Hey. Parce qu'on me l'a demandé, je re-republie cette histoire pour la troisième fois.
Ouais, je sais.
Cependant, ne vous attendez pas à des publications prochainement. Peut-être un jour … On verra. Tout dépend de l'inspiration et … j'ai peur de ne pas répondre aux attentes ?
Vous aurez donc les trois chapitres d'un seul coup. Désolée si ça fait trop lourd, seulement comme ça j'ai l'impression de ne pas trop trop merder, aucune idée pourquoi.
Bonne lecture.
Cette histoire est une inspiration du film The Neon Demon. C'est un film exceptionnel, je vous conseille de le regarder :)
Disclaimer : Le monde d'Harry Potter appartient à J.K Rowling, pas moi. Malheureusement.
Not Pretty
.
.
.
Chapitre I
.
.
.
Elle laissa son bras recouvert de faux sang pendre dans le vide.
« Maintenant tourne-toi vers moi. »
Elle fixa l'objectif.
Flash.
.
.
« Qui les a prises ? » demanda la femme impeccablement habillée. Elle feuilletait ses photos entre ses mains fines, ne les scrutant qu'un instant puis déposant celles qui ne l'intéressaient pas sur la table basse. Quand Hermione mit un temps à répondre, elle releva la tête en haussant un sourcil finement épilé. « Un ami ? »
Hermione se tortilla sur le canapé en cuir blanc, ouvrant et fermant la bouche. « Pas vraiment … »
Voulant fuir son regard perçant, Hermione laissa ses yeux se balader autour d'elle. La pièce était épurée - trop épurée. Tout était blanc. Les meubles, le sol, les murs. Absolument chaque recoin transpirait la richesse.
Elle avait l'impression d'être une vulgaire tâche dans le décor.
« Ton petit-ami alors ? » insista-t-elle.
Hermione reporta à contrecœur son regard sur la femme assise à son opposé. Elle était magnifique avec son carré noir plongeant qui soulignait ses traits fins. Le tailleur qu'elle portait devait valoir bien plus que son loyer mensuel, étreignant sa silhouette parfaite et renforçant chez Hermione le sentiment qu'elle n'était pas à sa place. Elle joignit ses doigts, mal à l'aise. Ses yeux verts semblaient presque se plisser pour l'évaluer.
« Non, non pas du tout. » répondit-elle d'un ton plus vif qu'elle ne le voulait. Elle reprit plus doucement. « Il m'a repérée sur le net et m'a proposée de me photographier. J'ai des études à payer alors j'ai accepté. »
Hermione ne savait pas si elle était censée en dire autant. Mais si cette femme la rejetait à cause des études qu'elle faisait en parallèle … Elle chercherait un autre boulot. Nerveusement, ses doigts pianotèrent sur sa cuisse, ses yeux se baissant sur ses genoux pour échapper à son regard de plus en plus pesant.
Après un long silence, Hermione se décida à parler pour mettre fin à ce massacre et partir avec le peu de dignité qui lui restait.
« Je ne sais pas ce que j'ai pensé. Je n'aurai jamais dû veni- »
« Vous savez, une trentaine de filles passe devant moi tous les jours avec l'espoir de devenir une superstar. » l'interrompit-elle en s'adossant contre le dossier du canapé. Elle croisa les jambes et posa la seule photo qui était restée dans sa main à côté d'elle. « Elles se présentent à moi parce qu'un jour le manager du fast food où elles travaillent leur a dit : une beauté comme vous devrait faire la couverture des magazines ! » Elle décroisa les jambes et rassembla les photos disposées sur la table, vérifiant qu'aucune ne dépassait de la pile. Hermione pensa qu'elle était légèrement maniaque et hyperactive. « Et elles le sont. Elles sont toutes belles. »
La femme se tut un instant, forçant son regard à rester ancrer dans le sien. « Vous cependant … vous ne l'êtes pas. »
Le ton qu'elle avait employé était tranchant et interdisait toute contestation. Hermione ne la contesterait pas.
Parce qu'elle le savait, c'était un fait. Elle n'était pas belle. Loin de là même. Elle ne faisait pas partie de ces standards de beauté qui possédaient de longues jambes et une silhouette élancée. Elle n'avait pas non plus la chance d'avoir des cheveux aussi raides que des baguettes. Elle était juste elle. Elle dans toute son intégralité, sans une once de maquillage et avec un peu trop de cheveux sur la tête. Elle ne voulait même pas devenir célèbre.
Mais Hermione voulait tenter sa chance. Elle était seule, en galère et avait besoin d'argent rapidement. Les factures n'allaient pas se régler miraculeusement alors elle avait pensé … pourquoi pas ? Elle ne perdait rien. Elle comprendrait parfaitement si elle n'était pas retenue.
Donc Hermione acquiesça, comprenant le message. Elle n'était pas faite pour ce monde. Un autre boulot lui était destiné. D'ailleurs sur le chemin, elle avait repéré un bar qui recherchait des serveuses. Elle devait penser y faire un tour. Rapidement, elle rassembla ses affaires dans sa sacoche usée et commença à se lever.
« Vous êtes plus que ça. »
Sous le coup de la surprise, Hermione se rassit brusquement. « P-Pardon ? » bégaya-t-elle.
« Je crois en la singularité. » se contenta-t-elle de répondre avec un sourire. Elle prit la photo posée à côté d'elle et la tourna vers Hermione. « Cette photo est la seule qui montre que tu es différente. Que tu as cette chose en plus. » Elle désigna d'un signe de tête le tas de photographies sur la table. « Toutes les autres font ressortir uniquement l'ambiance artificielle. Néons, sang, obscurité … Celui qui t'a photographié doit être un amateur. Ils ont souvent cette fascination pour le glauque mais comme toujours, ils en font un stéréotype. »
Hermione la regarda avec des yeux ronds, la bouche légèrement entrouverte. Elle remarqua qu'elle s'adressait maintenant à elle en la tutoyant, comme si ce changement était la preuve qu'elle avait validée une sorte de test. Lentement, elle hocha la tête, complètement désorientée. La photo qu'elle lui montrait représentait son visage en gros plan, la seule qui effaçait l'environnement autour d'elle.
« Quel âge as-tu ? »
« Dix-sept ans. »
Une expression de mécontentement s'afficha sur son visage. « Ce monde n'aime pas les filles trop jeunes. Cela fait polémique. » Elle réfléchit pendant quelques secondes. « Dix-huit ans c'est trop louche. On inscrira sur le formulaire que tu as vingt ans. »
« Mais ils ne me croiront jamais ! » contesta Hermione, paniquée à l'idée de devoir mentir.
« Chérie, les gens croient ce qu'on leur dit. » répliqua-t-elle avec un sourire narquois. D'un bond elle se leva, lissa son tailleur et marcha vers la sortie du bureau. « Reste ici, je vais chercher ton contrat. » annonça-t-elle par-dessus son épaule.
Hermione la regarda partir, se demandant brièvement comment elle pouvait marcher aussi gracieusement avec ses talons vertigineux. Elle secoua la tête, absente et un peu abrutie après tout ce qui venait de se passer. Avec un pouf, son dos atterri lourdement contre le dossier du canapé, ses jambes se balançant dans le vide. Elle leva les yeux au plafond. Alors elle était prise ? Elle n'y croyait pas. Elle n'arrivait pas à y croire. Mais elle ressentait. Elle ressentait des frissons qui parcouraient son corps - des frissons d'excitation. Elle ne savait probablement pas dans quoi elle s'embarquait. C'était nouveau, une sorte de page qui se tournait. Elle espérait seulement que la nouvelle lui permettra de reprendre goût à la vie.
Le cliquetis d'une porte qui s'ouvre la fit se redresser brusquement. Elle observa avec appréhension la femme qui s'avançait vers elle.
« Alors voilà, tu dois signer là, ici et là. » dit-elle en désignant avec son doigt manucuré les encadrés vide. Elle se rassit et la regarda sérieusement. « Il y a un casting dans trois jours et je veux que tu y participes à tout prix. C'est pour la couverture du magazine Vogue UK. » La femme s'interrompit et croisa ses bras sur sa poitrine. « Est-ce que tu connais Drago Malefoy ? »
Hermione réfléchit un instant et secoua la tête avec un sourire navré. « Non, jamais entendu parler. »
« Tu ne dois pas beaucoup regarder les médias alors. » déduit-elle en levant les yeux. « Il est à ce jour le photographe ayant reçu le plus de récompenses. Vogue, Elle magazine, Vanity Fair, W magazine … Il photographie les mannequins qui y figurent en couverture. »
« Mais je ne suis pas mannequin ! »
« Ce n'est pas ce que dit le papier que tu viens de signer. »
« Je pensais seulement que j'allais commencer par quelque chose de moins … important ? » grimaça-t-elle en posant le stylo sur la table.
« Chérie, tu es éblouissante et tu n'en as pas conscience. Tu as toutes tes chances crois-moi. » Elle marqua une pause, plongeant dans ses pensées puis soupira. « J'ai oublié de me présenter, Pansy Parkinson. » dit-elle en lui tendant la main.
.
.
La première chose qu'Hermione fit en sortant du bâtiment était de prendre une grande bouffée d'air. Elle l'avait fait, elle était prise. Elle ne put retenir le grand sourire qui chatouillait ses lèvres. Elle entama une danse de la joie, levant son poing vers le ciel en signe de victoire.
« Oui ! » Les personnes qui passaient devant elle la regardèrent bizarrement. « Hum, désolée. » s'excusa-t-elle en haussant les épaules.
Maintenant de bonne humeur, elle se dirigea avec entrain vers le stand de café le plus proche. C'était bien mérité.
« Hey ! » cria une personne derrière elle.
Elle se retourna avec un froncement de sourcil. « Ron ! » s'exclama-t-elle en écarquillant les yeux. « Désolée je t'avais … »
« Complètement oublié ? » finit-il en levant un sourcil inquisiteur. « Ça fait un bout de temps que je t'attends. »
« Tu as attendu longtemps ? »
« Une bonne heure oui. » répondit-il en observant attentivement son visage. « Ça a l'air de s'être bien passé. Tu sembles plus heureuse que toute à l'heure. »
Ensemble, ils marchèrent vers le Starbuck situé au bout de la rue. Hermione sortit son bonnet et ses gants, le froid hivernal commençant à paralyser chacun de ses membres. A cette période de l'année, elle se sentait normalement déprimée à cause du temps gris et des rafales glaciales. L'hiver londonien ne représentait en rien cette image clichée où la neige tombait à profusion et les décorations de Noël recouvraient chaque coin de rue. Non il faisait froid, il pleuvait et les gens tiraient les gueules.
Pourtant en ce moment, elle ne pouvait tout simplement pas empêcher le sautillement dans sa démarche.
« Plutôt oui. » répondit-elle avec un sourire. Mais il s'effaça aussitôt en pensant à ce qui allait venir. « Elle m'a demandé de passer le casting pour la couverture de Vogue UK. Tu sais qui est Drago Malefoy ? Il semble connu. »
« Tu rigoles ? Bien sûr, c'est le meilleur photographe de tous les temps ! Son travail est juste spectaculaire, il a ce talent pour magnifier tout ce qu'il photographie. C'est lui qui fait passer le casting ? »
Elle hocha la tête, le stress montant en puissance dans ses veines après avoir entendu son ton admiratif. Ce Drago Malefoy semblait être un géant, une figure emblématique dans le milieu. Elle allait juste être ridicule une fois devant lui. Elle … Stop. Elle fera tout ce qu'elle pourra et sera très contente d'elle-même. Point final. Hors de question qu'elle se rabaisse. Avec cette résolution, Hermione releva le menton fièrement et rajusta sa veste.
