Disclaimer: Non non non, je ne m'appelle pas Hidekaz Himaruya, les personnages ne m'appartiennent pas. Pas les deux principaux en tout cas.
P'tit mot avant de passer aux choses sérieuses: ceci est une side-story , qui fait partie de l'univers de Lilium. Il n'est pas nécessaire de l'avoir lue pour suivre celle-ci, cependant. Elle est consacrée à Gilbert.
Note: Je remercie toutes les personnes qui ont lu, commenté, suivi ou ajouté Lilium à leurs favoris, j'espère que cette histoire vous plaira tout autant :D
Sünde
Chapitre 1 : Fehler
Décembre 1392.
Une femme sortit d'une habitation et traversa le bas château. Elle marchait vite et serrait ses bras contre elle, probablement pour garder de la chaleur en elle malgré l'atmosphère glacée de l'hiver et ses vêtements peu épais, ou pour préserver quelque chose de la vue de tous.
Elle arriva au deuxième château, réservé aux chevaliers. L'un d'eux l'empêcha de passer le pont-levis.
-S'il vous plaît... Je dois parler à messire Beilschmidt... le supplia-t-elle.
-Pourquoi?
-J'ai quelque chose à lui donner... Une chose qui lui appartient. répondit la jeune femme, hésitante.
Le chevalier fronça les sourcils et demanda encore:
-Qu'est-ce que c'est?
-Je vous en prie... Vous savez ce qu'il s'est passé...
Le chevalier n'insista pas plus: cette femme était visiblement au bords des larmes et profondément affectée.
-Suivez-moi.
Il la conduisit dans la partie supérieure du château de Marienburg, dans une salle d'armes où quelques chevaliers s'entraînaient.
Elle le repéra tout de suite parmi eux. Ses longs cheveux blonds, lâchés à l'exception d'une discrète tresse, cascadaient jusqu'à ses épaules. Il portait une chemise blanche, légère, qui laissait deviner son torse musclé et ses bras sculptés par l'escrime.
La jeune femme ne pouvait s'empêcher de le trouver beau... Mais elle n'en avait pas le droit.
Son guide alla lui annoncer qu'il avait de la visite et les mena dans une pièce voisine, où il les laissa seuls.
Elle voyait bien qu'il ne la reconnaissait pas. Et cela lui fit mal. Elle prit la parole la première:
-Je crois que... Vous n'avez pas pu oublier ce qu'il s'est passé il y a quelques mois.
Le chevalier comprit alors qui elle était et demanda, un peu sévère:
-Que faites-vous ici?
-J'aimerais vous donner ceci. répondit-elle en tendant le paquet de linges qu'elle serrait contre elle jusque là.
Il la dévisagea avec incompréhension alors qu'il réceptionnait l'amoncellement de tissu entre ses bras.
-C'est le vôtre. J'en suis sûre. Quant à moi, je n'ai pas les moyens de l'élever et pas le courage de l'abandonner. Vous êtes tout aussi responsable de lui que moi... Elevez-le.
Elle présentait cela comme une requête, mais elle n'avait pas l'intention de lui laisser le choix.
-Je ne peux pas... commença Alexander Beilschmidt.
-Il sera bien mieux ici qu'avec moi... Il ne passerait pas l'hiver. Il n'a plus besoin de sa mère, maintenant, alors s'il vous plaît...
Les yeux de la femme brillaient de larmes, le suppliant silencieusement de ne pas protester plus.
Il hocha lentement la tête. C'était presque imperceptible, mais elle comprit qu'il acceptait. Elle se leva, s'inclina et disparut de la pièce.
Alexander resta hébété pendant un bon moment, le paquet gigotant dans les bras.
Il n'en revenait pas. Pour faire les choses de la pire façon qui soit, il était le meilleur: revenu d'une campagne en Pologne un peu moins d'un an auparavant, il avait été fêter son retour avec quelques chevaliers dans une taverne de la ville... Ils avaient rencontrés des jeunes filles et ils avaient brisé leur serment de chasteté...
Revenus dans la forteresse, ils s'étaient tous confessés, bien évidemment, avaient fait pénitence pour leur péché et tous croyaient que cela était derrière eux.
Aucun n'avait rien reçu de leur conquête d'un soir.
Sauf lui, évidemment. Comme s'il n'avait pas déjà eu assez de problèmes, il allait devoir s'encombrer d'un enfant?
Il entrouvrit les pans de tissus et découvrit un bébé.
