désir sexuel, Uryû est conscient qu'il y a une faille dans l'attraction d'Abarai. Cela n'a tout simplement aucun sens. En outre, être attiré et être ami sont deux concepts différents et lui, il ne veut pas sortir avec Abarai. Il en est sûr.

- « Je vais trop vite ? »

- « Non… si, enfin, ce n'est pas le problème », explique le Quincy en faisant abstraction de l'expression inquiète de son ami. « Pourquoi es-tu là Abarai ? »

- « Parce que j'ai besoin de toi, Uryû ! »

Entendre prononcer son prénom aussi soudainement et sur ce ton fait écarquiller les yeux au brun. Abarai se rapproche de lui sans attendre une quelconque réponse, faisant réaliser à Ishida combien il est déstabilisant de le voir se focaliser sur une seule idée, à savoir lui-même. La situation va dégénérer si lui et Ayasegawa souffrent d'un délire commun. Heureusement, le zanpakutô d'Abarai est coincé avec son âme à l'intérieur du gigaï. Pourtant, Uryû sait qu'il doit se sortir de cet impair s'il veut éviter les ennuis.

- « Ok, ok », le rassure-t-il, réussissant à arracher un doux sourire à son partenaire. « Il faut que j'aille chercher quelque chose et après je reviens. »

- « Tu vas chercher quoi ? »

- « C'est une surprise. » Renji fronce les sourcils. Aussitôt, Uryû s'essaye à ce genre de sourire enjôleur qu'il a déjà vu faire par d'autres, avant d'ajouter : « Tu vas aimer. »

- « Vraiment ? Dans ce cas, je t'attends ici. »

- « Bien. Je reviens très vite. »

Le brun se saisit de son manteau et commence à reculer tout en continuant à sourire. Il enfile ses chaussures et ne prend pas la peine de saisir au vol ses clefs lorsqu'il ouvre la porte. Dès qu'il l'a refermée, il atténue son reiatsu et fonce comme l'éclair.


Il a pris un itinéraire détourné pour semer d'éventuels poursuivants et arrive finalement à destination : le magasin d'Urahara. Uryû est convaincu que si quelqu'un dans cet univers peut l'aider à comprendre ce qui lui arrive, c'est bien ce fou de scientifique. Il prend le temps d'évaluer qui se trouve à l'intérieur et constate qu'Urahara est la seule âme présente. Il s'avance près de l'entrée et frappe à la porte à quatre reprises. Il est tard, mais pas au point de déranger le repos de qui que ce soit. Cela dit, il doit attendre plusieurs minutes avant que la porte ne s'ouvre pour révéler le propriétaire. Comme d'habitude, ses yeux sont masqués par le chapeau et l'éventail, mais il est bien trop soulagé de le voir pour se soucier de son manque d'esthétisme.

- « Uryû-kun, que puis-je faire pour toi ? »

- « Je suis tellement content de vous voir, Urahara-san », commence-t-il avec un soupir de soulagement. « J'espère que je ne m'impose pas… »

- « Non-sens ! Entre, entre », chantonne le blond en faisant de larges gestes avec son bras. « Ça te dit du thé ? »

- « Un thé serait le bienvenu. »

- « Assied-toi pendant que je vais en refaire du frais. »

Tel un enfant perdu qui retrouverait la sécurité des bras d'un adulte, Uryû s'enfonce dans un coussin autour de l'immense table basse d'Urahara. Et pendant qu'il attend que l'autre le rejoigne, il s'emploie à trier ses pensées. Urahara revient et lui verse une tasse fumante de thé vert. Après quoi, il s'installe sur des oreillers posés à même le sol. Tout en regardant patiemment le Quincy siroter sa boisson, il éloigne son éventail, offrant un sourire bienveillant. Une vague de compassion envahit le Quincy en réalisant qu'il a parmi ses relations un allié aussi puissant prêt à l'assister, même pour des choses aussi futiles.

- « Connaitriez-vous une raison au fait qu'un shinigami débarquerait à Karakura pour harceler des mortels ? » Il préfère taire les détails embarrassants. « En particulier deux membres du Gotei 13 ? »

- « Mm, non… » Urahara regarde au loin, faisant mine de réfléchir. « Je n'ai jamais entendu quelque chose comme ça. Pourquoi tu me poses cette question ? »

- « Eh bien, c'est… euh… Une longue histoire. »

- « J'ai tout mon temps. »

Uryû acquiesce lentement, évaluant ce qu'il est prêt à dévoiler, cherchant à savoir comment il peut discuter de quelque chose d'aussi personnel avec cet homme, sans causer de tort aux deux shinigamis. Malgré le risque que cela comporte, il décide néanmoins qu'il n'a pas le choix.