Ils rentrèrent dans le Starbuck qui était à leur grande surprise peu rempli et choisirent une table près de la fenêtre, appréciant pleinement la chaleur de la salle.
« D'ailleurs, on a dit quelque chose sur mes photos ? » demanda Ron l'air de rien une fois qu'ils étaient assis avec leur café. Mais elle pouvait quand même déceler une note d'appréhension dans sa voix.
« Pas vraiment. » déclara-t-elle en hésitant. Il avait déjà trop d'insécurités, elle ne voulait pas lui faire du mal. Au contraire, son intention était de l'encourager et elle savait très bien que répéter les paroles de Pansy anéantiraient ses maigres espoirs. « Mais ils ont gardé une photo. Alors … tiens, je te rends les autres. » poursuivit-elle en surveillant attentivement sa réaction.
L'expression qui s'afficha sur son visage brisa le cœur d'Hermione. « Oh. » dit-il en regardant les images sur la table. Il les effleura avec la pulpe de ses doigts, sa touche aussi légère qu'une plume, et tenta vainement de cacher sa déception en lui offrant un sourire. « Merci de les avoir montrées pour moi. »
« C'était le moins que je puisse faire. »
Un silence gêné s'installa entre eux. C'était toujours comme ça. Une fois qu'ils avaient fini de parler de photographie, la conversation s'arrêtait parce que – c'était bien triste de l'avouer, mais ils n'avaient absolument rien à se dire. Hermione prit une longue gorgée de son café et regarda les gens passer derrière la fenêtre, ses doigts pianotant contre la table.
Ron n'était pas son petit-ami. Ron n'était même pas son ami. Ron n'était rien de plus qu'une connaissance. Ils étaient dans la même fac, Poudlard, mais évoluaient chacun dans des sections différentes. Lui étudiait la photographie et elle le dessin réaliste. Ils ne s'étaient jamais adressés la parole jusqu'au jour où il l'avait contactée pour devenir son modèle photo. Au départ, elle ne le voulait pas. Ce n'était pas son truc. Elle détestait être observée et encore plus être sous le feu des projecteurs. Mais très rapidement après un essai, elle avait pris conscience qu'elle ne se sentait pas épier. Qu'elle ne retrouvait pas le sentiment d'être enfermée dans une cage en verre.
Elle se sentait libre.
Poser était un art. Un moyen d'expression totalement transparent. Et c'était ce qui fascinait Hermione, la transparence. Elle ne pouvait pas mentir. Elle ne pouvait pas se cacher. Elle devait jouer avec sa peau, son visage, son regard. Et c'était à sa grande surprise une chose qui la passionnait ; le fait de transmettre une émotion rien qu'avec son corps. Il y avait une telle totalité qu'on ne pouvait ignorer. Alors qu'elle essayait de faire passer un message avec une feuille et quelques coups de crayons, le corps permettait bien plus, parfois même au-delà de la compréhension. Il fallait le ressentir, c'est tout.
Ça la prenait aux tripes. Quelque chose au fond d'elle-même se retrouvait toucher, mise à nu et révélée aux yeux de tous. Elle devrait être effrayée mais … non. Elle ne ressentait que les vibrations d'excitation sous l'objectif, ces moments uniques la rendant parfois sauvage et incontrôlable.
Mais Ron ne le permettait pas. Il cherchait toujours à contrôler cette transe qui la prenait en donnant des directives trop précises. Il n'acceptait pas le fait qu'elle se libère et pose selon ses propres envies ; laisser son corps s'exprimer de lui-même. Si jamais elle était prise, elle espérait … Elle espérait que ce Drago Malefoy lui céderait cela.
Elle n'y croyait pas trop.
Avec une étreinte maladroite, elle et Ron partirent chacun de leur côté.
En se dirigeant vers son appartement miteux situé dans la banlieue de Londres, Hermione se répéta mentalement son mantra. Malgré la promesse qu'elle s'était faite tout à l'heure, elle ne pouvait s'empêcher de paniquer.
C'était une litanie qui constituait ses pensées.
Pas de peur, pas de douleur. Inlassablement.
.
.
Trois jours plus tard, Hermione se retrouva devant la porte du casting, le corps figé. Elle pouvait le faire, elle tenterait sa chance comme toutes les autres et repartirait heureuse même si ça ne fonctionnait pas. Alliant une profonde respiration et un hochement de tête pour se donner du courage, elle ouvrit la porte avec plus de force qu'elle ne le voulait. Le bang de la porte qui cogna contre le mur résonna dans la pièce.
« Merde. » souffla-t-elle en voyant toutes les têtes se tourner vers elle.
Hermione écarquilla les yeux face à l'horreur qui se dressait devant elle. Les filles qui se présentaient au casting était assises sur des chaises disposées autour d'une estrade légèrement surélevée.
Et elles étaient toutes en sous-vêtements couleur chair, une paire de talons aux pieds. Elles étaient magnifiques.
Pendant un instant, elle fut tentée de reculer et de s'enfuir en courant. Mais elle se rappela qu'elle s'était faîte une promesse, elle tenterait sa chance. Hermione s'avança timidement, les yeux baissés sur le carrelage blanc –tout était blanc ou quoi ? ; ses membres étaient raides à cause du silence qui régnait dans la salle. « Merde, merde, merde. » se répétait-elle mentalement, le poids de leur regard perçant des trous dans sa peau.
Le fait de marcher à l'aveugle pouvait expliquer pourquoi elle faillit rentrer dans la femme postée quelques mètres plus loin.
« Oula. » s'exclama celle-ci qui recula d'un pas. Hermione releva la tête, mortifiée de honte. Alors c'était ça, elle allait enchaîner gaffe sur gaffe.
Elle grimaça d'excuse. « Pardon. »
La femme plissa les yeux. « Et vous êtes ? » interrogea-t-elle finalement en regardant la liste de noms inscrits sur son carnet.
« Hermione Granger. »
Elle la vit cocher une case, et Hermione se dit que Pansy avait dû lui transmettre qu'elle venait. Elle rajusta sa sacoche et jeta un coup d'œil par-dessus l'épaule de la femme qui l'analysait de haut en bas.
« Tu es toute menue. » déclara-t-elle en pleine réflexion, un doigt grattant son menton. « Tu dois faire un 90B et un petit trente-six. » poursuivit-elle en cherchant dans le désordre un soutien-gorge et une culotte à sa taille, les mêmes que ceux que portaient les autres filles.
Mais Hermione ne l'écoutait pas. Son regard était accroché à l'homme assis devant l'estrade. Alors c'était lui Drago Malefoy ? Ses pieds étaient sur la table face à lui, l'air de se foutre royalement de ce qui se passait autour de lui. Elle s'attendait à voir un photographe efféminé habillé de vêtements à paillette, des doigts pleins de bagues et des colliers par milliers autour du cou.
C'était de toute évidence un beau cliché.
Drago Malefoy … n'était pas ce à quoi Hermione s'attendait. Il portait une tenue sobre, des derbies en cuir noir aux pieds et une chemise blanche rentrée dans un jean bleu foncé. Les filles salivaient devant lui, le fixant avides de son attention. Mais il les ignorait toutes, plus intéressé par la bille en métal qu'il faisait rouler entre ses doigts.
On aurait dit qu'il ne voulait pas être là.
Hermione secoua la tête et reporta son attention sur la femme qui lui tendait des sous-vêtements et une paire de talon noir.
« Ta pointure, c'est du trente-sept ? » demanda cette dernière pour la forme, sachant pertinemment qu'elle avait bon. C'était son métier après tout.
« Euh oui, merci. »
Hermione prit les affaires et se dirigea d'un pas précipité vers les cabines à côté, avec l'horrible impression qu'un regard la suivait jusqu'à ce qu'elle referme les rideaux. Elle se faisait des films, c'était le stress. Voilà. C'était la seule explication plausible que pouvait penser Hermione en se changeant le plus rapidement possible. Elle rangea ses affaires dans son sac et baissa ses yeux sur son corps, sceptique.
Bon, elle essayera au moins.
Elle sortit de la cabine discrètement et posa sa bandoulière sur un des bancs, se faufilant entre les candidates pour trouver une chaise libre. Merde, elle et son retard. Après une minute interminable, elle trouva enfin un siège en retrait qui donnait sur l'arrière de l'estrade. Le casting avait déjà commencé, et Hermione observa émerveillée ces filles gracieuses qui défilaient chacune leur tour sur le podium. Leur corps était longiligne et leur démarche féline. Elles paraissaient flotter, leurs pieds ne faisant qu'effleurer le sol.
Au bout d'un certain temps et malgré toute la retenue qu'elle possédait en elle, Hermione ne put s'empêcher de déplacer son regard sur l'homme blond assis de l'autre côté de l'estrade. Il semblait être fasciné par sa foutue bille et ne prenait pas la peine de lever au moins une fois les yeux. Il ne connaissait pas la politesse ? Hermione sentit monter en elle une poussée d'indignation. Elle avait envie de traverser la distance entre eux et de le secouer, le gifler même. C'était un manque total de respect.
« Candidate suivante, Astoria Greengrass. » annonça la voix de Pansy Parkinson, assise à côté de l'homme qu'elle avait nouvellement baptisé –le connard.
Un silence envahit la salle. Murmures, grincements de chaises, claquements de talons … plus rien. Tous les yeux étaient rivés sur la fille qui venait de se lever.
Elle était plus que magnifique. Et Hermione se demandait si elle ressemblait davantage à un elfe ou un humain. Avec des longs cheveux noirs ondulés qui atteignaient le bas du dos, une peau presque blanche, des traits fins et des yeux bleus glaciales, elle était tout à fait frappante.
Inutile de parler de ses jambes qui semblaient faire mille kilomètres de long, de son ventre tonique et de sa poitrine à en faire damner un saint.
Hermione regarda la sienne en fronçant les sourcils, cette partie traîtresse avait décidé d'arrêter de pousser au début de lycée. La vie était injuste.
Le bruit de ses talons montant les escaliers pour accéder à l'estrade résonna dans la salle. Parmi toutes celles qu'elle avait vu défiler, Astoria avait la démarche la plus élégante et hypnotisante. Elle dégageait une telle assurance qu'il était impossible de détourner le regard. Hermione l'observa avancer jusqu'à l'autre bout du podium, là où se trouvaient Pansy et Malefoy, puis se poster devant eux avec les bras le long du corps. Elle devina que le regard de la brune était fixé sur le connard, attendant son verdict avec impatience.
Pansy se tourna vers lui, et parla d'une petite voix. « Drago tu t'en souviens ? Tu as déjà fait un shooting avec Astoria il y a quelques mois. Cela s'était bien passé, non ? »
Il leva brièvement ses yeux métalliques pour regarder qui était face à lui et … haussa les épaules. « Mmh … »
Puis retourna à son activité favorite, c'est-à-dire faire rouler sa putain de bille entre ses doigts, complètement ennuyé. Hermione n'aurait jamais cru voir un jour Pansy comme ça, si peu elle-même. Ecrasée et recroquevillée. La première fois qu'elle l'avait vu, elle était confiante et possédait une assurance sans égale. Là, elle semblait se faire toute petite face au blond.
Pansy s'éclaircit la gorge. « D'accord Astoria, tu peux retourner à ta place. »
Lorsque cette dernière se retourna, l'expression sur son visage bouleversa Hermione. Son visage était défiguré par la colère et l'humiliation, ses yeux tirant des éclairs et sa mâchoire était serrée. Sa démarche n'était plus aussi souple que tout à l'heure et son dos était droit. Trop droit même, il était raide. Comme tout son corps.