Alexander sursauta lorsqu'il vit son visage.
L'enfant le fixait de ses yeux rouge sang. Sa peau était très pâle, et ses cheveux n'avaient aucune couleur: ils étaient blancs, immaculés. Le petit garçon était albinos...
Ce n'était pas un hasard. Un enfant non-désiré et issu d'une union interdite... Dieu n'avait pas pu laisser passer ça.
Alexander s'assit à même le sol et prit l'enfant sur ses genoux, osant à peine poser les yeux sur lui.
Ce pauvre enfant innocent portait la marque de son péché à lui... C'était injuste. C'était lui que Dieu aurait dû punir. C'était son erreur, c'était à lui de la réparer.
Le chevalier savait bien ce que la particularité physique de son fils allait provoquer: il serait rejeté, raillé, et frappé d'infamie. Sa vie s'annonçait déjà assez difficile, Alexander ne pouvait se résoudre à le rendre à sa mère pour qu'il soit élevé dans la misère. Au moins, auprès des Chevaliers Teutoniques, il aurait de quoi grandir de manière décente...
Et peut-être même que si l'enfant devenait un chevalier, personne n'oserait plus lui manquer de respect à cause de son apparence.
Oui, c'était précisément ça: il allait élever son fils. Et il ferait de lui le meilleur chevalier de l'Ordre.
Ainsi sa conscience serait un tant soit peu apaisée et son vœu brisé, racheté.
Alexander adressa un sourire au petit garçon, qui le regardait toujours d'un air soucieux.
-Hé bien, bonhomme, notre premier défi ensemble: te trouver un prénom...
oOo
Septembre 1400.
Alexander asséna un grand coup et Gilbert le reçut de plein fouet, finissant à terre. Une fois de plus.
L'enfant frotta vigoureusement ses côtes endolories, une grimace de douleur peinte sur le visage.
-Ta garde, Gilbert! Dans un combat réel, tu serais déjà mort. lui rappela le blond pour la énième fois tout en le laissant se relever tout seul.
L'Albinos acquiesça d'un signe de tête et se prépara à endurer un nouveau sermon de la part de son père.
-Je ne te demande pas encore d'attaquer, alors concentre-toi au moins sur ta défense! Qu'est-ce que tu crois? Que je t'attaque pour le plaisir de te frapper? Fais-moi plaisir, pare, ou au moins esquive!
Cela faisait une semaine qu'Alexander avait estimé que Gilbert était assez grand pour apprendre l'art du combat.
Cela faisait une semaine qu'Alexander s'occupait personnellement de faire trimer son fils de l'aube au crépuscule.
Cela faisait une semaine que le père attentif et exemplaire s'était transformé en maître d'armes intransigeant.
Gilbert reprit son épée de bois, lâchée dans sa chute, et planta fermement ses pieds dans le sol pour tenter de bloquer l'attaque de son père.
Allez Gil, tu peux le faire...
"Le combat est une épreuve physique, mais demande également beaucoup de réflexion. Tu dois être attentif au moindre mouvement de l'adversaire pour comprendre où il va frapper, comprendre ses techniques et contourner ses feintes. Quant à toi, tu dois redoubler de concentration pour qu'il ne puisse percer tes stratégies."
Autrement dit, je dois décomposer ses mouvements... Et anticiper...
Son père lui signala d'un bref mouvement de tête qu'il allait commencer son attaque. Gilbert se concentra.
Alexander fit un pas en avant, puis un autre, tout en plaçant son épée de bois perpendiculairement à son bassin, le bras légèrement en arrière, prêt à se tendre en avant pour heurter... Quelle partie du corps de Gilbert, cette fois?
L'enfant comprit que le plus âgé ajustait sa trajectoire vers son torse. Il n'avait plus qu'à se baisser et...
-Trop tôt. commenta le blond en abaissant son arme en même temps que le plus petit pliait les jambes.
Gilbert reçut donc le coup quand même.
Il est pas humain, c'est pas possible...
-Tu dois attendre le dernier moment pour parer, sinon ton adversaire risque d'avoir suffisamment le temps de changer ses plans.
-Mais tu me dis tout en plusieurs fois! grogna Gilbert, pressant son torse dans une vaine tentative pour diminuer la douleur.
Alexander lui sourit. Un sourire? Sérieusement? Ca n'arrivait jamais pendant les entraînements!
