Traduction de "Out of the Mouth" de everything-is-eninalus. J'ai contacté il y a plusieurs mois l'auteur ainsi que Lola by Lolitta, dont la traduction est en hiatus depuis plus de 4 ans, mais je n'ai pas eu de réponse. En tout cas, ils sont prévenus, et si je fini par obtenir un refus je supprimerai la traduction.

En attendant, bonne lecture !


Cela n'allait pas fonctionner.

Ce fut la seule pensée que Reid parvint à formuler quand la suggestion sortit de la bouche de Prentiss, la seule pensée qu'il parvint à formuler quand Hotch approuva, la seule pensée qu'il parvint à formuler quand Rossi commença à tout planifier avec Garcia, la seule pensée qu'il parvint à formuler quand Morgan soupira puis acquiesça.

Cela ne fonctionnerait pas.

L'équipe se trouvait dans le nord de l'Illinois, et ce depuis trois semaines. Ils étaient tous frustrés, fatigués et ne souhaitaient rien d'autre que rentrer chez eux et reprendre le cours de leur vie. Mais ils ne pouvaient pas. Pas avec ce tueur en série toujours en liberté.

Dix-huit couples homosexuels, masculins et féminins, avaient été assassinés. Tout simplement massacrés par un unsub au MO invariable. Il les surveillait pendant au moins deux jours, si ce n'était une semaine. Il les attaquait de nuit, généralement quand le couple était engagé dans une activité sexuelle. Il attachait le couple puis s'attaquait à leurs parties génitales avant de torturer lentement le « passif » afin que l'« actif » l'entende crier. Il sectionnait enfin une artère majeure de l'« actif » et les laissait tous les deux se vider de leur sang.

Les membres de l'équipe étaient tous d'accord pour dire que le facteur de stress était la loi autorisant l'union de personnes de même sexe, promulguée le premier juin.

Trente-six personnes torturées physiquement et mentalement parce que quelqu'un pensait qu'ils ne méritaient pas d'être ensemble, qu'ils ne méritaient pas de vivre à cause de leur orientation sexuelle.

Cette idée faisait bouillir le sang de toute l'équipe, et ne faisait que s'ajouter à la contrariété et à la colère qu'ils ressentaient déjà. Qui avait l'audace de décider de la vie et de la mort d'une personne parce qu'elle pouvait désormais s'unir légalement à quelqu'un du même sexe ? C'était mal et nocif et biaisé.

C'était immoral.

Reid aurait fait n'importe quoi, n'importe quoi pour capturer cet homme et le faire asseoir dans la salle d'interrogatoire glaciale afin de pouvoir lui expliquer sa façon de penser, mais pas ça.

Jamais ça.

- Cela ne va pas fonctionner, dit Reid en essayant de mettre de l'assurance dans sa voix, bien que celle-ci finisse par le trahir.

- C'est tout ce que nous avons, Spence, le raisonna JJ.

- Il ne va pas… c'est… tenta-t-il de protester bien que les mots lui fassent défaut.

- Ecoute, je sais que ce n'est pas ce qu'il y a de plus facile à faire, dit doucement Hotch, seulement il faut qu'on attrape ce type. Le profil piétine et, sincèrement, il bien trop lacunaire.

- Mais je…

- Pas de « mais ». C'est définitif.

Reid ne put s'empêcher d'afficher une expression boudeuse, ce qui fit rire Garcia et Prentiss.

- Tu ferais mieux de te faire à cette idée, rit Morgan en ébouriffant les cheveux de Reid.

C'était l'enfer. L'enfer sur terre.

En revenant à l'hôtel pour se préparer, une heure plus tard, Reid avait le bourdon. Il marcha d'un pas lent jusqu'à sa chambre, et ralentit encore la cadence lorsqu'il emballa ses affaires.

Lui, Spencer Reid, allait passer la semaine à venir dans un chalet près de Lake Heron à prétendre être un homosexuel en compagnie de son petit-ami, interprété par nul autre que Derek Morgan.

« Prétendre » et « petit-ami » étant les mensonges dans cette phrase.

Reid était, en réalité, homosexuel. Enfin, plus bisexuel, ou ambisextre, selon le terme atrocement affectueux de Garcia (la seule au courant de ce fait). Il s'était toujours senti plus attiré par les hommes, cela dit. Certes, il pouvait apprécier les femmes et ce qu'elles avaient à offrir, néanmoins quelque chose de particulier ressortait avec les hommes.

Plus particulièrement, avec Derek Morgan. Le même Derek Morgan avec lequel il allait devoir vivre, et partager des étreintes et jouer les baratineurs la semaine suivante.

Seuls.

Dans un chalet.

- N-nous pouvons utiliser quelqu'un d'autre ! avait balbutié Reid. Nous pourrions demander à un autre agent du département de…

- Hors de question beau gosse, était intervenu Morgan. Il neigera en enfer avant que je te laisse te faire traquer par un cinglé sans que je sois là.