Elle entendit le rire moqueur des autres candidates. « La panthère n'est pas si invincible, finalement. Elle est même périmée. » dit l'une d'entre elles. Les ricanements deviennent plus forts. En entendant ces paroles, Astoria regagna sa chaise en jetant un regard méchant autour d'elle, les poings serrés.
Hermione pensa que ces hyènes étaient bouffées par la jalousie.
« Candidate suivante, Hermione Granger. » s'éleva la voix de Pansy, faisant taire efficacement le brouhaha qui s'était créé.
Quelques secondes passèrent.
Puis d'un bond elle se leva, sa chaise raclant bruyamment contre le sol derrière elle. « Est-ce que j'ai la poisse aujourd'hui ? » se demanda-t-elle en n'osant regarder les dizaines de têtes se tourner vers elle. Elle monta les quelques marches qui menaient au podium et s'avança vers la table où étaient assis Malefoy et Pansy. Cette dernière lui fit un discret clin d'œil, un léger sourire aux lèvres.
Une fois au bout du podium, Hermione attendit, regardant partout sauf les personnes devant elle. Le calcul était simple. Si Astoria laissait insensible Drago Malefoy, elle n'avait tout simplement aucune chance.
Pendant longtemps, elle se retrouva poster devant eux, prête à entendre la voix de Pansy dire : « Merci, tu peux regagner ton siège. ». Une minute passa, deux minutes passèrent ou même peut-être une heure. En tout cas, c'était interminable. Est-ce que ces filles restaient plantées sur place autant de temps ? Elle ne s'empêcher de jeter un coup d'œil à Malefoy, qui devait sûrement regarder intensément sa petite bille de métal.
Elle croisa ses yeux gris.
Hermione écarquilla les yeux. Ses iris métalliques se détachaient parfois des siennes, descendant et montant, scrutant chaque parcelle de sa personne. Mais il faisait en sorte que leur regard se replante l'un dans l'autre. Elle sentit sa respiration s'approfondir, se hacher, n'arrivant pas à faire le tri dans ses pensées et à comprendre ne serait-ce qu'une émotion parmi la dizaine qu'elle ressentait. Elle le vit esquisser un sourire narquois. Cet enfoiré s'amusait de sa panique.
Il posa sa bille sur la table.
Et c'est à cet instant qu'Hermione remarqua le silence de mort qui régnait dans la salle.
Il se recula contre le dossier de sa chaise et croisa les avant-bras, ses manches retroussées jusqu'aux coudes. « Présente-toi. » ordonna-t-il. C'était elle ou il n'avait pas cligné des yeux une seule fois ?
« Euh … Je suis Hermione Granger et j-j'ai vingt ans. » balbutia-t-elle pitoyablement. Elle ferma brièvement les yeux de frustration, jamais autant honteuse d'elle-même. Merde si elle ne pouvait pas aligner deux mots, elle n'aurait jamais ce job.
« Tu as ta carte ? »
« Ma carte ? » répéta-t-elle bêtement. Hermione regarda Pansy, demandant silencieusement de quel bordel il parlait. « Ah oui ! Je ne l'ai pas encore, elle est en cours de création à l'agence. Je la recevrai d'ici une semaine environ. Donc … Voilà. »
Elle avait envie de se frapper.
Il haussa un sourcil, moqueur. « Viens à mon studio dans deux jours à 11h. »
« Qu … Quoi ? »
« Tu es prise. »
Des pleurs, cris, et protestations des candidates explosèrent. Il n'y avait plus qu'un vacarme assourdissant.
.
.
Lorsqu'elle quitta la salle du casting, c'était avec un gros soupir de soulagement. Elle pouvait encore entendre le brouhaha derrière elle, et Hermione se frotta les tempes en sentant un début de mal de tête. Un grand sourire était tout de même présent sur ses lèvres. Elle l'avait tenté et avait finalement réussi, mais n'arrivait toujours pas à y croire. Certes, elle s'était largement ridiculisée mais cela en avait valu la peine. Voulant rejoindre la sortie le plus rapidement possible pour respirer l'air frais, Hermione descendit les escaliers avec entrain. Elle pensa à Drago Malefoy qui était définitivement un pur connard, et Pansy qui n'était pas elle-même en sa présence. Pourquoi ?
Le bruit d'un miroir qui se brisa en mille morceaux la stoppa net. Cela provenait des toilettes. Avec hésitation, Hermione ouvrit la porte et la vision qui s'offrit devant elle la figea.
Astoria Greengrass.
Son maquillage coulait sur ses joues, ses yeux larmoyant la fixaient à présent rageusement et ses cheveux étaient dans un désordre total. Une poubelle gisait sur le sol recouvert de morceaux de verres -elle l'avait lancée contre le miroir.
Hermione s'avança prudemment vers elle.
« Astoria viens vers-moi. Tu risques de te faire mal avec les bouts de verre. »
Cela ne la fit reculer que davantage. « Ça te fait quoi quand les gens te regardent ? Quand les gens se taisent quand tu rentres dans une pièce ? » demanda-t-elle avec un sourire fou. « Tu n'es même pas belle en plus ! Mais t'es différente. Ça nous fascine tu vois, le magnétisme que tu renvoies. Tu sembles insaisissable. » Elle fit un large geste vers son propre visage. « Moi je suis belle, mais les gens s'en foutent maintenant. Ils y sont habitués. Je suis comment déjà ? » Elle fit semblant de réfléchir. « Ah oui, périmée. »
Et elle éclata de rire, hystérique.
Hermione faillit céder à l'envie de reculer jusqu'au mur derrière elle, horrifiée par ses mots. Elle voyait une femme brisée par un monde égoïste et trop hypocrite. « Tu dis n'importe quoi. Tu n'es pas dans ton état normal, viens s'il te plaît … Ces filles sont juste jalouses de toi, elles t'envient. S'il te plait viens vers-moi, je peux t'aider. » répéta-t-elle d'un ton désespéré.
« Tu crois que ces filles m'admirent ? » ricana Astoria en essuyant une larme qui descendait sur sa joue, étalant le maquillage encore plus qu'avant. « Non, ces putes attendaient mon humiliation. Elles étaient d'ailleurs tellement respectueuses tout à l'heure. Plus un son, que le silence pour assister à mon échec … »
Hermione secoua la tête. « Elles ne valent pas ta tristesse. Elles ne valent rien du tout d'ailleurs. Juste … Sortons et on parlera de tout cela où tu veux sauf ici. »
Elle l'ignora totalement. « Et Drago, tu as vu comment il regardait ? C'est la première fois que je le vois … Intéressé ? Fasciné ? Tout semblait dangereusement intense quand tu es apparue sur la scène. » Elle lâcha un rire sardonique. « Moi, je ne suis rien. Je n'existe pas pour lui. »
Une lueur effrayante apparût dans ses yeux bleus. Avant qu'elle ne puisse bouger d'un pouce, Astoria traversa rapidement la distance qui les séparait et la prit par les épaules.
« Dis-moi comment faire ! » lui cria-t-elle en la secouant violemment. « Dis-moi comment faire pour être comme toi ! »
« Astoria, arrête ! Arrête tu vas … »
En essayant de se dégager, Hermione trébucha en arrière sur le sol. Elle ressentit une vive douleur dans sa paume et regarda avec effroi le morceau de verre qui y était enfoncé profondément. Le sang commençait déjà à couler, tâchant le sol et ses vêtements. Elle recula en rampant, sa main blessée bercée contre sa poitrine, l'autre prenant son sac.
Puis elle s'enfuit en courant.
Elle dévala les marches le plus vite possible, atteignant la sortie du bâtiment en un temps record. Elle ne prêta pas attention aux personnes qui la regardaient avec horreur, mortifiées par ses habits recouverts de sang. Non, elle s'arrêta seulement de courir quand elle trouva une ruelle sombre. Haletante, Hermione se plaqua contre le mur puis déchira un bout de sa chemise qu'elle mit dans sa bouche.
« Pas de peur pas de douleur. Pas de peur pas de douleur. Pas de pe… »
Elle délogea brusquement le morceau de verre de sa paume, son cri étouffé par la bande de tissu entre ses dents. Elle glissa silencieusement le long du mur, enveloppant sa main du bout de tissu, et posa son front contre ses genoux.
Dans quoi s'était-elle embarquée ?
.
.
Le soir, dans le salon du Manoir des Malefoy, un silence planait entre Pansy et Drago. De la cigarette de ce dernier se diffusait de la fumée, créant un nuage vaporeux au-dessus de leur tête.
Drago était calé dans le canapé, les pieds croisés sur la table basse qui les séparait et la tête rejetée en arrière. Son regard était fixé sur le plafond, observant d'un air absent le blanc aérien se disperser.
« Tu as vu ses yeux ? » dit-il en prenant une bouffée de sa clope, brisant finalement le silence. « Marrons glacé, quasi noirs, et cerclés d'or. C'est la première fois que j'en vois. ». Il marqua une pause et reprit avec une voix où l'on pouvait entendre la frustration. « Ce qu'elle dégage autour d'elle, ça m'obsède. Elle arrive à se démarquer des autres filles et je n'arrive pas encore à comprendre comment. »
Pansy savait exactement de qui il parlait. « Ecoute Drago … »
« Je veux la revoir. Invite-la demain à mon exposition. » la coupa-t-il brutalement.
« Mais tu vas la voir dans deux jours. » protesta-t-elle. « Il y aura tout le gratin londonien en plus. Elle n'est pas encore prête pour ce genre d'évènement. »
Il se redressa pour la regarder droit dans les yeux, la foudroyant sur place. « Tu crois que j'en donne une merde ? Fais-en sorte qu'elle vienne. »
Après quelques secondes, Pansy hocha finalement la tête. C'était la première fois qu'elle voyait Drago fasciné par une fille. Le regard affamé qu'il lui avait donné cette après-midi l'avait tout simplement effrayé. Il ne regardait jamais personne, ou en tout cas jamais de cette manière. Il ne donnait son attention qu'à ceux qu'il estimait digne d'intérêt, ignorant les autres au point qu'ils se sentent inexistants.
Il avait ce genre d'impact sur les gens.
Mais là, c'était lui qui demandait l'attention de cette fille. Et Pansy n'aurait jamais pensé voir ça durant son existence. Elle le salua et se dirigea vers sa voiture pour rentrer chez elle, la culpabilité rongeant ses os. C'était de sa faute si Hermione se retrouvait seule face à Drago. C'était de sa faute si Drago vouait un tel engouement à cette fille. Elle avait forcé le destin. Et une fois que Drago voulait quelque chose, il ne reculait devant rien. Elle aurait voulu protéger Hermione du blond, ou l'éloigner au moins. Mais elle n'en était pas capable, elle n'avait pas la force de le résister. Elle était faible.
Une pensée traversa son esprit, la faisant ricaner tristement.
C'était parti pour un remake du petit chaperon rouge et du grand méchant loup.
.
.
.
Chapitre II
.
.
.
Hermione rejeta avec un frustration son crayon 2B sur son bureau, prête à s'arracher les cheveux. Son regard se fixa longuement sur la feuille, analysant chaque détail, nuance et contraste. La technique était parfaite, la réalité qu'elle essayait de transmettre ne l'était pas. Avec un soupir, elle écrasa son travail entre ses mains et le jeta dans la poubelle située à ses pieds. Elle pianota ses doigts quelques secondes sur le sous-main qui recouvrait la surface en bois, pourrie et gâchée de rayures – puis, énervée, elle se leva pour rejoindre le seul espace correct dans ses quinze mètres carré minuscule : le tapis, centre de son humble demeure. Elle y commença à faire les cent pas, pathétique et désespérée, ses pieds nus s'enfonçant dans les poils doux du tapis.
