Cela fait maintenant 6 mois que Lilly est revenue travailler à la suite de son accident. Pas une seule nuit ne se passe sans revivre à nouveau ce traumatisme, et ses séances tous les 2 jours chez le psychologue commencent à l'énerver. Comment parvenir à oublier, si elle doit toujours en parler. Personne ne peut comprendre, même le Dr Thomson, malgré ce qu'elle veut lui faire croire. Selon elle, le traumatisme est augmenté par le fait de la mort de sa mère. C'est vrai que ça fait beaucoup à gérer pour une seule personne. Même si au plus profond d'elle-même, elle voudrait faire part de ses états d'âmes à quelqu'un, elle ne voit pas à qui elle pourrait se confier. Stillman est son chef et la renverrait illico en congés forcés. Kat, elle n'est pas assez proche d'elle, Vera et Jeffries, elle n'arrive pas à se confier à eux. Et pourtant ce n'est pas l'envie qui lui manque, et d'ailleurs Will a déjà essayé à maintes reprises de la faire parler. Reste Scotty. Que pourrait-elle lui dire ? Il culpabilise déjà assez d'être « responsable » de son état, elle ne va pas l'embêter encore plus avec le sien. Surtout que les affaires internes ne le lâchent pas. Donc il ne lui reste que cette inconnue qu'elle va voir tous les 2 jours.
Elle était donc assise sur son canapé la télécommande dans la main et zappant sur toutes les chaînes de sa télé. Tous les soirs elle retardait l'heure du coucher. L'appréhension de refaire de nouveaux cauchemars. Le lendemain donc, elle fut encore la 1ère arrivée au central. Elle s'installa à son bureau et entreprit de faire tous ses rapports qu'elle avait en retard. 15 minutes plus tard, Elle fut rejointe par Scotty. Etonnée, elle lui demanda ce qu'il faisait ici de si bonne heure.
- C'est aujourd'hui que se décide mon sort, je te rappelle.
- Aujourd'hui ? Fit-elle étonnée. Tu n'as pas à t'inquiéter. Toi et moi on sait que tu as fait ce qu'il fallait.
- Oui, mais eux n'ont pas la même opinion tu vois. Prenant un temps de réflexion et en la regardant. Comment ça va Lil' ? Lui demanda t'il.
- Bien. Répondit-elle à mi-voix.
- T'es sûre ? Car ce n'est pas l'impression que tu donnes, dit-il avec inquiétude.
- Je vais bien, lui assura t'elle. Ne t'inquiètes pas pour moi, mais penses plutôt à toi. Puis le regardant fixement, tu le sais que si ça n'allait pas je te le dirais. Je sais que je peux avoir confiance en toi.
- Ok ! Mais tu te rappelles... A n'importe quelle heure de la journée ou de la nuit, si tu en ressens le besoin, je suis là, ne l'oublie pas.
Lilly sentit ses yeux s'embuer. Et comme il l'avait fait quelque temps auparavant, elle passa sa main sur son épaule, et lui répondit qu'elle le savait et qu'elle lui en était reconnaissante. Ce qu'elle ne lui disait pas, c'est qu'en fait elle allait plus que mal. Elle n'arrivait plus à faire surface. Mais elle ne pouvait pas l'associer encore plus à ça. Il était déjà bien plus impliqué qu'il ne l'aurait dû l'être.
Il n'était pas dupe. Il ne savait pas comment lui faire voir qu'il savait. Elle pouvait mentir aux autres, mais pas à lui, et encore moins à elle. Stillman arriva à son tour. Il les observa quelques instants. Avec un sourire, il s'éclipsa dans son bureau.
Un peu plus tard dans la journée, Lilly et Kat étaient occupées à interroger un suspect dans l'affaire en cours. Une sombre histoire de jalousie au sein d'une équipe de base ball. Ils étaient sur le point d'appréhender le suspect. Scotty et Stillman étaient toute la journée au tribunal. Ils n'avaient pas encore appelé et Jeffries commençaient à perdre patience, comme les autres d'ailleurs. La seule qui curieusement avait l'air d'avoir confiance était Lilly. Vera lui avait demandé. Elle ne lui avait pas répondu. Mais elle avait l'intuition que tout irait bien pour lui. Mais plus l'heure avançait, plus elle ressentait une appréhension. Stillman lui avait interdit de témoigner. Elle l'avait d'abord très mal pris. Elle était concernée dans cette affaire. Puis, elle s'était faite une raison. Il voulait la préserver, éviter qu'elle ne subisse encore une fois ce qu'elle avait vécu. Mais peut-être que ça l'aurait aidé. Elle avait été voir le procureur, et lui avait fait part de son avis. Et là encore, cette requête lui avait été refusée. A croire que personne ne voulait qu'elle aille mieux ! Elle était persuadée que si elle témoignait, elle pourrait exorciser cette rage contenue. Elle n'en avait jamais parler à Scotty. Elle ne voulait qu'il y croit trop, et que si la décision était en sa défaveur, qu'il soit déçu. Et cela s'était avéré la bonne solution.