- « Aujourd'hui, à deux endroits différents, j'ai reçu la visite de deux shinigamis : Yumichika Ayasegawa et Renji Abarai. » Faisant un hum compréhensif, Urahara observe attentivement le jeune homme, qui prend une grande inspiration et continue : « Leurs intentions étaient sans conteste amoureuses. »

- « Ah. »

- « Pourtant, aucun d'entre eux n'avaient montré le moindre intérêt pour moi auparavant. »

- « Je vois. »

- « Bien entendu, moi le premier, je ne les ai jamais encouragé en aucune façon. »

- « Vraiment ? »

- « Mais le plus étrange au sujet de ces évènements... », le front d'Uryû se fronce de rides au souvenir de ce qui s'est passé, « c'est que tous les deux semblaient être dominés par une sorte d'émotion ou influence. Ayasegawa-san a été jusqu'à dégainer et libérer son zanpakutô. »

- « Vraiment ? » Les sourcils d'Urahara se sont levés d'intérêt. « Comme c'est bizarre. »

- « N'est-ce pas ? Donc, j'espérais que vous auriez une idée ou un conseil… » Uryû fait des gestes avec ses mains, paumes retournées, « … qui pourrait m'aider à comprendre et trouver une solution à ce problème. »

- « Je crains que tu n'apprécies guère la réponse. » Urahara se met à secouer la tête avec tristesse, avant de soupirer et prendre un air grave. « Je suis surpris que ton père ne t'en ait pas parlé. »

- « Ryuken ? Pourquoi il serait au courant ? »

- « Parce que ce que tu es en train d'expérimenter est un cycle inhérent à ton héritage de Quincy, connu sous le nom : la phase du chèvrefeuille. » C'est la bouche ouverte que le brun fixe le blond continuer à débiter sur un ton terre-à-terre. « C'est le moment de la vie d'un jeune Quincy où il émet un faible niveau de phéromones très concentrées, destinées à attirer le compagnon le plus puissant, avec qui il partagera sa vie. »

Mise à part la similitude troublante de ces paroles avec le déroulement des évènements, Uryû ne parvient pas à accepter qu'il a failli dans son apprentissage de Quincy et que personne parmi son peuple ne lui a enseigné quelque chose avant que cela n'arrive. Et ne parlons pas en plus de l'idée que le compagnon le plus puissant soit apparemment un shinigami !

- « Non », murmure Ishida en secouant la tête. « Non, vous devez faire erreur. »

- « Je t'avais bien prévenu que tu n'aimerais pas. »

- « Mais c'est… c'est impossible. Un Quincy avec un shinigami, et un homme en plus ? Le fait que les shinigamis soient des âmes n'entre pas en ligne de compte ? »

- « Oh, tu préfères les femmes ? Je suis sûr que Rangiku sera heureuse de… »

- « Non !... Ce n'est pas la question ! » Il prend une grande inspiration pour se donner contenance, pendant qu'en pensée, il revient en arrière. Puis il demande : « Pourquoi le chèvrefeuille ? »

- « Parce que les substances chimiques que tu produis sont communément interprétées comme du nectar du chèvrefeuille sauvage. »

- « Attendez, Abarai et Ayasegawa ont tous deux mentionné à quel point je sentais bon… » Se sentant bête de ne pas y avoir pensé plus tôt, Uryû enlève ses lunettes et les pose sur la table, pour apaiser le mal de tête qui revient et qui, malheureusement, se situe entre les deux yeux. « Ça ne peut être qu'une blague. Je n'ai jamais entendu un truc pareil. »

- « C'est quelque chose de rarement répandu parmi ton peuple. Qui n'arriverait apparemment que pour cinq pourcent de la population, et seulement chez des personnes avec des gènes extrêmement dominants. C'est la manière pour les meilleurs parmi les meilleurs de trouver un partenaire équivalent à l'âge de s'accoupler, et de leur donner la chance de concevoir la plus puissante progéniture. »