Une trace grise marqua sa joue lorsque sa main tâchée de graphite passa dans ses cheveux ébouriffés. Tout n'était que frustration et déception dans ses dessins. Elle n'y arrivait pas, elle ne le terminerait pas. Cela faisait bien trois heures qu'elle esquissait, estompait, hachait, rien à faire, rien n'aboutissait. Des tas de feuilles de papier jonchaient le sol et remplissaient sa poubelle. Et cette vision la démoralisait, lui donnant l'envie irrésistible de tout foutre en l'air et d'arrêter.
Elle était dans une zone floue, où des milliers de questions se bousculaient les unes contre les autres. Cette impression de se planter magistralement dans son choix d'étude supérieure lui bouffait le crâne. Elle connaissait tout sur le bout des doigts : techniques et théories étaient accrochées fermement à ses neurones. La passion ? Inexistante, même pas un subtil filament.
Hermione sursauta lorsque son portable échoué sur son lit sonna avec la retentissante chanson de The Pretty Reckless, Underwater -très addictif et entêtant. Se réveillant d'une transe qui la démolissait à petit feu, elle récupéra son téléphone maladroitement et décrocha sans prendre la peine de regarder le nom de la personne qui l'appelait.
Hermione coinça le cellulaire entre son épaule et son oreille, décidant sur un coup de tête de se préparer un café noir intense. Elle en avait besoin. « Allô ? » dit-elle en regardant les deux sachets posés sur sa kitchenette, hésitant entre le café en dosette et le café moulu. Elle avait la sérieuse flemme de laver sa cafetière, donc dosette.
Sans un bonsoir ni une présentation, la voix directe de Pansy lui répondit. « Demain, vernissage de Drago Malefoy. Il faut que tu y ailles. »
« Hein ? » s'exclama-t-elle en lâchant la capsule qu'elle allait mettre dans sa machine Krups. « Mais le shooting est après-demain, pourquoi devrais-je venir ? » Elle abandonna son café et entreprit de marcher en rond dans son appartement, le téléphone collé à l'oreille.
« Il veut que tu voies son travail. » soupira Pansy au bout du fil. « Alors ne discute pas et viens demain à 20h. Enfile une robe de soirée et … fais toi toute petite. Il y aura des gens importants là-bas. »
Puis elle raccrocha. Sans un au revoir. Sans attendre sa réponse.
Hermione regarda bêtement l'écran de son portable. Le tic-tac de l'horloge accrochée au mur défraîchi résonna ironiquement plus fort dans la pièce, rythmant ses pensées qui se fracassaient brutalement contre son crâne. C'était au-delà de l'insensé. C'était irréel. Elle resta immobile quelques secondes puis finit par resserrer sa main autour du boîtier avec colère.
« Merde ! » haleta-t-elle en le laissant tomber au sol.
Sous le bandage qui protégeait sa blessure, une violente douleur perça sa paume. Elle décolla lentement le ruban de tissus, prêtant attention à ne pas empirer la profonde écorchure, et découvrit avec horreur qu'elle s'était une fois de plus ouverte. Le sang bouillonnait dans l'entaille puis faillit couler sur son tapis –la prunelle de ses yeux, comme sa machine Krups jaune poussin. Hermione se mordit la lèvre quand le liquide rougeâtre commença à suivre les lignes de sa paume. Normalement, sa blessure nécessitait des points de sutures mais puisqu'elle voulait éviter les frais médicaux, Hermione attendait sagement que la nature et le temps lui confessent leurs pouvoirs guérisseurs.
En serrant les dents, elle se dirigea vers la salle de bain uniquement composée d'une douche bancable, d'un ridicule lavabo en décomposition et de toilettes dont la cuvette était fissurée. Son appartement transpirait la pourriture à chaque recoin. Mais à force de l'habitude, elle n'y prêtait plus attention. Hermione se lava les mains, désinfecta la plaie et changea le bandage - puis se motiva pour recommencer à travailler et finir l'impossible devoir de Mme Trelawney : un portrait. Son portrait. Qui relevait du désespoir pour Hermione. Etait-il possible de nous percevoir réellement ? Car elle avait constaté que la plupart des personnes sur cette Terre embellissaient ou enlaidissaient ses traits. C'était inconscient ou conscient, mais le fait était là : sur la feuille, le visage que nous nous faisions de nous-même ne correspondait pas à la réalité.
En passant devant son portable oublié sur le tapis, Hermione sursauta une nouvelle fois lorsqu'il sonna pour l'avertir qu'un message était arrivé. Elle le ramassa avec précaution puis maugréa en lisant ce que Pansy lui avait envoyé. Hermione jeta le cellulaire sur son lit et le rejoignit quelques secondes après en s'affaissant sur sa couverture premier prix, sa décision de se remettre au travail oubliée. Son regard se tourna vers le plafond tâché de moisissure puis elle resta plantée, immobile, ses boucles en auréole autour de son visage et sa main gauche, celle intacte, posée derrière sa tête.
La réalité l'atteignit brutalement. Alors il n'y avait pas d'alternative, elle devait vraiment y aller. Dire « non » relevait de la défiance absolue, et la dernière chose que voulait Hermione, c'était de se faire renvoyer pour manque de respect envers sa patronne. Puis il y avait l'argent, l'argent, l'argent ; elle imagina un instant les dollars qui luisaient dans les yeux de ces personnages de cartoon. Elle sourit. Brièvement. La richesse était une chose simple et bien vile. Seul un mot méritait à ses yeux un roulement de tambour en fond sonore : la passion. Hermione voulait la trouver et l'empoigner à pleine main, souhaitant goûter aux saveurs de la décadence et de l'abandon.
Son visage devint rêveur.
« Signal Gallery, 22 Paul Street, Londres. Demain, 20h. »
Demain, elle serait comme un nouveau-né qui allait faire ses premiers pas.
.
.
Le lendemain soir, Hermione se retrouva devant la façade du Signal Gallery. A travers la vitrine, elle apercevait la masse de gens rassemblée dans la salle d'exposition, un verre de champagne à la main, un porte-monnaie dans l'autre ; la carte de crédit bien en évidence. Chacun puait la richesse à mille kilomètres, avec leurs bijoux hors de prix et leur costume trois pièces taillé sur mesure. Hermione observa un instant ces femmes qui portaient une robe haute couture et des parures dorées, leur main manucurée posée sur l'avant-bras de leur mari fortuné. Hermione n'était pas jalouse, loin de là même, mais elle ne put s'empêcher d'avoir un a priori sur ces dames qui ne ressemblaient à rien d'autre que des trophées. Des accessoires. Peut-être se trompait-elle. Probablement. S'il y a une chose qu'elle savait avec certitude, c'était qu'il ne fallait jamais se fier aux apparences. Mais en voyant ce cadre d'argent et d'or, les rires délicats et les sourires hypocrites, Hermione souhaitait presque croire en ces idées préconçues.
Ses yeux vaguèrent sur l'ensemble de la salle, à la recherche de Drago Malefoy. Elle ne le voyait pas d'ici et en tout honnêteté, elle n'avait pas envie de se tenir face à lui de toute la soirée. Se faire toute petite lui avait dit Pansy. Donc, elle sera invisible. Parfois, elle souhaitait qu'une cape d'invisibilité existe en ce bas-monde.
La nuit peuplait déjà la ville de Londres. En cette saison d'hiver, les journées étaient courtes et glaciales ; peu de personnes s'aventuraient le soir par peur d'affronter le froid mordant. Une brise de vent frais la fit frissonner, gelant ses mollets découverts. Elle portait une robe noire à bretelle très simple, qui datait de sa promo au lycée –parce qu'elle n'en avait pas d'autre. Elle atteignait la hauteur de ses genoux et épousait très légèrement la courbe de sa taille et de ses hanches. Le décolleté en cœur n'avait rien d'extraordinaire, permettant seulement de voir l'infime naissance de sa poitrine. Une paire d'escarpin, une sacoche, un manteau, le tout en noir, puis le tour était joué.
Hermione regarda sa montre. 20h15. Elle était en retard. Consciemment. Cela faisait quinze minutes qu'elle était plantée dehors, à les observer et à appréhender, le stress gonflant ses veines. Elle avait juste … peur ? Mine de rien, ce troupeau de millionnaires était extrêmement intimidant. Elle soupira puis rentra dans le Signal Gallery, savourant la chaleur sur sa peau glacée.
« Vous êtes ? » demanda le réceptionniste en regardant la liste d'invités.
« Hermione Granger. »
« Vous pouvez y aller. » sourit-il en hochant la tête avec reconnaissance.
De sa main gantée, il fit un geste vers les deux grandes portes ouvertes.
Hermione inspira profondément, resserra sa main autour de sa pochette et rentra dans l'immense salle.
.
.
Drago sirotait tranquillement son martini, écoutant d'une oreille distraite le monologue ennuyant d'Astoria. Son regard était bloqué sur l'entrée, scannant les visages qui défilaient les uns après les autres, émerveillés par le décor luxueux qu'offrait la salle d'exposition. Il se retenait parfois de lever les yeux en entendant les exclamations exagérées lorsqu'une de ses œuvres plaisaient au gratin.
« Tais-toi Astoria, tu m'ennuies. » claqua-t-il en terminant son cocktail d'une traite, ignorant l'expression blessée de la brune. Il déposa son verre sur une table à proximité et commença à avancer en fourrant ses poings serrés dans ses poches, un sourire dangereux aux lèvres.
Elle était là, donnant son manteau à l'homme chargé du vestiaire.
« Alors, tu es venue. » dit-il en arrivant à sa hauteur.
Il leva un sourcil moqueur lorsqu'elle se retourna en sursautant, ses grands yeux écarquillés. Son visage était tellement expressif, si facile à lire, si vulnérable. Drago frissonna face à ses iris envoûtantes qui le fixaient, détenant en elles une lueur surprise. Elle était délicieusement innocente.
Elle haussa les épaules avec un sourire contrit. « On ne m'a pas vraiment laissé le choix. » grimaça-t-elle. Elle se figea dès que ses mots dépassèrent sa bouche et Drago esquissa un sourire amusé. « Je veux dire … je serai venue quand même. C'est juste que ma patronne n'est pas une fervente adepte du libre-arbitre, plutôt dictatrice à ses heures perdues. » Elle se racla la gorge. « Enfin quelque chose dans ce genre-là et- » Elle fit une pause en fermant ses yeux brièvement. « Et, je ne devrais pour vous dire ça. »
« Le monde sait que Pansy est trop exigeante. Cela restera notre petit secret. » dit-il avec un clin d'œil en se rapprochant subtilement. Ses yeux dévorèrent son corps fragile, sa peau parsemée de quelques points de beautés et ses traits curieux qui la rendaient infiniment désirable. Il était hypnotisé. « Blessure de guerre ? » demanda-t-il en remarquant le bandage qui entourait sa main droite. Drago fronça les sourcils, contrarié.
Elle recula d'un pas. Il avança, provocateur. En transe. « Un malheureux accident. Ce n'est rien. » rassura-t-elle en évitant son regard. « Est-ce que la blessure sera gênante pour le shooting de demain ? »
Posant une main sur sa taille, il la ramena brusquement contre son corps lorsqu'un homme à la bedaine fière, titubant et un verre à la main, se jeta dans la direction de la brune. Drago ignora les halètements choqués et convoqua ses vigils d'un imperceptible signe de tête. « Foutez-le dehors. » ordonna-t-il sèchement. Il baissa ensuite la tête vers la brune collée contre lui, ses mains fines étaient posées sur ses avant-bras et bordel, bordel, il résista à l'envie de l'emmener dans son bureau et de lui faire découvrir toutes les finesses de la sensualité.