-C'est normal. J'utilise tes erreurs pour te faire comprendre les bases. De toute façon, tu n'appliques quand même pas les conseils que je te donne un par un, à quoi ça aurait servi que je te les donne tous d'un coup?
Gilbert fit la moue.
-Tu progresses, malgré tout. lui annonça Alexander. Souviens-toi, le premier jour, tu n'arrivais même pas à tenir une épée sans te faire mal tout seul! On reprend.
Une fois de plus, Gilbert et son père se préparèrent.
Cette fois, le chevalier plaça ses bras au-dessus de sa tête, tenant son épée à la verticale. Quelques pas rapides et la lame de bois fendit l'air.
Gilbert n'avait pas eu à réfléchir: en un pur réflexe, il leva sa propre arme devant son visage et, lorsque les deux épées se rencontrèrent, repoussa celle de son père de toutes ses forces.
Cette fois, il n'allait pas manger le coup.
Il serra les dents un peu plus et fit un pas en avant. A quelques centimètres du visage de son père, il voyait distinctement qu'il n'effectuait aucun effort pour contrer les maigres forces de son fils. Par contre, si ce dernier abandonnait, il se ramasserait encore un coup dans la figure.
Le petit garçon choisit donc de diriger les armes vers le bas et s'écarta, séparant leurs lames.
-Je suis en un seul morceau? s'étonna l'enfant en tâtant son buste qui n'avait pas morflé.
Alexander acquiesça avec un petit sourire et Gilbert s'autorisa quelques sautillements d'allégresse.
-Tu as bien travaillé, aujourd'hui. Va te changer, et après nous irons dîner avec les autres.
Gilbert fronça les sourcils.
-Ca veut dire que l'entraînement est fini?
-Tout juste.
La mâchoire du garçon faillit s'écraser au sol. Il avait dû réaliser un exploit pour que l'impitoyable maître d'armes, également connu sous le nom d'Alexander Beilschmidt, le relâche avant que l'obscurité ne les empêchent de s'exercer.
-Allez, file!
Gilbert ne se le fit pas dire deux fois. En quelques secondes, il était de retour dans sa chambre, voisine de celle de son père.
Il ôta sa chemise maculée de terre et humide de sueur, se pencha au dessus d'un baquet d'eau et y plongea les mains, les ramenant en coupe vers son visage pour se rafraîchir.
Lorsqu'il eut terminé, il releva la tête, ses yeux accrochant le regard de son reflet dans un miroir accroché au mur.
Comme à chaque fois qu'il se voyait, son visage se ferma. Il détestait ce miroir. Et tous les miroirs de la terre, qui lui renvoyaient son image maudite sans aucune pitié.
Il avait toujours été contre cet objet de torture dans sa chambre, mais son père avait toujours refusé de l'enlever. Il lui avait dit:
-Si tu n'es même pas capable de regarder ton reflet en face, comment veux-tu que les autres ne te fuient pas ?
L'enfant n'avait rien trouvé à répliquer. Comme souvent avec son père.
Ce soir-là, son torse nu s'ornait de plusieurs horribles ecchymoses violette, rendues encore plus dramatiques par la pâleur naturelle de sa peau.
Son visage dégoulinait de gouttes d'eau. Sa pommette gauche était rougie par un coup de pommeau et une bosse bourgeonnait sur son front.
Encore moins beau à voir que d'habitude...
Il n'avait jamais vu dans son reflet un adorable petit garçon de huit ans comme les autres enfants devaient se voir.
Tout ce qu'il voyait, c'était une erreur.
Son père ne le lui avait jamais caché: c'était le fils qui payait pour les fautes des parents. Il s'en excusait d'ailleurs régulièrement, mais qu'est-ce que ça changeait? Il restait un rebut et une erreur de Dieu, pour ne pas dire de la nature.
Il avait toujours eu conscience de ce qu'il était. Et c'était bien trop à supporter pour les frêles épaules d'un enfant.
Avec un soupir à son image, il enfila une autre chemise et quitta sa chambre pour aller dîner.
Traductions:
Sünde signifie "péché" en allemand et Fehler veut dire "erreur"... Si Larousse est digne de confiance...
Non, Gilbert ne sera pas OOC. Il va devenir awesome... Ne vous inquiétez pas ^^
Heu... Oui, Germania s'appelle Alexander... J'avais pas d'autre idée u.u
J'attends vos avis :D
Prochain chapitre la semaine prochaine ...
A bientôt :3
