Ils s'étaient aimés, elle en était persuadée, puis ils s'étaient quittés. Elle était parvenue à se reconstruire, peu à peu, avec Ron. Elle l'aimait, c'était une évidence mais elle ne parvenait toujours pas à être heureuse alors elle griffonnait, chaque jour, dans un carnet.


Aujourd'hui rien de nouveau. Il ne m'appelle pas, il ne pense pas à moi. J'arrive à le dire mais pas encore sans que ça me fasse un creux au cœur.

Dans ma bêtise je me suis demandé s'il viendrait à l'hôpital si je devenais anorexique. Je me suis demandé si Ron irait le chercher en voyant que j'allais mal à ce point. Je m'imaginais déjà les joues creuses, alitée et lui qui entrerait comme une fleur :

« Ça va ?

Qu'est-ce que tu fais là ?

Ron m'a dit que tu n'allais pas bien

Toujours à exagérer celui-là »

Et ça aurait continué comme ça. Mais c'était tellement pas lui. Et tellement pas Ron d'aller se sacrifier comme ça pour moi.

Puis j'ai eu honte. On ne déconne pas avec ce genre de sujets.

Alors je me suis retournée et je me suis rendormie.


J'ai rêvé de lui cette nuit. Je me rappelle plus trop. Juste qu'il me regardait de toute sa hauteur, que je me sentais minuscule mais que ça m'allait. Fichu rêve !


Temps de merde. Journée de merde.

Miss-je-sais-tout n'arrive plus rien à apprendre, je suis vraiment bonne à rien en ce moment. J'ai même plus envie d'écrire, mais je sais pas... C'est comme si à chaque fois que je voulais m'endormir ce carnet me regardait et me disait qu'il ne me lâcherait pas tant que j'y aurai pas mis mes lignes quotidiennes.

Malgré tout, quand c'est fait, je me dis que j'ai accompli au moins une tâche dans la journée. Je me couche avec cette pensée.


J'ai l'impression que mon existence ne se résume qu'à une longue attente. De quoi ? Je ne sais pas encore. Il faut juste que ça passe, que le temps file, sans raison.


J'ai réécouté de la musique. Ça faisait quelques temps que je ne pouvais plus, qu'elle glissait juste sur moi sans que je ne m'accroche à la moindre note, au moindre mot.

Mia Mia Mia Mia Miami
Mia Mia Mia Mia Miami
Mi-ami, à Miami

Et ça tourne sans cesse dans ma tête aujourd'hui.

Mia Mia Mia Mia Miami
Mia Mia Mia Mia Miami
Mi-ami, à Miami

Il faut toujours que je la réécoute, que je la mette plus fort, qu'elle sature le son de toute la pièce. Comme ça, d'un coup, quand elle s'arrête, j'apprécie le silence.


Il a fait beau. Je suis sortie.


J'aime énormément quand le soleil se couche et qu'il projette des teintes de lumières rosées sur la campagne. Chaque bosquet éclairé semble être un trou de lumière, un lampion joyeux.


Je me rappelle ses mains. C'était jamais doux, il nous fallait de la brusquerie, pas de violence, juste des contacts oubliant toute forme de bienséance. On se rentrait dedans, c'était à celui qui serait le plus offensif, le plus sûr de ses appuis, prêt à tenir, à ne pas vaciller. Et on chancelait toujours à deux.


Aujourd'hui on n'a rien fait. On était juste à deux à attendre que le temps passe. Une longue léthargie heureuse. On ne pensait à rien, juste se laisser aller et détendre le temps.


J'aimerai avoir un chat.

Mais bon, je ne saurai surement pas l'éduquer, lui apprendre à aller dans sa litière, lui apprendre à jouer sans mettre les griffes. Il ne m'aimerait sans doute pas. Et un chat sans ronronnement, autant ne pas en avoir.


Je veux du mouvement. Qu'il se passe enfin quelque chose, que j'arrête d'attendre.

Mais voilà, je pense mais je ne fais pas.