La mâchoire serrée, il ferma les yeux pour se contenir. « Ça va ? »
« Il a tâché ma robe. Je vais régler ça aux toilettes. M-Merci. » balbutia-t-elle en s'éloignant lorsqu'elle se rendit compte de leur proximité. Elle lui fit un léger sourire et se retourna rapidement.
Drago regarda son sa silhouette se noyer dans la mer de gens, fasciné par le balancement de ses hanches. Il se servit un autre verre au hasard au buffet, tremblant et fiévreux. Son visage, son corps, sa peau, ses yeux. Ses yeux. Tellement particuliers. Tout en elle l'attirait. Drago ne comprenant pas pourquoi cette fille l'aimantait ainsi ; c'était la première fois de sa vie qu'il se retrouvait impuissant. Incontrôlé et insatiable, il voulait connaître chaque courbe de son corps, chaque teinte de sa peau, les tâches de rousseurs qui la parsemaient et ses halètements quand elle atteignait l'orgasme. Ses doigts se resserrèrent autour de son verre de whisky en pensant à un éventuel petit-ami. A un fiancé.
Il avala une longue gorgée de son whisky - il l'effacerait de la route, comme il l'avait fait avec tous les autres obstacles qu'il avait connu dans sa vie. Il ricana quand certaines femmes avec un gros caillou à l'annuaire lui firent des regards aguicheurs. Quelques-unes tentèrent de s'approcher de lui et interrompirent leur ascension en voyant son regard méprisant jeté dans leur direction. Il haïssait de tout son être ces chiennes chercheuses d'or, le corps refait de la tête aux pieds - les seins gonflés, les lèvres injectés et le visage botoxés.
Des pauvres chiennes.
Appuyé contre une des tables que disposaient la salle de l'évènement, Drago observa avec ennui la foule qui critiquaient son exposition. Il haïssait leur visage gras et leurs gestuels habituels – copiés par tous au milieu d'une société fade et sans intérêt.
« Hermione est là ? » interrogea Pansy en arrivant à sa droite, sa robe Balmain incrustée de cristaux scintillant au rythme de ses pas.
« Belle robe. » répondit-il en ignorant sa question, déjà exaspéré par cette conversation qui n'avait même pas commencé.
« Drago. Est-ce qu'elle est là ? » insista-t-elle en soupirant, se postant aussi contre la table pour observer la marée humaine.
« Oui. »
« Et alors ? »
Il reprit un autre verre de whisky, prenant son temps pour en savourer les saveurs riches et douces. « Alors quoi ? »
« Comment est-elle ? » demanda-t-elle nerveusement.
« Tu crois quoi ? » lança-t-il en levant les yeux. « Dépassée. »
Il posa son verre derrière lui, ennuyé.
Pansy se tourna vers lui, les yeux fixés intensément sur son visage. « Tu dis la vérité. » constata-t-elle, pensive. « Mais je sais que tu n'en as rien à faire. Tu ne fais pas attention à ce genre de chose, Drago, je te connais. Que tu remarques cela alors que- » Elle s'interrompit et Drago contracta sa mâchoire en croisant ses bras. « Je te préviens si, si … »
Il planta fermement son regard dans le sien. « Tu crois pouvoir m'en empêcher ? »
.
.
Hermione se sentait épier, impuissante, piégée dans cette sphère inconnue. L'impression que des milliers de miroirs l'entouraient, dans lesquels se reflétaient son apparence était le pire sentiment qu'elle ait ressenti de toute sa vie. Elle n'avait pas voulu lui parler. Même le regarder. Encore moins tenir une conversation avec lui. Mais il était apparu devant elle, avec son regard terrible et son allure intimidante. Et elle s'était sentie tellement mal à l'aise, tellement observée. C'était effroyable, cette aura qu'il dégageait. Comme pourrait-elle survivre sous son objectif ?
« Excusez-moi, où sont les toilettes ? » demanda-t-elle à un serveur.
« Au fond à droite. » indiqua-t-il en pointant du doigt le couloir.
« Merci. »
Elle tremblait encore.
Lorsqu'elle ouvrit la porte, Hermione se figea lorsqu'elle aperçut Astoria. Celle-ci se regardait dans le miroir, en train de se repoudrer. Elle hésita un instant - puis en se raclant la gorge, accéda au lavabo qui se trouvait à côté de celui de la beauté brune. Elle ignora le silence tendu, prit la serviette en tissus qu'elle avait piquée sur l'un des buffets et la mouilla légèrement en actionnant le robinet.
« Alors miss Innocente, comme se passe la soirée, mmh ? » demanda Astoria en se tournant vers elle, son pinceau en suspension dans l'air.
« Très bien, merci. » dit-elle entre ses dents. Elle tapota le morceau de tissu sur la tâche d'alcool, ignorant volontairement son regard inquisiteur. Tout ce qu'elle voulait, c'était de finir tranquillement son rafraîchissement et de partir sans un mot échangé avec cette peste.
« On ne va pas tourner autour du pot, n'est-ce pas ? » ricana Astoria. « Tu parles de ce que tu as vu hier et je peux t'assurer que ta jolie figure finira au fond du caniveau. C'est clair ? Je pense que ta petite blessure a su calmer tes ardeurs. »
Hermione plissa les yeux. Elle en avait marre de se faire marcher sur les pieds et d'être considérée comme une moins que rien. De plus, le fait qu'ils pensaient qu'elle était si manipulable l'exaspérait au plus haut point. Elle ouvrit la bouche pour lui répondre très franchement quand la porte d'une des cabines de toilette s'ouvrit avec un retentissant grincement, la chasse d'eau bruyante coupant sa réplique bien tournée.
« Voyons, Astoria. Un peu de tenu envers les invités ! » s'exclama une blonde à l'allure de lutin. « J'te jure, chaque fois que j'te croise, tu menaces quelqu'un. La vie en société n'est pas ton fort, non ? D'ailleurs, j'voulais te dire pour ton bien, ta robe rose jure affreusement avec tes talons Fendi orange. Just'horrible, tu vois ? »
Le chewing-gum rose qu'elle mâchait copieusement éclata dans sa bouche. Hermione ne savait pas si elle devait éclater de rire ou s'enfuir en courant. Elle décida de la regarder, les yeux ronds, complètement choquée par ce personnage étrange.
« Et j'aimerai vraiment mais alors, vraiment, m'laver les mains. Donc, si t'pouvais te décaler ou partir tout simplement ? Ça s'rait sympa, t'vois ? » poursuivit-elle pour l'achever un peu plus.
La bouche ouverte, Astoria reprit contenance et grogna furieusement, rassemblant son maquillage dans son sac. Les talons qui claquèrent sur le carrelage marbré et la porte qui se referma brusquement leur indiquèrent qu'elle était partie.
« Wow. » dit Hermione. « Je veux dire wow ! » s'exclama-t-elle ensuite, un sourire aux lèvres. Elle posa sa serviette et la regarda, sa tâche oubliée.
« Luna Lovegood. » se présenta-t-elle en se lavant les mains. Elle les essora en les pressant l'une avec l'autre puis sortit un gel antibactérien de sa poche arrière qu'elle versa généreusement sur ses paumes. Une fois son rituel fini, elle se retourna vers Hermione et lui tendit sa main. « Enchantée. »
« Enchantée, Hermione Granger. » sourit-elle, déstabilisée par ses yeux bleus limpides. Encore une fois, Hermione pensa qu'elle était bien étrange cette Luna, avec son pantalon kaki patte d'eph, sa veste en fourrure blanche et ses boucles d'oreille en forme de radis.
Quelques secondes passèrent pendant lesquelles la blonde l'observa minutieusement ; leur main toujours scellée. Hermione tenta de la retirer poliment mais sa poigne serrée l'en empêcha. Le pouce de Luna vint caresser le dos de sa main et bizarrement, à cet instant, Hermione sentit un sentiment d'inconfort.
« T'as la peau douce. » murmura-t-elle en se rapprochant dangereusement. La pointe de leur nez se toucha et Hermione fut mortifiée, sentant le parfum à la fraise de son chewing-gum lui monter à la tête. Elle détestait ce parfum. « Ce sont tes vrais cheveux ? Tes vrais yeux ? T'es drôlement belle, dis donc. Une chance que j'sois ta maquilleuse demain. » soupira-t-elle rêveusement.
Hermione pensa qu'elle aurait dû s'enfuir en courant.
.
.
Drago discutait avec le père d'Astoria, l'un des magnats de l'industrie immobilière de Londres, lorsqu'Hermione sortit précipitamment des toilettes avec une démarche rapide et fuyante. Il la suivit du regard, fronçant les sourcils en la voyant rejoindre la sortie. Elle ne pouvait pas partir maintenant. Elle ne pouvait pas lui échapper. Se détournant, il coupa court à la discussion et la rattrapa en quelques pas, prenant son bras pour la retenir. Elle. Ne. Pouvait. Pas. Partir. Elle s'arracha brutalement de sa poigne et se retourna, furieuse.
« Laisse-moi tranqu- »
« Tu n'as même pas daigné regarder mes œuvres. Je devrai être offensé, tu ne trouves pas ? » l'interrompit-t-il en reprenant son poignet, avec la ferme intention de l'empêcher de franchir cette porte.
« Pardon, je croyais que vous étiez quelqu'un d'autre. » s'excusa-t-elle en tentant discrètement de se libérer de sa prise.
Sa main se resserra davantage. Il ne la laissera pas partir. « Qui ? » respira-t-il en numérisant dans sa tête tous les visages qu'il avait invité. « Et je t'en prie, tu peux me tutoyer. »
Une expression de surprise se peignit sur son visage. Hésitante, elle acquiesça en grimaçant, les yeux fixés sur sa main qui encerclait son poignet. « La maquilleuse. Disons qu'elle est particulière. » dit-elle finalement.
« Luna Lovegood, c'est ça ? » ricana-t-il. « Elle a toujours été folle. »
Intérieurement, Drago bouillonnait. Cette Lovegood devrait savoir qu'elle était sa place. Elle prenait trop de libertés –profitant de la notoriété de son père qui était le chef du Chicaneur, le journal le plus vendu à Londres. S'il acceptait qu'elle fasse partie de ses employés et qu'elle vienne à son exposition, c'était uniquement parce qu'elle était une fille de. A part draguer les gonzesses qui passaient, cette lesbienne ne valait même pas la peine de cirer ses chaussures. Drago ne retiendra pas ses coups quand il se retrouvera face à cette folle.
Drago intériorisa la colère qui monta en lui quand Hermione reprit la parole, ne paraissant pas plus convaincue. « J'essayerai d'y penser demain et … de faire abstraction de ce passage gênant dans les toilettes. » dit-elle en haussant légèrement les épaules.
Pendant quelques minutes, une tension se créa entre eux. Insoutenable. Puis doucement, Drago relâcha son poignet en veillant à garder son regard dans le sien. « Je te fais visiter ? »
Ses yeux se fixèrent avec insistance sur les gens autour d'eux. « Vous- » commença-t-elle, et finit par s'éclaircir la gorge, gênée, quand il haussa un sourcil. « T- tu ne dois pas t'occuper des autres invités ? »
« Avec ou sans moi, ils seront plus que capables de claquer leur carte bleue. Je ne suis là que pour le décor. » exagéra-t-il avec un sourire en coin. C'était à peine vrai. Disons qu'ils savaient tous utiliser leur World Elite Mastercard et que les nouveaux riches n'attendaient qu'un regard de sa part pour faire affaire avec lui.
