Bonjour, bonsoir
L'attente, c'est interminable : une petite fic qui malgré sa taille semble très longue (c'est fait exprès)
Les personnages ne m'appartiennent pas, je ne connais pas trop l'univers Marvel, et donc, il n'y a pas besoin de connaitre très bien pour lire ceci.
C'est en chemin entre le UA et le jesaispasquoi. On peut dire que c'est après le un? (vision utopiste des choses, hm?)
Bonne lecture, et si le coeur vous en dit, laissez une review.
L'usage du monde
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"En mourant je ne le rejoins pas, je cesse de l'attendre. »
« L'alcool a été fait pour supporter le vide de l'univers, le balancement des planètes, leur rotation imperturbable dans l'espace, leur silencieuse indifférence à l'endroit de votre douleur; [..] L'alcool ne console en rien, il ne ne meuble pas les espaces psychologiques de l'individu [..]. Il ne console pas l'homme. C'est le contraire, l'alcool conforte l'homme dans sa folie, il le transporte dans les régions souveraines où il est maître de sa destinée. »
« Tu sais l'ombre portée du fuseau de ton corps ; Ultime au cœur vibrant du vide mais noyées de lumière »
« Quel secret d'indigo à nos nuits s'appatrie ; Influx à fleur de peau comme un joyau rebelle? »
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P1. Prends-moi, Chaos, dans tes bras.
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Bienvenue Monsieur.
Y a-t-il quelqu'un à la tour ?
Personne Monsieur.
Tony se sert un verre de rhum. Les stores sont baissés. Il n'y a plus qu'à s'affaler sur le canapé et prétendre de ne pas être là.
Le salon est immense dans la pénombre. Tony Stark s'endort. Il recule un peu devant l'inévitable.
L'éclairage de la ville atteint avec peine le salon. Steve entre à son tour. Il ne touche à rien. Il s'assoit dans le fauteuil le plus loin de la lumière. Lui aussi. Il s'endort.
C'est bon. Ça a commencé.
Tony le suspecte, Steve l'ignore. Comment peut-il s'en douter, après déjà soixante-dix ans d'immobilité, ce qui va arriver ? Mais Tony sait. Tony a prévu, deviné. Ça rampait dans l'air, ça planait comme une ombre.
Ça arrive sur eux avec une force inconnue, courant d'air. Ça colle à leurs mouvements en chewing-gum. Ça les surprendra la nuit.
Ils ne se rendent pas compte tout de suite il ne se passe rien.
C'est au matin que Tony Stark fini son verre. C'est au matin que Steve demande : où sont les autres ? Ce n'est pas Tony qui répond. Tony est déjà figé dans ce qu'il sait. C'est JARVIS :
Les autres membres de l'équipe Avengers sont en mission, Monsieur Rogers. Je ne dispose pas d'informations complémentaires.
Il y en a pour un paquet de temps. Ils ne savent même pas combien. Ce n'est même pas important.
Ce n'est même pas encore vraiment l'attente que ça parait déjà insupportable d'attendre. Car elle va s'installer. Partout. Sur les meuble, dans la ville, jusqu'à l'intérieur des os.
Steve semble épinglé dans le fauteuil. Ses lèvres se tordent dans une grimace.
Ils ne savent pas pourquoi cette fois-ci, c'est différent. Pourquoi l'absence de leurs camarades à ce goût poisseux ?
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C'est la nuit de nouveaux. Longue, lourde. Horrible. Oui, c'est le mot, horrible. Puis le jour. L'aube fraiche sur la ville délivre une lumière égale.
Le silence. Ce silence qui vrille les tympans.
Que connaissaient-ils de l'attente, du silence fébrile ? Rien. Du retour attendu ? Ils découvrent tout ça.
La ville figée à leurs pieds.
Ça grouille de vie silencieuse, pas vue. Ce n'est pas une histoire de se cacher ou de sortir, l'attente.
C'est ce silence, au réveil, dans les rues, dans la ville entière au souffle coupé. Qui attend, des réponses, des nouvelles. Des noms.
Personne ne peut parler de cette attente-là. Du silence. De la vie qui bruisse plus délicatement que le sang dans les veines.
Steve et Tony attendent dans le silence de leurs équipiers. Dans ce silence d'information. Dans le silence de New York, du monde entier, pour eux.
Le silence de la vie qui s'étonne d'être toujours là, increvable. C'est un émerveillement pour les deux hommes.
Oui, Steve sert fort la main de Tony Stark, ce matin. La tasse de café fumante. Sur la terrasse. Dans la lumière et le calme absolu. Ce gout blanc du mouvement transit.
Et malgré toute la pression, ils respirent encore.
Incroyable.
Tony se laisse faire.
Mais l'attente ne reste pas douce. Elle s'impatiente avec la monté du jour. Elle devient longue. Plus longue que d'habitude, avec encore moins d'espoir que cela se termine pour les deux hommes. Elle leur ronge les sangs.
Amer. Oui c'est ça : amer.
Ils attendent d'un commun accord.
Ils se regardent en chiens de faïence. Sans bouger. Sans progresser d'un poil.
Le soleil arrive. Il est là. Il brule toute la ville dans la peur de chaleur qui augmentera encore. Il arrive avec une force de Titan. La terrasse devient invivable.