- « Mais alors pourquoi cela attire les hommes vers moi ? », lâche-t-il sur un ton à la fois irrité et lésé à cause de son foutu corps. « Je ne peux pas avoir d'enfant sans un utérus. Et d'ailleurs, encore moins sans un corps humain ! »

- « Voilà une question intéressante. Peut-être que tes préférences innées ainsi que celles de ceux que tu affectes entrent en ligne de compte. Il pourrait y avoir de nombreuses autres raisons, la caractéristique étant si rare. J'estime qu'il existe une personne en particulier avec laquelle tu es biologiquement censé être… que ton corps tente d'attirer vers toi. »

- « Ne vous avisez pas de prononcer les mots 'âme sœur' ! »

- « Soit dit en passant, ce n'est pas juste biologique. L'essence même de ton reiatsu est imprégnée de cette lueur couleur or, qui traverse à la fois la distance physique et les dimensions spirituelles. »

Uryû avale le reste de son thé et se met à fixer les feuilles trempées au fond de sa tasse. Il repense à la réaction qu'il a eu face à chacun de ces hommes et la façon dont eux ont réagi. Pendant les deux propositions, il s'est assuré de n'avoir jamais voulu aller au-delà de simples contacts. Son comportement est resté irréprochable, contrairement au leur. Est-ce que cela veut dire qu'il obtient ce qu'il veut sans qu'eux n'aient le loisir de choisir ? Est-ce que les effets s'estompent après un moment ? Combien de temps cela dure-t-il ? Et que se passe-t-il s'il ne trouve jamais le compagnon idéal ?

Alors qu'il s'apprête à énoncer certaines de ces questions, il est rendu silencieux par le regard de Kisuke sur lui. Un regard admiratif et étrange. Et là, il se rend compte que le blond fait aussi partie de ce groupe d'individus sensibles à sa personne. Un frisson traverse son corps tandis qu'il patiente. Il ne comprend pas pourquoi l'effet sur cet homme s'est révélé avec retard. Qui sait, Urahara est peut-être capable d'y résister jusqu'à un certain point.

L'excitation commence à monter et il réalise que le regard d'Urahara est en train de tomber sous une sorte d'emprise, comme s'il s'en enivrait. Les yeux sont absents, cachés par un voile et son corps se tend clairement. L'homme laisse fleurir un sourire paresseux sur son visage qui rosit jusqu'à son cou. Son regard est empli d'un désir absolu, le même que ses deux précédents harceleurs. Uryû constate qu'il ne s'habituera jamais à ce qu'on le dévisage ainsi. Désormais, son souffle devient laborieux. Sous sa peau sensible, son sang pulse d'excitation et, lorsque le blond se rapproche de lui, il ne s'y oppose pas.

Il se laisse allonger sur le tatami qui recouvre le sol et autorise l'autre à l'embrasser tranquillement. Là où Ayasegawa s'est conduit comme un égoïste et un opportuniste, Urahara est respectueux et attentionné. Sans l'écraser de son poids, il reste au-dessus du brun, écartant ses cheveux pour glisser une main sur son cou. Là où Abarai a agi de manière rude et insistante, Urahara se montre curieux et doux. Il parcourt du bout des doigts la peau et s'arrête à chaque nouveau contact pour obtenir son approbation. En fait, Urahara est en train de le séduire, là où les deux autres shinigamis visaient à le prendre.

Cela explique sans doute pourquoi il ne tire pas son arc lorsque les mains du blond viennent se poser sur la braguette de son pantalon. La chaleur irradie son visage et la façon qu'a cette langue de frotter contre la sienne l'inspire au plus haut point. Peu à peu, la friction du tissu fin devient une révélation. Uryû lâche un gémissement au moment où l'homme referme ses doigts sur le zip, le descend et le touche à travers son boxer blanc. D'eux même, ses genoux s'écartent, permettant à Urahara de s'installer confortablement entre ses cuisses. Pour lui apporter cette plaisante friction, les hanches du blond se substituent à sa main, qui grâce à sa liberté retrouvée, s'en va errer immédiatement de son ventre à ses flancs, autour des courbes de ses fesses, à l'intérieur de ses cuisses et derrière son genoux. Et tout le temps, il embrasse simplement Uryû.