Elle n'avait pas vraiment besoin de le savoir. La dernière chose que souhaitait Drago, c'était de la faire fuir : elle était bien plus intéressante que ces loups prévisibles et affamés.
« D'accord, alors. Si cela ne dérange pas. T-Tu es sûr ? »
« Certain. » promit-il en levant les yeux. Il posa une main sur le bas de son dos et l'incita avec une petite impulsion à la faire avancer, la faisant tressaillir légèrement. Drago ne retient pas son sourire, il allait se régaler.
Ensemble, ils déambulèrent entre les cloisons noires sur lesquelles étaient accrochées les photographies de Drago, se frayant un chemin dans ce labyrinthe où personnes excentriques et distinguées s'entrecroisaient.
Leurs épaules s'effleuraient pendant qu'ils marchaient, s'arrêtant quelques instants devant une œuvre puis continuant leur chemin pour en commenter une autre. Drago la regardait, fasciné, avec l'envie de la toucher et de la ramener contre lui. La coller contre lui. Ses mains tremblaient, prises de frénésie, la tentation de se l'approprier n'était que trop présente.
Il écouta attentivement chaque mot qui sortait de sa bouche tentatrice, fruit du pêché ultime. Sa respiration s'accéléra en tentant de résister à sa convoitise ; la plaquer contre l'une des parois et l'embrasser pour tout ce qu'elle valait. Elle continua de parler en faisant des grands gestes, les étoiles dans les yeux, totalement ignorante de ses pensées obscènes qui jouaient dans son esprit.
Elle arrêta brusquement de parler, se bloquant sur une photographie à taille humaine, les yeux grands ouverts lorsqu'elle se tourna vers lui.
« Qu'il y-a-t-il ? » demanda-t-il en plongeant ses mains dans ses poches.
« Cette photo est … bouleversante. » souffla-t-elle. Elle se détourna et ses yeux restèrent fixés sur le visage capturé sur le papier baryté. « Magnifique. Le regard de cette femme ressort plein de haine. Et le jeu d'éclairage, bon sang, ce contraste entre le l'obscurité et la lumière. Avec seulement une bande de lumière verticale, qui met en valeur cet iris et sa pommette anguleuse, le reste du visage dans la pénombre. Elle nous dévisage, plein de ressentiment envers celui qui la regarde. Peut-être est-elle défiante envers celui qui la jugerait ? Le crâne rasé, l'absence de maquillage, les lèvres craquelées … Je suis sincèrement impressionnée. »
Elle fit une pause. Puis lui fit face, gênée et les joues roses. « Désolée. Je me suis emportée. »
« Ne t'excuse pas. » murmura-t-il. Il ne pouvait plus se retenir, avant qu'il ne puisse y penser, sa main droite sortit de sa poche et effleura sa joue, rangeant ses mèches rebelles derrières son oreille. « Tu es ... » Il réfléchit un instant. « Merveilleuse. »
Elle se figea. Silencieuse. « P-Pourquoi m'avoir choisi ? » déglutit-elle finalement.
Le regard de Drago épousa les traits de son visage, les courbes de son corps puis s'ancra une nouvelle fois dans ses iris obsédantes. « Tes cheveux sont broussailleux. » Il emmêla ses doigts dans ses boucles. « Ton menton est trop rond. » Ses doigts suivirent la courbe de sa mâchoire. « Ton corps est trop frêle. » Ses mains effleurèrent la ligne de sa taille. « Ton nez est trop pointu. » Il le câlina avec la pointe de son nez. « Et ta bouche est si- » Il s'arrêta en contractant sa mâchoire. « Ces imperfections te rendent humaine et parfaite à mes yeux. »
« Je- »
Une tousse délicate les interrompit brutalement. Hermione s'éloigna d'un pas en arrière et cligna des yeux, semblant se réveiller d'une transe intense. Drago, lui, retint un grognement furieux.
« Je dérange ? » interrogea Pansy en croisant les bras, inquisitrice et le regard plein de reproches.
« En effet. Donc, si tu pouvais partir, cela arrangerait bien des choses. Comme éviter ta pathétique critique que tu t'apprêtes à nous assener. » siffla-t-il en passant une main dans ses cheveux, frustrés.
« Drago, il y a plein de gens autour. Contrôle-toi. » répliqua-t-elle en ignorant totalement ce qu'il venait de lui lancer, un air fatigué sur son visage. « Quant à toi Hermione, je pense que tu devrais rentrer. La soirée va bientôt se terminer de toute manière. »
Cette dernière acquiesça en hochant la tête, docile. Absente.
« Il fait froid, il est tard, on ne sait pas ce qu'il peut lui arriver. » Il planta son regard dans celui d'Hermione. « Tu repars en métro ? »
« O- oui. »
« Drago … » soupira Pansy.
« Je vais la ramener. Tu penses pouvoir m'en empêcher ? » provoqua-t-il.
.
.
« Où tu habites ? » demanda-t-il une fois qu'ils étaient dans sa voiture.
La brune se déplaça nerveusement dans le siège en cuir. « J'aurai pu revenir par moi-même. Les autres invités doivent être- »
« Hermione, il n'y a rien de mal. Ils survivront très bien sans moi quelques minutes. Ton adresse. » répéta-t-il en serrant ses mains autour du volant, la jointure de ses doigts devenant blanche.
« Dans le quartier de Shoreditch, au 100 East Road. »
S'assurant qu'elle avait attaché sa ceinture, Drago démarra en trombe. Il doubla les voitures avec imprudence, dépassant largement la vitesse autorisée. Il fit semblant d'ignorer le silence gêné et tendu, le regard fuyant d'Hermione qui regardait la ville défilée devant ses yeux, ses halètements de peur lorsqu'il accélérait brutalement … Il était furieux. Il était si près de l'avoir. Il négocia un virage sans délicatesse puis appuya aussitôt sur le frein lorsqu'un piéton traversa la route.
« Connard. » murmura-t-il.
Cinq minutes plus tard, il s'engagea dans une ruelle déserte qui mena à un immeuble en dégradation.
« C'est ici que tu vis ? »
« Au moins j'ai un toit. » se contenta-t-elle de répondre en haussant les épaules. « Merci pour le retour. A demain. »
Puis elle sortit de la voiture sans un regard. Drago l'observa rentrer dans le bâtiment, la mâchoire serrée. Il devait fumer. Il sortit à son tour et prit une clope de son paquet rangé dans la poche de son manteau. Il inspira une bouffée, savourant la fumée qui s'infiltra dans sa gorge et ses poumons, puis la relâcha dans la nuit froide. Ses doigts se crispèrent, sa vision se brouilla ; il devait détruire quelque chose. Il ferma les yeux en se remémorant son parfum. Tellement désirable.
Un cri étouffé lui fit rouvrir les yeux. Un rouquin était tombé à terre après avoir glissé sur du verglas, un bouquet de roses dans une main. La carte qui l'accompagnait gisait aux pieds de Drago. « Pour Hermione. » y avait-il de marquer.
« Pas trop tard pour amener ces fleurs à la dame ? »
« Par- Pardon ? » demanda le roux en se relevant difficilement.
Drago ne répondit pas. Ce gars voulait prendre Hermione. Il voulait la voler sous ses yeux. Il ne le laissera pas faire. Drago écrasa sa cigarette sous sa chaussure et s'avança jusqu'à sa hauteur.
« V-Vous voulez quoi ? » bégaya-t-elle pitoyablement.
Il devait l'éliminer. Son poing s'abattit violemment contre sa joue. Son abdomen. Ses côtes. Le type ne comprenant pas ce qu'il lui arrivait, gémissait pathétiquement en essayant de le repousser. Il s'écroula au sol et se recroquevilla sur lui-même. Et Drago continuait, en transe, pensant seulement au fait qu'il voulait lui prendre Hermione. Il asséna des coups de pied dans son ventre, ses dents et son crâne. Partout. Le roux commença à cracher du sang, le visage recouvert d'ecchymoses et d'écorchures. Au bord de l'évanouissement. Ses dents se brisèrent, sa vue devint floue, ses os craquèrent dans le silence de la nuit. Puis le noir. L'inconscience. Et Drago continuait, continuait, continuait …
Lorsqu'il repartit, les poings et les chaussures en sang, Drago laissa derrière lui un corps devenu inconnaissable.
.
.
.
Chapitre III
.
.
.
C'est à dix heures qu'Hermione se réveilla, soit à une heure de son shooting-photo au studio de Drago Malefoy.
Elle était en retard. Frappant son réveil braillant avec un geste violent, Hermione rabattit brutalement sa couette au bout de son lit et sauta sur ses pieds. Elle se débarrassa dans son pyjama - qu'elle jeta au hasard dans son studio - alors qu'elle enfilait ses sous-vêtements propres disposés sur son bureau, puis son sweat à capuche gris défraichi et son jean. Interrompant ses gestes frénétiques, elle se figea un instant, les yeux fixés sur sa machine Krups.
« Est-ce que je me fais un café ? » se demanda-t-elle en regardant les capsules Nespresso qui lui faisaient de l'œil. « Est-ce que j'ai le temps ? Non. »
Et sur ces dernières paroles, Hermione gagna la salle de bain en enfilant ses chaussettes, évitant à peine de s'étaler de tout son long sur le sol.
Lorsqu'Hermione sortit de son appartement, il était précisément dix heures trente-trois. Elle avait passé plus de dix minutes à chercher son portable, qui avait décidé de jouer à cache-cache et de se retrouver finalement sous sa couverture de lit. Dieu seul sait pourquoi il se trouvait là et comment. Et très franchement, Hermione s'en fichait des hypothèses. Retard. Elle était encore plus en retard. Aux pieds de sa porte numérotée « 68 », Hermione vérifia son sac et pria qu'elle n'avait rien oublié.
C'était bon. Remerciant les dieux, et se rappelant sur le fait qu'elle était censée être athée, Hermione descendit les escaliers à un rythme sans pause et sortit de son immeuble.
Dans sa précipitation pour rejoindre la bouche de métro, Hermione fut intriguée pendant un total d'une seconde en apercevant une tâche de sang à moitié séchée sur le béton.
.
.
Le studio de Drago Malefoy se situait à la périphérie du centre de Londres, perdu entre les immeubles et le trafic routier. De l'extérieur, Hermione pensa à une grande usine dont le plafond semblait aussi haut qu'inatteignable, et l'extérieur aussi froid qu'industriel avec ces grandes portes lourdes en acier terne. Le studio semblait intimidant, presque inaccessible. Elle se mordilla la lèvre inférieure et crispa ses doigts sur le sangle de son sac, les grognements des moteurs à essence bourdonnant dans ses oreilles à quelques mètres de la ruelle d'où elle se trouvait.
Elle n'était plus en retard. Cinq minutes avant qu'elle ne doive se rendre à son shooting-photo et affronter … quoi, au juste ? Drago Malefoy ? Hermione secoua sa tête en ricanant légèrement, son regard tombant sur le sol goudronné.
Les évènements de la nuit dernière devaient être oubliés. Le déroulement de cette soirée était devenu hors de contrôle pour tout le monde, que ce soit elle, avec ses réactions incompréhensives, et lui, qui devait être sous l'emprise de l'alcool ou bien – parce qu'elle doutait que Malefoy puisse être un jour ivre – plus rationnellement, qui avait simplement eu la volonté de la séduire pour le shooting-photo.