Je suis tellement jalouse. Tous ces autres si créatifs et moi qui n'ai que mon intelligence. J'aimerais tellement pouvoir faire taire mon esprit et laisser mon inconscient peindre sa réalité. Mais je ne suis que contrôle et plaintes.

C'est décidé je cesse de me plaindre


Encore raté. Une si bonne résolution et pas même un jour d'existence.

Ce soir, j'ai besoin de déverser mes craintes inutiles : je suis pétrifiée par la mort. J'ai pas peur de mourir, ça passe au-dessus de moi. J'ai juste peur d'être insensible à la mort. A chaque fois qu'elle frappe mon entourage je n'arrive pas à être touchée comme le sont les autres. Peut-être parce que ce ne sont jamais des personnes importantes. Peut-être parce que je suis juste sèche émotionnellement. J'ai peur de la mort de Ron, de Draco, de mes amis. Pour lequel je pleurerais le plus ? On pourrait le quantifier ? Est-ce que je pourrais vivre ensuite ? Normalement ? Est-ce qu'on s'en remet ? Les autres ont bien l'air de s'en sortir. Mais les autres avancent toujours, ils n'arrêtent pas, ce doit être ça des battants. Ou peut-être des égoïstes ?

Hermione Granger dans tout son art ! Décrédibiliser les autres et se sentir supérieure ! Mais les autres, quand bien même égoïstes, ont d'autres passe-temps que l'apitoiement.


Il y a quelques mois je pensais avoir fait le « deuil » de ma relation avec Draco. J'étais là, pensant que ce n'était que du passé, je me voyais apaisée, libérée de toute colère, loin de la dépression. J'avais constamment le désir de lui reparler, mais je me disais que c'était normal, qu'il avait été une part de moi et que je voudrais donc toujours être à ses côtés.

Et des tristesses en colères me revoilà maintenant, persuadée que ce coup-ci c'est le bon, que j'en ai vraiment fait le « deuil », je ne veux même plus le voir, presque comme s'il n'était qu'un souvenir, pourtant mon cœur se serre toujours à l'évocation de son nom.

En espérant que ce ne soit pas de nouveau une simple phase.


Je sais que c'était dur entre nous. Je sais que je pleurais beaucoup, que je n'avais pas confiance en moi, que je ne savais pas qui j'étais, que je n'étais qu'insignifiance face à l'admiration et la passion que j'avais pour lui. Pourtant quand j'y repense, je ne vois que les souvenirs heureux. Les autres ont dû disparaître dans les larmes.


J'aimerais m'engager plus. Tout me révolte mais je ne fais rien. Enfin, je fais comme tout le monde, j'en parle un peu, je signe les pétitions venues s'échouer vers moi, je gueule auprès des gens déjà acquis à ma cause, je gueule sur les cons aussi, ça fait toujours du bien pour l'estime de démonter un raisonnement débile.

C'est pas suffisant.

Un jour je créerai une association de défense des opprimés, je le veux alors j'y arriverai et qu'importe ma force mentale à ce moment j'imposerai à la dépression d'aller se faire foutre !


Je sens que je m'opacifie. Même cela ne veut rien dire.


Il faut que j'écrive, je me vide. Comme un appel au secours.


C'est l'urgence, il le faut. Ça ne veut pas.


Tant pis si c'est forcé.


Vidée

ruinée

tout dépenser

à retaper

toute nue, à vide, une faille dans l'âme, de part en part, tout traverser, tout dégorger.

Les taches floues se forment, ne plus ressentir, juste la fatigue, s'épuiser pour ne plus penser, rester à l'air libre, la tête ailleurs, la tête ailleurs et qui rêve de platitudes, de faux qui respire tellement le vrai. Juste comme ça, d'un clin d'œil ne plus être, voguer à plat pour ne plus penser.

J'aimerai refermer ce vide mais je ne peux pas, il aspire tout, de part en part, il m'aspire même moi, à l'intérieur. Et il altère.


* La chanson mentionnée est Miami de Saez