C'est vraiment une expédition. Tous les jours, tous les jours c'est une expédition.
D'aller jusqu'au banc dans le parc. Tous les jours, souvent. Il ne sait pas pourquoi il y va. Il ne sait pas que c'est sur ce banc que s'endort Tony Stark, ivre, les soirs où il ne rentre pas.
Une expédition. Il faut vaincre la chaleur. Les passants. Les enfants qui courent le long des rues à la recherche de fraîcheur.
Le banc est ombragé.
S'il prend le bus, il pourrait se noyer dans cette chaleur. Fondre. Steve n'est pas dans un bus mais il sait que s'il y était, c'est ce qui se passerait. Il en est certain.
Tony continu à boire sous la chaleur. Il ne mange plus du tout : il boit. Il fond à vue d'œil.
Il atteint le parc. La bise passagère le sauve de sa mort par étouffement des petites particules liguées contre lui. Il ne fait rien, dans cette bordure de parc. Il regarde les gens passer. Il les voit venir, tumultueux. Puis ils sont là, pour une seconde où on peut tout voir, tout savoir. Et enfin, de dos, s'éloigner jusqu'à perdre leurs traces.
Il faut s'occuper. C'est le début de l'été. Il fait encore frai, tout n'est pas encore écrasé et immobile par la chaleur. Ou bien que ça le soit, on peut encore croire en la fraicheur de l'aube, même là maintenant.
Il faut oublier. C'est si facile, pour l'instant.
Il fait toujours aussi chaud. Peut-être davantage. Ils sont dehors cette fois, presque dans la même position que le premier soir au salon, là-haut. Steve a trainé Tony dehors. L'éloigner quelques heures des bouteilles.
Tony ne remarque même pas que Steve Rogers est à côté de lui, qu'il l'a trainé sur ce banc public.
Il ne voit rien. Il ne voit que ce coton imbibé d'alcool qui le maintien à distance. Une bénédiction.
Tony boit. Il boit par habitude, par envie de boire encore.
Steve écoute la vie alentour. Il dépense son temps de manière à le voir passer sans souffrir de trop.
Tony l'y rejoint. Il en est à un point où il ne fait plus confiance à lui-même. Où il a désespérément besoin de quelqu'un.
C'est midi bientôt. Ils sont fichés dans cette attente profonde, immuable, qui les cloue sur place aussi sûrement que le Christ sur sa croix.
Ils attendaient. Tous les deux assis sur un banc. Attendre l'éternité. Attendre la nuit.
Comment en parler, comment raconter ce rien. Ce vide intersidéral ? On ne peut pas. Il n'y a aucune manière d'expliquer le rien, le vide de l'attente. Pas de mots. Pas de gestes. Pas d'image.
Pas d'action. Aucune intrigue : la mort.
Ils ne savent pas pourquoi, cette fois, c'est comme ça. D'habitude, ce n'est comme ça. D'habitudes, ils peuvent s'occuper. Atelier ou salle d'entraînement. Cette fois ci, c'est comme s'ils ne pouvaient plus y aller. Comme si tout doit être suspendu. Travaux interrompus.
Ils rentrent à la tour lorsque le soir tombe.
– Nous n'avons plus rien à faire ici.
Stark ne sait pas si il a parlé ou murmuré. Rien ne semble percer le silence abattu sur le banc. Il est l'heure de rentrer. En effet, il n'y a personne. Plus personne à regarder. Plus personne pour tromper son ennuis.
Steve te ramène à bout de bras. Il te fait marcher pour que tu te souviennes de l'odeur de la ville, des rues. Il t'emmène comme ceux qui réapprennent à marcher. Il te ramène lentement à la surface. Sans grand succès. Laisses moi Steve. Laisses moi je suis fatigué. L'alcool fait dormir.
Steve le laisse.
Un fois, Tony part dans les rues. Comme ça. Avec juste sa carte bleue et son téléphone. Part boire et trouver une fille pour la nuit. Il rêve de cette soirée. Irréelle, parfaite, de frissons sur sa peau et d'oublis.
Il revient deux heures plus tard. Incapable d'abandonner le capitaine à l'attente seul. À l'attente étouffante. S'il mourait, alors Tony serait seul à attenter. Ce serait pire que tout.
Alors Tony rentre. Désespéré. Attendre le jour, la nuit. La nuit soit le ciel noir bleu et oranger de New York, kilomètres défilants à la ronde.
Tony boit.
Les bouteilles brillent au sol. On pourrait croire qu'elles forment une ronde autour du corps dans un salon. Elles brillent de mille feux. Debout ou renversées.
Sous des couches et des couches de poussières.
Dans un salon inutilisé. Il ne veut plus rien voir. Il ne veut plus rien entendre. Il ne veut pas voir Steve.
Il a compris, il comprend vite. C'est, malheureusement, un génie : Tony Stark. L'attente des autres c'est bidon. Ce n'est pas vraiment ça. Ils attendent quelque chose de beaucoup plus gros. Et Stark a peur. Peur de contempler les mains de Rogers. Peur de l'envie.
Il prend une douche tardive, tiède, dans la nuit.
Dans l'attente incommensurable de l'inconnu.