Après tout, Hermione se dit en s'adossant au mur opposé à l'entrée, les photographes ont l'habitude de mettre à l'aise le modèle en le flattant excessivement. En étant affectif. Lorsqu'il était sous l'objectif, il n'était pas anormal qu'un photographe demande à son modèle de le regarder comme s'il était son copain. Peut-être que Malefoy procédait précocement, une sorte de phase préliminaire avant le shooting, et que cela était la clé de son succès : mettre le modèle complètement à l'aise pour des photos réussies.
Elle se sentait plus en danger que confiante avec lui.
« Hermione ? » appela Pansy en sortant du studio, l'extirpant de sa rêverie. Hermione fut davantage surprise par le fait qu'il y avait une seconde entrée plus loin vers le renfoncement de la ruelle que par sa soudaine apparition. « Qu'est-ce que tu fais ici ? On t'attend depuis sept minutes … » précisa-t-elle en regardant sa montre accrochée à son mince poignet droit. Droit.
Hermione grimaça en l'entendant soupirer et commença à préparer mille excuses dans sa tête quand Pansy s'avança vers elle, ses talons vertigineux plantés à quelques centimètres de ses baskets blanches-marronnées.
« … Et ils patienteront encore un peu. » poursuivit Pansy avec un ton conspirateur, les yeux plissés de suspicion. Il eut un silence et de la tension, les yeux fixés les uns dans les autres, et Hermione ne pouvait que se rappeler de leur entretien étrange d'il y a seulement six jours. « Je veux que tu me dises ce qui s'est passé hier soir avec Drago. » ordonna-t-elle alors brutalement, implacable. « Tous les détails. »
En entendant ces paroles, les yeux d'Hermione s'écarquillèrent d'abord d'étonnement, pour finalement se froncer d'agacement. « Je suis désolée, mais je ne pense pas que cela vous regarde. » répondit-elle le plus poliment possible, bien qu'une pointe d'agacement transparût dans sa voix.
D'accord, Drago Malefoy était un problème. D'accord, Pansy était légalement son patron. Mais en aucun cas le contrat qu'elle avait signé permettait à son employeur de s'introduire dans sa vie privée, ou de connaître quelle relation décidait-elle d'entretenir, amicale ou non. Que ce soit avec un PDG d'entreprise ou le boulanger du coin, cela ne regardait qu'elle, tant que cette dite relation n'empièterait pas sur l'image de l'agence ou de sa propre carrière.
Alors … de quoi se mêlait-elle ?
Pansy parut se radoucir alors que ses traits durs s'affaissèrent légèrement. « Ecoute. » dit la directrice d'agence en réorganisant ses cheveux corbeaux déjà parfaitement coiffés. « Je voudrais que tu fasses attention. »
« Attention à quoi ? »
Pansy laissa retomber doucement ses deux bras aux côtés de ses hanches fines, ses mains désormais tremblantes posées à plat sur ses cuisses. « Fais attention. Avec lui. C'est tout, d'accord ? » demanda-t-elle d'un ton lasse qui tranchait avec la lueur étrangement alerte dans ses yeux verts.
« Je veux savoir pourquoi. » insista la brune. Elle savait que Drago Malefoy était eh bien – spécial. En sa présence, Hermione se sentait maladroite et faible. Telle une proie pathétique, elle se retrouvait prise dans son aura menaçante, quasi prise au piège. C'était un sentiment horrible, de n'être plus qui l'on était, et tout cela à cause d'une personne.
Si Pansy lui demandait de faire attention, alors Malefoy devait être bien pire que ce qu'elle pensait.
Après un certain temps pendant lequel Pansy resta de marbre, Hermione pensa qu'elle ne lui répondrait pas et que la conversation était terminée. Mais comme d'habitude, Pansy étant Pansy, cette dernière décida au dernier moment de se poster à côté d'elle contre le mur, son dos reposant avec précaution contre la surface granuleuse.
« Je connais la femme de ménage de Drago. » commença Pansy. « Elle m'a envoyé un message étrange, qui décrivait la présence de sang sur les vêtements de son employeur. Tout d'abord, j'ai pensé que Drago t'avait fait du mal, que le sang t'appartenait. Puis je me suis rappelée ce que tu étais pour lu- » Elle s'arrêta alors qu'Hermione fronçait les sourcils, interrogatrice. « Peu importe. Tu es là, non ? » dévia-t-elle avec un rire jaune. « Peut-être que je me trompe et qu'encore une fois, je me fais des idées. » Elle fut prise dans ses réflexions. « Peut-être qu'il s'est seulement blessé, un accident … »
« Pourquoi me dîtes-vous ça ? A moi, qui plus est. » interrompit finalement Hermione, osant enfin poser la question qui lui brûlait les lèvres.
Pansy sembla déstabilisée pendant une seconde avant de reprendre sa façade froide. « Comment ? »
« Pourquoi me dîtes-vous ça ? » répéta-t-elle avec plus de verne.
Un silence, toujours le silence, puis Pansy soupira. « Parce que toi, comme moi, savons qu'il y a quelque chose de mal avec Drago. »
D'un coup, Hermione eut un flash. La tâche de sang sur le goudron, dans sa rue. Devant son immeuble. Est-ce que-
Est-ce que ?
« Je pense que vous devriez rentrer. » claqua la voix froide de Malefoy.
.
.
Face au miroir, Hermione était figée, le regard perdu et apeuré alors que Luna s'occupait de ses cheveux. Sa voix douce commenta la couleur auburn de ses boucles, puis devint légèrement excitée en lui racontant que c'est la couleur d'ma terre natale ! Ça m'rappelle la forêt près d'mon chalet. Hermione ne répondit qu'avec un hochement de tête, un sourire faux aux lèvres alors que les dix dernières minutes tournaient dans sa tête.
Hermione espérait que Malefoy n'avait rien entendu de sa conversation avec Pansy.
Il était sur le seuil de la porte, une cigarette dans la main droite, un briquet dans la main gauche. Hermione pouvait apercevoir le contour de son paquet dans la poche de son jean. Il les regardait en levant un sourcil, probablement surpris de les voir converser alors que le shooting devait avoir lieu dans moins d'une demi-heure, le temps qu'Hermione ne soit maquillée et habillée. Elle observa son visage. Son visage éternellement fermé, ne laissant transparaître aucune émotion, aucun indice qui permettrait de savoir qu'il ait entendu leur discussion.
Hermione avait sursauté en entendant sa voix. Maintenant, elle le fixait avec peur, indécise et l'impression d'être prise sur le fait.
Pansy ne répondit pas, gardant une expression gardée et aussi indifférente que lui. Avec un bref ricanement incrédule, elle se dirigea vers l'entrée du studio, passant devant lui sans un regard. Néanmoins, avant de disparaître de leur vue, la directrice jeta un regard derrière son épaule et fixa la brune. « Fais attention à ceux qui t'entoure, Hermione. » Et elle rentra sans attendre de réponse.
Hermione reste un moment absente, le regard tourné vers la porte d'où avait disparu Pansy. Elle ramena la sangle de son sac sur son épaule et s'apprêtait à la suivre, avec l'intention de saluer brièvement le photographe et de rentrer avec autant de dignité qu'elle possédait.
Aucune, donc.
Elle hocha la tête discrètement vers Malefoy, adossé contre le mur gris de son studio près de la porte d'entrée et les chevilles croisées avec nonchalance. Il portait un léger rictus, les yeux anthracites brillant et espiègles tandis qu'il l'observait atteindre le seuil de l'entrée. Au dernier moment, il encercla sa main autour de son poignet et l'obligea à se tourner complètement vers lui. Ses grands doigts resserrèrent leur poigne et Hermione frissonna. Frissonna. Et espéra de toutes ses forces qu'il ne le remarque pas.
« Tu ne me dis pas bonjour ? » demanda-t-il en étant attentif à rejeter la fumée sur le côté, et non dans son visage. Hermione ne put s'empêcher de penser qu'il était un fumeur plutôt consciencieux.
« Hum, si. » fit-elle avec une voix suraiguë. Elle présenta sa main gauche - celle qui n'était pas retenue par sa poigne - avec un sourire tremblant, priant intérieurement qu'il accepte sans poser de question sa salutation trop formelle.
Il esquissa un sourire, les yeux rieurs alors qu'il ignorait sa main tendue. « Tu es d'origine française, non ? »
« Oui ? » dit-elle avec hésitation, sa réponse ressemblant davantage à une question. « Comment le saviez-vous ? » continua Hermione sans retenir la suspicion dans sa voix, oubliant sur le moment qu'elle pouvait le tutoyer.
« Eh bien, tout le monde a le droit à ses petits secrets, non ? »
Hermione tenta de reculer mais une faible pression sur son poignet l'en dissuada. « Je …. je … comment … » balbutia-t-elle, des dizaines de pensées traversèrent son crâne sans jamais se terminer.
Elle le vit rouler des yeux et soupirer avec exaspération. « J'ai reçu ton dossier ce matin, Hermione. Le dossier qui contenait une photocopie de ta carte d'identité, qui manifestement à bien fait son job puisqu'elle précise où tu es née. C'est à dire Paris, si je sais encore lire. »
La mémoire d'Hermione se rembobina au moment où l'agence lui avait envoyé par message que sa carte et son dossier était prêts, et qu'ils seraient transférés au studio de Malefoy. Pour l'amour de merde, Pansy et elle avaient passées plus de deux heures à falsifier sa date de naissance sur sa carte d'identité, à l'aide de Photoshop et d'autres logiciels encore inconnus pour elle il y a quelques jours.
Elle fut coupée de ses pensées quand il la rapprocha dangereusement de son corps. « Alors, tu vois ? Pas de quoi s'inquiéter. » murmura-t-il à son oreille. Ses lèvres déposèrent un baiser sur sa pommette puis effleurèrent le côté de sa nuque. Il fit une pause alors qu'Hermione pouvait sentir un lent sourire se former contre sa peau frémissante. « Et maintenant, la bise. » chuchota-t-il finalement.
Hermione ne pouvait plus bouger. Elle était paralysée.
Après son tour surprise, Malefoy l'avait incitée à rentrer dans le studio avec un ricanement et une faible impulsion sur le bas de son dos.
Elle se retrouvait maintenant dans la loge de la maquilleuse et coiffeuse, Luna, en train de regarder son reflet avec incrédulité et méfiance. La blonde continuait à parler, rire et blaguer alors qu'Hermione était toujours dans un état hagard après ce qui s'est passé, se demandant qu'est-ce je fiche ici ? Ils sont tous fous. Cinglés. Si j'avais un minimum d'instinct de survie, je partirais dès maintenant.
« T'es magnifique. » soupira Luna en relâchant doucement ses boucles sur le milieu de son dos. « J'peux prendre une photo ? Comme souv'nir, j'veux dire. »
Son chewing-gum éclata dans sa bouche et Hermione ne pouvait que détester ce bruit depuis les évènements de la dernière fois. « Ecoute, Luna. Je ne pense pas que ce soit une bonne idée. »
« Allez, s'teuplaît ? » pria Luna en sortant son portable qu'elle coinça entre ses deux paumes. « J'te promets que ça restera entre nous. Personne ne saura quoique ce soit. »
Hermione l'observa durement pendant quelques secondes, puis avec un souffle vaincu, se détendit à contrecœur. « Ok. Mais seulement pour cette fois. »
« Merci ! » s'exclama-t-elle en sautant à ses côtés.
Luna ignora son malaise et balança un bras autour de ses épaules, plaçant le portable au-dessus de leur visage. Elle prit quelques temps pour cadrer leur expression, tandis qu'Hermione observait sur l'écran son sourire crispé, au contraire de celui de Luna qui montrait toutes ses petites dents blanches. La brune bougea inconfortablement en sentant la maquilleuse resserrer son bras autour d'elle et supplia mentalement que tout cela se finisse le plus rapidement possible, se demandant encore une fois pourquoi tout cela lui arrivait.