La sanction tomba aux alentours de 18h30 : Un blâme et une mise à pied d'une semaine, que Stillman transforma en congés avec l'accord des affaires internes. A la suite de cela, John était revenu au central, seul. A peine arrivé, il convoqua Lilly dans son bureau.
- Ils m'ont fortement conseillé d'accorder à Scotty une semaine de congés.
- Et... Demanda Lilly, sachant qu'il y avait une suite.
- Il n'a qu'un blâme.
- Mais attendez ! Ce n'est pas juste... Il ne voyait pas ce qu'il faisait ! Et d'ailleurs on ne sait pas si...
- Lilly, ne m'obligez pas non plus... Vous savez ce que je pense. Vous avez repris beaucoup trop tôt. Et le Dr Thomson n'est pas très optimiste à votre sujet.
- Excusez-moi, boss, mais je vous rappelle qu'on a vécu une prise d'otage, on vous a tiré dessus, qu'on m'a tiré dessus également, et que j'ai perdu ma mère ! Tout ça dans la même journée ! Alors, désolée de vous dire, mais normal que j'ai eu un temps... Pour... Et puis, maintenant je vais bien ! Je recommence à ressortir, je...
- Très bien, mais je voudrais que vous continuiez les séances. A voir sûrement avec le Dr Thomson, mais au moins une fois par semaine.
- Et vous ? Questionna Lilly. Vous aussi vous avez subi un traumatisme ! Et pourtant, vous êtes là !
- Je ne suis pas non plus obligé de tout vous dire Lilly. Vous le savez, le règlement impose des séances de...
- Ca fait plus de 6 mois maintenant ! Ca en devient ridicule, ces séances ! Et je ne vois pas ce que le Dr Thomson veut me faire dire !
- Elle doit estimer que vous devez encore en avoir besoin, sinon elle n'aurait pas demandé plus de séances. Et je vous connais. Si je vous accordait du repos, vous...
- Ne me faites pas ça chef ! J'ai besoin de travailler ! Seule chez moi, je ne vois pas ce que je pourrais faire. Au moins ici je m'occupe.
- Très bien ! Mais promettez-moi que...
- Promis, dit-elle avec un petit sourire. C'était la 2ème fois dans cette journée qu'elle faisait cette promesse.
Le lendemain, Scotty se réveilla avec une impression d'avoir raté quelque chose. En même temps il se dit que quelques jours de congés ne peuvent pas faire de mal. Il entreprit donc d'organiser ses vacances. Un peu de rangement, du temps pour se reposer, et pourquoi pas faire un peu de sport. Il se leva, et passa la majeure partie de sa journée à classer papiers et cie. De son côté Lilly s'était levée avec une sensation d'avoir bien dormi. Avant de se rendre au central, elle passa au cabinet du Dr Léa Thomson, qui lui demanda comment elle se sentait ? Et pour la 1ère fois depuis le début de leurs séances, elle ne s'énerva pas, et lui dit qu'elle avait bien dormi. Le Dr Thomson, lui dit qu'elle devrait profiter de sa journée pour se reposer, et s'occuper de choses diverses. Elle lui demanda de prendre ce jour de congé comme un signe positif. Elle était sur la bonne voie. C'est ainsi que Lilly se retrouva dehors aux alentours de 10h. Elle décida donc de faire un tour dans la ville. Elle conduisit jusqu'à l'extérieur de Philadelphie et s'arrêta au niveau d'un parc. Elle acheta un sandwich, de l'eau et un livre et s'assit sur un banc. A 15h à peu près, elle décida de faire quelques courses. Elle n'avait pas réalisé que c'était vendredi aujourd'hui. Après avoir dévalisé un magasin pour réapprovisionner son réfrigérateur, elle appela le Dr Thomson. Elle en ressentit le besoin. Elle voulait lui faire part de quelque chose. Après avoir raccroché et convenu de se retrouver une heure plus tard, Lilly remonta dans sa voiture et mit le contact. Et c'est ainsi qu'elle se retrouva devant le cimetière. Elle y entra et se dirigea avec à la main un bouquet de fleurs, elle s'approcha d'une tombe et s'y agenouilla. Elle sentit les larmes lui brouiller la vue, et les chassa d'un geste vif. Il fallait qu'elle le fasse. Elle regarda autour d'elle, et elle vit d'autres compositions florales. Une en particulier attira son attention, elle regarda si par hasard il y aurait un mot qui pouvait la mettre sur la voie, mais rien. Et c'est à cet instant qu'elle pensa à sa sœur. Se pouvait-il qu'elle soit venue ? Si tel était le cas, pourquoi ne pas être venue la voir ? Elle se rappela qu'elles s'étaient quittées en très mauvais termes et la connaissant, elle devait penser qu'elle n'avait pas envie de la voir. Ce qui était une erreur. Elles sont sœurs et c'est leur mère qui est enterrée ici. Elle regretta de ne pas avoir cherché à la contacter. Et si elle le faisait maintenant, Christina ne lui pardonnerait pas de ne pas l'avoir fait plus tôt. Tout en pensant, elle n'entendit pas le Dr Thomson approcher.