Inconsciemment, le corps de ce dernier répond aux mouvements saccadés d'Urahara, allant à la rencontre des lentes oscillations. Il enregistre vaguement le concert de leurs gémissement, un peu comme s'il était un observateur extérieur. Il tire sur le tissu du kimono d'Urahara, jusqu'à ce que celui-ci le fasse glisser pour le contenter. Puis il enfouit ses doigts dans la chevelure blonde, renversant au passage le chapeau et glisse son autre main au bord du slip avec manifestement un objectif bien précis. L'audace du plus jeune fait sourire en coin le plus vieux qui se recule, avant de venir pincer la pointe de sa mâchoire. Très vite, Uryû sent une tension et une effervescence se répandre dans son bas-ventre. Il est naïf, oui, mais même lui sait ce que cela signifie.

- « Urahara », fait-il en guise d'avertissement.

L'homme lui répond par un grand sourire, puis plonge sur ses lèvres pour l'embrasser à nouveau avec passion. La cadence augmente et il ferme les yeux dans l'attente de ce qui va se produire, les mains refermées sur les bras musclés d'Urahara. L'orgasme le fauche en trois vagues incroyables, l'obligeant à rompre le baiser et à émettre une série de sons pour le moins surprenants. En réponse, il entend le grondement sourd du blond résonné dans son oreille. Tandis que son cœur retrouve un rythme plus lent, quelque chose proche du soulagement envahit Uryû.

Quelques instants plus tard, Urahara se recule et s'assoit pour récupérer son kimono. Il laisse en revanche le chapeau là où il est tombé. Uryû récupère ses lunettes, mais reste tel qu'il est, échevelé. En silence, ils échangent un regard. Puis, Urahara s'éclaircit la voix.

- « Cela devrait t'aider à contenir les effets pour les prochains jours. »

- « Quoi ? »

- « Ne te l'ai-je pas dit tout à l'heure ? Tu produis des phéromones », explique le blond tout en réajustant ses vêtements et en lissant ses cheveux. « Leur sécrétion diminue si tu combles leur dessein. »

- « Donc, passer à l'acte ralentit la sécrétion et créé une sorte d'écran ? »

- « Exactement, Uryû-kun », s'extasie Urahara. Ce n'est pas la première fois que quelqu'un juge son intelligence à sa juste valeur. Cependant, c'est une première que cela coïncide avec un tel orgasme. « Toutefois, ce n'est pas la seule raison qui m'a poussé à me sacrifier, je peux te l'assurer. »

Le Quincy comprend ce que l'autre lui dit, explicitement et subtilement. Et bien entendu, sa modeste confession est bien plus mature et plus à même de contenir l'attraction que celles d'Abarai et d'Ayasegawa. Néanmoins, il n'en demeure pas moins qu'Uryû ne ressent pas plus d'intérêt pour lui, qu'il n'en ressentait pour les deux autres. En outre, il ne peut s'empêcher de songer que ce phénomène oblige ses hommes à agir contre leur propre volonté. Aucun d'entre eux n'a émis l'idée de courtiser Uryû, et encore moins de devenir son compagnon pour la vie.

- « Je suis flatté, Urahara-san », énonce avec soin Uryû, priant intérieurement que cela ne se termine pas comme les deux autres rencontres. Il ne se fait aucune illusion sur son incapacité à contrer un homme tel qu'Urahara dans un combat à un contre un. D'ailleurs, il est persuadé qu'il ne pourrait pas se battre avec quelqu'un avec qui il vient d'avoir des attouchements sexuels. « Mais je… »

- « Ça va, ça va. Je suis grand et je comprends », sourit le plus vieux avec bonhommie.

- « Merci pour tout », lâche le brun, une fois de plus soulagé par la bienveillance de cet homme. « Vous m'avez été d'un grand secours, c'est certain. »

- « Heureux d'avoir pu t'aider. Si tu souhaites utiliser la salle de bain, je t'en prie. »

Après avoir jeté un œil à l'état de ses sous-vêtements, Uryû hoche la tête.

- « Serait-il possible que je reste ici ce soir ? J'ai laissé Abarai chez moi et… »

- « Ce serait imprudent. »

- « Oh. »

- « Mon habilité à me contrôler est limité, compte tenu de ton émission continue, bien que réduite, de substances attirantes. Si tu restais ici toute la nuit, je ne suis pas sûr de ne pas finir dans ton lit. »

- « Dans ce cas, je vais m'éloigner de vous aussi vite que possible », promet le brun, la voix chevrotante parce que… Urahara est manifestement en train de le regarder comme un prédateur regarderait sa proie.