- Je sais très bien me protéger tout seul, avait tenté de protester Reid.

- Morgan a raison, était alors intervenu Hotch. Il faut que tu ais la meilleure protection possible et Morgan est celui qui convient le mieux pour ce travail.

- Hotch, je comprends votre inquiétude, mais qu'en est-il de Morgan ? Il a tout autant besoin de protection que moi !

- Et c'est là que tu entres en jeu, Reid. Il est pour toi ce que tu es pour lui. Un protecteur. C'est pour la même raison que nous n'utilisons pas un agent de la police locale pour être le partenaire de Morgan.

- Être avec moi ne peut pas être horrible à ce point, si ? avait demanda Morgan en feignant d'être blessé.

- Ne sois pas ridicule, il ne s'agit pas de toi, avait marmonné Reid.

- Il s'agit de quoi alors, sucre d'orge ? avait demandé Garcia avec un sourire en coin.

L'analyste avait par le passé encouragé Spencer à faire son coming-out auprès de l'équipe, mais Reid n'était simplement pas encore prêt. Il lui avait donc jeté un regard de travers avant de baragouiner pour lui-même :

- C'est absurde.

Hotch avait alors pris à part un Reid mécontent après que celui-ci ait écouté les autres décider des arrangements et de la planification de l'opération.

- Reid, je sais que c'est embarrassant, mais…

- Pourquoi ne pouvons-nous pas simplement utiliser deux hommes de la police locale ? avait gémit Reid.

- Je ne vais pas les mettre en danger de cette manière. De plus ils ne sont pas à l'aise entre eux comme vous l'êtes, Morgan et toi.

- Hotch, vous comprenez la situation pas vrai ? Nous… Morgan et moi… l'unsub attaque les couples pendant qu'ils ont des rapports sexuels ! avait murmuré Reid d'une voix tranchante.

- Vous ferez semblant. Beaucoup d'équipe sont déjà passées par là. Moi-même j'ai dû le faire une fois !

- Vous aussi ?

- Oui, moi aussi.

Reid soupira

- Très bien. Je vais le faire.

Hotch lui dédia un de ses rares sourires et lui donna une tape amicale sur l'épaule.

A présent, Reid trainait son sac jusqu'au hall de l'hôtel où ils étaient descendus. Un SUV noir l'attendait à l'extérieur, et il savait qui se trouvait à l'intérieur. En effet, en atteignant la portière il trouva Morgan de l'autre coté, avec Garcia assise à l'arrière.

Génial, songea-t-il. Pile ce que je voulais.

- Prêt à partir jeune prodige ? demanda joyeusement Garcia.

Reid fit un simple signe de tête.

- Penny va nous faire le topo sur la situation, l'informa Morgan en démarrant, et Reid hocha de nouveau la tête.

- Okay, sourit Garcia. Alors, nous allons être postés en bas de la route menant au petit cottage où vous serez. Je vais travailler 24 heures sur 24 pendant que notre magnifique équipe se relaiera.

- Tu n'as pas besoin de faire de pauses ? demanda Morgan en fronçant les sourcils.

- Chéri, c'est ça ma pause. Je préfère largement vous surveiller tous les deux plutôt que travailler depuis Quantico. Pour en revenir à nos moutons, vous allez sortir dans des bars, des boîtes et compagnie jusqu'à ce qu'on puisse confirmer que quelqu'un vous observe.

- Pardon ? demanda Reid avec scepticisme.

- Ouais, il faut s'assurer qu'il vous prenne bien pour cible.

Reid soupira.

- Vous aurez tous les deux un bouton d'alarme que vous devez porter constamment.

- Est-ce que des boutons d'alarme ne vont pas être un peu trop voyants ? questionna Morgan

- Pas si votre analyste, Penelope, est un génie, ce que je suis. Ce qui veut dire qu'ils seront brillamment dissimulés grâce à ceci.

Reid se tourna pour accepter la petite boîte que Garcia lui tendait. Il l'ouvrit avec précaution. A l'intérieur se trouvaient un anneau et un collier.

- Deux ? remarqua Reid d'une voix lasse.

- Le bouton d'alarme est dans l'anneau, le collier est un microphone qui peut être éteint et rallumé.

- Pourquoi aurait-on besoin d'éteindre le microphone ?

Reid se tourna pour regarder Garcia, dont le sourire devint malicieux tandis que ses yeux glissaient en direction de Morgan. Par chance, l'ainé des agents ne pouvait pas s'en rendre compte puisqu'il conduisait, toutefois Reid lança à l'analyste un regard noir qui, il espérait, avait l'air au moins un peu plus intimidant que « adorable ».

Reid se rassit sur son siège. Il ne se réjouissait pas vraiment à l'idée que Garcia puisse entendre leurs conversations. Même si les micros pouvaient être éteints, il était sûr que l'analyste aurait également mis la maison sur écoute.