La brune allait presser Luna quand cette dernière, plus vite qu'elle ne le pensait possible, tourna la tête vers elle, plaqua ses lèvres sur les siennes et prit la photo.
Flash.
Une seconde trop tard, Hermione la repoussa brutalement et se leva de sa chaise, qui tomba parterre dans le processus.
« Non, mais ça va pas ? T'es malade ! » s'écria Hermione en s'essuyant grossièrement la bouche. Elle sera ses poings et se mordit la lèvre en sentant la blessure de sa main droite se réveiller de douleur. Lentement, ses yeux se baissèrent et découvrirent avec horreur le sang qui se rassemblait sous le bandage auparavant vierge et blanc. Sa coupure commençait à guérir et c'était le jour du shooting qu'elle décidait de se rouvrir ? Elle avait fini par oublier sa blessure après l'absence de douleur et le début de la cicatrisation, son esprit moins alerte en constatant le bon rétablissement de sa paume. Mais maintenant …
Jusqu'à quand sa malchance persistera ?
Luna lui offrit un petit sourire coupable. « C'est pour me venger d'Astoria. » se contenta-t-elle d'expliquer.
Avant qu'Hermione ne puisse lui donner un morceau de son esprit, Pansy ouvrit la porte avec un air exaspéré gravé sur son visage. « Le shooting commence. Hermione … A toi de faire tes preuves. »
Et elle partit.
Sans attendre de réponse, encore une fois.
.
.
Malefoy interrompit brusquement sa conversation avec Pansy quand Hermione arriva.
Cette dernière était à bout de nerfs, prête à imploser, exploser, littéralement à deux doigts de crier après toute cette folie. « Tu recommences et je te dénonce. » avait-elle dit à la blonde. Mais serait-ce suffisant ? A qui pouvait-elle se confier ? Elle était seule, irrévocablement seule, sans pilier ni personne de confiance. Il n'y avait personne pour l'épauler dans ce territoire hostile.
Seule.
Seule.
Ça résonnait.
Hermione n'entendit pas Luna arriver derrière elle, ni les regards des uns et des autres qui buvaient son apparence.
On disait beaucoup de choses sur Luna, mais on ne pouvait nier son talent. Grâce à ses mains de fées, elle avait peint au-dessus de ses sourcils une première ligne dorée, épaisse et légèrement courbée, puis une deuxième sur l'arrête de nez – un fil doré qui rejoignait le milieu de la première. Deux traits fins de même couleur figuraient sous la courbe de chaque pommette et un triangle, pointe vers le haut, aussi doré que tout cet art prenait place sur son menton.
De l'or finement sculpté sur son visage qui soulignait ses traits.
Hermione finit par s'humecter les lèvres en entendant le silence. Elle baissa le regard au sol et tomba sur sa robe en coton blanc. Sa longueur atteignait quasi le sol, laissant apercevoir le bout de ses vieilles baskets. Elle ne pouvait que penser à cet étrange contraste entre ce vêtement symbolisant la pureté et ses chaussures tâchées par le temps qu'elle enlèvera sûrement dans quelques secondes.
Elle releva la tête et se retrouva engloutit par le regard gris de Malefoy, qui la dévisageait de la tête au pied, le visage fermé mais les yeux qui disaient tellement. Tellement. Elle ne voulait pas lire en eux, alors elle fixa Pansy. Pansy qui était tout aussi indifférente aux premiers abords - mais si l'on observait avec plus d'insistance, on pouvait déceler la tension dans sa mâchoire et le léger tremblement de ses mains.
« Enlève tes chaussures. » exigea Malefoy avec une voix serrée.
Hermione s'exécuta immédiatement, frissonnant quand ses pieds nus rencontrèrent le sol froid. Ils se fixèrent quelques instants, puis le photographe s'avança vers elle et empoigna son bras doucement, l'amenant vers le décor du shooting. Le décor du shooting. Fond blanc. Sol blanc. Les deux aussi grands qu'un terrain de tennis, à tel point qu'Hermione – lorsqu'elle se retrouva au milieu de cette scène – se perdit dans la couleur du blanc, noyée et perdue dans cette marre de couleur unie. Unique.
Malefoy l'observa avec un regard … affamé. Elle ne pouvait l'ignorer plus longtemps. Il y avait une distance raisonnable entre eux, mais la manière dont il la scrutait la dérangeait ; elle ne se sentait pas modèle. Elle se sentait proie. Elle entendit le bruissement de ses pas qui effleuraient le sol blanc, refermant l'espace qui les séparait. Il s'arrêta à quelques infimes centimètres d'Hermione alors que cette dernière n'entendait que son propre souffle tremblant et le sien, brûlant, qui se frottait contre la peau de son épaule. Invisible à un œil extérieur, personne n'aurait pu deviner qu'elle s'était recroquevillée légèrement sur elle-même - personne n'aurait vu à part Drago Malefoy. Il entreprit de tourner lentement autour d'elle, son regard acéré décrivant chaque parcelle du corps de la brune.
Hypnotisé.
S'arrêtant devant Hermione, il fixa la dizaine de personnes qui avait aidé à monter les équipements et la mise en scène. « Ok, tout le monde. » dit-il avec monotonie. « Vous pouvez partir. »
Les gens se pressèrent de quitter l'endroit, le cliquetis de la porte d'entrée résonnant dans le studio derrière eux. Hermione vit Luna lui faire un clin d'œil avant de sortir, ses feuilles et son paquet de tabac à rouler dans une main. La brune froissa son nez et détourna les yeux.
« Je peux rester. » proposa Pansy, dernière personne restante après l'ordre de Drago. « J'ai du temps, cela ne me dérange pas. »
Intérieurement, Hermione implorait pour qu'il accepte. Elle ne voulait pas rester seule avec lui. Peu importe qui, mêmeLuna ferait l'affaire, pourvu qu'ils ne soient pas seuls dans ce studio. Hermione était prête à accepter n'importe qui.
« Pas utile. » déclara-t-il avec le même ton que précédemment.
Pansy la regarda tandis qu'Hermione rassemblait toute la pitié qu'elle pouvait transmettre dans ses yeux. Elle vit la femme aux cheveux corbeaux hésiter, puis finalement se diriger vers la sortie, laissant derrière elle le bruit sec d'une porte qui se ferme.
Seule.
Seule.
Lorsqu'elle releva la tête, Malefoy se trouvait à l'extérieur du décor avec les bras croisés. Il l'observait encore et encore, ses iris anthracites dévalant son corps de haut en bas. Sans rien dire, il se retourna et marcha jusqu'à la porte d'entrée. Hermine n'eut le temps que de voir sa main descendre l'interrupteur avant que le studio ne soit plongé dans le noir.
Seul le blanc. La scène. Elle. Seules la scène blanche et elle-même étaient éclairées par des projecteurs puissants, ne focalisant que la lumière à l'endroit précis où elle se trouvait.
Hermione le vit réapparaître devant le décor. Dans la pénombre, Malefoy semblait irréaliste, presque inhumain. Il s'appuya contre la table où se trouvait son appareil photo et adopta la même posture qu'il y a quelques minutes.
« Déshabille-toi. »
Surprise, Hermione resta pétrifiée quelques secondes. Elle pinça légèrement le tissu de sa robe entre son majeur et son pouce et le relâcha l'instant d'après. Avait-elle bien entendu ? Le cœur frénétique et son corps frissonnant, elle déplaça nerveusement ses mains derrière son dos, déboutonnant avec maladresse les boutons qui suivaient la ligne de sa colonne vertébrale. Elle sentait son regard sur son visage alors que sa robe tombait autour de ses chevilles. Elle la ramassa et la plaça sur le côté du décor, dans le noir, regrettant déjà ce vêtement qui la protégeait de –
De quoi ?
De lui ?
Elle revint au centre de la scène et déplaça son poids d'une jambe à l'autre, le froid grimpant sur sa peau et provoquant la chair de poule sur ses bras.
« Il y a un problème ? » demanda Drago avec une voix rauque. « Enlève tout. »
Hermione baissa son regard sur ses sous-vêtements couleur chair. Avec des mains tremblantes, elle décrocha son soutien-gorge et enleva sa culotte, les laissant tomber négligemment sur le sol à côté d'elle. Elle n'avait pas le courage de les porter jusqu'au côté de la scène et de les ranger. C'était au-dessus de ses forces, elle ne pouvait pas.
Elle était nue.
Nue.
Nue.
Devant une personne inconnue. Devant un homme inconnu.
« C'est pour le boulot. » se répéta-t-elle mentalement. Pour le boulot, le boulot, le boulot. Hermione sortit de sa transe alors que ses yeux se posèrent sur le dos de Malefoy, qui s'éloignait jusqu'à ce qu'il devienne un rien dans le noir, marchant quelque part pour chercher quelque chose. Elle se retrouvait encore seule, seule dans le blanc entouré de noir. Elle était effrayée, ne comprenant plus rien mis à part ce sentiment de nervosité. Des impressions cependant s'entrecroisaient, vagues et plutôt incompréhensives : les fois où elle avait la sensation d'être exposée à l'Enfer, démunie et faible, les fois où il n'y avait que le vide et le silence et elle.
Les fois où elle avait la sensation d'être dissocier d'elle-même. De jouer une personne qui n'était pas elle.
S'était-elle réellement dénudée devant un inconnu ?
Son corps se crispa lorsqu'elle entendit des pas se rapprocher. Drago sortit de l'obscurité et rentra dans le décor blanc de la scène, atteignant sa hauteur. Les yeux d'Hermione s'abaissèrent sur le seau qu'il tenait dans sa main. Le seau qui contenait de la peinture dorée. La brune releva son regard écarquillé et le planta dans celui implacable du photographe. Silencieusement, celui-ci la contourna et vint se placer derrière elle, son torse touchant le dos nu d'Hermione. Elle le sentit bouger, et bientôt, une main couverte de peinture vint caresser ses clavicules, son abdomen, son ventre. Sa poitrine.
Des flammes flambèrent sous sa peau, les caresses laissant dans leur sillage une fusion de sentiments contradictions chez Hermione. Le moment semblait durer une éternité, leurs souffles quasi haletants résonnant dans ce silence.
Jamais elle ne fut aussi déstabilisée.
Jamais les effleurements ne dépassèrent son bas-ventre.
Le sceau en ferraille était maintenant déposé à leurs pieds, alors que Drago – après avoir trempé une nouvelle fois ses mains dans la peinture dorée – frôlait cette fois-ci son cou. Son visage près du côté de sa nuque, ses lèvres proches de sa peau.
Enfin, Drago s'éloigna de son corps et reprit le pot de peinture qu'il déposa sur la table devant le décor. Il prit son appareil photo fermement entre ses mains, fit quelques réglages et se retourna vers Hermione.
« Ta blessure saigne. » remarqua-t-il avec un froncement de sourcil.
Hermione baissa son regard sur sa paume droite et découvrit son bandage maintenant rouge. Elle n'avait pas même senti la douleur. Sans doute était-elle anesthésiée avec tout ce qui se passait.
« Enlève le bandage. » ordonna-t-il.
Le morceau de tissu s'affaissa au sol alors que des gouttes de sang tombaient sur le décor blanc.
Une scène blanche. Des sous-vêtements. Du sang.
Et Hermione, recouverte de liquide doré.
.
.
Voili,voilou. J'espère que je ne vous ai pas perdu en route.
N'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé.
Tchuss.