- « Salut Ishida, qu'est-ce qui se passe ? », l'accueille Ichigo quand il se pointe à son appartement. « T'as changé d'avis à propos du fait d'étudier ce soir ? »

Uryû laisse échapper une grande bouffée d'air. Il s'est inquiété que Kurosaki ne soit pas exempt d'être touché par cette connerie d'évènement, ou quoi que ce soit réellement. Ce n'est pas comme s'il n'avait nulle part où aller (pas moyen qu'il s'impose chez Chad ou chez Inoue), mais il aurait détesté mettre le rouquin dans le même panier que les autres. Ceux qu'il doit éviter à tout prix, du moins jusqu'à ce qu'il trouve le moyen de cesser d'exhaler ces invitations à le baiser vers tous les plus puissants shinigamis de la galaxie. C'est une chance qu'il ait en ce bas monde au moins un ami sur lequel il peut s'appuyer pour l'aider à surmonter ce passage critique. La seule difficulté va être de lui expliquer.

- « C'est une longue histoire. »

- « Bah, je viens juste de faire des onigiris, si t'en veux. »

- « Je meurs de faim », admet le brun en suivant son ami à l'intérieur. Il reconnait la touche de Yuzu dans la recette et sourit avec délice. « Kurosaki, je pourrais t'embras… »

Feignant une toux, il s'interrompt avant de finir sa phrase. C'est bien évidemment la dernière chose à dire à son seul allié. Mais ça n'aide pas que sa tête soit emplie avec des visions de baisers. Déconcertés, ils s'évitent du regard tandis qu'ils se déplacent vers la salle à manger, juste à côté de la cuisine. Uryû se concentre sur ses onigiris, en même temps qu'il réfléchit à la façon la plus diplomatique de demander à passer la nuit ici. Bien qu'il soit déjà venu chez Kurosaki, il n'est jamais resté. Au cours des cinq dernières années, leur amitié a progressé mais pas à ce point-là.

- « Alors quoi de neuf ? », demande Ichigo une fois leur repas terminé.

- « Tu te souviens cet après-midi, l'incident avec Ayasegawa ? »

- « Ouais. Est-ce qu'il revenu t'embêter ? », gronde Ichigo, énervé par l'idée. « Parce que je me ferai un plaisir de lui botter le cul ! »

- « Non, je ne l'ai pas revu. »

- « Bien. »

- « Mais Abarai m'a rendu visite. »

- « Renji était ici ? »

- « En fait, il se peut qu'il y soit encore », répond Uryû en avalant de l'eau. Il se met à jouer avec ses grains de riz en évitant le regard intense du rouquin. « Je l'ai laissé à mon appartement. »

- « Pourquoi il est venu chez toi ? »

- « Il est venu pour se déclarer. »

- « Il a fait quoi ? »

- « Et on a en quelque sorte… fricoté ensemble pendant un petit moment. »

Kurosaki demeure silencieux pendant de longues minutes. Ils posent ses yeux sur Uryû et constate quelques subtils indices, comme cet affreux suçon dans son cou, ses vêtements froissés et ses cheveux décoiffés, ses traces de dents à divers endroits sur sa peau. Et que dire du fait qu'il est encore rouge près d'une heure après sa 'rencontre' avec Urahara. Uryû attend que l'autre intègre son apparence et la digère.

- « Putain, mais tu déconnes. Je ne savais même pas qu'il était attiré par les hommes ! »

- « Je suis allé chez Urahara après ça. »

- « Ouais et je paris qu'il sait ce qu'il se passe. Ça ne peut pas être normal que deux gars aussi droits qu'eux décide de virer de bord et de te courir l'arrière train, te vexe pas hein ? Et il a dit quoi ? »

- « Eh bien… »

- « Quoi ? », insiste le rouquin sur un ton impatient.