- Vous savez que je suis fière de vous Lilly. Nous avons bien travaillé toutes les 2, et pour ne rien ne vous cacher, c'est ce que j'espérais secrètement. Et vous l'avez compris. Vous devez lui dire au revoir. Je sais que c'est difficile, mais il fallait que cette démarche vienne de vous.
- Je n'en ai aucune envie pourtant. Commença Lilly les larmes aux yeux, mais... J'ai compris que...
- Je sais, je sais... Prenez le temps qu'il vous faut pour le faire.
- Chris... Je dois...
- Qui est-elle ? Demanda Léa.
- Ma sœur. Nous ne sommes pas du tout proches, mais elle a le droit de le savoir.
- Votre sœur n'est pas au courant ? Fit Léa incrédule.
- C'est... C'est compliqué s'énerva Lilly. Je... Histoires de famille, conclu t'elle de façon à ce que Léa ne puisse rien ajouter.
- Mais pourtant...
- Vous pensez que je ne le sais pas ça ! Mais je ne sais pas où elle est.
- Quelque chose me dit qu'elle est passée, fit Léa en désignant la couronne de fleurs que Lilly observait quelques instants auparavant. C'est quelque chose qu'on sent. Même si en effet, elle n'est pas au courant, elle a dû le deviner.
- Pourquoi n'est elle pas venue me voir ? Dans ces moments, on doit mettre de côté ses rancœurs, n'est-ce pas ?
- Ca, je ne sais pas Lilly. Peut-être a t'elle voulu le faire, et qu'au dernier moment, elle...
- Elle est tout ce qui me reste. Ma seule famille, fit Lilly en pleurant. Et je lui ai dit de ne plus remettre un pied chez moi. Mais elle m'a tant fait souffrir... Elle brise tout sur son passage, même, elle s'arrange pour semer le trouble là il ne doit pas y en avoir...
- Peut-être devriez-vous mettre ça de côté pour le moment. Essayez de la contacter. Vous devez bien avoir un numéro de téléphone ? Ou vous connaissez peut-être quelqu'un qui...
- Je n'ai pas envie de le mêler à ça, interrompit Lilly. Il est déjà bien trop impliqué dans ma... Je vous l'ai dit, c'est compliqué.
- Qui est trop impliqué dans votre vie ? Devina Léa.
- Personne... Mentit Lilly. Je... Je dois bien avoir gardé son numéro de portable dans mes affaires.
- Appelez-la, mettez de côté votre rancœur ! Croyez-moi, la vie est trop courte, et vous aurez sûrement l'occasion de lui dire tout ce que vous avez sur le cœur. C'est votre sœur Lilly, votre mère est morte, je pense que...
- Je ne sais pas... A chaque fois qu'elle réapparaît elle chamboule tout sur son passage.
- C'est peut-être sa façon de se faire remarquer de vous, elle pense peut-être que vous ne la considérez pas comme votre sœur. Je ne sais pas ce que vous avez vécu toutes les 2, mais réfléchissez-y. Je vais vous laisser maintenant. Vous n'avez pas besoin de moi pour vous recueillir. On se revoit dans 1 semaine. On fera le point. Je suis confiante, vous êtes sur la bonne voie. Continuez à avoir confiance en vous. Et faites confiance aux personnes qui vous entourent. Si elles sont là, c'est qu'elles tiennent à vous.