Pas que Reid ait l'intention d'avoir une conversation à cœur ouvert ni quoi que ce soit mais, pendant la semaine à venir, il allait définitivement avoir des conversations embarrassantes avec Morgan.

L'équipe était pratiquement certaine que lorsque l'unsub devenait plus à l'aise avec le couple qu'il observait, il trouvait un moyen de mettre des caméras ou des microphones dans les maisons.

Ce qui signifiait qu'à un moment donné de la semaine, Reid et Morgan allaient devoir commencer à se comporter comme un couple. A vraiment se comporter comme un couple.

Reid se passa une main sur le visage. Ce n'était pas juste.

Le cottage se trouvait à environ quinze minutes de la ville et donnait presque sur la berge du lac. La zone se trouvait assez isolée ; la plus proche maison se trouvait à cinq minutes par la route, ce qui se révéla à la fois rassurant et intimidant.

Reid sentait comme un poids sur ses épaules alors qu'il sortait du SUV et trainait des pieds jusqu'à la porte d'entrée. Derrière lui, Garcia marchait d'un pas bondissant, une main sur son épaule.

- Ca va bien se passer mon ange. Ca va être génial, l'encouragea-t-elle à voix basse pour que Morgan ne puisse pas les entendre.

- Ouais, ça serait génial si j'avais la moindre once de confiance en moi ou si je savais ce que je faisais, soupira-t-il. Ou si Morgan était gay, ajouta-t-il en marmonnant.

- Tu ne sais jamais, bébé. Je l'ai déjà vu flirter avec des hommes tu sais, alors peut-être qu'il joue sur les deux tableaux.

- Ouais, fit Spencer en fronçant les sourcils. D'accord.

Il déverrouilla la porte et l'ouvrit, pour se retrouver dans un petit vestibule donnant sur un spacieux salon et une cuisine. Un petit couloir, directement face à lui, donnait sur ce que Reid supposait être la salle de bain, la chambre et sûrement une buanderie. L'endroit serait idéalement confortable pour deux personnes vivant une relation intime.

Dommage que nous ne vivions aucune relation, pensa amèrement Reid.

- Ca va être sympa ici, sourit Morgan en passant la porte.

Reid aurait bien apprécié qu'il cesse de sourire avec tant d'enthousiasme.

- Ouais, ça devrait être sympa et douillet, confirma Garcia en souriant.

Elle fit un clin d'œil à Reid, derrière le dos de Morgan, puis baissa les yeux sur sa montre.

- D'accord, bon il est treize heures donc je vais aller préparer mon poste d'observation avec Hotch et Rossi et je reviendrai vers dix-huit heures pour passer vous prendre.

- Passer nous prendre ? demanda Morgan.

- Bien sûr ! Je dois vous conduire jusqu'au bar ! Prentiss vous retrouvera là-bas pour vous passer votre voiture.

- Très bien, soupira Reid. Enfin je suppose.

- En attendant vous devriez en profiter pour vous installer et vous détendre. Cette semaine sera longue et pleine de tension.

Quand Morgan acquiesça et se détourna pour jeter un œil autour de lui, Garcia articula en silence « sexuelle » en levant les deux pouces. Reid fut presque tenté de lui faire un doigt d'honneur mais se ravisa.

- Je pense qu'on va passer du bon temps ici, beau gosse, rit Morgan en passant un bras autour de la nuque de Reid.

Celui-ci tenta de sourire sans avoir l'air nauséeux.

- Très bien, à tout à l'heure les garçons, les salua Garcia avant de sortir.

- C'est plutôt sympa pour une courte période de temps, observa Morgan.

- C'est vrai, confirma Reid.

Il se glissa hors de l'étreinte de Morgan et s'entoura de ses bras, avant d'errer sans but en direction de la cuisine.

- Tu vas bien ? demanda Morgan.

- Oui, je vais bien.

Morgan eut un soupir.

- Ecoute, je sais que je peux être chiant parfois, mais je te jure que si je me moque un peu c'est que je tiens à…

- Ce n'est pas toi, l'interrompit Reid en secouant la tête.

Il fut tenté d'ajouter « c'est moi » mais n'en fit rien.

- Tu es sûr ?

Reid sourit et, cette fois, c'était sincère :

- Oui, j'en suis sûr.

Morgan hocha la tête avec un sourire prudent.

- Ca va être assez drôle quand on va vraiment devoir agir comme un couple, hein ? demanda-t-il dans une tentative pour détendre l'atmosphère.

Reid eut un rire nerveux.

- Ouais, ça va être un peu bizarre.

- Ne t'inquiète pas, beau gosse. Je ne mords pas ! lança l'agent en se dirigeant vers la chambre.

Pratiquement hors de vue, il s'arrêta et regarda Reid droit dans les yeux :

- Pas trop en tout cas, ajouta-t-il avant de joindre un clin d'œil à ses paroles.

Reid put sentit ses joues chauffer à une température qui devait approcher les 400 degrés.

Ouais, c'était son petit enfer personnel.