Uryû remonte ses lunettes et se tourne vers la fenêtre lorsqu'il répond : « Tout bien réfléchi, je préfère ne rien dire. »

- « Oh non, pas question. Ishida, tu me dis ce qu'il se passe ou alors je vais lui demander moi-même. »

Comme Kurosaki n'est pas du genre à faire des menaces en l'air, Uryû grimace avant de se résoudre à parler pour éviter cela. Il préfère ne pas imaginer ce qui arriverait si Urahara avait l'opportunité de relater ce qu'il s'est passé entre eux il y a une heure. Epargnons les détails privés.

- « Fondamentalement, on va dire que je diffuse des ondes. »

- « Bon sang, ça veut dire quoi ça ? »

- « Je…, c'est un peu comme… as-tu déjà entendu parler du mythe grec des sirènes ? » Il rencontre enfin les yeux du rouquin, vides de toute compréhension. « Il s'agissait de créatures qui par leur chant et le son de leurs voix, attiraient les pêcheurs et les marins vers elles. Lorsqu'ils entendaient leur appel, ils étaient incapables de leur résister. »

- « Tu chantes vers les gens pour qu'ils tombent amoureux de toi ? », demande l'autre avec un sourcil levé.

- « Non, je ne chante pas, mais c'est l'idée générale. »

- « Mais pourquoi tu ferais un truc pareil ? »

- « Je ne le fais pas exprès ! », s'insurge le brun, vexé. « Apparemment, c'est un truc Quincy ! »

- « Ah. Un autre truc bizarre typiquement Quincy pour surpasser les shinigamis, c'est ça ? » Uryû lance un regard au vitriol vers son ami. « Bon, et tu vas faire quoi à ce sujet ? Continuer à attirer des mecs jusqu'à obtenir un fan club au grand complet ? Eh! Au fait, pourquoi ce sont tous des mecs d'abord ? »

Le front d'Uryû vient s'écraser sur ses paumes. Faites confiance à Kurosaki pour envisager toutes les choses les plus stupides avant de s'attacher au plus important. Voilà la raison principale pour laquelle Uryû n'a jamais pu permettre à cet homme d'être plus proche de lui qu'il ne l'est déjà. Pas moyen de s'appuyer sur quelqu'un d'aussi bête. Un mélange de fatigue, dû à trop de révisions, et de stress est en train de faire chuter son humeur. Au moins, sa migraine s'est fait la malle. Quoiqu'il suspecte le traitement d'Urahara d'en être la cause.

- « Je suis gay, Kurosaki. »

- « Tu… tu es gay ? » La note d'incrédulité dans sa voix est ennuyeuse, mais au moins il ne semble pas dégoûté. « Pourquoi tu ne me l'as pas dit ? »

- « Ce n'est pas comme si je le cachais, Kurosaki. En réalité, j'ai supposé que c'était plutôt évident. Je faisais partie du petit groupe de mecs au club de couture de l'école, je ne suis jamais sorti avec une fille, et j'ai un petit faible pour ce qui est mignon comme les papillons et les chatons », marmonne le brun à la table, parce qu'il est bien trop las pour redresser la tête. « Sans compter que j'ai fricoté avec Abarai et Urahara. »

- « T'as fricoté avec Urahara aussi ? Est-ce qu'il y a quelqu'un que tu n'as pas embrassé aujourd'hui ? Putain. »

Les mots le frappent. Il se redresse et découvre Kurosaki en train de secouer la tête et de soupirer d'irritation. Il ne parvient pas à comprendre pourquoi cela préoccupe tant le rouquin qui il a embrassé. Et encore moins pourquoi il semble furax. Sauf s'il déteste l'image mentale d'Uryû embrassant un homme. Encore une fois, la désapprobation lui fait mal.

- « Quoi Kurosaki ? Est-ce l'idée de moi intime avec quelqu'un qui heurte ta sensibilité ? », crache-t-il en plissant les yeux. « Ou méprises-tu seulement les putes en général ? »

Ichigo affiche une moue railleuse mais refuse de répondre. Dans un cri rageur, Uryû se lève de son siège et se dirige à grands pas vers la porte. Si c'est ainsi que Kurosaki veut se la jouer, eh bien Uryû fera sans lui.

- « Où est-ce que tu vas ? »

- « Loin de toi. »

- « Ishida, attend », fait le rouquin en se saisissant de son poignet. Le toucher envoie à travers le corps d'Uryû une sensation lourde et étrangère. Ça plus que toute autre chose le fait s'arrêter alors même qu'il était décidé à se débarrasser de l'emprise et à foutre le camp. Kurosaki a une expression inhabituelle sur le visage lorsqu'il dit : « Tu ne peux pas rentrer chez toi, pas vrai ? Il se peut que Renji soit en train de t'attendre. »

- « Qu'est-ce que ça peut te faire ? »

- « Ecoute, reste ici ce soir et demain matin, on essaiera d'y voir plus clair, d'accord ? »

- « Je ne vais sûrement pas rester près de quelqu'un qui va me juger. »

- « Je ne te juge pas », s'écrie Ichigo. Puis, après quelques secondes de réflexion, il ajoute plus calmement : « Tu m'as surpris. Embrasse qui tu veux, je m'en fous. Mais pour toi et Renji, le mieux serait que tu l'évites, lui et toute personne qui se pointerait ce soir. »

Uryû l'observe avec scepticisme. Son langage corporel sous-entend le regret, et il sait qu'il n'a pas beaucoup d'autres options. Bien qu'il apprécie peu les insinuations de Kurosaki selon lesquelles il manipulerait les hommes contre leur volonté (pour ce qu'il en sait, c'est le cas), il préfèrerait rester ici plutôt que d'aller demander l'asile à une tierce personne. En outre, ils doivent encore réviser demain matin. Hors de question qu'une bizarrerie biologique vienne impacter ses notes !

- « D'accord. »

- « D'accord », répète Ichigo en abandonnant son poignet. Le sentiment tourbillonnant s'évapore dans les secondes qui suivent la perte du contact, faisant froncer les sourcils du Quincy. « Je vais te prêter un pyjama. »

- « Je dormirai dans ce que je porte. »

- « Ce n'est pas un problème. On peut mettre tes fringues à laver ce soir. »

Alors qu'Ichigo se dirige dans le couloir vers sa chambre pour récupérer un pantalon lâche noir et un t-shirt bleu, Uryû demeure dans le salon, un sentiment désagréable dans le ventre, malgré son récent repas. Un peu comme un besoin, l'impression vague se propage en lui jusqu'à ce qu'il soit contraint de poser sa main et de presser juste sous le sternum. Ce n'est pas de la faim qu'il ressent. C'est plus que ça.

Uryû se souvient de ce qu'a mentionné Urahara, le 'compagnon le plus fort possible'. S'il était pleinement sincère envers lui-même, il admettrait qu'il ne peut y avoir qu'un seul shinigami qui réponde à cette description. Encore faut-il que l'homme en question soit affecté par ce truc qui provient de son corps et de son âme. De plus, l'idée de sortir avec Kurosaki semble relever du délire, compte tenu de leur tendance à constamment se chercher des noises. Mais, à l'opposé, l'idée de sortir avec Kurosaki l'excite au plus au haut point.

Ça n'a pas de sens. Comme rien dans toute cette histoire.

Sans mot dire, il se saisit des vêtements offerts et va s'enfermer dans la salle de bain pour prendre une douche et se changer. Lorsqu'il en ressort, Kurosaki est en train de mettre un drap sur le canapé. Après quoi, il jette un oreiller à une extrémité et une couverture à l'autre. Il darde un regard rapide sur Uryû avant de marmonner quelque chose d'indéchiffrable et de se diriger vers sa chambre. Uryû le regarde fermer sa porte, puis s'effondre sur le lit de fortune.

Comme d'habitude, il s'endort lentement. L'inconvénient d'être un génie et d'avoir une mémoire photographique est que l'esprit ressasse et trie tous les souvenirs de la journée avant de lui octroyer le sommeil. Vu les évènements d'aujourd'hui, le processus va être complexe. Uryû s'arrête sur les nouvelles sensations physiques, et elles sont légion. Bien sûr, penser au sexe commence à le réveiller. Il sert son poing autour de la couverture et lâche une respiration profonde pour dépasser ce stade.

Ensuite, viennent les émotions. Pour la plupart, surprise et confusion, avec un soupçon d'irritation. La dernière est largement imputable à Kurosaki pour avoir été comme toujours insupportable. Une fois cela appréhendé, c'est au tour d'une série de pensées dirigées justement vers le rouquin. Uryû détecte clairement son odeur sur les vêtements qu'il lui a prêtés. Une odeur qui déclenche une flopée de sentiments désagréables qu'il se refuse à analyser. A la place, il se force à couper court et peut finalement déconnecter.